CHAPITRE VI : ELARGISSEMENT DE LA REFLEXION
La démocratie exige la participation de la population
dans le processus de décision collective. En effet, le culte de
participation se sera pas réductible au moment du vote électoral,
mais engage une grande part du temps de la population pour afin de rendre
effectif ses implications dans la pratique. Toutefois nous avons
expliqué que cette participation est handicapée par plusieurs
facteurs. Le présent chapitre va essayer de compléter les autres
problèmes que rencontre la pratique démocratique dans le contexte
malgache.
VI.1. A l'heure du bilan
VI.1.1. Une démocratie de
façade
La tentative de la mise en place de la démocratie
structurelle dans le pays n'a pas obtenu le résultat escompté. Si
on regarde la structure du pouvoir dans le pays, nous dirions que Madagascar
est un pays démocratique. La séparation du pouvoir est
installée, le multipartisme gagne du terrain, la société
civile se développe, la presse commence à s'épanouir, la
décentralisation est une préoccupation de chaque homme qui arrive
au pouvoir, l'élection n'est pas absente. Mais lorsqu'il s'agit de voir
le fonctionnement de l'une de ses institutions, nous sommes loin du
processus.
L'échec de tentative de démocratisation du pays
revient aux bailleurs de fonds car il ne s'agit pas d'une véritable
démocratie mais l'ouverture du pays dans l'économie de
marché et surtout le maintien de la dépendance du pays à
l'égard des bailleurs. La conditionnalité économique avait
imposé un réalisme politique. L'illusion est de faire croire que
l'engagement du pays vers la démocratisation peut mener vers le
développement. Il s'agit tout simplement d'une démocratie
formelle pour espérer avoir le salut économique des bailleurs.
L'idée de Touraine mérite d'être signalée sur ce
point ou le mot démocratie est souvent employé comme synonyme
d'économie de marché ou de civilisation occidentale amis il est
vide de sens38. Le système mondial prône le
développement de la démocratie alors que dans la pratique il
s'auto érige en frein à celle-ci. Les mesures prises de
développement et de démocratisation sont à visage unique
sans prises en compte du contexte historique et des aspirations des pays. Le
système mondial ne donne pas de place aux pauvres dans laquelle, ils
auront un mot à dire concernant les mesures de redressement mondial. Ce
système n'accepte pas un véritable débat
démocratique.
38 Touraine (A.), Qu'est ce que la
démocratie, éd. Fayard. 1994.
Le rétrécissement de l'Etat exigé par le
programme d'ajustement structurel n'a fait qu'aggraver la situation. L'Etat
n'arrive plus à exécuter normalement sa fonction
régalienne. La logique de la liberté d'entreprendre a
laissé le champ libre aux entreprises privées
étrangères et de l'enrichissement illicite des hommes au pouvoir
qui sont la base de l'inégalité sociale. Les programmes de
développement pour la nouvelle construction de la société
se soldent en échec du fait que ce sont des programmes qui ne s'adaptent
pas à la réalité malgache et ne répondent pas aux
besoins de la population malgache. La conditionnalité
démocratique du XXe siècle n'a fait qu'instaurer une
pauvreté durable et de renforcer l'emprise de l'occident sur le pays.
Actuellement, la dépendance s'accentue qui se reflète par la
dépendance à l'égard des idées en provenance de
l'Occident.
La tentative de la démocratisation dans le pays est
l'oeuvre du mouvement de foule. Ces mouvements de contestataire ont
exprimé un désir de changement, une recherche de la
démocratie. C'est par l'intermédiaire de l'action des foules que
le pays a changé de régime, l'alternance au pouvoir se fait
toujours de façon musclée. Pourtant, ce ne sont que des
mouvements qui ont légitimé l'exclusion sociale des
protestataires. La conséquence est facile à envisager, à
chaque action de foule du pays, la préoccupation première de
l'homme providentiel lorsqu'il arrive au pouvoir est d'élaborer un texte
à sa mesure et le renforcement de sa bureaucratisation afin de pouvoir
régner. Les problèmes de fond des hommes qui l'ont poussé
sur ce pouvoir ne sont jamais débattus et ne font l'objet d'une
discussion quelconque. Le débat démocratique se réduit
à la question doctrinale au lieu de s'attaquer à la recherche de
solutions viables aux problèmes de la vie quotidienne et la
manière dont on gère l'Etat pour mieux préserver et
pérenniser les intérêts. L'homme qui arrive au pouvoir
devient conservatisme et n'admet plus une autre mode de production comme
solution aux contradictions que sa domination produit selon Marx. Les hommes
mobilisés pour la réalisation de la démocratie
éprouvent de déception parce que la démocratie telle
qu'ils l'avaient inculquée et sublimée ne correspond pas à
l'idée qu'ils s'en faisaient.
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