V.2.2. Le dysfonctionnement de la démocratie
Pour apprécier la manière dont les citoyens
aperçoivent le dysfonctionnement de la démocratie, nous avons
opté à une question ouverte portant sur le problème de la
démocratie dans le pays. La répétition des réponses
de nos sujets a permis de dresser le tableau quantitatif suivant.
Tableau n°11 : Le dysfonctionnement de la
démocratie.
Dysfonctionnement de la démocratie
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Effectif
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Fréquence
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L'analphabétisme
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21
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32,3 %
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La peur de s'exprimer
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4
|
6,2 %
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La pauvreté de la population
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6
|
9,2 %
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On ne s'écoute pas
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14
|
21,5 %
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Ne s'adapte pas à notre culture
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1
|
1,5 %
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C'est une démocratie pour les politiciens
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6
|
9,2 %
|
Problème de mentalité
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2
|
3,1 %
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Mauvaise gouvernance
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2
|
3,1 %
|
C'est une idéologie d'oppression
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2
|
3,1 %
|
Chacun à sa manière de la définir
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1
|
1,5 %
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L'absence d'espace pour s'exprimer
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2
|
3,1 %
|
Pas de réponse
|
4
|
6,2 %
|
Total
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65
|
100 %
|
Source : Enquête personnelle 2011.
A partir de ce tableau, nous apercevons que pour les personnes
interrogées l'analphabétisme est au premier plan du
problème de la pratique de démocratie dans le pays. 32 % ont
souligné sur ce point. Il est suivi de près par l'attitude des
dirigeants politiques qui n'écoutent pas les gouvernés avec un
pourcentage de 21,5%.
Les enquêtés ont insisté que la
démocratie est pour les politiciens (9,2 %). Le problème de
mentalité, la pauvreté de la population, la peur de s'exprimer,
la mauvaise gouvernance et l'absence d'espace pour exprimer sont des
indicateurs donnés par la population pour montrer le problème
à la mise en place de la démocratie dans le pays.
V.2.3. participation de la population dans le processus
de décision
La participation de la population à la prise de
décision au niveau local est plus facile en raison de la
proximité du pouvoir dans le contexte de la décentralisation.
Lorsque nous avons posé la question « sentez vous prendre
réellement part aux décisions dans votre société
» aux citoyens. Ils ont tendance à faire référence
à la participation locale et à l'acte du vote.
Graphique n°06 : Participation à la
décision au niveau de l'instance de base.
Source : Enquête personnelle
2011.
Il ressort de ce graphique que 66 % des sujets
enquêtés estiment participer aux processus de prise de
décision locale, 22 % estiment de ne pas participer dans le processus de
décision. 12 % déclarent à hésiter de participer
effectivement.
Graphique n°07 : Modalité de participation
dans le processus de décision au niveau local.
Source : Enquête personnelle 2011.
Ce graphique met l'accent sur la modalité de
participation de la population dans la prise de décision. Le graphe ne
tient plus compte de l'acte électoral qui signifie pour les individus
enquêtés le premier signe de la prise de décision. En
dehors de l'acte électoral donc, c'est surtout au niveau local que les
sujets sentent prendre part dans la décision. La participation est
définie avec l'assistance à des réunions locales qui prend
un pourcentage de 62 %. Cette forme participation est suivie par l'action de
donner des idées à travers les réunions avec une
fréquence de 23 %. La forme de participation qui consiste à
donner des idées à travers les représentants avec une
fréquence de 6 % témoigne que le contact entre gouvernant et
gouverné reste encore faible. Pourtant, cette faiblesse de
modalité de participation trouve son explication en demandant à
la population concernant son avis sur ceux qui devraient prendre la
décision. Le travail de terrain a permis de constater que 52 % des
enquêtés s'attendent encore que les décisions se prennent
au niveau central. 32 % estiment que les populations devraient prendre les
décisions dans le cadre de la démocratie et la
décentralisation. Les autres n'ont pas donné de réponses
claires.
Au terme de cette deuxième partie de notre
réflexion, nous disons que la pratique démocratique dans le pays
souffre d'une crise de représentativité. Les institutions qui
devraient la réaliser ne sont pas au rendez-vous. Les partis politiques
n'ont pas de crédibilité pour proposer une alternative au
problème du pays. Le champ politique est fortement individualisé'
où chaque personnel politique cherche à satisfaire ses
intérêts personnels.
Les sociétés civiles nationales ne gagnent pas
la confiance du pouvoir public, leurs actions sont invisibles et peu efficace
en cédant sa place à des sociétés civiles
internationales oeuvrant dans le développement du pays à travers
des projets qui ne s'adaptent pas avec la réalité malgache.
L'ignorance de la population des rôles de la société civile
dans le processus démocratique témoigne la faiblesse de la
société civile.
Malgré le développement de la liberté
d'expression qui s'exprime par le foisonnement de presse force est de
reconnaître que le quatrième pouvoir est loin d'être acquis.
Le manque de professionnalisme, l'acte d'intimidation qu'on attribue aux
médias, la politisation de la presse, et l'inexistence du code de
communication sont actuellement les problèmes de fond de la
démocratie malgache.
L'inaccomplissement du rôle de l'Etat permet à
l'individu de juger qu'il ne vit pas dans une société libre. La
réduction de l'Etat comme un simple instrument au service de la classe
politique ne fait que discréditer le système.
Le degré d'implication de la population dans la prise
de décision reste encore faible, aux yeux de la population
l'élection reste la seule modalité de participation dans la prise
de décision. Malgré l'instauration de la décentralisation,
les populations s'accordent toujours que la décision doit se prendre au
niveau central. Cette situation est due principalement à la
méconnaissance des citoyens de l'enjeu de la décentralisation
ainsi que leurs responsabilités dans ce processus.
L'analphabétisme généralisé, la
pauvreté, l'inexistence du sens de l'écoute et la gabegie sont
actuellement des dysfonctionnements de la démocratie dans le contexte
malgache.
PARTIE III : ELARGISSEMENT DE L'HORIZON DE
REFLEXIONS
Cette dernière partie de l'étude s'attachera
à élargir notre réflexion pour avoir une vision de
perspective face à la problématique démocratique du pays.
Nous avons constaté que la pratique démocratique malgache souffre
d'une crise institutionnelle et une crise de représentativité.
Nous avons montré aussi que le système manque d'un activisme
politique, une culture discursive institutionnelle à cause de la
monopolisation du pouvoir et une réduction des débats à
des solutions éphémères et transitoires selon les
circonstances historiques. Les minorités dirigeantes ont profité
du dysfonctionnement structurel, ils ont utilisé le pouvoir pour
fructifier leurs affaires personnelles. Le contrôle des ressources par
une minorité d'Etat crée une inégalité source de
tension sociale et de misère profonde.
La démocratie malgache doit être aussi
appréhendée par le changement apporté par le contexte de
la mondialisation et de la globalisation. La démocratie qui s'impose
à nous est une version libérale qui par sa logique de
marché pilotée par la liberté d'entreprendre est une
source d'inégalité et d'exclusion sociale.
Pourtant proposer des perspectives concernant le
problème de la démocratie dans le contexte malgache est une
entreprise difficile qui nécessite un travail de longue haleine. Nous
devons tenir compte des facteurs culturels, sociaux, politiques, pour que le
système réponde à la totalité organique selon le
langage de Malinowski. Pour cette raison nous limiterons notre étude
à dégager quelques points saillants susceptibles d'ouvrir une
vision de perspective.
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