3.3.2 Coût de la scolarisation.
Parler de coût de la scolarisation revient à faire
allusion à toute dépense engagée pour permettre
à un enfant d'aller à l'école. Cela regroupe aussi bien
les frais de scolarité
66 Femme, âgée de soixante (60) ans et
sans niveau d'instruction
67 Femme de trente deux (32) ans
68 Femme de cinquante un (51) ans et sans niveau
d'instruction
69 Homme de trente deux (32) ans
(ou la cotisation des parents d'élèves), les
tenues scolaires (s'il y`en a), et aussi l'ensemble du matériel
didactique (cahiers, bics, matériel de géométrie, livre,
sac d'école, etc.)
On ne peut pas évaluer avec exactitude les coûts
de ces différents facteurs. Si les scolarités ou les cotisations
des APE sont fixées pour l'année scolaire, il est cependant
difficile d`avoir une idée exacte des fournitures. Anselme
YARO70 (1999) rappelle qu' « au Burkina Faso, les prix des
fournitures varient : il ya les prix officiels, mais ce sont surtout les prix
chez les commerçants qui comptent ». Néanmoins, nous
avons essayé d'évaluer de façon approximative le
coût des différents facteurs indispensables pour un
élève. Pour ce faire, nous y sommes allés par
étapes :
> la première étape a consisté
à se renseigner auprès des établissements aussi bien
privés que publics pour faire le point sur le matériel didactique
exigé pour chaque classe allant de la classe de CP1 à la classe
de 3ème.
> à la deuxième étape, pour chaque
classe, nous avons pris attache avec deux (02) librairies de la place où
nous avons pu avoir le coût de chaque élément afin de
pouvoir évaluer non pas de façon exacte, mais approximative, le
prix à payer pour acquérir la totalité des fournitures
scolaires par classe.
A ces fournitures scolaires, il faut ajouter la cotisation de
l'APE et la tenue scolaire, pour avoir une idée nette du coût
global
70 Anselme YARO, Représentations de
l'école par les parents au Burkina Faso, Colloque (la recherche face au
défis de l'éducation), Ouagadougou 19-22 novembre 2002, p22
Tableau n° 18: Evaluation du
coût approximatif des besoins scolaires en fonction du type
d'établissement fréquenté et du niveau d'étude
|
|
|
Public
|
Privé
|
Coût total
|
|
Tenue scolaire
|
Fournitures scolaires
|
APE
|
Frais de scolarité
|
Public
|
Privé
|
CP
|
-
|
1000
|
1000
|
15000
|
2000
|
16000
|
CE
|
-
|
1000
|
1000
|
15000
|
2000
|
16000
|
CM
|
-
|
2000
|
1000
|
15000
|
3000
|
17000
|
1er cycle
|
4000
|
5000
|
10000
|
53000 à 58000
|
19000
|
62000 à 67000
|
En termes beaucoup plus concrets, un parent dépense
entre deux mille (2000) et soixante sept mille (67000) par an pour chaque
enfant qu'il envoie à l'école, sans y avoir comptabilisé
l'achat de livres71 pour chaque classe. A ce coût minimum de
deux mille (2000) et maximum de soixante sept mille (67000) francs, il faudrait
encore ajouter celui du sac d'école qui n'est pas souvent abordé
par les parents d'élèves.
Pour faire face aux besoins scolaires des orphelins, deux (02)
situations se présentent :
- soit le chef de ménage reçoit de la part des
associations/structures un appui pour le payement des frais de scolarité
et de l'achat du matériel didactique.
- soit il ne reçoit aucune aide et doit lui-même
avec ses ressources faire face aux besoins de scolarisation de l'orphelin.
Dans le cas de notre échantillon, seulement vingt quatre
(24) chefs de ménages (soit 30%) bénéficient d'un
appui.
71. Ce volet a été exclu parce que de
plus en plus dans les écoles, aussi bien privées que publiques,
les élèves reçoivent gratuitement des manuels scolaires,
cependant, à la Direction de l'Inspection Primaire, on reconnaît
les offres insuffisantes par rapport à la demande.
Le tableau suivant permet de faire les constats :
Tableau n° 19 : Rapport entre apport
des associations/structures en fonction de la profession des chefs de
ménages
Aide reçu de la part d'une
association
|
Oui
|
Non
|
Totaux
|
Valeur évaluée Profession des
chefs de ménages
|
Moins de 5000
|
[5000- 17000[
|
17000 et +
|
|
|
Cultivateurs/éleveurs
|
3
|
6
|
1
|
41
|
51
|
Ménagères
|
1
|
1
|
3
|
3
|
8
|
Employés
|
-
|
-
|
-
|
4
|
4
|
Retraités/ inactifs
|
-
|
2
|
2
|
1
|
5
|
Commerçants
|
-
|
4
|
1
|
7
|
12
|
Totaux
|
4
|
13
|
7
|
56
|
80
|
Les chefs de ménages cultivateurs sont les plus
durement touchés par l'absence d'appui à la scolarisation des
orphelins qu'ils ont à leur charge. 80,39% d'entre eux n'ont pas
d'appui. Cela peut s'expliquer d'une part par l'insuffisance de ressources au
niveau des associations qui viennent en aide aux enfants, et d'autre part par
la situation d'ignorance de l'existence de ces structures par les chefs de
ménages. Quand bien même les structures existent, très peu
de chefs de ménages les connaissent et les fréquentent.
Or, l'apport de ces associations auraient un temps soit peu
permis de pallier aux difficultés de scolarisation des orphelins si nous
convenons avec P.R.72 que : « la situation
est difficile surtout pour les orphelins complets, le manque de moyens faisant
que les enfants ne peuvent pas poursuivre leur scolarité ».
Néanmoins, les associations
72Président de l'ASSEMERTOM
se satisfont des acquis enregistrés. Pour
K.R.73, «
S'il n'y avait pas notre association, je crois que certains enfants ne
seraient pas allés à l'école ».
Cependant, les associations n'ont pas caché leur
mécontentement dû au fait que certains chefs de ménages
usent de stratagèmes pour permettre à certains enfants de
bénéficier d'un double parrainage. Désarroi aussi face
à certaines dérives où le matériel donné aux
orphelins est confisqué par le tuteur au profit de ses propres enfants.
« Nous avons vu des cas où des sacs d'école ont
été retirés entre les mains des orphelins et remis aux
propres enfants du tuteur (...). Certains tuteurs viennent nous voir, et
dès que nous leur remettons le matériel, ils s'en vont le
remettre à leurs propres enfants laissant ainsi les vrais
bénéficiaires » : soutient
O.A.74 C'est en toute légitimité que
les associations ont un sentiment de résultats souvent mitigés de
leurs actions. Les résultats scolaires sont bien en deçà
de leurs attentes, posant du même coup le véritable
problème du suivi des enfants. « Nous intervenons depuis 1992
dans la localité. En quinze (15) ans d'existence, si nous nous devions
de faire un bilan, nos meilleurs résultats sont de vingt (20)
brevetés et quatre (04) bacheliers », amertume de
K.R.75, pour qui beaucoup d'argent a
été investi pour rien.
Pour mieux appréhender ce que peut avoir comme
implication les coûts ci-dessus pour les parents, nous nous sommes
intéressés au kit scolaire des enfants interrogés. Certes,
l'enquête s'est déroulée à une période de
rentrée scolaire (mois d'octobre), et donc à un moment où
certains enfants n'avaient pas encore reçu la totalité du
matériel scolaire, mais les chiffres auxquels nous avons abouti sont
porteurs de sens : sur les quatre vingt (80) enfants interrogés,
seulement quatre (04) soit 5% disposaient du nécessaire pour aller
à l'école et 95% étaient toujours dans l'attente soit du
complément, soit de la totalité des fournitures scolaires. Et,
certains de se poser de véritables inquiétudes sur la
gratuité de l'école comme le soutient explicitement
B.D.76, « on dit que l'école est
gratuite (...) ; nous en tout cas on ne voit pas cette
73 Président du CLJT
74 Présidente de l'AED
75 Président du CLJT
76 Retraité de soixante sept (67) ans
gratuité de l'école77 là !
». Au regard de ces chiffres, l'on pourrait aisément mieux
comprendre les difficultés vécues par les chefs de
ménages, surtout quand ceux-ci affirment avoir du mal à honorer
leurs engagements pour ce qui est de la scolarisation des enfants. D'ailleurs,
à ce sujet, Komla LOKPO78 (1999) rappelle qu' « un
tuteur sur deux ne paye ni la scolarité, ni la cotisation de leurs
filleuls »
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