4.2.2. Choix des sequences
NÕayant pas participé à la collecte de
données sur le terrain, il nous a paru important et dans le but de mieux
comprendre lÕensemble de la mission, de nous immerger dans les
données, cÕest-à-dire les videos. La première
étape a donc été de visionner
lÕintégralité des 42 heures dÕenregistrements video
afin de sÕimprégner du contexte. Regarder lÕensemble des
videos nous a permis de nous familiariser avec le langage particulier des
membres de MSF et de le comprendre. Puis, à lÕaide dÕun
carnet de route et armé dÕun stylo, nous nous sommes
attelée à noter les details du déroulement et les sujets
de conversations de chacune dÕentre elles. En même temps que nous
notions toutes ces informations, nous nous sommes évidemment
intéressée plus particulierement à la manière dont
MSF est exposé, raconté, présenté et
négocié
par ses acteurs dans leurs interactions. Ainsi, notre
attention s'est portée sur la facon dont était construite et
performée l'identité organisationnelle, mais aussi la facon dont
celle-ci était utilisée pour accomplir des choses, explicitement
et implicitement. Tout au long du visionnage, nous nous sommes focalisée
sur l'expression des marqueurs d'identité tels que: prénoms,
noms, on, nous, vous, MSF, principes,É afin de capter des moments de
manifestation de l'identité organisationnelle. Le but étant, en
particulier, d'identifier des extraits qui démontrent la
négociation et la construction de l'identité de MSF au sein des
interactions.
Avant d'effectuer l'analyse proprement dite, nous avons
dü opérer un choix à travers la quantité de
données qui se présentaient à nous. Pour cela, nous avons
eu recours à certains critères comme la longueur de
l'interaction, le nombre de participants et la diversité des situations
interactionnelles. En plus de ces critères de base, nous avons
cherché des séquences où la question de l'identité
organisationnelle semblait clairement présente dans l'interaction. Il
faut noter, de surcroit, que nous avons sélectionné des
séquences oü les acteurs utilisaient dans leurs conversations des
expressions comme MSF fait/ne fait pas, doit faire/ne doit pas faire ou encore
est/n'est pas.
En ce qui concerne la longueur des séquences choisies
pour l'analyse, nous avons préféré nous restreindre au
choix d'extraits d'interactions n'excédant pas une vingtaine de minutes,
cela afin de mieux nous concentrer sur les détails de celles-ci. Il est
à noter que les séquences choisies ne correspondent pas aux
débuts et fins de rencontres entre les acteurs présents dans les
interactions, mais à une sélection en leur sein pour
répondre à notre objet d'étude. Le choix s'est aussi fait
par rapport à la notion de co-construction dans les conversations.
Ë ce sujet, Traverso (2009) dit : Ç La conversation se
caractérise surtout par sa temporalité, liée au fait
qu'elle impose
à chacun lÕabandon de son temps individuel et
ordinaire, lÕentrée dans un temps commun È (p. 83). Ces
critéres sur la longueur des sequences nous ont obligee de proscrire de
notre analyse des interactions intéressantes dans leur globalité,
mais qui duraient environ une heure, donc qui étaient beaucoup trop
longues pour pouvoir espérer entrer dans leur detail.
Quant au nombre de participants, nous avons
privilégié les sequences qui sÕavéraient suivre
cette prémisse : Ç Le nombre des interlocuteurs est a priori
illimité, il doit cependant permettre de preserver une proximité
favorable aux échanges È (Traverso, 2009, p. 83). Ë ce
titre, les extraits choisis ne compte pas plus de trois personnes qui parlent
dans lÕinteraction, cela afin de nous permettre de considérer le
mieux possible le discours de chacun. Nous avons donc éliminé des
sequences qui étaient intéressantes pour notre analyse, comme des
reunions dites de « mise au point » entre des membres de MSF et des
reunions du Conseil dÕadministration de lÕhTMpital de Mumba
(ville fictive), car elles comprenaient de cinq à dix personnes qui
prenaient la parole. De plus, il faut savoir que lors de la collecte de
données, les participants des videos nÕont pas été
choisis par le chercheur, qui sÕest laissé guide par la
réalité des rencontres du quotidien du travail du chef de mission
MSF.
Un autre de nos critéres a été de
sÕefforcer dÕoffrir pour lÕanalyse une certaine
diversité des situations et natures interactionnelles, avec un
dénominateur commun qui est en lÕoccurrence Max, chef de mission
de la branche francaise de MSF. En effet, le but de ce critére
était de pouvoir accéder à un florilége, sans
aucunes prétentions dÕuniversalité, des situations
normales auxquelles peut être confronts un chef de mission MSF dans son
travail de tous les jours, afin dÕessayer de capter lÕessence de
son discours et dÕen observer les variations et/ou la constance. De
plus, nous nous sommes attelés à sélectionner des
sequences oil lÕidée de construction
et/ou de négociation de l'identité
organisationnelle était clairement présente dans l'interaction.
On revient donc ici au coté interprétatif de notre recherche.
Remarquons aussi que, comme le dit Traverso (2009), <<La finalité
de la conversation est interne et les participants y poursuivent un objectif
communÈ (p. 83). Ainsi, c'est aussi l'idée de performance des
acteurs qui nous a guidée avec un focus sur les conversations oü
les interactants semblaient aborder la question << Qu'est ce que c'est
MSF ? È de facon explicite ou implicite.
Ë l'aide de tous ces critères, nous avons
finalement abouti à une sélection de quatre extraits vidéo
que nous allons brièvement présenter. Pour la première
séquence, il s'agit d'une réunion d'information à
l'hôpital de Mumba qui se situe au début de l'intervention de MSF
dans cet hôpital oü Max, chef de mission MSF, prend la parole devant
le personnel de l'hôpital. Cette séquence nous présente
donc la voix de MSF ou son discours officiel, face à ses partenaires. La
deuxième séquence sélectionnée est une
réunion entre Max, accompagné de Carole et deux
représentants militaires de la MONUC, mission de la paix de l'ONU en
RDC. Cette séquence nous montre la voix de MSF ou son discours officiel,
face à des acteurs de son environnement. Le troisième extrait est
une rencontre entre Max et deux représentants du ministère de la
Santé du Nord-Kivu avec qui MSF travaille en collaboration pour
établir ses programmes. Cette séquence illustre les discussions
entre un chef de mission MSF et des collaborateurs gouvernementaux de terrain.
Ces trois premières séquences nous permettent d'observer et
d'analyser une vision donc plus <<externeÈ de l'identité
organisationnelle. Pour finir, la quatrième séquence nous
présente une interaction entre deux membres de MSF, Max (chef de
mission) et Eric (responsable terrain). Celle -ci nous permet de voir comment
est présentifier l'organisation sous un angle plus << interne
È.
|