3-comment maintenir la forme d'un champion
La conjoncture internationale envoie des coups de boutoir dans
1'appareil de production industriel allemand : 1974-75 puis 1980-82 marquent
des temps d'arrêt, des périodes de freinage, mais la machine
repart avec
vigueur surtout pour les biens d'équipement.
L'élan n'est pas homogène; certains secteurs peinent : la
sidérurgie a des convulsions d'agonie, d'autres affichent un tonus
réconfortant, d'autres encore luttent besogneusement: c'est le cas de
l'industrie mécanique.
Le secteur de la mécanique est le plus puissant de
1'Industrie allemande, en termes de chiffre d'affaires, d'emplois aussi bien
que d'exportations (voir tableau ci-contre).
Le développement de 1'industrie mécanique est
irrégulier, mais il en impose cependant. La puissance se traduit par un
pouvoir de domination qui est 1'effet d'une spécialisation très
poussée, conquise au cours de longues années. Pour certains
produits, la suprématie Internationale de la RFA est si forte que le
principal concurrent est relègue loin derrière, avec une
part des exportations mondiales qui n'atteint pas la moitie de celle de la RFA
(voir tableau ci-dessous).
Avec prés de 100 milliards de DM de ventes a
1'étranger en 1986, et une balance commerciale créditrice de 58
milliards de DM, la mécanique allemande est dans son domaine,
globalement, le premier exportateur mondial. Un découpage de la
mécanique en 43 sous branches conduit a classé 23 fois la RFA a
la première; place et 10 fois au second rang. L'Allemagne est
véritablement le leader mondial pour la production de machines
spécialisées
Cela ne signifie pas pour autant qu'elle puisse se reposer sur
ses lauriers. L'adaptation constante a la différenciation des marches
est une nécessitée renouvelée, douloureuse parfois.
Si certaines branches ont pu se déployer
généreusement dans les quinze dernières années,
d'autres ont etc. contraintes à réduire leur
activité. Même le leader' mondial n'échappe pas aux
nécessites du redéploiement. Des licenciements n'ont pu
être évites. La situation est peu réjouissante pour
toute une série de produits, orientes a la baisse, ou au mieux a la
stagnation, tels les pompes a liquide, la robinetterie, les compresseurs et
pompes a vide, les machines a bois, les instruments de pesage, les
distributeurs automatiques, les matériels de genre civil, les appareils
pour les industries chimiques, les machines de fonderie, les appareils de
manutention et de levage, les machines minières, les machines agricoles
et tracteurs, les mécanismes de transmission, les appareils d'essais,
les appareils de lutte centre 1'incendie, les fours industriels, le
matériel de blanchisserie, les locomotives, les coffres-forts, les
machines pour 1'industrie du cuir, les appareils de soudage (non
électrique).
Dans les domaines des biens d'investissement les
équipements électriques et électroniques ont tendance
à se substituer à ceux de la mécanique classique; ces
derniers doivent intégrer de nouveaux composants de régulation et
d'automatisation.
L'expérience montre que la construction
mécanique est une Industrie sensible : aux mouvements conjoncturels, aux
changements technologiques, au taux d'in-tercet, a la politique"
gouvernementale... bref a un ensemble de variables difficiles a gérer.
L'effort d'innovation s'impose continuellement. Les acquis ne sont pas des
rentes de situation, certes, mais ils facilitent les transformations, ils
permettent d'accompagner les changements et de détecter des choix
stratégiques judicieux. Conscients du handicap que leur cause la forte
rémunération de la main-d'oeuvre, les constructeurs allemands de
machines ont tendance à abandonner les produits standardises, pour
lesquels le prix est un déterminant important de la demande. Par centre
ils centrent leurs efforts sur la fabrication spécifique unitaire ou en
petites séries, la demande étant a ce stade peu élastique
au prix. Cette évolution suppose une main-d'oeuvre qualifiée, des
ingénieurs inventifs, une bonne connaissance des besoins et des
technologies. De ce point de vue 1'industrie mécanique allemande a su
exploiter son savoir-faire.
Cependant, la spécialisation accrue de la production ne
va pas toujours dans le sens de la demande mondiale qui tend à commander
des systèmes complets et non pas des machines isolées. Par
conséquent pour aller au-devant des attentes de la clientèle, les
constructeurs allemands intègrent et commercialisent de plus en plus
De produits composants. Cette pratique permet aux
producteurs-ensembliers de focaliser leur capacité d'action sur un
nombre réduit de produits, sans investir exagérément en R
&; D, et de proposer aux clients une gamme de machines dont tous les
éléments sont a la pointe du progrès technologique. Les
producteurs deviennent de plus en plus des négociants. Les bureaux
d'études tendent à devenir plus importants que les ateliers. Les
services en tous genres rapportent plus d'argent que la fabrication ; la
maintenance et les services après-vente dégagent des profits. En
définitive le savoir-faire industriel est bel et bien source
d'accumulation, de capital et de profit, a condition de la
régénérer.
A la fin des années soixante-dix, entre les deux chocs
pétroliers, la mécanique allemande n'a pas échappe a une
certaine somnolence. Les dirigeants avaient sous-estime 1'impact des mutations
technologiques enclenchées par la micro-électronique, et pense un
peu vite que forts de leurs atouts traditionnels, ils pourraient continuer de
dominer le marche sans investir massivement dans les nouvelles technologies.
Quatre années noires se sont succède, de 1980 a 1983,
accentuées par une conjoncture monétaire et une demande mondiale
de biens d'investissement défavorables. Mais la profession
réagit, encouragée par les Pouvoirs Publics qui ont lance un
imposant programme « Productique » : un succès dés la
première étape, il a été renouvelé pour la
période 1984-87. La mécanique allemande est dopée ; elle
redevient confiante. La confiance ne s'improvise pas ! La, comme dans d'autres
secteurs, elle se justifie.
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