Politique monétaire et bulles spéculatives( Télécharger le fichier original )par Nesrine Ressaissi Faculté des sciences économiques et de gestion de Tunis - Mastère 2010 |
2/ La réaction des autorités monétaires en fonction de la nature des chocsÉtant donné que l'idée de la construction d'un nouvel indice des prix qui incorpore les prix des actifs financiers et des actifs réels a été rapidement abandonnée, certains auteurs suggèrent, à l'instar de Goodhart et Hofmann42(*), d'introduire les prix des actifs dans la fonction de réaction des banques centrales. Néanmoins, ces auteurs refusent le principe que la banque centrale devrait réagir de manière automatique aux variations des prix des actifs. Les autorités monétaires doivent, par contre, analyser les causes de ces variations, suivant qu'elles soient imputables à des facteurs de l'offre ou à des facteurs de la demande. Ce point a été exposé de manière plus constructive dans le travail de Durré 43(*). Durré montre que les autorités monétaires ne doivent pas réagir de la même manière à toutes les variations des prix des actifs. L'analyse de la nature des chocs afférant à la variation des prix des actifs est primordiale. a) Cas d'un choc de demande positif En cas de chocs de demande positifs, la demande globale augmente, induisant par là des pressions à la hausse du niveau des prix. La banque centrale intervient par l'augmentation du taux d'intérêt nominal, afin de minimiser l'écart du taux d'inflation par rapport à sa cible. L'augmentation du taux d'intérêt conduit à une diminution des prix des actifs qui, à son tour, induit une diminution de la demande globale par l'intermédiaire des effets de richesse. Or, cette augmentation du taux d'intérêt renchérit le coût du capital et déprime les dépenses d'investissement. Ainsi, la réaction de la banque centrale aux chocs positifs de demande devra être plus faible lorsque celle-ci vise la stabilité financière que dans le cas de l'objectif traditionnel de la stabilité des prix mesurée à l'aide de l'indice des prix à la consommation, grâce au rôle rééquilibrant joué par les prix des actifs. Il convient de préciser que la variation du taux d'intérêt directeur sera d'autant plus faible que la sensibilité de la demande globale à la variation des prix des actifs est forte (donc lorsque les effets de richesse sont importants). b) Cas d'un choc d'offre En cas de chocs d'offre, les autorités monétaires sont tenues de détecter la nature de ce choc. Lors d'un choc technologique, les banques centrales ne devraient généralement pas intervenir. Un choc technologique contribue à augmenter les capacités de production. Or, les prix des actifs connaîtront de fortes tendances haussières grâce à une augmentation permanente des dividendes futurs anticipés. D'un côté, la demande globale augmente comme réponse à l'augmentation des prix des actifs via un effet de richesse. De l'autre côté, le niveau de production de long terme augmente grâce aux progrès technologiques. Lorsque la banque centrale vise son objectif traditionnel, elle peut réagir aux chocs positifs de l'offre par une baisse des taux d'intérêt dans le but de relancer la demande globale. Or, dans un modèle de ciblage de l'inflation avec des effets de richesse (règle de Taylor augmentée d'une cible pour la variation des prix des actifs), la banque centrale ne doit pas toujours intervenir en situation de choc technologique car, cette fois-ci, la demande globale arrive à égaliser l'offre globale grâce à l'impact positif de l'augmentation des prix des actifs sur le niveau de la demande globale. En effet, le degré d'intervention de la banque centrale dépendra de la sensibilité de la demande globale à la variation des prix des actifs. En situation de choc technologique, la variation du taux d'intérêt sera d'autant plus faible que les effets de richesse sont forts et viceversa. Selon les calculs de Durré, à partir d'une élasticité de la demande globale par rapport aux prix des actifs de 0,7 (ce qui signifie qu'une augmentation de 10 pour cent des prix des actifs induit une augmentation de 7 pour cent de la demande globale), l'intervention de la banque centrale n'est plus nécessaire. Cet exemple met en exergue le rôle rééquilibrant des prix des actifs. Il convient toutefois d'ajouter une précision dans le cas où la banque centrale est confrontée à un choc d'offre. Lorsque l'élasticité de la demande globale par rapport aux prix des actifs est faible, la banque centrale doit faire un arbitrage entre la stabilisation de l'activité économique et celle des prix des actifs. La diminution des taux d'intérêt, outre la relance de la demande globale, induit une volatilité plus forte des prix des actifs. c) Cas d'un choc financier positif Si l'on considère maintenant le cas où le marché des actifs est affecté par un choc financier positif, l'augmentation de la prime de risque va diminuer les prix des actifs. La diminution des prix des actifs va, pour sa part, influencer négativement la demande globale. Tout en maintenant la production inchangée, toute pression à la baisse de la demande globale peut affecter négativement les prix des biens et services. Afin d'éviter la baisse des prix, la banque centrale réagit par une diminution du taux d'intérêt directeur, ce qui aura pour corollaire une augmentation de la demande globale. Plus la sensibilité de la demande globale à la variation des prix des actifs est forte, plus forte sera la variation du taux d'intérêt par la banque centrale suite à un choc financier. En effet, les autorités monétaires devront non seulement contrecarrer les fluctuations de l'activité économique, mais aussi celles des prix des actifs. La réponse de la banque centrale à un choc financier sera plus forte lorsque celle-ci aura pour objectif la stabilité financière que dans le cas contraire. Cela s'explique par le fait qu'un choc financier (tout comme un choc technologique) affecte directement les prix des actifs. Avec un objectif de stabilité financière, les autorités monétaires doivent réagir à la diminution des prix des actifs d'un côté et à la diminution de la demande globale de l'autre côté. * 42 ibid * 43 ibid |
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