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Du droit de résistance aux abus de pouvoir: une lecture du "second traité du gouvernement civil" de John Locke

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par Victor SETIBO BATUZOLELE
Faculté de philosophie Saint Pierre Canisius - Bachalauréat en philosophie 2002
  

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Chapitre deuxième :
LES ABUS DE POUVOIR

2.1. Introduction

Là où vivent les hommes, malgré les lois établies que tout le monde est appelé à respecter, il peut arriver des violations graves compromettant l'avenir de la Communauté politique. Il peut arriver qu'un Prince dirige l'Etat en fonction de ses avantages et de ses intérêts propres, sans se référer aux lois. L'on se demande alors : Que faut-il faire pour éviter les abus de pouvoir ? En cas d'abus de pouvoir, que deviennent les Institutions politiques ? Quelles sont les conséquences à redouter pour le peuple ? Sans prétendre donner des réponses parfaites à toutes ces questions, à la suite de John Locke, ce chapitre tentera d'en apporter plus de lumière

2.2. Les limites du pouvoir

La structure et l'étendu du gouvernement civil découlent de ses origines et de ses missions, qui lui assignent des limites rigoureuses. Le résultat principal de l'institution du gouvernement est donc de garantir la liberté, la sécurité et la propriété des individus en les protégeant contre l'arbitraire. Ceci n'est possible que si le gouvernement assure le règne de la loi et non pas la domination d'un homme ou d'un groupe d'hommes. De là, découle en premier lieu la place prééminente du pouvoir législatif, qui est le pouvoir suprême et qui a pour mission d'établir les règles auxquelles chacun doit obéir. Même s'il peut être exercé par un monarque, ce pouvoir a sa source dans la collectivité ( ou dans la majorité) puisqu'il « représente » les hommes qui composent la société. Pouvoir suprême, il reste néanmoins limité : il ne peut agir que par le moyen de lois établies et promulguées, qui ne garantissent que le bien du peuple ; il ne peut percevoir d'impôts qui n'aient été consentis par le peuple ou par ses représentants, il n'a « ni le droit ni la possibilité d'aliéner la compétence en vertu de laquelle il légifère41 ».

Subordonnés au pouvoir législatif, les pouvoirs exécutif et fédératif ont aussi des tâches à accomplir. Le pouvoir exécutif à faire aux individus en tant qu'ils doivent être soumis à la loi. Et donc la tâche de ce pouvoir est de garantir la permanence de l'exécution

41 Second Traité, § 142, pp. 249-250.

des lois. Le pouvoir fédératif quant à lui, a la charge de la sécurité de la société dans ses rapports avec les autres communautés ou avec les autres individus, à l'égard de qui elle reste dans l'état de nature.

Le gouvernement civil doit donc être contenu dans les strictes limites : il a une fonction essentiellement protectrice et il doit respecter la liberté, l'égalité naturelle. C'est ainsi que pour prévenir les abus de pouvoir, John Locke limite ce pouvoir. De ce fait, le pouvoir législatif ne peut pas être absolument arbitraire sur la vie et les biens du peuple. « Car, le pouvoir n'étant autre chose que le pouvoir de chaque membre de la société, remis à cette personne ou à cette assemblée qui est le législateur, ne saurait être plus grand que celui que toutes les différentes personnes avaient dans l'état de nature, avant qu'ils entrassent en société, et eussent remis leur pouvoir à la communauté qu'ils formèrent ensuite. 42»

Les limites du pouvoir s'expliquent essentiellement quand on comprend que pour John Locke, il est incompréhensible et inadmissible qu'un homme, ainsi qu'il a été prouvé, se soumette au pouvoir arbitraire d'un autre. Dans l'état de nature, n'ayant point un pouvoir absolu sur la vie, sur la liberté ou sur les possessions d'autrui, son pouvoir s'étend seulement jusqu'où les lois de la nature le lui permettent, pour la conservation de sa personne, et pour la conservation du reste du genre humain. C'est ce que donne et que peut donner cet homme à une société, et, par ce moyen au pouvoir législatif. Ce pouvoir ne saurait alors s'étendre plus loin qu'il ne le faille43. Il doit simplement se limiter au bien public. C'est un pouvoir qui n'a pour fin que la conservation et par conséquent, il ne saurait jamais avoir le droit de détruire, de rendre esclave ou d'appauvrir le peuple.

L'autorité législatrice ou suprême n'a point le droit d'agir par des décrets arbitraires, et formés sur-le-champ, mais est tenu de dispenser la justice, et de décider des droits des sujets par les lois publiées et établies, et par des juges connus et autorisés. Contrairement à Hobbes qui pense que pour résoudre des problèmes qui se posent fréquemment dans l'état, il faut un pouvoir absolu et arbitraire sur les personnes et sur leurs biens, Locke pense pour sa part qu'un pouvoir arbitraire et absolu, un gouvernement sans lois établies et stables, ne saurait s'accorder avec les fins de la société et du gouvernement. Ce serait se mettre dans une condition pire que celle de l'état de nature, dans lequel on a la liberté de défendre son droit contre les injures d'autrui, et de se maintenir, si l'on a assez de force, contre l'invasion d'un homme ou de plusieurs.

42 Second Traité, §. 135, pp. 246-248.

43 Idem.

Dans ce même ordre, il est à savoir que le bien de la société seul constitue ce pourquoi le gouvernement est constitué ou a été mis en place. Le pouvoir arbitraire ne peut être exercé suivant le bon plaisir, mais suivant des lois établies et connues ; en sorte que le peuple en même temps les gouvernants, se tiennent dans de jutes bornes, et ne soient point tentés d'employer le pouvoir qu'ils ont entre les mains, pour suivre leurs passions et leurs intérêts, pour faire des lois inconnues et désavantageuses à la société politique, et qu'elle n'aurait garde d'approuver.

Une autre limite est que la suprême puissance n'a point le droit de se saisir d'aucune partie des biens propres d'un particulier, sans son consentement44. Ce qui engage les différentes personnes à entrer en société politique, c'est entre autre la fin du gouvernement qu'ils ont devant eux, à savoir, la conservation de leurs biens propres. Ceci suppose que les biens propres du peuple doivent être sacrés et inviolables. C'est donc une erreur flagrante que de croire que le pouvoir d'un Etat pourra faire ce qu'il veut, et disposer des biens de ses sujets d'une manière arbitraire ou de se saisir d'une partie de ces biens comme il lui plaît.

C'est ainsi qu'une manière de remédier à l'arbitraire du pouvoir législatif est de faire en sorte qu'il ne soit pas sur pieds de manière fréquente ou permanente. Les membres seront, après que l'assemblée a été séparée et dissoute sujets aux lois communes de leur pays45. Mais dans les gouvernements, où l'autorité législative réside dans une assemblée stable, ou dans un homme seul, comme dans les monarchies absolues, il y a toujours à craindre que cette assemblée, ou ce monarque, ne veuille avoir des intérêts à part et séparés de ceux de la communauté ; et ainsi qu'il ne soit disposé à augmenter ses richesses et son pouvoir, en prenant au peuple ce qu'il trouvera bon. Dans ces gouvernements, les biens propres ne sont pas en sécurité.

Aussi, l'autorité ne peut pas remettre en d'autres mains le pouvoir de faire des lois. Car cette autorité n'étant qu'une autorité confiée par le peuple ; ceux qui l'ont reçue n'ont pas le droit de la remettre à d'autres. Seuls ont le droit de faire des lois, les personnes que le peuple a choisies librement ; des gens en qui il a mis toute sa confiance, son trust.

« Et quand le peuple a dit, nous voulons être soumis aux lois de tels hommes, et en telle manière, aucune autre personne n'est en droit de proposer à ce peuple des lois à observer, puisqu'il n'est tenu de se conformer qu'aux règlements faits par ceux qu'il a choisis et autorisés pour cela.46 »

Le libéralisme de Locke trouve donc sa figure ultime et sa dimension tragique,

lorsqu'il accepte simultanément la souveraineté et le droit de résistance ; mais la grandeur de

44 Second traité, § 138, pp. 246-248.

45 Idem.

Locke est aussi d'avoir su intégrer ces deux logiques apparemment antagonistes dans une théorie du gouvernement limité, dont le but est de montrer à quelles conditions les hommes peuvent établir un corps politique qui neutralise leurs conflits en représentant leurs intérêts et leurs opinions et en protégeant leurs droits47.

Telles sont les bornes et les restrictions mises en place pour que le pouvoir donné en toute confiance par le peuple ne dégénère pas en arbitraire et en absolutisme car, on n'entre pas dans la société civile pour vivre sous le poids de l'anarchie et des injustices. Les restrictions sont mises en relief pour que la société civile se maintienne, qu'elle poursuive la fin pour laquelle elle a été instituée afin d'éviter, autant qu'on le pourra, des conséquences fâcheuses de l'arbitraire et de l'absolutisme.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote