3.3.2. L'apport de John Locke
Il appartient à Locke d'avoir au lendemain de la
Glorieuse Révolution de 1688. posé la question du droit
d'opposition en termes incisifs et parfaitement clairs. A la question de savoir
si la résistance est légitime, il répond en disant que
dans les cas où l'illégalité commise frappe non pas des
personnes privées, mais la majorité du peuple, elle constitue
pour l'avenir une menace : alors, l'opposition est légitime.
Un appel en bonne et due forme à la révolution
est lancé : « chaque fois que les législateurs tentent de
saisir et de détruire les biens du peuple, dans ce cas, les
législateurs se mettent en guerre avec le peuple qui en ce moment est
exempt d'obéissance. Le peuple a le droit de reprendre sa liberté
originaire et établir une nouvelle autorité législative
72>>. Le peuple peut retirer son pouvoir pour le remettre
à celui qui pourra assurer sa sécurité.
Il est essentiel de noter que c'est à l'ensemble des
citoyens que John Locke confie, en ultime instance, le droit de faire appliquer
la loi, bafouée par l'arbitraire royal. C'est la raison pour laquelle,
il a établi sur des bases solides le droit de résister à
l'arbitraire d'en haut. Il veut à cet effet ruiner l'idée
filmérienne73 de droit absolu de
propriété privée, tel qu'il se manifeste dans toutes
sortes de relations sociales à l'intérieur de la
société. Contre cette idée génératrice, elle
aussi, de rapports d'esclavage, Locke fait valoir que chaque être humain
possède, en tant que créature de Dieu, un droit naturel de «
créance >> sur la vie, sur la liberté et sur les biens
nécessaires à la conservation. Ces droits inaliénables
privent de toute valeur morale le pouvoir absolu des seigneurs et
propriétaires terriens despotiques sur les serviteurs réduits
à la condition servile, et dépouillés de toute
espèce de propriété74.
Un tel pouvoir, au sein de la société politique,
est nul au regard de la loi parce que le souverain est tenu à la
création des droits-civils qui reflètent aussi fidèlement
que possible les
pp. 154-155.
72 Second Traité, §222, pp. 305-308.
73 Ce mot vient du nom de Filmer que John Locke a longuement
attaqué dans le premier traité du gouvernement civil.
trois droits inaliénables que possède tout
être humain, à savoir : la vie, la liberté et la
propriété.
La révolution constitue donc le moyen ultime de
défense contre l'oppression d'un pouvoir absolu d'un membre de la
société sur un autre, pouvoir qui du fait qu'il
méconnaît les droits des serviteurs, est incomparable avec
l'idée même de société politique75. Ou
encore pourrait-on dire, <<le droit de révolution est le dernier
rempart de l'Etat de droit et de toute société politique
constituée conformément à la loi
naturelle76.
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