II) Les assurances responsabilité civile
Pour des raisons évidentes, le pilote étant une
personne physique à ressources personnelles financières
limitées, nous avons vu que la responsabilité des pilotes,
à l'échelle européenne, était soit limitée
soit ils sont exemptés de responsabilité envers les tiers et
l'armateur. Cependant, selon le rapport Rh & H Consult Report de 1995, les
limites peuvent être tellement importantes, comme en Espagne ou en
Italie, que les pilotes doivent s'assurer.
En conséquence, lors d'un événement le
contact direct entre les pilotes et les assureurs est un
événement assez rare.
En Italie, par exemple, ces dernières années
plusieurs incidents engageant la responsabilité des pilotes, les ont
conduits à posséder leur propre assurance. Ceux-ci sont
assurés par le Lloyds de London, à hauteur de 500 000 euros par
évènement dommageable.
D'autre part, certains pays obligent aujourd'hui leurs pilotes
à être assurés civilement pour avoir le droit d'exercer.
C'est le cas notamment au Danemark: les fournisseurs de service de pilotage
sont enregistrés sur un registre tenu par la « Danish Pilotage
Authority » et ils doivent remplir certaines conditions pour y être
enregistré en tant que compagnie de pilotage97:
1) être domicilié dans un pays membre de
l'Union Européenne ou de l'Espace Économique Européen
;
2) avoir souscrit une police d'assurance dommages couvrant
civilement les pilotes
3) ne pas avoir de dette impayée envers l'État
(DKK 50.000 ou plus).
L'autorisation d'exercer du fournisseur de service de pilotage
peut être supprimé du registre s'il ne remplit plus les conditions
pour être inscrit ou s'il n'a pas respecté ses obligations
(notamment concernant la souscription d'assurance).
Dans certaines juridictions où les pilotes n'ont pas
d'immunité reconnue envers leur responsabilité, une assurance
responsabilité civile peut être un moyen de protéger le
pilote. Et, les pilotes qui ne souscrivent pas aux assurances pourraient se
voir exposer potentiellement à de grosses et ruineuses contraintes en
cas d'évènements dommageables.
97 Danish Pilotage act section 24 part 11 subsection
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Néanmoins, dans certains pays comme au Portugal, il
n'existe pas d'assurance souscrite individuellement par les pilotes. La
responsabilité des pilotes est couverte par leur employeur, ceux ci
étant considérées comme fonctionnaires de l'État.
Au Portugal, la situation actuelle est due à la publication de la
nouvelle loi «Lei dos Portos». Les pilotes Portugais n'ont pas de
limitation ni d'assurance, c'est l'autorité du port qui couvre leur
responsabilité civile.
En outre, il existe déjà, grâce à
l'action des P&I, des assurances de responsabilité couvrant les
dommages au tiers, les dommages pour pollution, les frais d'assistance, et les
blessures personnelles aux équipages. Or ces assurances ne couvrent pas
le pilote, et ne couvrent pas non plus les frais de recours, ou les frais
engagés suite à des sanctions disciplinaires qu'il pourrait se
voir infliger, ni les pertes de salaires causées par des sanctions, ou
par la perte de sa licence, donc de son travail. Il existe donc des assureurs
privés qui se sont spécialisés dans le domaine de
l'assurance pour responsabilité personnelle du pilote, et pour les
accidents du travail des pilotes.
Par exemple, en Angleterre, pour être membre de
l'Association Nationale des Pilotes, la UKMPA oblige à souscrire
à une assurance annuelle qui inclue une couverture responsabilité
civile et perte de salaire ( voir en annexe 4 les détails de la
couverture d'assurance).
Il existe plusieurs type de police d'assurance des pilotes
couvrant civilement98, l'une est fourni par la Royal & Sun
alliance en Angleterre, l'un des plus gros assureurs du monde, et est unique
sur le marché de l'assurance en Angleterre, car elle couvre les pertes
de salaires survenant à la suite d'un incident de pilotage, et tous les
couts légaux, qui peuvent survenir le temps de récupérer
le licence de pilotage, et la troisième partie de cette police couvre en
général les plaintes de tiers.
Par ailleurs, il peut exister une police de couverture
optionnelle, couvrant pour les accidents corporels.
Le problème de ces assurances est qu'elles augmentent
de ce fait les coûts du pilotage, se faisant ressentir sur les armateurs.
La meilleure des solutions serait certainement qu'ils supportent ces frais avec
les P&I.
98 Pilot mag N°294
En France, pour Frédéric Moncany,
Président de la fédération française des pilotes
maritimes, « les compagnies d'assurance rencontrent des difficultés
à évaluer le montant des primes d'assurances, dans une profession
ou la sinistrabilité est faible mais les coûts d'un sinistre
élevé [...], les assurances proposent donc des primes dont le
montant nous parait trop élevées ».
Cette situation de l'assurance responsabilité pourrait
faire prendre à tous les pilotes une assurance onéreuse pour
couvrir ces risques et répercuter ces coûts sur les tarifs de
pilotage, proposé aux armateurs. Et, pour le moment, comme de coutume
dans le domaine maritime, le juriste prenant en compte le danger
inhérent au pilotage l'utilisation de la limitation de
responsabilité y prend toute sa crédibilité.
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