L'analyse des résultats de l'enquête se fera
sous l'angle des différents problèmes spécifiques
identifiés. Cette analyse sera concomitante à la
présentation des résultats, de sorte a permettre plus tard,
l'établissement du diagnostic.
+ La question de la mauvaise connaissance des
rôles et des exigences de
l'élu local par les conseillers de village ou de
quartier de ville
A la question de connaître le rôle du chef de
village ou de quartier de ville, les conseillers de village ou de quartier de
ville rencontrés affirment pour l'essentiel, que le chef de village ou
de quartier de ville doit s'occuper des affaires suivantes :
- règlement des litiges et différends par
convocation et médiation; - distribution des convocations venant de la
gendarmerie ;
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de ville dans l'exercice de la gouvernance
locale au Bénin
- sécurité (maintien de l'ordre et de la paix
sociale, renseignement sur les étrangers installés dans le
village) ;
- information de la population via les crieurs publics ;
- mobilisation de la population pour diverses activités
;
- réunions trimestrielles pour débattre des
questions locales (salubrité, développement local,
réflexion sur l'amélioration du cadre de vie communautaire) ;
- signature des attestations de vente et règlement
à l'amiable des litiges fonciers ;
- hébergement des voyageurs surpris par la nuit ; etc.
Le Conseiller de village ou de quartier de ville aurait, selon
eux, pour mission d'assurer l'information, le maintien de l'ordre et de la
sécurité dans le village.
A l'analyse, on constate déjà une sorte de
confusion dans l'esprit des conseillers de village ou de quartier de ville et
des chefs de village ou de quartier de ville en ce qui concerne leur rôle
et leurs missions. Il en est de même pour ce qui concerne leurs droits.
En effet, même si les pratiques ne sont pas harmonisées partout,
il a été constaté que les chefs de village ou de quartier
de ville bénéficient d'une indemnité mensuelle,
attribuée trimestriellement (avec quelques arriérés dans
bon nombre de communes), alors que les conseillers locaux (de village ou de
quartier de ville) n'en bénéficient pas. Ce fait est une
injustice dont les conseillers de village ou de quartier de ville n'ont pas
conscience, parce qu'ils ne connaissent pas les dispositions des textes de loi
sur la décentralisation au Bénin. Dans ces conditions, ils se
contentent d'implorer la bienveillance des élus communaux (conseillers
communaux ou municipaux).
Vers une dynamisation des conseils de village ou de quartier
de ville dans l'exercice de la gouvernance
locale au Bénin
De plus, les enquêtés affirment que les sessions
du conseil d'arrondissement ne se tiennent pas systématiquement et
semblent beaucoup plus dépendre de la disponibilité et du vouloir
du chef d'arrondissement ou du souhait du Maire. Cela traduit l'ignorance par
les conseillers de village ou de quartier de ville des dispositions de
l'article 129 de la loi n° 97-029 du 15 janvier 1999 portant Organisation
des Communes en République du Bénin. Selon le dernier
aliéna de cet article, « le conseil d'arrondissement peut
également se réunir à la demande des 2/3 de ses membres
». En réalité, la vitalité du conseil
d'arrondissement dépend en grande partie de la vitalité des
conseils de village ou de quartier de ville de l'arrondissement
concerné.
Les acteurs des services déconcentrés, en
donnant leur appréciation du fonctionnement des conseils de village ou
de quartier de ville, avouent qu'ils se traduisent par une certaine
léthargie et par la non maîtrise des textes et des attributions
par les conseillers. Cependant, le fonctionnement diffère d'un conseil a
l'autre. En effet, tandis que certains conseils de village ne tiennent pas les
sessions, d'autres en tiennent, mais sans un procès verbal tel que le
dispose l'article 130 de la loi n° 97-029 du 15 janvier 1999 portant
Organisation des Communes en République du Bénin.
Par ailleurs, les populations se plaignent des prestations des
chefs de village ou de quartier de ville. Selon eux, les chefs de village ou de
quartier de ville outrepassent leurs compétences dans le
règlement des litiges et s'érigent en juge pour traiter des
affaires liées au viol, a l'enlèvement de mineur, etc.
De l'avis des personnes enquêtées, même
des conseillers de village ou de quartier de ville, les solutions pour
améliorer le fonctionnement des conseils de village ou de quartier de
ville sont des actions de renforcement des
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locale au Bénin
capacités des conseillers de village ou de quartier de
ville sur leurs attributions, sur les dispositions légales de la
décentralisation.
+ La question de la méconnaissance des
règles de management des organisations locales
L'enquête a révélé a ce sujet que
les conseillers de village ou de quartier de ville sont confrontés
à de véritables difficultés de gestion. La première
difficulté est celle de la langue et du niveau d'instruction. A
celles-ci, s'ajoutent le défaut de moyens matériel et
financier.
La plupart des chefs de village ou de quartier de ville
enquêtés ont par exemple des pratiques divergentes en
matière de gestion de l'intérim, de délivrance des
pièces administratives, d'implication et de partage de l'information
avec les collaborateurs. La recherche du niveau d'instruction des
enquêtés révèle un constat qu'aggrave l'absence de
renforcement de capacités, déjà soulevée au point
précédent.
Le niveau d'instruction des élus rencontrés est
présenté dans les figures 14 en annexe.
Il ressort de ces graphiques que la majorité des
élus locaux enquêtés (31,66%) sont au niveau primaire. Ceci
explique certainement leur faible capacité managériale.
Cependant, ce faible niveau d'instruction pourrait ne constituer qu'une limite
et non un véritable handicap a leur capacité de gestion dans le
contexte décentralisé, si ces élus avaient vu leurs
capacités renforcées par des formations, tel que les élus
communaux et le personnel communal en ont bénéficié entre
2003 et 2008 (même jusqu'à nos jours).
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de ville dans l'exercice de la gouvernance
locale au Bénin
A la question de savoir quelles sont leurs attentes des
autorités communales et nationales, les conseillers de village ou de
quartier de ville énumèrent les besoins de renforcement de leurs
capacités sur des thématiques telles que la gouvernance locale,
les rôles des conseils locaux, la gestion administrative
(rédaction administrative), la gestion alternative des conflits,
l'hygiène et l'assainissement de base, etc.
Au-delà de ces besoins, les élus rencontrés
rappellent également le besoin en matériels et équipements
pour le fonctionnement des conseils de village.
L'enquête a révélé par ailleurs,
un conflit entre les activités professionnelles des conseillers et leur
fonction d'élus. Ils pensent que c'est plutôt la fonction
d'élu qui les empêche de vaquer a leurs obligations
professionnelles ; pourtant, les populations se plaignent de leur
indisponibilité. Cela traduit une mal organisation, voire une gestion
peu efficace du temps afin de concilier les deux pans de leur vie.
Les services déconcentrés rencontrés ont
également fait la même remarque. Face à cela, ils proposent
de renforcer les capacités des conseillers de village ou de quartier de
ville sur leurs droits et devoirs, entre autres, sur les techniques de
participation à la mobilisation des ressources locales.
+ La question de la faible implication des populations
par les conseils de
village et de quartier de ville dans la gestion des
affaires locales
Au terme de l'enquête, les populations ont
confié qu'elles ne sont impliquées que lorsque des actions
nécessitent leurs interventions physiques. C'est le cas lorsqu'il s'agit
de débrayer une rue de forage de puits (cotisation, travaux
communautaires); de construction de hangars, écoles (dons de
matériaux). De
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de ville dans l'exercice de la gouvernance
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ce fait, elles se demandent si elles sont impliquées ou
plutôt sollicitées, voire « utilisées ». Ils
souhaiteraient des comptes-rendus périodiques.
A contrario, les conseillers de village ou de quartier de
ville affirment bien jouer leur rôle. Selon eux, il ne leur revient pas
de faire des comptes-rendus aux populations : c'est plutôt le rôle
du Maire et des élus communaux.
Ce dialogue de sourd s'explique par un déficit
d'informations au niveau des conseillers de village ou de quartier de ville et
justifie une fois de plus, leur faible compréhension des grands
bouleversements induits par le processus de décentralisation. Non
seulement ils semblent perdre de vue qu'ils sont des élus de leur
localité, mais encore plus, ils ne perçoivent pas la place que
donnent aussi bien la Constitution béninoise du 11 décembre 1990
que les lois sur la décentralisation, au principe de la participation
citoyenne. Il faudra alors, dans une approche
d'Information-Education-Communication, leur faire percevoir le rôle
nouveau que doit jouer la population, dans le contexte de la
décentralisation.