2. Les continuités
Selon Georges Balandier (1985, p.167), " l'opposition de la
tradition et de la modernité paraît trompeuse, surtout si l'on
admet que celle-ci peut être qualifiée de « tradition du
nouveau »". Pour lui, la continuité des éléments de
la tradition en modernité est réelle, mais elle ne se fait pas
par invariance ou répétition des formes sociales et
culturelles. Au contraire, les éléments de la tradition ne se
maintiennent dans les sociétés modernes qu'en subissant des
transformations.
Dans le centre, certaines logiques socio-culturelles propres
à la médecine endogqne sont sauvegardées grkce à la
résistance des tradithérapeutes, d'autres par contre se
pérennisent en subissant des transformations.
2.1. Les résistances de la tradition
Malgré la valorisation, certains aspects de la
médecine traditionnelle classique sont conservés au centre. En
effet, les promoteurs du centre comme les
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guérisseurs, n'ont aucune envie de renoncer à
l'identité traditionnelle de la thérapie qu'ils exercent. C'est
pourquoi, ils refusent absolument d'utiliser des médicaments modernes
dans le traitement des patients. Dans ce cadre, un membre de la direction
affirme que malgré la valorisation « la médecine
traditionnelle doit garder son âme ».
En effet, les tradipraticiens jouent un rôle important
dans la perpétuation de SIDIUNI P \ VliunriEWEFeItreE TIsIEBSRsEWEYCHP
EuHEI P 1n WIEDY la salle de consultation qui leur permet, dans le secret,
d'employer les méthodes DalY9U11NESSIRSUOIs IEWqDEINSDIEMEMI rEWIFRP SAM
TBL'FMTEXIDIF lors de nos enquêtes, un thérapeute traditionnel
nous a avoué qu'il utilise la divination pour le diagnostic de certaines
maladies « compliquées ». Le simple fait que le
promoteur du centre ait prévu une salle de consultation du Fâ est
KOMLIMEHFeIDWIEVADEIdIP rP I i TI SHSONLIIRQIIHFeIAe pratique malgré la
valorisation.
2.2. La valorisation du communautaire
La médecine à OK{SBEEMEGBARnWIECIEP EBRQUIMIENer
conserve certaines valeurs fondamentales de la médecine endogène
classique.
En effet, malgré la valorisation, le centre n'a pas
adopté l'approche de la médecine moderne qui, selon Fontaine
(1995, p.134), "prend d'abord le problème de l'individu dans ses
dimensions personnelles et n'accorde à la famille et à la
communauté qu'un rôle secondaire, voire absent". Au
contraire, la place accordée à la parenté dans cette
structure montre la volonté de ses promoteurs de faire participer
l'entourage familial du malade à la thérapie. C'est pourquoi, la
« philosophie » médicale privilégiée au
centre est que le patient doit être soigné dans son milieu social.
Les malades internés sont accompagnés de membres de leur famille
pour les soutenir psychologiquement, les aider à suivre les traitements.
C'est dire que la relation thérapeutique dans cet établissement
n'est pas uniquement établie entre le malade et le guérisseur,
elle est élargie à la
famille voire à la communauté d'origine du
patient. Pour montrer l'importance du rôle de la communauté en
médecine traditionnelle, Gollnhoffer et Sillans (1975, p.231) expliquent
que chez les Tsogho, la technique médicale est exercée
"tantôt en privé, tantôt publiquement ou en présence
d'une audience restreinte composée de membres de la famille du patient
et de la communauté villageoise".
En réalité, à la différence du
modèle biomédical propre à la médecine occidentale
qui selon Fontaine "focalise son intervention diagnostique et
thérapeutique sur « l'organe » malade, considérant
l'homme d'abord dans ses composés physiologiques et secondairement dans
ses rapports avec le social et le spirituel, "la tradithérapie à
`'la maison de la feuille'' s'inscrit dans la continuité de la tradition
médicale endogène, par la conception de la personne malade
qu'elle promeut et les représentations de la guérison qu'elle
incorpore. En effet, dans cet hôpital, la personne malade est
conçue comme un tout, elle n'est pas un rein, un foie, un numéro,
mais un être humain qui a des sentiments, qui pense. C'est pourquoi,
pendant la cure les guérisseurs prêtent une attention
particulière au respect de la dignité du patient. Il n'est pas
question pour eux d'exprimer de la pitié ou de la répugnance
envers les malades.
Notons également la forte présence du spirituel
dans les pratiques thérapeutiques, malgré la valorisation de la
médecine traditionnelle. Sur ce plan, rappelons que les
thérapeutes traditionnels de cette structure, dans leurs
représentations de la guérison, affirment dans leur
majorité que celle-ci est un don de Dieu. C'est pourquoi, les
guérisseurs après avoir donné des médicaments aux
patients, formulent des prières pour eux.
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