CHAPITRE 3 : ROBUSTESSE D'UNE AUTRE REGLE MONETAIRE
SIMPLE : LA
REGLE DE MCCALLUM
Il est question ici de tester la possible pertinence de la
règle de McCallum pour ce qui est de la BEAC. Cette règle qui est
plus ancienne que celle de Taylor, a suscité notre attention car la BEAC
qui est l'institution d'application de cette recherche, agit aussi directement
sur la quantité de monnaie en circulation dans l'économie
à travers la constitution des réserves obligatoires,
l'encadrement du crédit,... Ainsi, nous montrons dans une
première section la conception théorique de cette règle et
dans une seconde section nous l'appliquons à la BEAC et en tirons les
leçons y afférentes.
Section 1 : CADRE THEORIQUE ET VERIFICATIONS EMPIRIQUES
DE LA REGLE DE McCALLUM POUR D'AUTRES BANQUES CENTRALES
La règle de McCallum, tout comme celle de Taylor, a un
instrument et une cible. Cependant, ses instrument et cible sont
différents de ceux de Taylor. Ceci dans la mesure oüla
règle de Taylor a pour instrument le taux d'intérêt et pour
cibles l'inflation et l'output gap.
Alors que celle de McCallum a pour instrument la base
monétaire et pour cible la production. Dans un premier temps, nous
présentons théoriquement cette règle. Et dans un second
temps, nous présentons quelques résultats de son estimation dans
certains pays.
A. Spécification de la règle de McCallum
Il est question dans un premier temps de spécifier
l'instrument et la cible de la règle de McCallum. Et dans un second
temps, nous nous penchons sur la formulation mathématique de cette
règle en vue de la détermination du facteur de réaction de
la banque centrale.
1. Instrument et cible pour McCallum
McCallum dans sa règle utilise comme instrument la base
monétaire et pour cible la production. Cependant, nous nous
appesantissons sur l'instrument croissance monétaire que nous
présentons dans son rôle de cible.
Selon Svensson (1999, p.636), une cible de croissance
monétaire, vue comme une stratégie pour atteindre la
stabilité des prix en stabilisant l'inflation autour d'une cible
d'inflation donnée, fait face à un choix entre être soit
inefficace et transparente soit être efficace et non transparente. Ainsi,
une cible de croissance monétaire pourrait être un moyen optimal
de réaliser une cible d'inflation, si la croissance monétaire
était le seul prédicteur de l'inflation future. Plus
spécialement, pour que celle-ci soit la cible intermédiaire
idéale, l'instrument de politique monétaire devrait uniquement
affecter le niveau futur des prix via son effet sur la monnaie.
Cependant, la sagesse conventionnelle dominante à
propos du mécanisme de transmission de la politique monétaire
assignerait seulement un rôle mineur aux agrégats
monétaires. La croissance monétaire n'est
généralement pas une cible intermédiaire idéale.
Comme l'a noté Svensson (1997), la cible de croissance
monétaire est en fait une cible de croissance prévue et peut
être établie comme une règle cible. Pour Taylor (1999), une
cible de croissance monétaire implique une fonction de réaction
particulière pour le taux d'intérêt. Nous notons que
très peu d'informations sur l'économie sont utilisées pour
la construction de cette fonction de réaction. L'instrument
dépend seulement des paramètres de la fonction de demande de
monnaie, la cible de croissance monétaire et de l'information
prédisant la demande de monnaie.
Une cible de croissance monétaire peut être
efficace si elle est conditionnelle à l'information de la période
t. un autre argument en faveur des cibles monétaires est que la monnaie
réagit avec un retard plus court à l'instrument que l'inflation ;
elle est par conséquent plus contrôlable.
Dès lors, cette cible peut envoyer des signaux
immédiats au public et au marché sur la position de la politique
monétaire et sur les intentions des policymakers à garder
l'inflation sous contrôle. Ces avantages de cible d'agrégats
monétaires dépendent de la relation forte et reliable entre la
variable objectif (inflation ou revenu nominal) et l'agrégat
ciblé. S'il y a instabilité de la vitesse de circulation, de
sorte que la relation entre l'agrégat monétaire et la variable
objectif soit faible, alors la cible d'agrégat monétaire aura des
difficultés à engendrer les effets escomptés. Cette faible
relation implique que frapper la cible ne produira pas l'effet
désiré sur la variable objectif et ainsi l'agrégat
monétaire ne fournira pas plus longtemps un signal adéquat
à propos de la position de la politique monétaire.
Ainsi, l'agrégat monétaire n'aidera pas à
fixer les anticipations d'inflation et à être un bon guide pour
imposer la responsabilité de la banque centrale. Ce problème avec
les cibles monétaires suggère la raison pour laquelle ceux qui
déterminent les cibles monétaires ne tiennent pas de
manière rigide le rang de celles-ci mais prennent plutôt en compte
des intervalles pour des périodes temporelles plus étendues. Les
deux pays qui ont sérieusement suivi une cible monétaire sont
l'Allemagne et la Suisse.
Le succès de la politique monétaire de ces deux
pays en contrôlant l'inflation par ce biais est la raison pour laquelle
une cible monétaire a encore de forts avocats et est une partie de la
stratégie de la politique officielle de la Banque Centrale
Européenne. Le régime des cibles monétaires de ces deux
pays est bien entendu très loin des règles avec cibles
monétaires de type Friedman dites mécanistes. Les cibles
monétaires adoptées par ces deux pays doivent être vues
comme une méthode permettant de communiquer la stratégie de
politique monétaire qui se focalise sur des considérations de
long terme et sur le contrôle de l'inflation. Les cibles
monétaires ont été plus problématiques en Suisse
qu'en Allemagne ; ceci étant dû aux difficultés de cibler
des agrégats monétaires dans une petite économie ouverte
qui connait également des changements substantiels dans la structure
institutionnelle de son marché monétaire.
De ces deux exemples nous tirons deux leçons. En
premier lieu, un régime de cible peut restreindre l'inflation dans un
plus long terme, même lorsque le régime permet des fautes de
cibles substantielles. En second lieu, la raison pour laquelle une cible
monétaire a été un succès raisonnable dans ces deux
pays, malgré des erreurs de ciblage fréquentes, est que les
objectifs de politique monétaire ont été
clairement établis. Ces éléments clé de
réussite du régime de cible - flexibilité, transparence et
responsabilité - sont des éléments aussi importants dans
les régimes de cible d'inflation.
Il nous reste donc de présenter comment McCallum a
intégré cette cible dans son équation en tant instrument
de la règle qu'il propose aux banques centrales.
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