2.4- Mille neuf cent quatre-vingt-douze et les conventions
de l'après-Rio de Janeiro
La CNUED de Rio de Janeiro a donné un élan
à la conclusion de plusieurs conventions mondiales et régionales
sur l'environnement, ou coïncidé avec leur adoption et a
proclamé des principes pour l'avenir dans la Déclaration de Rio
de Janeiro sur l'environnement et le développement (PNUE, 1992a). Outre
les deux conventions conclues à Rio de Janeiro -- la convention-cadre
concernant les changements climatiques (PNUE, 1992b) et la convention sur la
diversité biologique (PNUE, 1992c) --, de nouvelles
conventions sur l'environnement signées en 1992 réglementent,
entre autres, l'usage des cours d'eau internationaux, ainsi que les effets
transfrontières des accidents industriels. A un niveau régional,
la convention sur la protection et l'utilisation de la zone de la mer Baltique
a été adoptée à Helsinki en 1992 (pour le texte et
l'analyse, Ehlers, 1993), et la convention sur la protection de la mer Noire
contre la pollution à Bucarest, en 1992. A noter également la
déclaration ministérielle d'Odessa de 1993 sur la protection de
la mer Noire, qui préconise une approche préventive et globale,
et la convention de Paris pour la protection du milieu marin de l'Atlantique
Nord-Est de 1992 (Ijlstra et Nollkaemper, 1993).
1-La convention-cadre des Nations Unies concernant les
changements climatiques (CCNUCC)
La CCNUCC, signée à Rio de Janeiro en juin 1992
par quelque 155 Etats, est plus ou moins calquée sur la convention de
Vienne de 1985. Comme son nom l'indique, elle établit un cadre dans
lequel les obligations seront négociées de façon plus
précise par la voie de protocoles détaillés. L'objectif
fondamental de la convention est de: stabiliser les concentrations de gaz
à effet de serre dans l'atmosphère à un niveau qui
empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système
climatique dans un délai suffisant pour que les
écosystèmes puissent s'adapter naturellement aux changements
climatiques, que la production alimentaire ne soit pas menacée et que le
développement économique puisse se poursuivre d'une
manière durable (art. 2).
Aux termes de l'article 4, «toutes les Parties
établissent, mettent à jour périodiquement, publient et
mettent à la disposition de la Conférence des Parties des
inventaires nationaux des émissions anthropiques par leurs sources et de
l'absorption par leurs puits de tous les gaz à effet de serre en
recourant à des méthodes comparables qui seront approuvées
par la Conférence des Parties. Elles établissent, mettent en
oeuvre, publient et mettent régulièrement à jour des
programmes nationaux et régionaux contenant des mesures visant à
atténuer les changements climatiques en tenant compte des
émissions anthropiques par leurs sources et de
l'absorption par leurs puits de tous les gaz à effet de
serre ainsi que des mesures visant à faciliter l'adaptation
appropriée aux changements climatiques».
En outre, les pays développés conviennent d'un
certain nombre d'obligations générales qui seront
spécifiées dans des protocoles plus détaillés. Par
exemple, ils «encouragent et soutiennent par leur coopération la
mise au point de technologies qui permettent de maîtriser, de
réduire ou de prévenir les émissions anthropiques des gaz
à effet de serre». Ils encouragent la gestion rationnelle, la
conservation et le renforcement des puits et réservoirs, notamment la
biomasse, les forêts et les océans de même que les autres
écosystèmes terrestres, côtiers et marins»; ils
«préparent, en coopération, l'adaptation à l'impact
des changements climatiques et conçoivent et mettent au point des plans
appropriés et intégrés pour la gestion des zones
côtières, pour les ressources en eau et l'agriculture, et pour la
protection et la remise en état des zones frappées par les
inondations». Ils «encouragent et soutiennent par leur
coopération l'échange de données scientifiques,
technologiques, socio-économiques et juridiques sur le système
climatique et les changements climatiques ainsi que sur les conséquences
des stratégies de riposte et l'éducation, la formation et la
sensibilisation du public dans le domaine des changements climatiques».
2-La convention sur la diversité
biologique
Les objectifs de la convention sur la diversité
biologique, également adoptée en 1992 à la CNUED de Rio de
Janeiro, sont «la conservation de la diversité biologique,
l'utilisation durable de ses éléments et le partage juste et
équitable des avantages découlant de l'exploitation des
ressources génétiques» (art. 1), (Boyle, 1993). Tout comme
la CCNUCC, cette convention, qui sera complétée par des
protocoles, établit des obligations générales concernant
la conservation et l'exploitation durable des ressources naturelles,
l'identification et la surveillance de la diversité biologique, la
conservation, la recherche et la formation in situ et ex situ, ainsi que
l'éducation et la sensibilisation du public et les études
d'impact sur l'environnement d'activités susceptibles d'affecter la
biodiversité. Il existe aussi des dispositions générales
relatives à l'accès aux ressources génétiques,
ainsi que le transfert de techniques pertinentes, dont les biotechnologies, et
à l'échange d'informations et la coopération sur le plan
international.
3-La réglementation de l'utilisation des cours
d'eau internationaux
La convention d'Helsinki sur la protection et l'utilisation
des cours d'eau transfrontières et des lacs internationaux de 1992 trace
le cadre de la coopération à établir: surveiller et
évaluer ensemble, entreprendre des activités communes de
recherchedéveloppement et échanger des informations entre les
Etats riverains. Elle oblige ces Etats à prévenir, à
maîtriser et à réduire les effets transfrontières
sur ces ressources communes, en particulier en ce qui concerne la pollution de
l'eau, par des techniques appropriées de gestion, y compris l'EIE et la
planification d'urgence, ainsi que par l'adoption de techniques peu polluantes
ou sans déchets et la réduction de la pollution provenant de
sources ponctuelles et diffuses.
4-Les effets transfrontières des accidents
industriels
La convention sur les effets transfrontières des
accidents industriels, également signée à Helsinki en mars
199 porte sur la prévention, la préparation et l'intervention en
cas d'accidents industriels pouvant avoir des effets transfrontières.
Les obligations fondamentales portent sur la coopération et
l'échange d'informations entre les parties. Le dispositif
détaillé de treize annexes prévoit des mécanismes
destinés à définir les activités dangereuses ayant
des effets transfrontières, pour la préparation d'études
d'impact sur l'environnement, y compris de tout effet transfrontière
(conformément à la convention d'Espoo de 1991 mentionnée
ci-dessus) dans la prise de décisions sur l'implantation
d'activités potentiellement dangereuses. Elle prévoit
également la préparation aux situations d'urgence et
l'information du public et des autres parties.
Comme ce bref tour d'horizon devrait l'avoir
démontré, depuis une vingtaine d'années la
communauté internationale a complètement changé d'attitude
à l'égard de la protection et de la gestion de l'environnement.
Cette évolution a consisté notamment en une forte augmentation du
nombre et de la portée des instruments internationaux y relatifs, qui
vont de pair avec l'affirmation de nouveaux principes et la création
d'institutions. Les principes du pollueurpayeur et de précaution
(Churchill et Freestone, 1991; Freestone et Hey, 1996), ainsi que le souci des
droits des générations futures inspirent les conventions
internationales évoquées ci-dessus. Selon les commentateurs, le
rôle du PNUE et la création de secrétariats chargés
de promouvoir et d'assurer le suivi de tous ces traités indiquent que le
droit international de l'environnement, à l'instar de celui des droits
humains, est en train de devenir une nouvelle branche distincte du droit
international (Freestone, 1994). Le souci de l'impact de la pêche en
haute mer sur
l'environnement a entraîné l'adoption, en 1995,
de l'accord des Nations Unies sur le droit de la mer relatif à la
conservation et à la gestion des stocks chevauchants et des stocks de
poissons grands migrateurs. C'est aussi en 1995 que s'est tenue la
Conférence des Nations Unies sur la pollution marine d'origine
tellurique, désormais considérée comme la cause de plus de
70% de la pollution totale des océans. Le commerce mondial, ainsi que la
désertification et le déboisement, dans leurs aspects
environnementaux, devront également être abordés à
l'échelle mondiale, tandis que le progrès continuera à
nous faire prendre conscience de l'impact des activités humaines sur les
écosystèmes de la planète. Le défi que pose ce
droit international de l'environnement naissant n'appelle pas simplement la
conclusion d'un nombre croissant d'instruments, mais aussi le renforcement de
son efficacité. Dans le chapitre qui s'ensuit nous en venons à
notre préoccupation de l'heure à savoir la situation
environnementale en Haïti, et nous intéresserons à un
modèle de contentieux écologique.
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