L'Union Africaine aura joué un rôle
particulièrement marginal dans la gestion de la crise libyenne. En
effet, aucune de ses actions n'a été réellement prise en
compte dans la gestion de ce différend. Pour le Docteur
19 Jean PING est le Président de la Commission
de l'UA
Jean-Jacques KONADJE20, cela s'explique
certainement par le mutisme qu'elle a observé dès le début
des hostilités. En effet, ce n'est que trois semaines après le
début des combats entre les insurgés et les forces fidèles
au Colonel Mouammar Kadhafi que l'organisation continentale a daigné se
prononcer sur la situation libyenne. Sans doute, était-elle
préoccupée par une issue pacifique de la crise
postélectorale ivoirienne. Mais cette réaction pour le moins
« tardive » sur la Libye a jeté un certain discrédit
sur l'organisation panafricaine et remis en cause ses compétences en
matière de gestion de crise.
Le manque de réaction spontanée de l'UA a
d'ailleurs conduit le reste de la communauté internationale, plus
particulièrement les pays occidentaux, l'ONU, l'Union européenne
et la Ligue arabe à prendre des décisions sans qu'elle y soit
associée. Le sommet international à Paris sur la Libye qui s'est
tenu le 19 mars 2011, sans la participation d'aucun leader africain ni d'aucun
représentant de l'Union africaine, en est une parfaite illustration.
Cette réunion décisive sur la Libye qui faisait suite à
l'adoption de la résolution 1973 du Conseil de sécurité
des Nations Unies, a permis à la communauté internationale
d'adopter une position commune sur la crise Libyenne.
Plusieurs rencontres sur ce dossier se sont tenues par la
suite. Mais à aucun moment, l'UA n'a voulu associer sa voix à ces
différentes initiatives. Une fois sortie de son mutisme, l'organisation
régionale s'est encore confinée dans sa position pacifiste et
affirme son opposition à toute action militaire en Libye et met en place
un panel de Chefs d'Etats pour juguler la crise.
20 Jean-Jacques Konadjé est Docteur en Science
Politique, consultant en géopolitique et relations internationales,
expert en maintien de la paix puis spécialiste de la défense et
de la sociologie militaire. Il enseigne la communication à
l'Université de Rouen.
L'Union africaine a adopté une position pour le moins
ambiguë par rapport à la crise libyenne. Beaucoup de
spécialistes justifient cette position de l'UA par le fait que le guide
libyen était à la fois le père fondateur et le plus gros
contributeur de l'Union africaine21.
Mais, même au sein de l'institution, les dissensions
ont commencé par voir le jour. Plusieurs pays se désolidarisent
de la position de l'Union africaine et reconnaissent le Conseil National de
Transition qui ne sera reconnu par l'organisation panafricaine qu'en
août, soit après la prise de Tripoli par les
rebelles22.
Au moment où l'UA menait son action diplomatique,
l'OTAN bombardait sous le couvert de la résolution 1973 du Conseil de
Sécurité. Et c'est cette action de l'alliance qui permettra aux
rebelles, de vaincre le Colonel Khadafi qui sera assassiné le 20 octobre
2011 à Syrte.
Nous avons donc constaté une difficile collaboration
entre l'ONU et l'UA dans la gestion de la crise libyenne où les deux
organisations ont plutôt agit parallèlement, sans une convergence
d'actions.
21 Il finançait à lui seul plus de 15%
du budget de l'UA
22 La Gambie a été le premier pays
à reconnaître le CNT dès le 22 avril 2011 ; suivi du
Sénégal le 18 mai.