2.2 Relations Agriculture-Elevage
Traiter du problème des relations
agriculture-élevage selon Landais et Lhoste (1990), est une
nécessité puisqu'il est évident que l'avenir des
sociétés pastorales africaines dépend directement de
l'évolution de ces relations. Donc, les problèmes y
afférents à celles-ci sont à l'évidence des
problèmes d'avenir. En pratique, selon la
![](Organisation-de-lespace-agropastoral-dun-terroir-sature-pour-une-gestion-durable-des-ressourc18.png)
source, deux types de relations apparaissent
particulièrement importants. Ce sont les relations de concurrence et de
complémentarité économique.
2.2.1 Relation de concurrence
Les relations de concurrence entre l'agriculture et
l'élevage sont relatives à l'allocation des principaux facteurs
de production agricole (la terre, capital et travail). En
général, elles ont une dimension technique importante. Le
principal problème est celui de la concurrence pour l'espace qui se pose
en des termes variés dans les régions sahéliennes et
soudaniennes selon les contextes locaux : aménagements hydrauliques,
développement des surfaces cultivées, implantation de cultures
nouvelles (cultures industrielles), etc. D'une façon
générale, l'évolution de ces contextes conduit à
des restrictions brutales ou progressives de l'espace pastoral, à son
émiettement spatial qui entraîne des difficultés
croissantes pour la circulation des animaux et l'accès aux ressources
fourragères (Landais et Lhoste, 1990). Dans ce sens, Awono et al.,
(2002) soulignent qu'au Nord Cameroun ces vingt dernières
années, l'accroissement des populations s'est accompagné d'une
augmentation importante des cheptels d'élevage et des surfaces
cultivées. La superficie pâturable est passée de 7 à
3,5 millions d'hectares et le cheptel bovin de 160 000 à 750 000
têtes entre 1974 et 1995, doit 96 000 bovins de trait aujourd'hui.
Dans un contexte de saturation foncière comme à
Laïndé karéwa, les relations de concurrence entre
l'agriculture et l'élevage (sur l'espace) conduisent à des
situations de conflits ou de tensions permanentes. Car pour Landais et Lhoste
(1990), la problématique de ces relations en Afrique rejoint souvent
celle des rapports entre agriculteurs et éleveurs, pratiquant sur des
espaces communs ou voisins des activités différentes. Les
conflits agropastoraux identifiés le long des pistes à
bétail dans le terroir d'étude sont des formes très
fidèles de la dégradation des relations entre les principaux
groupes d'acteurs. C'est dans la problématique des conflits
agriculteurséleveurs que plusieurs cas d'intervention en matière
de sécurisation foncière ont été constatés
au Nord Cameroun vers 1985 et 1997. Ces interventions ont été
l'oeuvre des deux opérateurs dont le Comité Diocésain pour
le Développement de Maroua-Mokolo (CDD) et le projet de
Développement Paysannal et Gestion des Terroirs (DPGT). Les
expériences conduites par ces derniers sont respectivement la
formalisation de transactions foncières et les actions de
médiation (Teyssier et al, 2002). Par ces actions de
médiations souligne l'auteur, le DPGT est intervenu sur la :
![](Organisation-de-lespace-agropastoral-dun-terroir-sature-pour-une-gestion-durable-des-ressourc19.png)
> Clarification foncière par des démarcations de
terroirs (Dans la région de Touboro en 1985)
> Régulation des conflits agropastoraux par la
préservation de parcours (en 1997 dans le lamidat de Tchéboa)
> Régulation foncière par anticipation de
conflits et aménagement concerté du territoire (à
Touroua)
Dans le cadre de la deuxième intervention, une action
s'est engagée dès 1997 entre le DPGT et les notables de la
chefferie de Tchéboa (sarkin saanu), arrondissement d'origine
du village de Laïndé Karéwa. Elle devait identifier et
statuer sur l'étendue des hurum (pâturage continu) et sur
les pistes à bétail qu'il fallait préserver pour permettre
le maintien des éleveurs face à la progression des espaces
cultivés par les agriculteurs migrants (Teyssier et al, 2002).
A cet effet, la même source indique que des négociations ont
été menées par une commission composée de
représentants des éleveurs, des villages migrants avoisinants,
d'un animateur du projet et de notables de la chefferie chargés des
questions d'élevage. Les décisions obtenues après
débat ont conduit à une nouvelle réglementation. Ces
dispositions sont matérialisées par un bornage des limites des
hurum selon les trois étapes suivantes:
> le repérage des aires pastorales exploitées
par les éleveurs dans le lamidat de Tchéboa;
> le levé des contours et une représentation
cartographique de ces aires pastorales; > la rédaction d'une charte
mentionnant les droits et devoirs des éleveurs utilisant ces
pâturages et des agriculteurs voisins.
Au final, treize aires pastorales et plusieurs couloirs
à bétail ont été négociés entre 1997
et 2001. Des chartes pour la préservation de ces espaces ont
été rédigées pour servir de
références lors d'arbitrages de conflits par la chefferie
(Teyssier et al, 2002).
Cette vue d'ensemble relate ainsi le contexte de la
création des pistes à bétail dans l'arrondissement de
Tchéboa et donc dans le terroir de Laïndé Karéwa.
Cependant la situation actuelle de la gestion de ces pistes reste à
clarifier.
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