Annexe 8: Le Rwanda pointé du doigt pour les
massacres en RDC. p. 80
Le Rwanda pointé du doigt pour les massacres en
RDC
La version non définitive d'un rapport de l'ONU
obtenue par le Monde détaille une décennie de crimes
contre l'humanité commis en République démocratique du
Congo. Elle met en cause Kigali pour des faits qui, selon les auteurs du
document, pourraient être qualifiés de
«génocide». Ce pourrait être une
première étape vers la fin de l'impunité. Le
Haut--commissariat aux droits de l'homme de l'ONU (HCDH) s'apprête
à publier un rapport sur les exactions commises en République
démocratique du Congo entre 1993 et 2003, révèle le
Monde dans son édition de vendredi, qui s'est procuré
une version provisoire du texte. Le document de 600 pages présente les
conclusions d'une enquête inédite, qui évoque le mot
«génocide» et met en cause la responsabilité du Rwanda.
L'ampleur massive des crimes commis en RDC est connue de longue date. Depuis
1998, 5,4 millions de personnes auraient été tuées,
victimes des multiples conflits dont le pays a été le
théâtre, estime l'ONG International Rescue
Committee. Exécutions, viols de masse, pillages sont le lot
quotidien de ces populations, principalement dans l'est du pays, depuis presque
vingt ans. Le rapport que s'est procuré le Monde se penche sur
la pire décennie, entre 1993 et 2003, quand la République du
Congo devient une victime collatérale du génocide qui se
déroule chez son voisin rwandais. En 1994, l'Armée patriotique
rwandaise (APR), menée par Paul Kagamé, reprend le pays.
Craignant des représailles de la part des Tutsi, plus d'un million de
Hutu fuient le Rwanda et se réfugient de l'autre côté de la
frontière, au Zaïre (future RDC), où ils s'entassent dans de
vastes camps de réfugiés. Ces camps sont alors la cible de raids
menés par l'Alliance des forces démocratiques pour la
libération du Congo (AFDL) de Laurent--Désiré Kabila,
futur président du pays. Une rébellion, rappelle le rapport du
HCDH, «dont les troupes, l'armement et la logistique étaient
fournis par le Rwanda».
Kigali aurait tenté d'étouffer le
rapport. Car le document que s'est fourni le Monde met
très clairement en cause le Rwanda, et notamment son président
Paul Kagamé, dans les exactions menées au Kivu, dans l'est de la
RDC. Le rapport, fruit de plusieurs mois d'auditions menées sur place
par les enquêteurs de l'ONU, fournit de nombreux exemples de «crimes
contre l'humanité» et «crimes de guerre». Ainsi, en
décembre 1996, quand des «éléments de
l'AFDL/APR» ont «tué plusieurs centaines de
réfugiés» dans le village de Mutiko. Ou quand les
mêmes ont «tué près de 310 civils, dont un grand
nombre de femmes et d'enfants» dans le village de Kinigi. Peut--on parler
de génocide? Le HCDH ne tranche pas mais évoque la
possibilité d'une telle qualification : «Les attaques
systématiques et généralisées (contre des Hutu)
révèlent plusieurs éléments accablants qui, s'ils
sont prouvés devant un tribunal compétent, pourraient être
qualifiés de génocide». L'objectif du rapport est
précisément de servir de base à d'éventuels
procès. Dans cette optique, les noms des personnes impliquées ont
été soigneusement consignés dans une base de
données confidentielle. De quoi faire trembler beaucoup de monde,
parfois haut placé. Le Monde révèle ainsi que
depuis plusieurs semaines, Kigali met tout en ouvre pour étouffer ce
rapport. Paul Kagamé aurait même menacé directement le
secrétaire général des Nations unies, Ban Ki--moon,
d'arrêter la participation du Rwanda aux opérations de maintien de
la paix de l'ONU s'il était publié.
Une menace prise au sérieux, le Rwanda étant
notamment l'un des plus gros contributeurs de la mission établie au
Darfour. Selon le Monde, Ban Ki--moon a déjà
commencé à céder du terrain, en mettant en garde contre
l'utilisation du mot «génocide» dans la version finale du
rapport. Ce qui pourrait expliquer la colère inhabituelle de l'ONU
à la publication de cette version provisoire, dont elle affirme que
certains éléments sont «faux». La version
définitive sera publiée «très rapidement»,
promet--on à New York. Reste à savoir si le terme
«génocide» y figurera.
Source :
http://www.lefigaro.fr/international/2010/08/26/01003--
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