La scène alternative de Poitiers( Télécharger le fichier original )par Maxime Vallée Université de Poitiers - UFR Sciences Humaines et Arts - Master 1 Civilisation Histoire et Patrimoine 2011 |
C/ La Fanzinothèque : une ligne directrice immuableL'année 1994 est l'occasion pour la Fanzinothèque de frter ces cinq années d'existence, et pour la presse locale de revenir sur l'histoire de cet établissement hors du commun et d'envisager ses perspectives. Avant tout, il convient tout d'abord de replacer la Fanzinothèque dans un contexte bien particulier. Nous nous trouvons presque au milieu des annees 1990, et comme nous l'avons vu, le mouvement alternatif qui avait connu son essor dans la deuxième moitie des annees 1980 est retourné à l'anonymat. Il n'existe plus du solide réseau que celui-ci avait contribue à construire que quelques bribes, relies par de forts liens affinitaires et militants. Le mouvement rock, qui avait impulse une dynamique puissante dans le fanzinat français et européen semble s'essouffler et la jeunesse qui en était à l'origine commence à s'orienter vers les styles musicaux émergents, nés des technologies numeriques, c'est-à-dire le rap et le hip-hop ainsi que les musiques electroniques. Si l'on ajoute à ce facteur l'arrivée d'internet qui permet aux rédacteurs de fanzines de publier eux-mêmes leurs creations sans passer par la partie edition #177; qui comprend la création de l'objet, avec les moyens du bord (ciseaux, colles etc.) et les photocopies ~ on pourrait penser la Fanzinothèque en danger, à court de fanzines à recolter. Pourtant, il n'en est rien : « le fanzinat se porte bien. »369 Comme l'explique Didier Bourgoin, la structure reçoit toujours une soixantaine de productions par mois, ce qui assure une quantite suffisante de travail au personnel qui gère le petit etablissement. Les premières annees ont permis à la Fanzinothèque de se faire un nom à travers la France et de creer des contacts supplementaires, en plus de ceux qui existaient avant son ouverture. Comme l'explique le directeur, « ce premier quinquennat represente pour les responsables de l'endroit une première phase, celle « de la mise en place, du lancement, ou de la decouverte » »370, et force est de constater que « la reconnaissance est acquise, et pas seulement auprès des inities. »371 Cette première phase dépassée, le public étant familiarisé avec ce lieu insolite qu'est la Fanzinothèque, son personnel a ainsi pu se consacrer à d'autres activites, qui mettent l'accent sur la valeur patrimoniale que représentent les fanzines. Cette deuxième phase pour l'équipe de fanzinothécaires consiste à remplir l'objectif « de referencer, 369 ACM : « Press Book de l'Oreille est Hardie » (septembre 1994-juillet 1995), Centre Presse du 4 novembre 1994. 370 Ibidem. 371 ACM : « Press Book de l'Oreille est Hardie » (septembre 1994-juillet 1995), Centre Presse du 5 novembre 1994. et de recenser toutes les informations contenues dans les fanzines et d'informatiser le tout pour créer une banque de données sur la musique. »372 Comme nous l'avions entrevu dans notre précédente partie concernant la Fanzinothèque, on voit donc que le rôle du lieu ne se limite pas à un lieu de stockage ou de simple communication des productions reçues. En partant du principe que les fanzines ont joué un rôle moteur dans l'autostructuration du mouvement alternatif, on voit que la Fanzinothèque dépasse la perception habituelle qu'on peut se faire de ce type de revues, c'est-à-dire l'objet-même, pour aller au contenu précis de ces dernières et créer un outil donnant accès à des ressources permettant de se documenter sur les acteurs qui ont contribué à faire de la scène alternative un mouvement culturel créatif à plusieurs niveaux (musique mais aussi graphisme, vidéo etc.) de grande envergure. La Fanzinothèque se dote donc en 1994 d'un outil de recherche documentaire et ne se cantonne pas au classement et à la communication des fanzines. Si l'on ajoute à cela la politique de mise en valeur de la presse alternative en tant qu'objet unique, aux codes esthétiques aussi particuliers que multiples qui fait du lieu un véritable musée, et les manifestations organisées par l'équipe a que ce soient des rencontres, des concerts etc. #177; on prend aisément conscience de la vivacité d'une telle structure, qui revêt une utilité culturelle énorme. Particulièrement impliquée dans le milieu musical, comme nous venons de le souligner, la Fanzinothèque développe, en plus des fanzines qu'elle publie ~ Arsenal Sommaire Poitiers, initialement édité par l'AMP, est repris en charge dès 1992 par la Fanzinothèque, et continue d'annoncer toutes les manifestations rock rayonnant autour de Poitiers #177; un espace dédié à la création, ce qui lui permet d'ajouter une corde à son arc, qui en compté déjà beaucoup : le laboratoire de sérigraphie. Cette nouvelle composante de la Fanzinothèque, qui voit le jour en 1994, met réellement l'accent sur les intérIts artistiques défendus par la structure, et s'implique une fois de plus, et de façon différente, dans le milieu musical, encore plus près des artistes eux-mêmes. En effet, l'atelier de sérigraphie « réalise des travaux d'impression, d'édition et de création, comme par exemple des pochettes de disques pour des groupes. »373 La 372 ACM : « Press Book de l'Oreille est Hardie » (septembre 1994-juillet 1995), Centre Presse du 4 novembre 1994. 373 La Fanzinothèque de Poitiers, Le labo, http://www.fanzino.org/serigraphie/labo.html, consulté le 4 juin 2011. )aQ iQRtICqqX41P RQtrITIYIFIFINEGIYHNifiFDIRQ Ge1NINTFtiYitpNEqXIFlle IN'aQF111Ge1 plus en plus dans le monde des arts graphiques et dans le milieu musical. 1 RXNFIYRQN GRQFESX7YRTIFIXeElRIQÜGyrItHIP IQaFplESELEl'eNNRXfflDP IQt GXC mouvement alternatif qui avait permis sa création, la Fanzinothèque de Poitiers continuait son chemin sans être inquiétée et restait active sur différents tableaux. Loin de restée cloisonnée dans le petit local du 185, Faubourg du Pont-Neuf, la structure diversifiait de plus en plus ses activités pour devenir un véritable pôle documentaire, artistique et créatif lié au monde du rock et des arts graphiques. Elle fête donc son cinquième anniversaire sereinement en 1994 et montre une fois de plus 1X11llN E lELTIP eQt GpSINNp NDIRnction initiale, qui était, rappelons-le, de répertorier la petite presse issue des lycées de Poitiers. On a donc pu voir dans cette dernière partie que la scène alternative de Poitiers GeY1Q11ViSlXN ICptprRgqQeEqXIaXSEEaYIQt : alors que le Confort Moderne achève son IQNtItXtiRQQalLNatARQCHANI1GpP ELqXEGeNEIXtIIN NtrXFtXreNESRBIYIQeN SRXr NIiQNpERE dans des dynamiques nationales qui tendent vers un partenariat étroit avec les pouvoirs publics, le label OAF ! et la Fanzinothèque conservent leurs lignes directrices. La fin de la structuration nationale des réseaux indépendants entraine néanmoins la focalisation des relations entre composantes sur des espaces plus locaux. Il est ainsi plaisant de constater que la Fanzinothèque de Poitiers fête ses cinq EQQpIN G'exiNAeQFIESEE XQe1NR1rpe1FRQFIIVOGEQN lEFNalleEGXC&RQfRLWO RGErQe, I réunissant des groupes produits par Weird Records et OAF ! #177; Label, dont Un Dolor.374 Ce dernier chapitre nous a donc montré que la scène alternative de Poitiers avait FRQQX GqN leN SIFP BrN P RiN GIIKEEE XQ IRXrQaQtAP INXrE 2Q ICSX FRQNtFAIIqX'FQ GK jours, le Confort Moderne avait montré les limites que constituait un fonctionnement ItRS EESSX p NXC lIEiGI11IQaKFiqrF GeNESRXYRENESXblIFN,FIXiEIYIHQt SIRIDp GeN problèmes de gestion du centre culturel pour intervenir sur son fonctionnement aGP IQiNt6111[1P IiNEEXNNi NXIENRQSrRjet, EIIIQ GeEl11ntégrer dans un réseau 374 ACM : « 311NNMARN1G11l'2111lle11NtM-ErGiL » (septembre 1994-juillet 1995), Centre Presse du 2 novembre 1994. d'infrastructures culturelles institutionnelles en leur assignant un rôle de service public qui incluait un cahier des charges strict dans le domaine du social et de la culture. Une fois de plus, le Confort Moderne a montré son caractère novateur puisque #177; même si celui-ci est né d'une crise oE les rapports entre l'équipe et ses partenaires se sont tendus #177; son nouveau fonctionnement a servi de modèle aux salles de spectacles de même type : Poitiers fut encore une fois le laboratoire qui a permis à l'État et aux collectivités d'expérimenter sur une échelle plus large une nouvelle forme de gestion de ces espaces culturels, oil ceux-ci auraient plus de prise, de contrôle. Or, c'est finalement ce tournant et ce partenariat étroit avec les pouvoirs publics qui ont de fait mis le Confort Moderne à l'écart de la scène alternative, n'ayant plus l'indépendance qui le caractérisait à ses débuts, et qui lui permettait d'rtre en lien direct avec la scène underground. La scène alternative se morcèle donc, et on peut remarquer que les structures qui subsistent se mettent alors à coopérer plus facilement qu'auparavant ~ oC les réseaux s'étendaient à l'échelle hexagonale #177; tout en gardant une éthique indépendante forte. |
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