Syndicalisme enseignant de l'enseignement superieur et universitaire et pouvoir politique (1999-2008)( Télécharger le fichier original )par Hermes Ndala Université de Kinshasa - licence en science politique et administrative 2007 |
IV.2. Les actions axées sur des ressources du champ politique.Pour le corps enseignant, l'influence sur la direction ou le devenir de la société par la production des conceptions de la société ou de son fonctionnement passe inévitablement par l'accès aux diverses ressources économique, sociale et symbolique, académique, voire politique. La nécessité est de constituer un volume global important des capitaux. Cependant, bien de ces ressources se prêtent à une meilleure conquête par la solidarité corporative, du fait du contexte favorable de leur accessibilité en corps. IV.2.1. Accès au capital économiquePour reconquérir un capital économique minimal ou le maximiser, le corps enseignant de l'UNIKIN a été conduit à recourir à plusieurs partenaires. La première approche fut le recours aux personnalités et autres privés par la création d'une commission de survie des professeurs « chargée de solliciter des dons en nature auprès des hommes de bonne volonté (1992-1993) ». Le non paiement des professeurs les réduisait à l'insignifiance politique que SABAKINU évoquait en termes tranchés « d'inutilité à la société »et « à la mendicité ». (95(*)). Cette approche ne fut pas structurée mais, bien, ponctuelle. Outre ces privés, les bénéficiaires directs de la formation (étudiants) devaient participer au financement de l'Université dans une approche structurelle. Le corps enseignant attendait du moins de la part du gouvernement la fixation du taux de participation financière des étudiants. Il s'agit ici plus essentiellement de contribuer au capital économique du corps enseignant. Le mécanisme structurel est encore effectif jusqu'à ce jour. On peut observer que le peuple étudiant s'offre en Usage coopératif, sous un angle, à l'efficacité d'une politique publique de financement de l'Université, tout en renforçant, sous un angle compétitif, le capital économique du corps enseignant. Par ailleurs, le corps enseignant a envisagé lors de sa table ronde la participation aux actions des entreprises privées ou publiques de l'Université de Kinshasa et la réalisation des projets générateurs des recettes (96(*)). Le tour de force, cependant, demeure dans le financement publique du pouvoir organisateur de L'E.S.U. La réduction infernale des allocations budgétaire à l'éducation ne procède pas d'un manque de ressources étatiques contrairement à ce qui est largement admis dans l'opinion et dans L'E.S.U., qui relève d'ailleurs de la violence symbolique et conditionnement du champ politique. MABI MULUMBA notait que « les dépenses de l'Education se sont maintenu à environ 0,1% du PNB entre 1990 et 1998, alors que la moyenne sub-saharienne s'est chiffrée à 5,0 % du PNB en 1998 » (97(*)) Comment expliquer que la guerre et le remboursement de la dette justifient dans le discours officiel la réduction drastique des dépenses de l'éducation pendant que la vitesse de l'enrichissement des animateurs des institutions politiques franchit la limite du tolérable. Une telle justification relève de la violence symbolique et s'avère efficace face à une population qui a intériorisé la débrouillardise. Et ce, même pour des charges qui relèveraient de l'Etat parce que l'Etat c'est « eux, comme dirait MWAYILA TSHIYEMBE, ces ancêtres et gardiens de la terre d'autre fois ». (98(*)) ; Débrouillardise de survie et mort social d'un Etat, quoique bourreau, que des décennies de souffrance et des discours officiels ont travaillé et inculqué sont favorables à une faible perception d'exigence d'efficacité et d'efficience de la gestion gouvernementale. A cela, se joint, plus précisément, pour le corps enseignant des frustrations à des longues luttes peu fructueuses, entretenu en définitif par un système d'autodestruction fait des principes d'ethnicité et gain immédiat des responsables syndicaux. Il en est résulté un faible niveau de perception des exigences d'engagement collectif après ajustement entre espérances et chances objectives de victoire syndicale. Espérances et chances, du reste, perçues d'une certaine manière. Relevons, au terme des lignes retraçant l'accès au capital économique, quelques revendications et grèves ayant jalonné le parcours de l'APUKIN : Ø La revendication de 1999, portant amélioration de condition de vie et travail Ø Les grèves déclanchés respectivement en 2002, en avril 2003, en novembre 2004 et novembre 2007 portant principalement sur l'amélioration des conditions de travail et l'augmentation salariale. Ø La participation d'une délégation de l'APUKIN en 1999, avec les ministres des finances et de l'éducation nationale dont l'objet fut la finalisation de projet de barème salariale à soumettre au pouvoir politique. Ø L'implication de l'APUKIN dans la fixation et la gestion de frais d'études perçus des étudiants. La littérature sur les actions syndicales différencierait les deux premiers cas ci - haut évoqués comme actions de contestations et les deux dernières comme actions de participation. Cependant relevons, comme NGOMPER, que la participation même n'élimine pas la lutte parce qu'elle s'insère dans un cadre de combat (99(*)) pour l'APUKIN. Bien au delà d'un capital économique, l'augmentation salariale et les meilleures conditions de vie, de travail ont été une voie obligée de la reconquête de la dignité et du prestige du professeur, capital symbolique. Une ressource non la moindre, la perception populaire de la valeur sociale et de l'exemplarité du « professeur » en dépendait. Dès lors, le renforcement de la distinction matériel et, donc, sociale du « professeur » s'imposait comme nécessaire au corps enseignant. Face à l'insignifiance des salaires et des piètres conditions de travail, des voies de substitutions s'imposaient nécessaires. * 95 SABAKINU KIVILU op. cit. , pp. 117 & 122 * 96 Rapport général de la table ronde des professeurs de l'université de Kinshasa du 22 au 27 avril 1991 p.5 * 97 MABI MULUMBA, op. cit . , p. 68 * 98 MWAYILA TSHIYEMBE, « au delà de la transition ; quel Etat et quelle gouvernance », in la transition en République Démocratique du Congo : bilan, enjeux et perspectives (sous la dir.) MWAYILA TSHIYEMBE, paris, harmattan, 2005 p. 126 * 99 NGOMPER ILUNGA, op. cit. |
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