Section 3- Le quantum des dommages garantis
L'assurance responsabilité contractuelle marchandise
transportée a pour objet de garantir les conséquences
pécuniaires d'une responsabilité légalement limitée
par les contrats types ou par la CMR qui fixent, en cas d'avarie, une limite de
responsabilité en fonction du poids de la marchandise ou du nombre de
colis transportés. En cas de sinistre, l'assureur ne fera que reproduire
ce mode de calcul, et ne sera tenu qu'à hauteur de cette somme
même si la victime n'a pas été informée de ces
limites applicables de plein droit en l'absence de convention contraire. Ainsi,
les conditions particulières des polices comportent en
général :
des limitations de garantie par kilo, par colis, par envoi qui
reproduisent les limitations d'indemnité légales. De même
que l'objet de la garantie, son montant est défini dans le contrat par
les parties qui sont libres de le déterminer à leur guise sous
réserve de respecter les garanties minimales prescrites par les textes
règlementaires en matière d'assurance obligatoire. C'est dans ce
sens que l'AU.CTMR. a prévu en matière de calcul
d'indemnité pour avarie ou perte totale ou partielle de la marchandise
que cette évaluation ne peut excéder 5.000 FCFA. Il importe
d'indiquer quelles sont les principales clauses affectant le montant de la
garantie.
En effet, comme toute forme d'assurance, l'assurance de
responsabilité est limitée si le contrat prévoit un
chiffre maximum au delà duquel l'assureur n'accepte pas de garantir la
responsabilité de l'assuré. Elle est illimitée si le
contrat ne prévoit aucun maximum. Si des intérêts
moratoires sont dus par l'assuré en application de l'article5
1153 - 1 du code civil, ceux-ci sont en principe compris dans le plafond de
garantie stipulé au contrat parce qu'ils représentent une dette
de responsabilité de l'assuré envers la victime. Cependant
lorsque l'assureur en est tenu envers la victime exerçant l'action
directe, ils deviennent une dette propre de l'assureur et doivent normalement
s'ajouter au plafond de garantie. Toutefois, jusqu'à une époque
récente la jurisprudence n'attribuait ce régime qu'aux
intérêts courant postérieurement au jugement, seuls ceux-ci
étant jugés « moratoires », les autres qui
n'étaient censés alloués qu'à titre «
compensatoire » demeuraient une dette de l'assuré. Cette
distinction n'est plus de mise depuis que la cour de cassation française
a décidé, dans un arrêt du 28 avril 1998 que « les
intérêts alloués à la victime en application de
l'article 1153 - 1 du code civil pour une période antérieure
à la décision qui fixe l'indemnité ont
nécessairement un caractère moratoire ». Il en
résulte que tous les intérêts quelque soient leur point de
départ, doivent être exclus du plafond de garantie et mis à
la charge de l'assureur de responsabilité dont ils représentent
une dette personnelle. Les clauses de limitation de garantie sont en principe
opposables aux victimes sous réserve de l'existence de dispositions
légales imposant un minimum de garantie. Qu'il s'agisse d'une assurance
limitée ou illimitée, le montant de la garantie peut être
également affecté par des clauses de franchise ou de
découvert obligatoire
5« Dans les obligations qui se bornent au payement d'une
certaine somme, les dommages et intérêts résultant du
retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation
fixée par la loi ; sauf les règles particulières au
commerce et au cautionnement.
Ces dommages et intérêts sont dus sans que le
créancier ne soit tenu de justifier d'aucune perte. Ils ne sont dus que
du jour de la demande, excepté dans les cas où la loi les fait
courir de plein droit ».
visés par l'article6 L. 121 du code des
assurances français. La « franchise » est une clause par
laquelle l'assureur refuse de prendre en charge les petits sinistres,
c'est-à-dire ceux qui se montent à une somme inférieure
à certain chiffre. En cas de « franchise simple », l'assureur
prendra en charge intégralement tous les sinistres dont l'indemnisation
dépasse ce chiffre, mais si la franchise est absolue, la prise en charge
est toujours partielle, elle ne porte que sur la partie de l'indemnité
qui dépasse le montant de la franchise. En principe, les franchises,
comme toute exception antérieure au sinistre, sont opposables à
la victime. Très proche de la franchise, la clause de «
découvert obligatoire » s'en distingue en principe par sa garantie
qui est de stimuler la diligence de l'assuré, en l'intéressant
à la non réalisation du risque, l'assuré restant
obligatoirement son propre assureur pour la portion non garantie. En outre, il
ne peut en principe être assuré grâce à une supprime.
Mais en réalité ni la loi, ni la jurisprudence ne distinguent
réellement les deux termes qui sont employés à peu
près indifféremment.
L'article 31 du code CIMA institue des règles
légales d'évaluation du dommage en ces termes : «
l'indemnité due par l'assureur à l'assuré ne peut pas
dépasser le montant de la valeur de la chose assurée au moment du
sinistre ». De l'énoncé de ce principe résulte des
conséquences. En effet le principe indemnitaire est le principe
fondamental qui régit les assurances de choses contrairement aux
assurances de responsabilité. Ce principe justifie que le
bénéficiaire de l'assurance ne doit en aucun cas s'enrichir en
recevant des indemnités supérieures à son
préjudice. Le fondement de ce principe réside dans l'objet
même du contrat d'assurance qui n'est pas l'enrichissement de
l'assuré mais la réparation d'une perte subie par celui-ci,
l'obligation de l'assureur doit être limitée à cette perte.
Les raisons d'être du principe indemnitaire sont d'ordre public et
d'ordre moral. Il faut éviter que, du fait de l'existence d'un contrat
d'assurance, l'assuré ne soit invité à spéculer sur
le gain que pourrait lui procurer la réalisation du sinistre. Ce
principe a donc pour objet de prévenir le développement du
sinistre volontaire. Si l'évaluation du dommage détermine le
plafond de l'indemnité en assurance de choses, les assurances de
responsabilité sont dominées par le principe de la
réparation intégrale du préjudice subi par la victime.
Cette solution est logique car les assurances de responsabilité par
nature ne comportent pas de valeur assurable. En
6 « L'assurance relative aux biens est un contrat
d'indemnité ; l'indemnité due par l'assureur à
l'assuré ne peut pas dépasser le montant de la valeur de la chose
assurée au moment du sinistre.
Il peut être stipulé que l'assuré reste
obligatoirement son propre assureur pour une somme, ou une quotité
déterminée, ou qu'il supporte une déduction fixée
d'avance sur l'indemnité du sinistre ».
dehors des assurances de dommages où le domaine du
principe indemnitaire est limité aux assurances de choses, ce principe
est également étranger aux assurances de personnes où
domine le principe forfaitaire. L'objet de ces assurances étant la
personne, sa vie ou son intégrité, échappe à toute
évaluation.
Concernant la détermination du plafond
général, la jurisprudence considère que
l'expéditeur n'est pas tenu d'informer le transporteur de la valeur des
marchandises pour lui permettre de s'assurer en conséquence, la clause
limitative de responsabilité lui étant opposable en l'absence
d'une telle déclaration. En revanche, la déclaration de valeur
par l'expéditeur entraîne une aggravation du risque, conduisant le
transporteur à en informer immédiatement son assureur afin
d'obtenir un relèvement de sa garantie.
Il existe des hypothèses dans lesquelles les limites
légales de responsabilité ne sont pas applicables. Cela concerne
les activités logistiques et la garantie de la faute lourde. Les
activités logistiques ne sont pas toutes des opérations de
transport. Il en est ainsi de déménageur dont les limites de
responsabilité sont purement conventionnelles, ce qui conduisait le
client à les négocier et à les accepter lors de la
conclusion du contrat même si sur le plan de la règlementation
administrative le déménagement est rattaché au contrat de
louage d'ouvrage et le contrat de transport en fonction de l'importance
respective du déplacement et des autres opérations.
De même le loueur de véhicule, le commissionnaire
pour sa faute propre et l'entreposant ne peuvent pas évoquer les limites
légales de responsabilité. Dans ces conditions, l'assureur
transport procédera au règlement des dommages sans pouvoir
opposer les limites de responsabilités, sauf s'il apporte la preuve que
les limites conventionnelles ont été connues et acceptées
par le réclamant au moment de la conclusion du contrat.
S'agissant de la faute lourde, elle se distingue du dol parce
que d'une part, elle ne comporte aucune intention de causer le dommage et parce
que, d'autre part, elle fait perdre au transporteur le bénéfice
des limitations de responsabilité ; ce qui l'oblige à la
réparation intégrale de tous les préjudices
justifiés, y compris lorsque le dommage était
imprévisible. En conséquence l'entreprise de transport doit
essayer d'obtenir de son assurance qu'elle la garantisse intégralement
jusqu'à concurrence du plafond par sinistre prévu au contrat. La
faute lourde se définit comme une erreur grossière ne comportant
aucune intention malveillante. Une telle faute ne peut être exclue de la
garantie parce qu'elle n'est ni formelle, ni limitée. Ainsi même
si une telle clause figure dans le contrat d'assurance transporteur, elle ne
peut être opposée par l'assureur, la cour de cassation ayant par
ailleurs précisé que « la faute lourde n'est pas exclusive
de l'assurance de responsabilité » (Cass 1 ere civ. 5 déc.
2000,
n° 98-13. 296). Toutefois la plus part des contrats
d'assurance transport limitent la portée de la garantie de la faute
lourde en indemnisant l'assuré en fonction des limitations normalement
applicables en l'absence de celle-ci.
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