1-3-1 STRUCTURES ET SYNERGIE DES INSTITUTIONS POLITIQUES
DE LA CITE
La cité athénienne invente une forme
politique sans constituer un corps politique étranger à la
réalité, à laquelle elle est confrontée. Cela se
traduit par la forme démocratique mise en place par Solon
dès 650 : elle comprend, en effet, quatre corps
gouvernementaux distincts, l'Ecclésia, la Boulé, les tribunaux,
(Aréopage et Héliée), et enfin les Archai (Archontes et
stratèges). Chacune de ces institutions fonctionne
indépendamment, et chacune a sa part de responsabilité et un
travail à accomplir, mais aucune ne peut fonctionner sans devoir
solliciter plusieurs institutions, pour pouvoir produire un acte politique. Sur
l'avantage de la pluralité de la prise de décision, Aristote est
encore une fois très clair en signifiant qu'une seule personne, voire
une seule institution ne verra jamais qu'un angle du problème à
l'inverse de plusieurs, dont les angles d'approche sont variés et
multiples :- « Dans une collectivité d'individus en
effet, chacun dispose d'une fraction de vertu et de sagesse pratique, et une
fois réunis en corps, de même qu'ils deviennent en quelque
manière un seul homme pourvu d'une grande quantité de pieds, de
mains et de sens, ils acquièrent aussi la même unité en ce
qui regarde les facultés morales et intellectuelles »*. A cet
effet, la démocratie athénienne, a su donner un nouveau souffle
en donnant à l'homme la capacité de concevoir et le pouvoir de
décider, et au même temps, savoir être capable de se plier
aux ordres des autres. Dans la période démocratique, on remarque
que dans toute décision à prendre, c'est à
l'Ecclésia que revient le droit suprême de décision.
Néanmoins, la Boulé a le droit de provoquer une nouvelle
discussion, lorsque le projet de loi ne lui semble pas bon. Le même
constat est relevé par l'institution de L'Héliée, (la
fonction judicaire), qui vérifiera la constitutionnalité de
chacune des décisions prises par L'Ecclésia. Elle a le droit
d'invalider un projet de loi. En outre, les Archaî sont dotées
d'un pouvoir exécutif, mais elles doivent rendre des comptes à
l'Ecclésia, et leurs places n'étaient accordées que pour
la durée d'un an. On peut, par ailleurs, noter la dynamique
d'échange de compétence exercée par exemple par
l'Héliée. Depuis Éphialtès, le pouvoir judiciaire a
été remis entre les mains du démos, restreignant ainsi la
fonction de l'Aréopage à la juridiction des affaires criminelles
et religieuses. L'Héliée arbitrait donc les litiges et les
sanctions, puis elle est devenue une institution très importante dans le
sens, où le peuple a le pouvoir de décision ; et c'est à
elle que revient la maîtrise de la régulation et le fonctionnement
ordinaire des institutions. Il existe la complémentarité de
compétences, du fait que l'Ecclésia juge les cas, où la
loi est imprécise pour décider sur un cas particulier.
En effet, les Archai instruisent certains
procès. La Boulé à son tour, a la tâche de
coordonner le travail des trois autres instances, et les décisions de
l'Ecclésia passent par elle, pour les faire appliquer. Par
conséquent, les institutions politiques de la cité fonctionnent
en symbiose les unes par rapport aux autres, favorisant ainsi la dynamique
politique de la cité. A ce propos, on remarque que la compétence
politique dans la démocratie athénienne, n'est pas
réservée à un seul corps de commandement, réduisant
le reste de la collectivité au statut de gouverné, car il
appartient aux citoyens de déterminer le modèle politique, auquel
ils veulent adhérer. C'est la condition même d'une possible vie
démocratique, et c'est un facteur déterminant pour le
développement d'une vie collective. A ce sujet, Platon abonde dans le
même sens dans la République. Ce qu'il l'intéresse
c'est un mode d'être de l'humanité autant que existence
concrète d'une cité, (une démocratie vraie) ; alors
que pour Aristote :-« sans les lois la démocratie est
despotisme »*.
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18 * L'ekkêsia : Assemblée des citoyens dans
la Grèce antique
19 *lagraphê (paranomôn) : le lien à
la cité reste régi par des règles comparables à
celles du temps de Périclès. Ce dernier institua l'action de
graphê para nomôn, une sorte de plainte en illégalité
destinée à empêcher que des malveillances ne nuisent
à la démocratie
20 * Misthos : Le principe du misthos fut
institué au V° siècle par Périclès pour
indemniser et les Bouleutes et les Héliaste. Au IV° siècle
il fut étendu à la présence sur la Pnyx pour les
séances de l'Ekklêsia.
21 *Zugou : Un attelage de boeuf
*Arendt H, dans son ouvrage intitulé, la crise de
la culture
*ARISTOTE dans son livre, Les politiques, III, 11,
128 1b ,3-8
*Ibid, livre IV, chapitre IV, trad. P. Pellegrin, paris,
GF-Flammarion, 1993, p. 294-295
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