La capacité de la femme mariée en matière du travail en droit français et en droit congolais( Télécharger le fichier original )par Yves-Junior MANZANZA LUMINGU Université de Kinshasa - Licence en Droit 2006 |
§2. Les réformes de 1938 et de 1942La loi du 18 février 1938 portant suppression de l'incapacité juridique de la femme mariée a expressément réglementé l'exercice d'une profession non commerciale par celle-ci. Et la loi du 22 septembre 1942 a repris l'essentiel de ces dispositions en les étendant aux professions commerciales. Ces réformes qui sont une réponse aux multiples revendications des femmes apportent quelques innovations. Un grand pas a donc été franchi quant à la promotion des droits des femmes. A. MotivationsEn France, toutes les politiques de l'emploi présentent un dénominateur commun : la lutte contre les discriminations. Certes, le législateur français a tenu à se conformer aux principes fondamentaux qui régissent le peuple français et à libérer la femme mariée du marasme juridique qui la maintenait dans une situation d'infériorité. En effet, sous l'impulsion des idées nouvelles et des batailles évoquées plus haut, il était indispensable d'alléger le fardeau qui continuait à peser sur la femme mariée. Par ailleurs, ces réformes se justifiaient également d'une part par la nécessité de susciter l'esprit d'initiative chez la femme, fut-elle mariée, et d'autre part par le souci de ne pas évincer les époux qui continuèrent à bénéficier d'un droit de veto. Ces deux textes apportèrent ainsi quelques innovations qui méritent d'être mises en exergue. B. InnovationsLes lois de 1938 et de 1942 ont fini par reconnaître à la femme mariée la capacité d'agir seule, sans l'autorisation de son mari. Il y eut à titre d'exemple suppression de l'exigence d'une autorisation écrite du mari pour que la femme mariée puisse ouvrir un compte en banque : la loi prévoyait simplement que, si la femme utilisait un compte dans un sens contraire aux intérêts de la famille, le mari pourrait s'y opposer, en allant en justice. Et le raisonnement était le même en matière d'accès à l'emploi. Que firent alors les employeurs ? L'autorisation maritale que devait fournir la femme mariée avant l'embauche fut supprimée et remplacée par un formulaire de non opposition du mari. Ces réformes ne firent pas un pas pour rien ; car de nombreuses femmes obtinrent des tribunaux la condamnation de l'autorisation maritale, pratique jugée contraire à l'esprit de nouvelles lois. Finalement, l'exercice de la capacité juridique de la femme mariée devint possible (40(*)). Que retenir en clair ? La femme mariée pouvait librement conclure un contrat de travail. Cependant son mari pouvait également faire opposition à l'exercice par la femme d'une profession séparée. Le juge était éventuellement appelé à apprécier si cette opposition était justifiée par l'intérêt de la famille. L'idée directrice était que si la femme mariée a recouvré sa capacité, l'exercice par elle d'une prestation de travail ne saurait toutefois demeurer indifférente au mari qui conserve la qualité de chef de foyer et peut estimer que la femme ne remplira plus effectivement de ce fait ses obligations familiales. Le mari bénéficie donc du droit d'opposition ou d'une sorte de veto auprès de l'employeur ; la femme pouvant être autorisée par la justice à passer outre en cas de refus abusif. En termes plus explicites, nous pouvons rappeler que les réformes de 1938 et de 1942 avaient institué un régime de liberté d'exercice du travail par la femme mariée, mais tout en prenant les précautions d'assortir ce droit d'une clause de non opposition maritale. Néanmoins, il existait une controverse sur la portée exacte de l'ancien article 223 du code civil français qui déclarait nuls à l'égard du mari les engagements professionnels de la femme pris malgré l'opposition de son mari (41(*)). Cette difficulté a heureusement été balayée par la loi du 13 juillet 1965 qui a modifié les régimes matrimoniaux et dont il sera question dans le point qui suit. * 40 http// : www.pereenfant.ifrance.com * 41 LANGLOIS, P., Droit du travail, 6ème éd., Paris, Sirey, 1987, p. 72 |
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