5.1.3 : Les facteurs
liés à la population
· Profil sociodémographique
L'entretien avec la population a permis de recueillir leurs
caractéristiques sociodémographiques qui peuvent avoir une
influence sur la survenue des IST ou constituer des entraves dans la lutte
contre les IST.
ü La distance
La distance médiane que doivent parcourir les
enquêtés pour se rendre à la FS la plus proche est de 1km
avec un minimum de 0 km et un maximum de 20 km. En d'autres termes, 50% des
enquêtés parcourent 1 km au plus pour se rendre à la FS la
plus proche. De plus, le 3ème quartile après rangement
par ordre croissant de la distribution des enquêtés selon la
distance de leur domicile à la FS la plus proche, correspond à 5
km. Cela signifie que 75% des enquêtés parcourent au plus 5 km
pour se rendre à la FS la plus proche. Cette proportion montre que la
situation est favorable à une bonne utilisation des services de
santé, et cela eu égard à la proportion nationale
d'accessibilité géographique (proportion des populations à
moins de 10 d'une FS) qui était à 72,48% en 2007. Cela
témoigne d'une meilleure accessibilité géographique des
services de santé dans le DSKPL. Une bonne accessibilité
géographique des services de santé devrait contribuer à la
réduction des IST si les populations utilisaient convenablement les
FS.
ü Le sexe
Le sexe féminin représente 53% des
enquêtés tandis que le sexe masculin est à une proportion
de 47%. Le sexe semble avoir une influence sur la survenue des IST. En effet le
test de chi2 est statistiquement significatif au seuil de 5%. Ces
résultats sont corroborés par l'étude de l'INSD [23] qui
avait trouvé que la répartition des IST n'était pas
uniforme entre les deux sexes. Dans notre cas, le sexe féminin pourrait
être un facteur de risque de la survenue des IST. En effet, la
probabilité de faire une IST quand on est de sexe féminin est de
59,5% tandis qu'elle est de 36,6% quand on est de sexe masculin. Il importe
alors d'accorder une attention particulière au sexe féminin dans
les actions de lutte.
ü L'âge
Notre échantillon est constitué majoritairement
d'adultes de 25 à 49 ans (73,4%).
L'âge moyen des enquêtés est de 28 ans avec
un écart type de 8 ans. C'est également l'âge moyen des
personnes qui ont eu des antécédents d'IST. Cette moyenne se
situe dans la tranche adulte. Ces résultats sont proches de ceux d'une
étude prospective menée par F. LY et col [8] qui avaient
trouvé que l'âge moyen des personnes atteintes d'IST était
de 25 ans. Le test de chi2 de la variable « groupe
d'âge » et la variable « survenue d'IST »
n'est pas significatif. Cela signifie que dans cette étude, il n'y a pas
un âge particulier auquel la survenue d'IST serait
particulièrement importante dans cette population de 15 à 49 ans.
Autrement dit, tous les âges dans la tranche d'âge de 15 à
49 ans sont concernés par les IST. L'âge ne semble pas non plus
influencer la connaissance des enquêtés (test statistique non
significatif). De ces résultats, l'âge ne peut être
particulièrement tenu pour responsable dans la survenue des IST. Ces
constats nous permettent de conclure qu'en dehors de ressources vraiment
limitées, il ne serait pas pertinent de limiter les interventions
à des tranches d'âge particulières dans cette population de
15 à 49 ans.
ü Le niveau d'instruction
La scolarisation a touché seulement 38,5% des
enquêtés, tout niveau confondu. Cette proportion est faible
rapport au taux rapporté dans la littérature selon laquelle le
taux de scolarisation est de 43% en 2004 (source : DPEBA Kourittenga,
service statistique). Cette situation témoigne d'une sous scolarisation
de nos populations. Lorsqu'on connaît très bien le rôle que
joue le niveau d'instruction dans les connaissances en matière de
santé, et plus particulièrement en matière d'IST, on peut
conclure que la situation n'est pas favorable à la diminution de
l'incidence des IST. Le niveau d'instruction semble d'ailleurs avoir une
influence sur la connaissance et la survenue des IST. En effet le test de chi
carré est statistiquement significatif pour ces deux variables
(p<0,05). Ce constat est corroboré par l'étude de l'INSD qui
avait trouvé que les connaissances n'étaient pas satisfaisantes
dans 77% des non instruits. Le fait d'être dans une situation de non
instruit est ainsi un facteur de risque de survenue des IST. Le district qui
compte jusqu'à 71,5% de non instruits selon notre enquête, est
donc exposé à l'augmentation de l'incidence des IST.
ü Le statut professionnel
La majeure partie des enquêtés sont des
cultivateurs et des ménagères dans les proportions respectives de
30,7% et de 38 ,3%. Le statut professionnel semble influencer la
connaissance des IST et la survenue de la maladie (test statistique
significatif au seuil de 5%). Le statut de fonctionnaire serait
particulièrement favorable à la connaissance (la
probabilité de connaître bien les IST quand on est de ce groupe
est de 85,7%) et celui du secteur informel serait particulièrement
favorable à la survenue d'IST (la probabilité qu'ils surviennent
une IST quand on est de ce groupe est de 86,4%). Ces informations nous
indiquent que l'établissement des priorités doit tenir compte de
ces facteurs.
· Comportement en cas d'IST.
Les comportements des populations en cas de survenue d'une IST
déterminent la circulation des germes pour une grande part. En effet les
informations sur l'itinéraire thérapeutique des individus
atteints d'IST et celles sur la gestion du partenaire sexuel nous permettent de
se faire une idée sur la propagation de ces infections dans la
communauté. Pour pouvoir apprécier ces deux situations, il nous a
été nécessaire de connaître les
antécédents d'IST des enquêtés.
ü Itinéraire thérapeutique des patients
atteints d'IST
Parmi les personnes ayant eu des antécédents
d'IST, ceux qui ont recherché un traitement auprès d'un agent de
santé sont de 64,7%, tandis que les autres ont eu recours soit à
l'automédication (10%), soit aux tradi-praticiens (11,8%), ou n'ont pas
du tout recherché un traitement (13,5%). Ces résultats sont
corroborés par des études similaires sur la question :
- I.E. KAMBIRE [22] a trouvé que les
enquêtés, en première intention, avaient eu recours, soit
aux FS (71%), soit à l'automédication (11%), soit aux
tradi-praticiens (7%), ou n'ont pas du tout recherché un traitement
(11%).
- Selon l'INSD [23], parmi les enquêtés ayant
déclaré avoir eu une IST et/ou des symptômes
associés aux IST, 60 % se sont adressés à un professionnel
de la santé pour être traité. Dans 30 % des cas, les
enquêtés sont allées dans une boutique ou une pharmacie
pour obtenir des médicaments ou des conseils (automédication).
Enfin, dans 10 % des cas, les enquêtés ont consulté un
guérisseur traditionnel.
- E. ZONGO [25], a trouvé que 90% des mères
avaient recours aux agents de santé en première intention en cas
de conjonctivite purulente de leurs nouveau-nés, et que les recours
à l'automédication et aux tradi-praticiens représentaient
respectivement 9% et 1% des enquêtés.
Ces résultats montrent que, bien que l'utilisation des
services de santé en première intention soit importante, le
recours à autre chose qu'aux agents de santé constitue encore de
nos jours une pratique de soins.
Ces individus qui ont recours à d'autres types de soins
autres que les services de santé sont une source de propagations des IST
étant donné qu'ils traineront toujours avec les germes. Ces
résultats montrent que l'itinéraire thérapeutique des
patients atteints d'IST n'est pas à l'avantage d'une réduction
considérable des IST dans le DSKPL.
ü La notification au partenaire sexuel
Le traitement du partenaire sexuel est une stratégie de
réduction de la circulation des germes dans la communauté. Parmi
les malades ayant consulté un agent de santé, seulement 62,7%
(soit 69 personnes) ont été recommandé le traitement du
partenaire sexuel par le prestataire. Ce qui montre que la PEC des IST
connaît des insuffisances compte tenu d'une proportion importante
d'individus (37,3%) chez qui le traitement du partenaire sexuel n'a pas
été demandé.
Parmi les personnes qui ont bénéficié
d'une recommandation du traitement du partenaire sexuel, 53,6% ont
déclaré avoir porté l'information à leurs
partenaires sexuels. Ce qui sous entend que 46,4% n'ont pas passé
l'information à leur partenaire sexuel. Ce résultat est proche de
ce qu'avait trouvé I.E. KAMBIRE [22]. Il a trouvé dans son
étude que 64% des patients avaient tenu informés leurs
partenaires sexuels de la nécessité de se présenter
à la FS pour leur soin. Comme dans cette étude, notre
étude montre une rétention de l'information de la part du patient
initial et par voie de conséquence, une déperdition importante de
cas dans la communauté. Ce qui n'est pas à l'avantage d'une
diminution de l'incidence.
Parmi les personnes qui ont porté l'information
à leurs partenaires, 24,7% ont affirmé que leurs partenaires
sexuels n'ont pas répondu à l'invitation du prestataire. Ce qui
montre qu'il ya certainement une insuffisance dans l'approche de notification
au partenaire sexuel.
· Comportement sexuel.
Les comportements des populations en matière de
sexualité ne seraient pas en reste dans les facteurs qui expliquent
l'augmentation de l'incidence des IST dans le DSKPL. En effet, les
résultats d'entretien avec les populations sur leurs comportements
sexuels sont éloquents.
ü Le nombre de partenaires sexuels
Une proportion de 30,9% des enquêtés ayant
déclaré avoir déjà eu des rapports sexuels ont
déclaré avoir eu plusieurs partenaires sexuels ces deux
dernières années. Cette proportion est proche de celle
retrouvée dans l'étude menée par F. LY et col [8] qui
avait trouvé que sur le plan comportemental, parmi les individus ayant
eu des antécédents d'IST, 34% avaient plus de 2 partenaires au
moment de l'étude.
Dans une étude sur les comportements sexuels à
risque, C. DIALLO [24] avait également relevé que 42% des
enquêtés ayant une vie sexuelle active avaient plus de deux
partenaires sexuels les 12 derniers mois précédent
l'étude.
La proportion de 30,9% qui est similaire à celles
relevées par ces auteurs nous indique que les comportements sexuels
à risque dans le DSKPL sont aussi importants que dans les zones
où ces études ont été menées, si l'on en
croit aux déclarations des enquêtés. Le multi partenariat
est l'un des facteurs qui n'est pas sans incidence sur la survenue des IST, en
témoigne le test statistique de chi2 significatif au seuil de
5%. Il joue donc un rôle important dans l'augmentation de l'incidence
dans le DSKPL dans la mesure où la proportion des personnes ayant ce
comportement est importante.
ü L'utilisation des préservatifs
Les individus ont la liberté de vivre leur
sexualité. Mais ils se doivent de protéger la santé des
autres, surtout dans ce contexte actuel de pandémie du VIH. Le port des
préservatifs à des occasions douteuses devrait être un
reflexe pour tout citoyen de ce monde. Le résultat que nous avons obtenu
sur l'utilisation des préservatifs sont alarmants si l'on en croit aux
déclarations des enquêtés. En effet, 25% des
enquêtés à partenaire sexuel multiple ont
déclaré ne pas utiliser le préservatif lors des rapports
sexuels à risque. C. DIALLO [24] a trouvé un résultat
différent. Il a trouvé que 90,8% des enquêtés
utilisaient systématiquement des préservatifs comme moyen de
prévention contre les IST/SIDA. Ce qui veut dire que 9,2% n'en
utilisaient pas systématiquement. Cela indique que l'utilisation
systématique du préservatif aux situations à risque est
moins importante dans le DSKPL. A considérer le test statistique de
chi2, l'utilisation du préservatif lors des occasions
à risque réduit la survenue des IST. Les conséquences
qu'expriment les résultats auxquels nous sommes parvenus se
résument à l'augmentation de la tendance des IST.
· Connaissances sur les IST.
Les connaissances des enquêtés sur les IST
pourraient se présenter comme déterminants clés de
l'incidence des IST.
Pour apprécier les connaissances des populations sur
les IST, des questions se rapportant aux items suivants ont été
posées : Les manifestations des IST, les modes de transmission, les
moyens de prévention, l'existence de traitement, les risques des IST.
Certains de ces items ont été traités par
des auteurs comme H. OUEDRAOGO [18] et I.E. KAMBIRE [22]. Celle-ci a
trouvé dans son étude que 40% des individus enquêtés
connaissaient bien les modes de transmission des IST, tandis que dans notre
étude, 82,03% des enquêtés ont une bonne connaissance. Nos
résultats sont corroborés par l'étude menée par
I.E. KAMBIRE qui a trouvé que 81% des individus avaient une bonne
connaissance des modes de transmission. Au regard de ces comparaisons, on peut
conclure que les modes de transmission sont assez bien maîtrisés
par la population du DSKPL. Cela constitue un atout dans la lutte contre les
IST.
Pour ce qui est de la prévention, notre étude
relève qu'une proportion de 70,1% a une connaissance jugée
satisfaisante. I.E. KAMBIRE avait trouvé une proportion de 47% et H.
OUEDRAOGO était parvenue à un résultat de 17%. Les
résultats de ces 2 études sont en déca des nôtres.
Ce qui nous permet de conclure que nos résultats dénotent d'une
assez bonne connaissance des populations en matière de prévention
contre les IST.
D'une manière générale, les
enquêtés devraient arriver à répondre
convenablement à toutes les questions se rapportant aux items
énumérés pour que leur connaissance globale sur les IST
soit jugée bonne. Suivant ce critère, le résultat montre
que seulement 42,45% des enquêtés ont une connaissance
satisfaisante sur les IST. L'INSD a trouvé un résultat
différent du notre. Selon cette étude, 69% des
enquêtés n'avait pas une bonne connaissance sur les IST. Ce qui
correspond à une proportion de 31% des populations qui ont une bonne
connaissance. Ce résultat auquel nous somme parvenu dénote d'une
insuffisance de connaissance sur les IST dans la population du DSKPL, dans la
mesure où nous attendions à une proportion d'au moins 70%. Cette
insuffisance globale est le corolaire des insuffisances de connaissance sur
l'existence de traitement moderne efficace contre les IST (16,4%), sur les
manifestations des IST (65,35%), et sur les conséquences des IST
(63,02%). Cette situation a une incidence négative certaine sur la
lutte contre les IST car pour bien combattre un mal il faut bien la
connaître ; surtout dans le cas des IST où une bonne
connaissance aide à les éviter au maximum.
· Perception des IST.
Au total, 52,1% des enquêtés ont
déclaré ne pas parler assez couramment des IST dans leur
entourage. Les raisons essentielles de ce mutisme sont le tabou pour 22,5% des
cas et la honte pour 75,5% des cas. A propos de la honte, I.E. KAMBIRE [22] a
trouvé que 41% des participants de son étude avaient ressentit la
honte qui les a conduit à éviter les services de santé
pour les soins. Cela confirme l'idée généralement admise
dans nos contrées selon laquelle le sexe constitue un sujet tabou. Cette
situation pourrait constituer un handicap sérieux dans la lutte car,
les populations chez lesquelles ce sentiment de honte ou de tabou est bien
partagé sont peu disposées à participer aux débats
de causerie éducative sur les IST, à plus forte raison être
des relais pour la sensibilisation.
Tous ces résultats relatifs aux populations de 15
à 49 ans font état d'une insuffisance générale de
connaissance dont la fréquence est assez élevée. Ils
montrent également des comportements favorables à la propagation
des IST. Ces résultats nous permettent de confirmer notre
troisième hypothèse de recherche qui dit que les facteurs
liés aux populations expliquent l'augmentation de l'incidence des
IST.
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