5.2.2 Le rôle de
l'entrepreneuriat dans la «troisième voie»
L'entrepreneuriat est sans doute la suite logique de
l'empowerment. Après avoir repris du pouvoir sur sa vie, il
importe que les individus ou communautés acquièrent certaines
notions de gestion permettant la création d'initiatives locales. La
charte de Songhaï décrit son type d'entrepreneuriat comme
suit :
SONGHAÏ offre un cadre dynamique, propice à
l'émergence d'entrepreneurs, qui :
o attire les gens, crée l'envie, suscite
l'intérêt et la confiance de se lancer à son
compte.
o renforce les compétences.
o offre un espace socialement et économiquement
viable pour développer une culture de succès.
o entraîne par exemple, avec les jeunes
entrepreneurs, les populations rurales, dans un grand mouvement, une nouvelle
dynamique de société (Charte Songhaï).
L'entrepreneuriat consiste à se mettre en
relation avec d'autres afin de créer des échanges, des projets et
de la richesse. L'entrepreneur a besoin pour cela de s'établir dans un
réseau et de consolider ses liens par l'excellence de son travail.
5.2.3 Le rôle du
réseau dans la « troisième voie »
Le réseautage est donc le troisième
élément qui suit après l'empowerment et
l'entrepreneuriat. Sans ce dernier maillon de la chaîne, la mise
en place des deux autres est impossible. La création de liens de
solidarité, d'engagement est ce qui permet la structuration d'un milieu
et le développement d'une localité. Cette structure permet aussi
de renforcer la participation de la société civile au
développement de la région ou du pays.
Les réseaux : une autre firme de partenariat.
Participer à un réseau signifie deux choses : enrichir sa
propre expérience par celle des autres membres et apporter sa propre
contribution pour enrichir les autres et pour participer à la
consolidation du réseau. Il s'agit en fait de
« donner » et de « recevoir »
(L'Aigle de Songhaï, développement, 2000, no 40-41).
Les réseaux donnent une force à la
communauté par les liens qu'ils tissent, mais ils permettent aussi de
revendiquer, de faire pression ou de demander des soutiens à des
instances hiérarchiques. Les réseaux verticaux renforcent la
crédibilité, s'ils sont forts et structurés, auprès
des réseaux horizontaux ou hiérarchiques, qui eux, ont des moyens
ou des fonds à faire bénéficier. L'USAID parle de
renforcer les réseaux parce que ces réseaux jouent un rôle
important dans la réussite de l'installation des fermiers.
La promotion des réseaux de fermiers offre
plusieurs avantages et implique une grande partie de la communauté des
fermiers dans la dynamique socio-économique que Songhaï est en
train d'impulser. Ces relations entre les centres de formation Songhaï et
la plus grande partie de la communauté des fermiers font aussi partie de
l'installation et de la prospérité des diplômés
stagiaires. Nombre des avantages des technologies et systèmes mis au
point et enseignés à Songhaï sont mieux
appréciés lorsqu'ils sont exécutés au niveau du
groupe ou de la communauté. Bien que Songhaï ait quelques
expériences dans ce domaine, le renforcement de sa capacité
d'expansion sous forme de personnel, formation, et équipement
s'avère nécessaire pour mettre en application l'expérience
et l'étendre à tous les trois centres (Porto-Novo, Zou et
Borgou). La formation à court terme est également une
activité essentielle dans l'appui à l'expansion et au
réseau des fermiers. La formation à court terme sera poursuivie
au Centre Songhaï de Porto-Novo et fera partie du programme des deux
centres du Zou et du Borgou (USAID, 1996).
Le projet Songhaï s'est construit dans la
communauté et à travers elle. Il ne peut survivre sans son appui
et son dynamisme. Le projet est là pour donner une direction, mais aussi
pour questionner cette direction. Il promeut l'innovation et les initiatives
dans le mouvement avec l'absorption sélective afin que la voie du
développement emprunté, soit celle que les gens ont choisie. Le
dernier numéro de l'Aigle de Songhaï paru lors de notre voyage,
faisait le point sur son évolution et se questionnait sur la direction
et sur les aboutissants du projet, qui se transforme et se structure de plus en
plus, tout en se décentralisant.
On peut donc encore reposer la question de savoir
où en sommes-nous arrivés et où allons-nous ? Aussi,
constatons-nous avec une certaine fierté que c'est l'éditorial du
5ème numéro de l'Aigle de Songhaï qui lance le 3ème
cycle de l'évolution de Songhaï (Innovation communautaire
-communication - commercialisation) tout en consacrant l'emprise
désormais visible à l'oeil nu de l'expansion des activités
en aval du secteur primaire (l'agro-industrie, la restauration et ses services
annexes, la télécommunication,... qui représentent
à eux seuls plus de 70 % du chiffre d'affaires global de
Songhaï). On peut donc proclamer le règne des prestations de
services. Mais la leçon la plus significative qu'il convient de tirer
est que le profil actuel de « l'économie de
Songhaï » atteste que la faisabilité de la
compétitivité de notre continent passe par le
développement de notre savoir-faire en matière de valorisation de
notre important héritage environnemental et culturel (L'Aigle de
Songhaï, éditorial, 2003, no50).
Songhaï tend vers l'autonomie et c'est à travers
cette vision du développement que nous nommerons la
« troisième voie » (puisqu'elle représente
une voie originale, ni tout à fait le modèle de solidarité
internationale, ni tout à fait le modèle de coopération
internationale et qui sait s'adapter aux approches sectorielles du
modèle libéral dominant) qu'il se dirige vers cet objectif. Les
bailleurs de fonds ont un rôle moins primordial aujourd'hui, pour
Songhaï, car l'ensemble des infrastructures a été mis en
place et l'expansion du Centre vers les « services » permet
en grande partie l'autofinancement. Le Centre privilégie des
partenariats techniques afin d'absorber des connaissances sélectives et
de permettre un développement durable dans le temps et
intégré sur le territoire. L'autonomie de plus en plus grande de
Songhaï transforme aussi le rapport avec le Nord et avec les bailleurs de
fonds internationaux. Il le rend plus égalitaire, dans une perspective
d'échange de savoir-faire, de soutien aux innovations et aux besoins des
populations plutôt que dans une perspective d'imposition de programmes
préfabriqués au Nord. Cette façon de faire de Songhaï
laisse entrevoir une nouvelle dynamique dans l'établissement de
partenariat entre le Nord et le Sud.
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