3.4
Problématique
Certains bailleurs de fonds ont critiqué Songhaï
en disant qu'il ne donnait pas de résultats quantifiables après
deux ans et ces mêmes bailleurs de fonds ont imposé une marche
à suivre pour que Songhaï puisse avoir droit au financement.
Songhaï a refusé de se plier à ces règles qui ne lui
convenaient pas, car il voulait rester fidèle à ses valeurs de
« processus de développement humain à long
terme ».
Ce n'est pas que les bailleurs de fonds soient opposés
à l'idée du développement humain, mais c'est
l'évaluation des résultats qui cause problème, car les
résultats du développement humain ne sont pas
immédiatement quantifiables. D'autre part, Songhaï est pris dans un
conflit de visions, non pas seulement avec les bailleurs de fonds, mais aussi
avec certains de ses participants et la population locale.
3.4.1 La capacité
entrepreneuriale chez Songhaï
Songhaï propose une formation pour « changer
les mentalités » et non une formation qui forme des
gestionnaires de projet. Songhaï veut promouvoir la culture d'entreprise
et former des leaders qui seront capables d'avoir une vision, de la formuler et
de la développer. Cette vision devrait se transformer en mission et
s'intégrer dans le mouvement Songhaï. Enfin, cette mission serait
mise en oeuvre avec l'aide et la participation des autres acteurs du mouvement.
Le leader aurait le devoir d'orchestrer l'ensemble des actions, mais aussi les
valeurs propres à Songhaï. L'économie et l'éthique
sont continuellement mises de l'avant dans le mouvement Songhaï pour
construire une nouvelle société. Pourtant, l'éthique et
les valeurs prônées par Songhaï ne peuvent être
imposées, elles doivent plutôt faire partie de la formation pour
s'intégrer dans les consciences : c'est de cette façon que
Songhaï entend « changer les mentalités ».
Pour cette O.N.G., le « changement de
mentalités » passe par le travail ; Songhaï veut
valoriser le travail et pour cela il donne l'exemple lui-même. Ses
formateurs doivent être productifs, et s'ils y parviennent, ils
reçoivent une prime. La formation est là pour faire
acquérir des connaissances pratiques et des attitudes face au travail.
La démarche de Songhaï n'est pas courante.
Elle a pris racine dans le système de formation. Or en Afrique, quand on
est bon élève, c'est pour devenir ingénieur, un
« spécialiste », pour acquérir un titre et ne
pas travailler, ne pas avoir à produire (Idem, p.80)!
Nzamujo ajoute que beaucoup de consultants ou d'experts en
développement ont adopté la même ligne de pensée
face au travail, mais sans connaître la manière de l'appliquer, ce
qui les rendait souvent moralisateurs. Les valeurs du travail
prônées par Songhaï s'inscrivent dans un tout : la
maintenance des biens et des lieux, le respect de la société et
du bien commun, tout comme la fierté et la dignité de chaque
personne.
L'objectif de Songhaï est donc de former des
leaders-entrepreneurs socio-économiques. Ces hommes et ces femmes
seraient des gestionnaires professionnels, mais aussi des agents de changement
pour leur région tout en étant des formateurs auprès des
jeunes. Bref, des leaders qui feraient émerger le meilleur dans chaque
homme pour un meilleur développement communautaire des régions et
un meilleur bien-être individuel et collectif pour tous. Reprendre du
pouvoir sur sa vie, l'empowerment pour tous, mais un empowerment mis en oeuvre
par le modèle de développement de Songhaï.
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