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La difficile percée d'une modèle alternatif dans les rapports Nord-Sud: Le cas de Songha

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par Sophie Lavigne
Université du Québec à Montréal - Maîtrise 2005
  

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CHAPITRE II

LE BÉNIN DANS LES RAPPORTS NORD-SUD

Le problème du « mal développement » dans les pays du Sud, et plus particulièrement dans les pays du continent africain se pose d'une façon frappante dans le contexte actuel de la mondialisation. Cette mondialisation est souvent synonyme de la dépendance du Sud face aux structures du Nord :

dépendance financière et monétaire, principe d'endettement et de désarticulation ; dépendance industrielle et technologique, principe d'économie et de sous-traitance ; dépendance commerciale, principe de l'échange inégal ; dépendance alimentaire, principe de pénurie et de famine. Ajoutez à toutes ces sujétions l'extraversion et la subordination des élites politiques et économiques à des intérêts transnationaux, et vous avez la raison des inégalités dans le monde d'aujourd'hui (Gélinas, 2000, p.228).

Cette définition de Gélinas est la critique du modèle « dépendantiste » qui est souvent faite au modèle libéral. Dans le cas concret du Bénin, cette perspective est aussi vraie puisque sous le régime socialiste du « tout à l'État », suivi de la démocratie et des ajustements structurels, la précarité sociale et économique s'est aggravée. L'histoire du Bénin nous permettra de mieux comprendre les tenants et les aboutissants du processus de développement de cette région et des modèles qui l'ont façonné.

Dès le 14e siècle, l'ex royaume du Dahomey, qui est aujourd'hui devenu le Bénin, est le principal comptoir de la traite des esclaves et dans les années 1890, le Bénin deviendra une colonie française après que l'armée du roi Béhanzin ait été défaite par la France, et le roi lui-même déporté en Martinique. L'indépendance du Dahomey aura lieu seulement en 1960, et il deviendra la République Populaire du Bénin en 1975. Après une suite de coups d'État, le général Mathieu Kérékou prend le pouvoir de 1972 à 1990 et installe un régime marxiste-léniniste. Ce n'est que dans les années 1990 qu'un régime démocratique voit le jour, à travers une transition pacifique, avec la nomination d'un premier ministre, Nicéphore Soglo. Celui-ci, élu à la tête du pays un an plus tard, gouvernera jusqu'en 1996, année où il perdra les élections face à son prédécesseur et adversaire Mathieu Kérékou. Aujourd'hui encore, Mathieu Kérékou est le président du Bénin pour un dernier mandat qui prendra fin en 2006. Mais voyons de plus près chacune des périodes de l'histoire du Bénin sous un aspect économique et social à partir de la période coloniale.

2.1 Les périodes pré-coloniale et coloniale

Cette période a débuté avec la traite négrière sur les côtes même du Dahomey et a introduit le marché capitaliste en commercialisant des humains ; elle a lancé une économie de traite pour satisfaire les besoins de main d'oeuvre de l'Amérique et des Caraïbes. Hountondji ajoute :

L'impact de ce commerce sur la vie politique, économique et sociale du pays est considérable. L'expansionnisme d'Agadja, roi du Dahomey, qui s'empare du royaume d'Allada en 1724 et peu après, du royaume de Savi et du port de Ouidah, n'a pas d'autre motif, en dernière analyse que la volonté de contrôler directement ce commerce florissant, sans besoin d'intermédiaires (Hountondji, 2000, p.189).

Après l'interdiction du commerce des esclaves par les Britanniques, l'économie dahoméenne se convertit à une économie de transformation d'huile de palme sous le règne du roi Ghézo de 1818 à 1858. Le pouvoir d'État pré-colonial s'est adapté aux conjonctures économiques toujours dans une même logique : celle de substituer un produit à un autre avec l'objectif de rentabilité. C'est dans cette perspective marchande que la colonisation du Bénin et de l'Afrique s'est effectuée.

La colonisation avait pour but ultime l'approvisionnement des industries de la métropole, en l'occurrence Paris, en matières premières agricoles. L'administration coloniale avait élaboré sa politique agricole dans les années 1906 dans la sous- région du Dahomey en créant le Service de l'agriculture et des forêts de la colonie du Dahomey. Ce Service devait mettre en valeur les ressources naturelles du Dahomey de façon à attirer les fermiers européens. Le Service développa des cultures d'exportation comme l'huile de palme, le cacao, le café, le coton et le tabac. Chaque type de culture était identifié à une zone et des techniciens spécialisés étaient affectés à chaque zone. De plus, on forma du personnel « indigène » vers 1913, pour assister les colons fermiers. Les régions ou zones agricoles ne coïncidaient pas avec les régions administratives, ce qui entraîna des conflits entre les administrateurs des régions. Effectivement, les régions administratives ne pouvaient contrôler les « chefs » des régions agricoles, qui traitaient directement avec le Service de l'agriculture et des forêts de la colonie du Dahomey, sans passer par leur autorité, et cela rendait difficile l'administration du territoire. De plus, les colons européens ne sont pas venus en très grand nombre et le Service agricole a dû favoriser les cultures locales des « indigènes » pour approvisionner la métropole. Ce qui ne fut pas un succès puisque l'agriculture indigène était peu performante selon les colonies qui décidaient d'envoyer des « commandants », c'est-à-dire des militaires gestionnaires qui appuieraient les techniciens européens afin d'assurer le bon déroulement du Service dans chaque région. Mongbo nous dira que cette période donnera sa couleur au système agricole jusqu'à nos jours :

En effet, cette option a probablement enclenché la bureaucratisation du service au lieu que soit privilégié le raffermissement de ses bases techniques. Ceci sera confirmé à partir de 1952 lorsque les Sociétés Indigènes de Prévoyance (SIP) qui étaient supposées constituer des mutuelles d'assistance réciproque entre paysans finirent, à l'issue de maintes réformes et acrobaties de l'administration et du pouvoir colonial par se confondre, en 1975 avec les Secteurs de développement rural, entièrement contrôlés par l'État et se situant essentiellement a l'échelle des arrondissements et sous-préfectures (Mongbo, 2000, p.81).

À ce stade, le Service ne servait plus de soutien technique aux paysans, il était devenu une partie intégrante de l'administration en dictant des corvées à tous. Or, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l'Europe manquait de tout et les industries européennes voulaient s'approvisionner en matières premières agricoles. L'administration coloniale avait encouragé les regroupements coopératifs et mutualistes de façon à approvisionner la métropole. Cette même administration, afin de réduire ses charges salariales auprès des colonies et de réponde aux revendications d'autonomie des territoires africains, a facilité, par des moyens techniques et financiers, la mise en place de coopératives agricoles (Mongbo, 2000). Il faut comprendre que la SIP (Société Indigène de Prévoyance) et autres coopératives comme la SOPA (Société de production agricole d'Abomey), UMAS, UMAD (Union des mutuelles agricoles de Savè et de Dassa), rendaient leurs adhésions obligatoires auprès des paysans qui devaient travailler bénévolement dès 1946, sur des champs collectifs de cultures de rentes qui étaient supposées servir à la collectivité, mais qui était souvent envoyées vers la métropole.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote