Conclusion du chapitre I
L'analyse économique souligne la
nécessité de baser les rémunérations sur des
mesures de performance, et donc de faire supporter un risque à
l'employé, afin d'inciter celui- ci à fournir un effort suffisant
[Aubert et Aubert-Monpeyssen, 2005]. Cette idée est conforme à
celle de la théorie des attentes et du modèle principal-agent
parce que ces théories donnent les mécanismes par lesquels les
incitations monétaires sont présumées causer une
augmentation de l'effort des salariés au travail au moment où il
y a une asymétrie d'information au sein de la firme.
En conséquence, la théorie des attentes et la
théorie du principal-agent se concentrent sur la façon de motiver
l'agent (l'employé) pour poursuivre certains objectifs de comportement
[Gerhart et Milkovich, 1992]. Dans ce cas, les incitations monétaires
augmentent le désir d'un individu qui l'incite à faire des
efforts coûteux parce que l'augmentation de l'effort est
présumée aboutir directement à l'accroissement de la
performance prévue et donc au salaire concomitant. Dans certains cas, en
revanche, la théorie du principal-agent est différente de la
théorie des attentes. D'une part, selon Gerhart et Milkovich [1992], la
théorie du principal-agent se concentre plus sur le choix
spécifique dont le système de gouvernement (souvent la
compensation) sera le plus efficace à utiliser, et sur le compromis
risque-récompense. Le dernier signifie que, pour obtenir la
rémunération variable et incitative, les employés doivent
supporter les risques. D'autre part, la théorie du principal- agent
identifie explicitement l'importance de processus de l'échange entre les
deux parties. En effet, le principal conçoit les contrats incitatifs
(les incitations monétaires) pour induire les agents qui ont une
aversion pour le risque et pour l'effort à exercer des niveaux d'effort
plus élevés et pour sélectionner ces agents basés
sur leurs capacités.
Dans le chapitre suivant, nous reviendrons sur la question de
principal-agent. Nous proposerons donc certains contrats incitatifs
fondés sur des données des études empiriques et
expérimentales pour résoudre le problème, même en
cas de la performance des individus mesurable ou non vérifiable.
CHAPITRE II : L'INDIVIDUALISATION DE
LA REMUNERATION
Introduction au chapitre II
« Pour les économistes, l'individualisation de la
rémunération découle naturellement de l'incitation
à l'effort des salariés, et implique, pour être efficace,
que ceux-ci supportent un risque au niveau de leur salaire » [Aubert et
Aubert-Monpeyssen, 2005]. Les formules de rémunération sont
très diverses. Outre celles qui font participer les salariés aux
bénéfices, on peut relever des modalités de
rémunération faisant peser une partie des risques d'entreprise
sur les salariés, ce qui est cohérent avec l'analyse
économique des incitations.
Comme nous avons déjà exposé dans le
chapitre précédent, les économistes considèrent que
le problème que pose la motivation des individus ou des organisations
est un problème « principal-agent ». Nous rappelons que ce
problème consiste au fait que l'agent (l'employé) n'agit pas
toujours dans l'intérêt du principal (son employeur) et ce en
situation d'asymétrie d'information. « La prise en compte des
interactions stratégiques en présence d'asymétrie
d'information a donc permis d'ouvrir la boîte noire que
représentait la firme, celle-ci pouvant dès lors être
conçue comme une organisation »27. Dans ce cadre, les
relations entre les employeurs et les employés sont marquées
à la fois par la détention privée de rentes
informationnelles et par des interactions stratégiques. Ainsi, Aubert et
Aubert-Monpeyssen [2005] suggèrent que pour inciter le salarié
à agir dans l'intérêt de l'employeur, il est indispensable
de rémunérer sa bonne performance, c'est-à-dire de
rémunérer à la performance. L'individualisation des
rémunérations est donc une conséquence logique de cette
analyse.
Alors, l'objectif de ce chapitre est de présenter
certains contrats incitatifs pour résoudre le problème
principal-agent, i.e. pour inciter les agents à maximiser leur effort au
travail. Dans la section 1 du chapitre, nous allons montrer les incitations
monétaires à la performance absolue, i.e. les contrats explicites
portant sur des variables mesurables et observables comme par exemple les
systèmes de rémunération à la performance et de
27 Malgrange, P., Rullière, J.-L. et Villeval,
M.-C. [2004], « L'économie des ressources humaines: pouvoir et
limites des incitations. Aperçu théorique et présentation
générale », Economie & prévision,
n° 164-165, p. 1.
rémunération à l'ancienneté. Mais
la performance des individus n'est pas toujours facilement quantifiable et
vérifiable. Cela pose donc encore des problèmes d'incitation au
sein de la firme. Dans la section 2 du chapitre, nous allons donc aborder les
incitations monétaires avec la performance non vérifiable en
spécifiant d'abord les situations (la production en équipe et la
situation multi-tâche) dans lesquelles la performance des individus est
difficilement mesurable et vérifiable, et ensuite certaines solutions
possibles à ces problèmes seront proposées.
Section 1 : Les incitations monétaires avec la
performance absolue
Idéalement, le problème des incitations à
mettre en place pour amener les agents à coopérer pourrait
être facilement résolu si on pouvait mesurer sans
ambiguïté leurs contributions individuelles [Ménard, 2004].
C'est ce que prédit le principe de rémunération des
facteurs à la productivité marginale. Dans cette section, nous
présentons deux types des incitations monétaires à la
performance absolue : la rémunération à la performance et
le modèle à paiement différé ou la
rémunération à l'ancienneté.
1- La rémunération à la performation
et le problème « principal-agent »
Le salaire variable se caractérise simplement à
attacher la compensation de salarié à la mesure de la performance
basée sur l'output28. Dans certains cas, afin de motiver les
salariés, il existe un lien contractuel explicite entre le salaire et la
mesure de la productivité ou de la performance individuelle [Milgrom et
Roberts, 1997]. La rémunération à la performance, dont le
salaire aux pièces constitue la modalité la plus pure, est sans
doute la méthode la plus connue pour résoudre le problème
« principal-agent », i.e. pour inciter les agents à agir dans
l'intérêt du principal. Selon Stankiewicz [1999], un tel
dispositif n'est convenable que si les résultats du travail (l'output)
peuvent être mesurés avec une objectivité suffisante.
Lazear [1999 ; 2004] suggère qu'il y a deux grands effets liés au
système de la rémunération à la performance sur la
productivité de la firme : l'effet des incitations et l'effet de
sélection.
28 Lazear, E. P. [1995], Personnel Economics,
The MIT Press, Cambridge, p. 13.
1-1- L'effet des incitations
Depuis plusieurs décennies, le recours au salaire
variable s'est largement répandu. « Le recours accru au salaire
variable est généralement associé au souhait de
créer des incitations »29.
Le salaire variable est pratiqué dans de nombreux pays,
en particulier au Japon, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Italie [Lazear,
2004]. Au Japon, le salaire à la performance fut introduit pour des
raisons historiques afin d'accroître le niveau de capital après la
seconde guerre mondiale. Au Royaume-Uni, c'est sous le gouvernement de Margaret
Thatcher que le salaire à la performance a été
expérimenté pour réduire le chômage. En effet,
l'utilisation du salaire à la performance est justifiée par la
théorie macroéconomique selon laquelle les salaires flexibles
permettent d'accroître le niveau de l'emploi en période de
récession.
La justification du salaire à la performance qui vient
le plus souvent à l'esprit est qu'il génère des
incitations pour les travailleurs alors que le salaire au temps
génère une productivité faible. Alors, on qualifie souvent
de dispositif à fort potentiel incitatif le système de salaire
à la performance. Dans ce cas, le salaire à la performance peut
inciter les salariés à faire des efforts au travail et puis le
problème « principal-agent » sera résolu. Pour Lazear
[1986], le problème « principal-agent » est au centre de la
littérature de contrat incitatif. Le principal (l'employeur) veut
induire son agent (l'employé) à se comporter de la manière
qui est avantageuse à l'employeur.
Lazear [1995] suggère que les arrangements optimaux
doivent accomplir deux choses. En premier lieu, ils doivent inciter un
salarié donné à exercer le niveau de l'effort
approprié. En second lieu, ils doivent inciter les bons salariés
à travailler pour la firme. Sous la neutralité de risque,
l'arrangement optimal de paiement est linéaire, ce qui entraine un
niveau de l'effort élevé. Généralement, l'objectif
de la firme est de maximiser le profit mais elle doit payer les salariés
suffisamment afin de les inciter à travailler pour la firme. Le
problème peut être divisé en deux étapes.
- La première étape est l'offre de travail: il
est nécessaire de déterminer quel niveau d'effort ou de nombre
d'heures de travail qu'un salarié fournira pour une certaine structure
de compensation donnée.
29 Lazear, E. P. [2004], « Salaire à la
performance : incitation ou sélection ? », Economie &
prévision, n° 164- 165, p. 17.
- La seconde étape, avec le comportement de l'offre de
travail d'un salarié donné, est que la firme doit choisir la
formule de compensation qui maximise des bénéfices.
Le modèle simple
On considère toujours deux parties, un principal
(l'employeur) et un agent (l'employé) dotés de fonctions de
préférence distinctes. On suppose que le principal détient
des droits sur un actif, dont il espère tirer parti, par exemple en
produisant l'output Q. Pour ce faire, il doit compter sur l'effort e
de l'agent qui est inobservable par le principal. On a donc une relation du
type :
Q = F (e, O), où O est un état de
nature30.
Donc, l'output est déterminé à la fois
par l'effort de l'agent et de l'état de nature dont on suppose qu'il a
une espérance nulle (E (O) = 0). Normaliser la mesure de l'effort de
sorte qu'une unité d'effort produit une unité de l'output.
Alors,
Q = e + O (1)
Le problème du principal est alors de trouver un
contrat capable d'amener l'agent à entreprendre l'action qui va servir
au mieux ses intérêts, ici maximiser Q. La difficulté pour
le principal, qui propose le contrat, est d'anticiper qu'il ne saura
déterminer avec certitude si le résultat observé Q vient
de l'action choisie par l'agent ou de l'état de nature. Il tentera donc
de formuler ex ante un contrat en fixant une règle de
rémunération, minimisant les risques liés à ces
« bruits », de manière à pouvoir coordonner et
contrôler les actions des agents, approchant ainsi de la valeur maximale
de Q. Dans ce qui suit, nous ne traiterons que des incitations
monétaires, c'est-à-dire la contrepartie monétaire que
reçoit l'agent en récompense de son activité. Le principal
possède l'output mais il doit contracter pour le partager avec l'agent
en payant un salaire W contingent à cet output. Par rapport à la
forme du contrat, nous nous restreindrons à un contrat linéaire
W(Q) qui prend la forme suivante :
W(Q) = a + 3Q ou W(Q) = a + 3(e + O) (2)
30 Il s'agit d'indicateurs qui donnent des
informations sur e mais dépendent d'événements
aléatoires qui échappent au contrôle des agents. Prenons
l'exemple de la mesure de la production : cet indicateur variera en fonction
des efforts fournis par l'employé, mais aussi en fonction de facteurs
sur lesquels l'employé n'a aucune prise et qui peuvent affecter la
production.
Où a est une composante fixe et 13 un paramètre
déterminant la proportion du produit Q qui reviendra à
l'agent31. Ces deux paramètres sont choisis par la firme.
Cela est un type de rémunération aux pièces avec un
salaire minimum garanti. La rémunération est donc
constituée d'un montant de base a et d'une quantité qui varie en
fonction d'output observable Q. 13 sert à indiquer l'intensité
des incitations fournies à l'employé. Ainsi, plus 13 est
élevé, plus le contrat est incitatif, mais il va également
imposer plus de risque à l'agent.
L'employeur peut espérer dégager un profit:
Il = Q - W (3)
Dans l'hypothèse où le principal est neutre par
rapport au risque, il cherchera à maximiser son profit, E (Q - W).
? Max E (Q) - (a + 13e) ; E (0) = 0
a, 13
? Max e - (a + 13e) (4)
a, 13
De son côté, l'agent qui accepte le contrat doit
fournir un effort qui a un coût, C(e). Le coût d'effort est souvent
désigné sous l'appellation « désutilité
». Il peut s'agir en effet d'une perte d'utilité (ou
bien-être) due au fait de travailler tard le soir, de ne pas se reposer
longuement durant la journée de travail, d'utiliser ses soirées
et week-ends à se former, de ne pas utiliser les actifs de l'entreprise
pour un bénéfice personnel, etc. [Aubert et AubertMonpeyssen,
2005]. On suppose la fonction de coût convexe, de sort que le coût
marginal de l'effort va croissant : il est plus fatiguant d'accroître son
effort lorsqu'on travaille déjà 50 heures que lorsqu'on travaille
35 heures. Ici, C'(e) et C"(e) sont positifs. Il garantit que la solution
implique les niveaux d'effort finis.
L'agent cherche aussi à maximiser son utilité qui
dépend à la fois de la rémunération qu'il
reçoit mais aussi du coût de l'effort. Son utilité
s'écrit de manière suivante:
U = W - C(e) (5)
Pour inciter le salarié à choisir un niveau
d'effort élevé, il faut satisfaire une contrainte d'incitation
qui spécifie simplement que l'utilité du salarié est plus
importante quand il choisit l'effort élevé.
Max E[a + 13Q]- C(e) (6)
e
Comme l'output Q = e + 0, (6) devient : Max E[a + 13(e + 0)]-
C(e)
e
31 13 est appelé le taux de bonus selon Gibbon [1998].
Avec la condition du premier ordre :
?
?e
[[a + 13e] - C(e)] = 0 ; E (0) = 0
? 13 - C'(e) = 0
? C'(e) = 13 (7)
L'équation (7) est la fonction de l'offre de travail du
salarié que la firme considère comme donné quand elle
maximise des profits en choisissant les paramètres a et 13. Le
salarié fixe le coût marginal d'effort égal à son
gain marginal d'effort. Comme C"(e) > 0 et dans l'hypothèse de
neutralité de risque, l'effort augmente en 13. Les taux de salaire
élevés entrainent plus de l'effort ou d'heures de travail.
Pour déterminer les niveaux de salaires optimaux, il
suffit d'ajouter la contrainte de participation du salarié, qui affirme
que celui-ci doit obtenir une utilité espérée au moins
aussi grande que l'utilité la plus importante qu'il pourrait obtenir
hors de cette relation d'emploi ou que sa désutilité dans cette
relation d'emploi. La contrainte de participation s'écrit comme suit
:
E (W) > C(e)
Comme E (0) = 0, on obtient : a + 13e > C(e) (8)
L'équation (8) nous montre que le salarié doit
gagner assez pour couvrir sa désutilité au niveau
d'équilibre de l'effort. La substitution de (8) dans (4) rapporte : Max
e - C(e)
a, 13
Avec la condition du premier ordre :
?
?13
|
[e - C(e)
|
?e
] = [1 - C'(e)] = 0 (9)?13
|
(
|
?a
?e = 0, la seconde condition est donc superflue)
|
L'équation (9) implique que la firme choisira 13 afin
de provoquer l'efficacité. La firme, dans sa recherche de profit, incite
le salarié à fixer le coût marginal d'effort égal
à sa valeur sociale marginale d'effort. A partir de l'équation
(7) et (9), on obtient: 13 = 1. Après que 13 a été choisi,
le niveau optimum de l'effort est déterminé par l'équation
(7). (8) dicte la taille du a nécessaire pour attirer le salarié
à la firme.
Pour Lazear [1995], le fait que 13 = 1 implique que les
employés avec le salaire aux pièces devraient avoir droit au
bénéfice résiduel entier. Ainsi, ce type de
rémunération est le plus efficient dans ce modèle.
Toutefois, la firme doit « charger » le travailleur pour le
coût
d'utilisation du capital32. Pour cela, il y a deux
solutions, soit f3 est réduit en-dessous de 1, soit a est fixé
à un nombre négatif. Selon Lazear, la réponse est que a =
- (coût de location de capital) et f3 = 1. La raison est que si la firme
réduit f3 en-dessous de 1, il incite le salarié à
réduire son effort au travail. Ainsi, la firme simplement « loue
» le travail au salarié à prix -a et le donne alors le plein
output.
Lazear [1986] reconnait que les salaires aux pièces
linéaires ne sont plus les contrats incitatifs appropriés si les
travailleurs ont de l'aversion au risque. Cette reconnaissance est
expliquée par Malgrange et al. [2004] que la politique optimale de
rémunération de l'employé dépend de son aversion
pour le risque : si l'employé est neutre au risque, les incitations sont
les plus fortes et sa rémunération dépend totalement de la
performance (f3 = 1), celle-ci dépendant complètement de la
variabilité du résultat. En revanche, si l'employé a de
l'aversion pour le risque, alors sa rémunération à la
performance est plus faible (f3 < 1) et celle-ci est d'autant plus faible
que le coût marginal est élevé et que la variabilité
du produit de la relation d'emploi est fort.
Toutefois, l'application la plus directe de l'économie
des ressources humaines est à l'offre des incitations, et l'un des
arrangements incitatifs les plus propres est le travail à la
pièce (f3 = 1). Lorsque l'on paie les individus sur la base de leur
output, leurs incitations sont bien évidemment alignées avec les
objectifs de la firme33.
L'argument de la rémunération à la
performance témoigne du pouvoir des incitations dans la réduction
de l'aléa moral. Ce schéma de rémunération se
révèle par ailleurs suffisamment puissant pour intégrer
d'autres dimensions de la relation d'emploi.
1-2- L'effet de sélection
Le salaire à la performance est aussi un instrument de
sélection des meilleurs salariés par les entreprises [Lazear,
1986; 1999; 2000a; 2000b; 2004]. La question du recrutement est en
général conçue comme un problème de
sélection adverse. Les caractéristiques des candidats à
l'embauche ne peuvent qu'être imparfaitement connues et ceci est à
l'origine de rentes informationnelles détenues par les candidats
opportunistes ou tricheurs. Dans la mesure où
l'hétérogénéité des candidats au recrutement
peut être forte, cela rend d'autant plus étendue la
rédaction du menu de contrats [Malgrange et al., 2004].
32 Lazear, E. P. [1986], « Incentive Contracts
», NBER Working Paper N° 1917, p. 8.
33 Lazear, E. P. [1999], « Personnel Economics:
Past Lessons and Future Directions », NBER Working Paper N° 6957, p.
22.
Alors que la rémunération à la
performance se justifie originellement dans un contexte d'aléa moral,
Lazear montre que ce dispositif incitatif peut être aussi mis en oeuvre
pour organiser le recrutement par un mécanisme de criblage des
employés. Cette capacité de sélection tient au fait que
les meilleurs éléments tendent à préférer le
salaire à la performance dans la mesure où ils savent que leur
performance est plus élevée que celle du reste de la
main-d'oeuvre. Les salariés qui ne peuvent pas produire un niveau
suffisamment élevé de l'output ne travailleront pas pour la firme
qui paye à la performance. Les salaires (ou les salaires horaires) qui
paie sur la base d'une mesure imparfaite d'effort encourage les salariés
de qualité inférieure à venir à la firme [Lazear,
1986]. Par conséquent, les employés de haute qualité
choisissent de travailler aux entreprises qui payent des salaires à la
pièce et ceux de basse qualité choisissent des salaires horaires.
La différence de la qualité à travers des entreprises
pourrait mener à conclure que le mouvement aux contrats incitatifs
basés sur l'output augmente l'output total.
L'illustration
Pour illustrer le double effet de la
rémunération à la performance : l'incitation et la
sélection, nous prenons l'exemple des « chauffeurs de taxi
New-Yorkais » de Lazear [1995 ; 2004].
Il y a beaucoup de manières de payer des chauffeurs de
taxi. Une possibilité est de leur louer le taxi et leur permettre de
garder tout ce qu'ils gagnent pour eux-mêmes après avoir
payé la location. C'est l'arrangement qui s'est juste
avéré optimal. L'histoire des chauffeurs de taxi compte cependant
un certain nombre d'exceptions. Par exemple, une règle de partage
répartissait la valeur du kilométrage au compteur entre les
chauffeurs et l'entreprise. Ainsi, un chauffeur acquittait un droit fixe
restreint, voire nul, à l'entreprise pour la location du taxi, mais il
ne conserve que 50% du produit des courses au compteur. Ce schéma
crée à la fois de mauvaises incitations et une mauvaise
sélection des travailleurs.
Parmi les problèmes les plus évidents est que
puisque l'entreprise ne peut pas surveiller la quantité de conduite
faite, le chauffeur de taxi et le passager peuvent faire une négociation
pour payer seulement 75% de ce que le compteur montrerait et ne pas
déclencher le compteur. Le passager et le chauffeur de taxi sont
monétairement bénéficiaires aux dépens de
l'entreprise, c'est-à-dire que le passager va payer moins et le
chauffeur de taxi va obtenir tout ce qu'il gagne même si ce montant est
inférieur à celui qui est montré par le compteur
(75% par exemple). Ceci prouve qu'il convient de donner un
résiduel complet au chauffeur de taxi pour résoudre ce
problème.
Le second schéma de rémunération
soulève un autre problème d'incitation. Considérons un
chauffeur de taxi qui a travaillé pendant onze heures dans un jour
particulier et il se demande s'il continue encore une heure (i.e.
douzième heure) ou s'il ramène le taxi chez lui pour regarder la
télévision. Il raisonne que s'il conduit le taxi, il peut encore
gagner 10 dollars en une heure. Supposons qu'il évalue son loisir
lié à cette douzième heure de travail à 8 dollars.
C'est le salaire de la réservation du chauffeur. S'il partage le gain au
compteur avec son entreprise, il ne gardera que 5 dollars (= 10 dollars * 50%)
et il décidera donc de rentrer chez lui dans la mesure où cette
somme est inférieur aux 8 dollars nécessaires pour le convaincre
de continuer à travailler. En revanche, s'il garde la totalité
des 10 dollars après avoir loué le taxi pour la journée,
il continuera à travailler encore une heure. Par conséquent,
rémunérer des travailleurs en totalité en fonction de leur
performance les incite à plus d'effort.
En plus des incitations, le mécanisme de
sélection fournit une autre raison importante pour louer le taxi aux
travailleurs et leur permettre de conserver la totalité de la recette
au-delà des coûts de location.
Figure 3 : La sélection des chauffeurs de
taxi
Rémunération
Q - á
RQ
Q* Q
0
- á
En examinant la figure 3, la politique de
rémunération à 100% au-delà de la location est
représentée par la droite qui commence sous l'origine à
-á et a une pente de 1 (taux de bonus = 1). La droite RQ, qui
représente la politique de partage des gains au compteur sans droit de
location du taxi, commence à l'origine et a une pente inférieure
à 1, par exemple 0,5.
Le résultat est la sélection. L'entreprise qui
paye (Q - á) attire les travailleurs les plus productifs, alors que
l'entreprise qui partage les gains kilométriques attire les travailleurs
les moins productifs.
En règle générale, en payant tous les
travailleurs RQ, l'entreprise perd de l'argent sur tous ceux qui produisent
moins que Q* parce que le taxi tout comme la plaque ont une valeur et un
coût. Ainsi, les travailleurs attirés par l'entreprise RQ sont
ceux qui ne sont pas rentables. Par conséquent, le schéma de
rémunération (Q - á) domine. Même en l'absence
d'effet incitatif, il vaudrait mieux pour l'entreprise payer (Q - á), ne
serait-ce que pour attirer les travailleurs de meilleure qualité.
Cette illustration montre que la rémunération
liée aux résultats a une capacité d'attraction pour les
travailleurs les plus habiles et les plus motivés qui peuvent ainsi
améliorer leur revenu.
Outre cette illustration, il y a d'autres évidences
empiriques qui soutiennent que les incitations monétaires (ici le
salaire à la performance) incitent les salariés à offrir
leur effort maximal au travail et donc augmentent leur performance, et aussi
attirent les salariés les plus productifs.
Les évidences empiriques
Dans notre recherche, nous prenons quelques études
empiriques des économistes pour mettre en lumière des effets
positifs de la rémunération à la performance sur l'effort
des salariés. La première évidence empirique que nous
présentons est réalisée par Lazear. Cette étude est
basée sur des données de Safelite Glass Corporation, une grande
entreprise qui installe des pare-brise à travers tous les Etats-Unis. Un
diagramme simple de Lazear illustre des mécanismes et les
prédictions de la théorie. Durant 1994 et 1995, Safelite a
changé son mode de rémunération en passant d'un salaire
horaire à un salaire à la pièce pour les ouvriers. Il
existe des données relatives à la performance à la fois
avant et après le changement, ainsi que des statistiques sur la
performance individuelle. Il est ainsi possible d'isoler les effets incitatifs
et les effets de sélection.
Avant le changement, tous les travailleurs étaient
payés à un salaire horaire. Ce type de salaire est
représenté par la droite horizontale correspondant à W et
il y a aussi un seuil Q0 en dessous duquel la rémunération
devient nulle, i.e. l'individu est licencié (Voir Figure 4). Ainsi,
même si les travailleurs reçoivent un salaire horaire, ils doivent
respecter un certain standard minimum s'ils ne veulent pas perdre leur emploi.
Face à ce mode de rémunération,
un salarié devrait préférer se situer au
point A puisque l'effort est coûteux, que les courbes
d'indifférence ont une pente positive et que le point A lui offre la
meilleure rémunération pour un moindre effort.
Figure 4 : Le schéma de compensation chez Safelite
Rémunération
f3Q -a
B
W 0 - a
A
Q0
Salaire horaire
Output, Q
Q*
Quand le nouveau mode de rémunération (ici, le
salaire à la pièce) est introduit à Safelite, les
travailleurs payés à la pièce sont assurés de ne
pas toucher moins qu'avec l'ancien système. Un paiement à la
pièce avec une pente indiquée par la droite (f3Q - a) offrirait
aux travailleurs une rémunération moindre que celle qu'ils
obtenaient avec une production inférieure au niveau Q*. Ainsi, tous les
travailleurs qui réalisent une production comprise entre Q0 et Q*
obtiennent toujours un gain W. En revanche, un travailleur qui produit plus que
Q* obtiendra le montant correspondant au salaire à la pièce.
L'arrangement utilisé est que : compensation = max [W, f3Q - a],
où W est le salaire garanti, f3 est le taux à la pièce
basé sur le montant des unités de l'output Q et a est une limite
constante pour satisfaire la contrainte de rationalité individuelle.
Dans la figure 4, les travailleurs avec des courbes
d'indifférence en pointillés sont les plus ambitieux : ils sont
plus enclins à échanger l'effort contre le revenu en n'importe
quel point. Ils préféreraient donc le point B plutôt qu'au
point A. Par contre, un salarié avec une courbe d'indifférence
solide préférerait le point A au point B. Donc, le salaire
à la pièce n'aura aucun effet sur les individus avec une courbe
d'indifférence solide mais conduira à accroître le produit
parmi les individus avec des courbes d'indifférence en
pointillés, i.e. les travailleurs plus productifs. Alors, le produit
moyen devrait augmenter. En outre, cette étude
montre que les travailleurs embauchés sous le nouveau
régime sont, en logarithme, 0,24 fois plus productifs que leurs
collègues. L'entreprise donc attire les travailleurs les plus
productifs.
Le principal résultat du changement de mode de la
rémunération est que Safelite a connu une augmentation de sa
productivité d'environ 44%. Cette augmentation est imputable pour
moitié aux incitations (22%) et pour moitié à la
sélection (22%). Donc, l'intérêt du salaire à la
pièce est que ce schéma prend en compte à la fois
l'hétérogénéité et les incitations des
travailleurs.
En résumé, il y a trois implications dans cette
étude34. En premier lieu, l'effort moyen ne diminue pas et
généralement augmente quand l'entreprise passe des salaires
horaires aux salaires à la pièce. Par conséquent, l'output
moyen augmente. C'est l'effet incitatif. En second lieu, les capacités
moyennes de la main-d'oeuvre augmentent parce que les capacités de
l'ouvrier moins qualifié ne changent pas en raison du changement dans
l'arrangement de compensation, mais les capacités de l'ouvrier plus
productif montent. Le changement aux salaires à la pièce a pour
effet d'améliorer la conservation et le recrutement des ouvriers les
plus productifs. C'est l'effet de sélection. En troisième lieu,
la variance de capacité de l'ouvrier et la quantité de l'output
augmente après le passage aux salaires à la pièce.
Dans ce qui suit, nous montrons une autre évidence
empirique qui supporte un effet incitatif d'une rémunération
à la pièce35. Autrement dit, le salaire à la
pièce incite des travailleurs à faire des efforts dans le
travail, et donc la productivité augmente. Cette évidence
statistique, réalisée par Paasch et Shearer [2000], est
tirée du registre du personnel dans une compagnie qui s'occupe de
plantation d'arbres en Colombie-Britannique. Les résultats de cette
étude suggèrent que l'augmentation de la productivité
résultant du passage d'une rémunération fixe à une
rémunération à la pièce soit de 22.6%. Les
résultats confirment la présence d'un effet incitatif,
c'est-à-dire que les ouvriers payés à la pièce sont
plus productifs que ceux avec des salaires fixes.
L'évidence d'une expérience sur le terrain de
Shearer [2004] soutient également l'effet incitatif de système
des salaires à la pièce. Les données de cette
expérience sont utilisées pour estimer le gain dans la
productivité qui est réalisée quand les ouvriers sont
payés aux salaires à la pièce plutôt qu'aux salaires
fixes. L'expérience a été entreprise au sein d'une
compagnie qui s'occupe de plantation d'arbres et fournit des observations
quotidiennes sur la productivité
34 Lazear, E. P. [2000a], « The Future of
Personnel Economics », Economic Journal, vol. 110, n° 467,
p. F621- F622.
35 Cette évidence empirique existe dans
l'article de Paasch, H. J. et Shearer, B. [2000], « Piece Rates, Fixed
Wages, and Incentive Effects: Statistical Evidence from Payroll Records»,
International Economic Review, vol. 41, n°1.
de chaque ouvrier sous les deux systèmes de compensation.
L'analyse sans restriction des données expérimentales estime que
le gain de productivité est de 20%.
Les résultats des études de Lazear [2000b], de
Paash et Shearer [2000], et de Shearer [2004] semblent compatibles avec
l'étude de Gielen et al. [2006] sur un panel de 1166 firmes hollandaises
durant 1995-2001. Le résultat montre que l'introduction de
système de la rémunération à la performance
augmente la productivité du travail de 9%. Cette augmentation provient
partiellement de l'effet incitatif et partiellement de l'effet de
sélection.
En conséquence, l'exemple des chauffeurs de taxi
New-Yorkais et les données des évidences empiriques ci-dessus
confortent à la fois le rôle de la sélection et le
rôle des incitations dans le choix de la rémunération
à la performance. En asymétrie d'information, ce mode de
rémunération a pour effet de signaler la qualité des
individus. La rémunération à la performance a
été donc justifiée comme mécanisme contractuel
efficace pour résoudre le problème « principal-agent »
parce qu'il aligne les préférences des firmes et ceux des
employés.
Outre le système de la rémunération
à la performance, il y a un autre système qui est un
mécanisme d'incitation très efficace, à savoir le
modèle à paiement différé. Analogue à la
rémunération à la performance, les salariés avec le
contrat à paiement différé sont payés sur la base
de leur performance, mais c'est la performance dans le passé, pas la
performance courante. C'est pourquoi la rémunération dans ce
modèle est croissante avec l'ancienneté des salariés.
2- Le modèle à paiement
différé
Le modèle à paiement différé est
une explication de la croissance de la rémunération avec
l'ancienneté. Toutefois, cette assimilation peut porter à
confusion dans le cas français où la rémunération
à l'ancienneté est associée à des augmentations de
salaires systématiques catégorielles sans liens avec la
performance individuelle. Le contrat à paiement différé
est interindividuel et consiste à récompenser a posteriori le
niveau d'effort consenti par des augmentations de salaires
irréversibles36. Ce type de contrat permet de pallier les
inconvénients d'une relation d'emploi marquée par une
asymétrie d'information où le travailleur est susceptible
d'adopter l'attitude du tire-au-flanc.
36 Lemistre, P. [2000b], « Modèle à
paiement différé, effort individuel et évolution des
préférences intertemporelles », La note du LIRHE n°
327, Université de Toulouse I, p. 2.
Selon Lazear [1995], le contrat à paiement
différé permet également à la firme de motiver les
employés qui sont enfermés dans une position particulière
et sont pratiquement certains de rester là sans promotion pour le reste
de leur carrière. Ce contrat doit rendre les augmentations des salaires
futures dépendantes de la performance courante. Par conséquent,
même si le poste du travail de salarié ne change pas, il peut
encore être récompensé sous forme de salaire croissant.
Ce genre d'arrangement incitatif est très semblable
à un salaire à la pièce parce que la performance de
salarié est observée et alors il est compensé sur la base
de cette performance. Cependant, Lazear [1995] indique deux différences
entre ces deux contrats incitatifs.
Premièrement, la période dans laquelle
l'évaluation de la performance est faite est habituellement plus longue
avec le cas de contrat à paiement différé qu'avec le cas
de salaire à la pièce. Quand les travailleurs sont payés
à la pièce, ils reçoivent généralement le
paiement pour le travail effectué pendant un intervalle très
récent comme une période de deux semaines. Par contre, dans le
modèle à paiement différé, l'intervalle est
habituellement beaucoup plus long, une année ou un certain nombre
d'années. Ici, les augmentations de salaires sont données pour la
bonne performance dans le passé.
La deuxième différence principale entre la
compensation différée et les salaires à la pièce
est que le travailleur doit continuer à être employé afin
de retirer les avantages d'une augmentation des salaires pour la bonne
performance. Avec le salaire à la pièce, la performance
passée de travailleur est récompensée sous forme de
paiement immédiat qui n'est pas contingent de l'emploi futur. Avec la
compensation différée, le travailleur doit rester dans la firme
afin de capturer les récompenses pour la bonne performance dans le
passé.
Le principe du modèle à paiement
différé consiste à exiger du travailleur un niveau
d'effort conséquent au cours d'une première période, ce
dernier étant récompensé au cours d'une seconde
période [Lemistre, 2000b]. Autrement dit, le mécanisme dans ce
modèle incite les travailleurs en les payant moins que leur contribution
productive quand ils sont jeunes et plus que leur performance quand ils sont
âgés. Les travailleurs plus âgés sont bien
rémunérés, pas tellement en raison de la performance
supérieure lorsqu'ils sont âgés mais plutôt parce que
leur compensation élevée sert à les motiver pendant les
premières années de leur carrière [Lazear, 1995; 1999;
2000a]. Par conséquent, le salarié qui ne souhaite pas perdre les
bénéfices futurs de l'effort fourni en première
période est incité à ne pas adopter l'attitude de
tire-au-flanc. La rémunération à l'ancienneté
apparaît alors comme un mécanisme incitatif, les salariés
étant récompensés a posteriori des efforts
passés.
Figure 5 : Le paiement différé et la date
optimale de départ en retraite W, Pm
0 t* T temps
W
Pm
Caution
Rent
Par ce graphique, le contrat de long terme, établi sur
le cycle de vie du salarié, se déroule comme suit. Dans la
première période de sa carrière, allant de 0 à t*,
le salarié reçoit moins que ce qu'il produit (le salaire W est
inférieur à la productivité marginale Pm). Il y a le
dépôt progressif d'une caution qui lui sera progressivement
restituée au cours de la seconde période de sa carrière
(de t* à T, où W excède Pm)37.
Le salarié n'a pas intérêt à
tricher de 0 à t* parce que, s'il est licencié, il ne
récupérera pas sa caution. Dans ce cas, les valeurs
actualisées de la rente et de la caution doivent être
égales. Dans un tel système de rémunération, le
salarié est incité à être productif [Gautié,
2002] car cela permet de garantir un comportement honnête et
sérieux des salariés dans le travail [Milgrom et Roberts, 1997].
Selon Dohmen [2004], ce contrat est susceptible non seulement d'inciter les
travailleurs à augmenter leur productivité, mais également
de réduire le turnover dans l'entreprise.
Pour l'employeur, le souci de ne pas compromettre sa
réputation ce qui rendrait difficiles les recrutements à venir,
l'incite à se comporter loyalement de t* à T. Le mécanisme
de paiement différé n'est donc viable que si l'employeur est en
mesure de promettre aux salariés de verser, en fin de carrière,
des salaires supérieurs à leur productivité marginale et
donc supérieurs à ce qu'ils pourraient gagner ailleurs.
D'ailleurs, le modèle à paiement
différé permet également de résoudre le
problème de sélection adverse car si le salarié est moins
productif que prévu, il est probable que la caution
37 Stankiewicz, F. [1999], Economie des ressources
humaines, La Découverte, Paris, Coll. Repère, p. 36.
ne lui sera pas restituée. Le travailleur a donc tout
intérêt à révéler la valeur exacte de sa
productivité s'il veut percevoir la rente de fin de carrière
[Lemistre, 2000b].
Ex post en T, la rémunération perçue est
encore supérieure à la productivité marginale du
salarié dont l'intérêt immédiat est de continuer
à travailler. Mais si le travailleur ne quitte pas son poste en T, le
total des rémunérations perçues dépasse sa
contribution productive pour toute la carrière et le contrat n'est plus
un optimum de premier rang. C'est la raison pour laquelle il est
nécessaire de définir à l'avance les conditions du
départ à la retraite.
Selon Stankiewicz [1999], ce modèle établit les
fondements de pratiques, destinées à fidéliser le
personnel, telles que la cotisation de l'entreprise à des fonds de
pension (Etats- Unis) ou l'octroi d'une prime substantielle lors du
départ en retraite du salarié (Japon).
En conséquence, la rémunération
croissante avec l'ancienneté permet de régler le problème
d'aléa moral (incitation à ne pas tricher et à augmenter
le niveau d'effort au travail) et un problème de sélection
adverse parce que, d'une part, un salaire de départ faible aboutit
à l'auto-sélection des candidats qui ont le projet de rester dans
l'entreprise et, d'autre part, si la productivité observée est
moins importante que prévue au moment de l'embauche, il risque de perdre
sa caution. De plus, ce modèle aboutit à réduire le
turnover du personnel dans la firme.
En conclusion, le système de la
rémunération à la performance et le contrat à
paiement différé sont les incitations monétaires à
la performance absolue qui poussent les travailleurs à faire des efforts
pour augmenter leur productivité au sein de la firme. Ces deux
systèmes peuvent donc régler le problème principal-agent
et fonctionnent à condition que la performance des salariés soit
mesurable.
Bien que les rémunérations basées sur la
performance soient efficaces, au moins dans une certaine mesure, se pose quand
même le problème de la mesure de la performance quand celle-ci
n'est pas facilement observable ou quantifiable. Dans la section suivante, nous
présenterons les situations dans lesquelles la performance individuelle
est difficilement mesurable. Et puis, nous proposerons également
certaines solutions possibles pour ces situations.
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