2. Collections et publics
On l'a dit, le public des discothèque est très
diversifié et animé de motivations parfois très
différentes, et ceci est d'autant plus amplifié par le fait que
les 32 discothèques de Paris -toujours dans un souci de maillage du
territoire- se trouvent chacune dans des lieux différents, drainant un
public qui leur est propre. Afin de percevoir les spécificités
des publics et des collections en fonction de l'implantation
géographique des établissements, j'ai obtenu des rendez-vous avec
plusieurs responsables de discothèques particulièrement
représentatives : Picpus située à
proximité de la porte de la Nation, dans l'est de Paris, zone
résidentielle très bien desservie par le métro et le
RER ; Beaugrenelle, au pied des tours du Front de Seine,
dans le 15ème arrondissement, zone très
résidentielle nettement moins bien desservie par les transports, et
Hergé, dans le nord de Paris, métro Stalingrad,
quartier très populaire. Il est apparu que ces discothèques ont
des politiques documentaires qui diffèrent sensiblement.
Du fait de son implantation dans le quartier le plus
densément peuplé de Paris31(*) Beaugrenelle est une bibliothèque de
proximité qui joue pleinement son rôle de mise à
disposition d'un public local de disques reflétant la production
courante. La politique documentaire est en cela généraliste et
l'important fonds (25 000 phonogrammes) ne reflète aucune
spécificité par genre, ou thématique particulière.
Picpus en revanche joue un rôle plus
spécialisé et complémentaire de la MMP. Située sur
un axe de communication majeur, elle atteint un public parisien et francilien
qui n'hésite pas à se déplacer pour aller chercher un
document qu'il a repéré sur le catalogue collectif. Les
collections demeurent néanmoins encyclopédiques et ne
privilégient pas plus un genre qu'un autre.
Le cas de la discothèque Hergé est lui beaucoup
plus singulier puisque cet établissement, implanté en plein coeur
d'un quartier `difficile', très touché par le chômage,
l'insalubrité et la consommation de stupéfiants (Stalingrad a
longtemps été la plaque tournante du crack à Paris, le
trafic s'effectuant quasiment aux portes de la bibliothèque)32(*), développe une
politique documentaire en prise directe avec la réalité sociale
de son environnement. Comme on peut aisément le constater sur le
diagramme `Fonds et prêts de phonogrammes par genre musical' en
annexe 7, les collections sont nettement plus développées en
`traditions nationales'33(*) (reggae, Afrique, Maghreb), répondant ainsi
à la forte demande du public local, a majorité issu de
l'immigration. A contrario, on s'aperçoit que le classique est
très peu emprunté alors que le fonds est relativement important,
le `désherbage' dans ce genre s'impose. On observe aussi que la
catégorie rock (qui comprend notamment le rap, le Rnb, la soul, le funk
les musiques électroniques) est très sollicitée alors que
le fonds dans ce domaine n'est pas assez fourni. Le discothécaire
s'efforcera donc de combler les déficits dans ces genres. La comparaison
de ce diagramme et celui de la MMP (en annexe 3,page 45) est très
parlante et révèle combien les publics influent la constitution
des collections -il montre également que les publics sont
différents. L'examen du diagramme de la bibliothèque de la Goutte
d'Or (annexe 8, page 50), également située dans un quartier
populaire du 18ème arrondissement montre que les collections
collent au plus près des demandes du public, des efforts constants ayant
été entrepris dans ce sens depuis son ouverture en 1999.
* 31 Le
15ème arrondissement compte 225 500 habitants, soit 11 % de
la population de Paris. (recensement de 1999)
* 32 La situation globale
de cet arrondissement est en nette amélioration depuis ces deux
dernières années.
* 33 Genre également
appelé musiques du monde
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