1- Le réfère est de la
compétence exclusive du juge des réfères
M. Courteault écrit « qu'il n'existe pas
d'autre juge compétent que le juge des référés
statuant dans les limites de sa compétence
normale »(119(*)). Cette argumentation mérite examen,
car la convention d'arbitrage enlève, en principe, toute
compétence aux juridictions de l'État, règle posée
par le code, pour l'arbitrage interne 19, que l'arbitrage international 52, et
par l'article 1458 du N.C.P.C Français. Cette règle devrait
s'imposer également au juge des référés.
MmeRubellin-Devichi dans le même sens,
affirme que « le référé est parfaitement
conciliable avec la convention arbitrale » puisque sa
caractéristique essentielle est de ne faire aucun préjudice au
principal(120(*)) c'est-à-dire de ne jamais entamer
le fond du droit. Pour elle si l'emploi du référé est
souhaitable en pratique il est de plus justifié puisqu'il
n'empiète pas sur celle des arbitres habilités à
connaître le fond du litige. Certaines législations excluent
cependant la possibilité pour les arbitres de prendre des mesures, le
juge des référés est seul compétent tel que par
exemple, le législateur Grec (l'article 685 du code de procédure
civile), l'article 26 du concordat suisse de 1969 reflète la vue
traditionnelle qui consacre la compétence exclusive des juges nationaux
des mesures provisoires mais la réforme de la législation suisse
sur l'arbitrage international a bouleversé totalement la situation par
l'article 183 de la L.D.I.P.
Dans le même sens, M. De Boisséson
considère que les mesures conservatoires ne peuvent
être autorisées que par les juridictions de droit commun.
M.Ouatkrat, dans une analyse synthétique, qui ne se limite pas au seul
droit Français, doute également de la possibilité pour les
arbitres de statuer sur telles mesures. Le juge étatique aurait, selon
l'auteur, compétence exclusive pour connaître de ces mesures
(121(*)).
Certains auteurs ont pensé que l'incompétence
des tribunaux créée par l'accord des parties, devait
s'étendre au référé. En effet, il est certain que
la connaissance du fond a été soustraite par les parties aux
juridictions étatiques, et que le juge des référé
qui préjudicierait au fond, non seulement violerait les limites
légales de sa propre compétence mais également
contreviendrait à la convention d'arbitrage.
2- La compétence du juge des
réfères est d'ordre public
Certains auteurs, se fondant sur une décision de la
1er chambre civile de la cour de cassation du 17 juillet 1972
(122(*)), estiment que la compétence du
juge des référés étant d'ordre public. La
convention des parties est dés lors inapte à écarter
même expressément la compétence du juge de
référés pour organiser une procédure de
référé arbitral. L'argument peut être
considéré comme excessif, ainsi M. Loquin voit mal pourquoi la
compétence du juge des référés dans tous les cas
s'imposer. Si les parties peuvent écarter la compétence des
tribunaux étatiques quant au fond du litige, a fortiori peuvent-elles le
faire pour le provisoire ou le conservatoire. La jurisprudence, dans la grande
majorité des espèces se contente seulement d'affirmer la
compatibilité de la compétence du juge des
référés avec la convention d'arbitrage, mais n'exclut pas
a priori une éventuelle compétence des
arbitres(123(*)).
Plus nuancé, M. Hébraud soutient que seule la
renonciation à toute saisine du juge des référés
est prohibé, car l'on ne peut se priver par avance des garanties
offertes par la procédure des référés
(124(*)). Il en résulte que le
référé arbitral peut être organisé et les
arbitres saisis. Mais dans ce cas, la compétence des
référés coexiste avec celle des arbitres dés lors
que la nécessité d'urgence l'impose.
La plupart des droits étaient réticents et
tendaient à considérer que la prise de telles décisions
est du ressort exclusif du juge étatique et précisément le
juge du lieu où la mesure serait exécutée au motif que ces
questions touchent à l'ordre public. Cette position ne peut
qu'être abandonnés. En effet, la majorité des droits
actuels reconnaît aux arbitres la possibilité de prendre ses
mesures tels que les article 62 et 19 alinéa 4 C.A. Cette opinion a
été démentie pour donner place à un fondement plus
logique à admettre.
* 119 C. Cass.
3e civ., 3 juillet 1979, Rev.arb. 1980, p.80, note P. Courteault
* 120 RUBELLIN- DEVICHI
(J.), op.cit., p. 202, n° 289
* 121 OUATKRAT(PH.),
« L'arbitrage commercial international et les mesures
provisoires », Rev. dr. pr. com. Int.,1988,t.9, n°2, p. 239
et s
* 122 C.Cass.
1er ch. civ., 17 juillet 1972, JCP 1980,éd. G, II, 19389,
note G.Couchez.
* 123 LOQUIN (E.), art.
précité, Fasc. 1034, p.6
* 124 HEBRAUD (P.), obs.
précité, p.353
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