le niveau d'équilibre des réserves internationales: cas de la CEMAC( Télécharger le fichier original )par André Bertrand MINE OKON Institut Sous-Régional de Statistique et d'Economie Appliquée - ingénieur d'application de la statistique 2008 |
INTRODUCTIONDu 16ème au 20ème siècle, la Théorie du commerce international fût marquée par deux grands courants de pensée économique. D'un côté, les protectionnistes et de l'autre, les libre-échangistes. Les protectionnistes prônaient la fermeture des frontières pour éviter l'entrée ou l'envahissement de l'économie des pays. Les échangistes, quant à eux, préconisaient l'échange mutuel entre pays car selon eux, tout pays, qu'il soit petit ou grand gagnerait en effectuant des échanges commerciaux avec d'autres pays. De nos jours, force est de constater que la plupart des pays ont opté pour l'échange avec le reste du monde. La CEMAC, quant à elle, n'est pas restée indifférente à cette théorie. On assiste ainsi à des flux commerciaux et financiers à l'intérieur de la zone et, entre la zone et le reste du monde. A cet effet, les transactions entre les pays membres de la CEMAC et le reste du monde engendrent la détention en monnaie étrangère entre la zone et ses partenaires commerciaux. Il s'ensuit donc une accumulation massive des avoirs extérieurs par la zone. PASCAL SALIN, dans son oeuvre intitulée « Économie Internationale » paru en avril 1974, fait ressortir quatre problèmes liés à la possession des réserves internationales : § Premièrement, quel est le niveau de réserves à détenir ? C'est le problème de l'optimalité des réserves internationales. § Deuxièmement, quelle est l'influence de la stérilisation des réserves ? C'est le problème de l'efficience des réserves. Il s'agit notamment de l'importance des coûts que supporte un pays en détenant des réserves internationales. Il fait ainsi apparaître la notion de coût de détention § Troisièmement, quelle est l'utilité des réserves ? C'est le problème de l'efficacité des réserves. Il s'agit de dire si les réserves dont on dispose pourront pallier aux différents chocs dus à la variation des transactions et par ailleurs couvrir les crises futures. § Quatrièmement, le problème de la rentabilité des réserves. En d'autres termes, quels sont les bénéfices que nous tirerons en plaçant une partie de nos réserves sur des comptes spéciaux. En ce qui concerne le premier point, plusieurs auteurs se sont mobilisés pour répondre à cette problématique. On dénombre au total trois types d'approches utilisées dans l'évaluation du niveau optimal des réserves internationales. A savoir : (i) l'approche par l'analyse des indicateurs d'adéquation des réserves ; (ii) l'approche par les fonctions optimales ou approche bénéfice coût ; (iii) l'approche par la fonction de demande des réserves. Dans le cas spécifique de la CEMAC, le FMI dans son rapport N° 05/3907(*) paru en Novembre 2004 propose une méthode empirique de l'évaluation de l'adéquation des réserves internationales. Cette approche se base sur l'évolution des indicateurs8(*) de l'adéquation, tout en prenant en compte les sources de vulnérabilité des réserves et les dispositions établies entre la CEMAC et le Trésor Français. Dispositions renfermant une garantie de convertibilité de la monnaie de la zone et le maintient du taux de couverture supérieur à 20 %. Il ressort de cette étude, menée par le FMI, qu'une garantie supplémentaire des réserves de près de deux mois d'importation et 100 % de la dette à court terme au delà des plafonds prescrits permet de résister aux impacts des fluctuations des cours pétroliers (principal produit exporté de la zone CEMAC). En d'autres termes, cette approche, recommande d'une part la détermination des plafonds de réserves par une analyse des indicateurs standards, d'autre part, une majoration de trois mois d'importation9(*) des plafonds évalués, soit au total un niveau de réserves permettant de couvrir 6 mois d'importation. En outre, à cause de l'essor pétrolier, les réserves de la CEMAC sont passés de 821 472 millions de FCFA en octobre 2002 à 4 306 141 millions de FCFA en octobre 2006, soit un taux de croissance de près de 424,20 % au cours de cette période. Le taux de couverture10(*) de la monnaie quant à lui n'est pas resté insensible à cette croissance galopante des réserves de la CEMAC. Il est passé de 64,61 % en octobre 2002 à 92,66 % en octobre 2006. Force est de constater que ce taux est largement au dessus du taux minimum statutaire établi entre les pays de la zone franc d'Afrique centrale et le Trésor français le 23 novembre 1972. Face à cette évolution ascendante des réserves, la CEMAC se doit de conserver un volume de réserves nécessaire à son activité économique, d'autant plus que la stérilisation de l'excédent de ses réserves s'accompagne des coûts d'opportunité qu'elle devra supporter. Ainsi, dans notre étude, nous nous proposons d'évaluer le niveau optimum des réserves de la CEMAC. Ce niveau ne doit pas porter préjudice aux grands équilibres macroéconomiques de l'ensemble de la zone. L'objectif principal de la présente étude est d'évaluer le niveau optimum des réserves de la zone CEMAC, niveau qui sera obtenu à l'aide de l'approche basé sur la fonction de demande des réserves. De manière spécifique, il est question : · d'identifier les principales sources de vulnérabilité des réserves internationales de la CEMAC ; · d'identifier les déterminants à long et court terme de la demande des réserves internationales dans le cas de la CEMAC ; · d'évaluer le niveau d'équilibre des réserves internationales de la CEMAC ; · de confronter le niveau actuel des réserves et le niveau optimal des réserves. Pour répondre à la question du niveau optimal des réserves, nous supposerons que : H1 : Les réserves internationales que possèdent la CEMAC sont excessives et au-delà du niveau requis favorable à la croissance des économies des pays membres. En d'autres termes, les réserves actuelles de la zone sont supérieures aux réserves d'équilibre garantissant la croissance économique de la zone. H2 : La fonction de demande des réserves internationales de la CEMAC est très sensible aux variations des cours du pétrole sur le marché mondial. La présente étude est nouvelle et importante pour la zone CEMAC vu son intérêt sur deux aspects : v Sur le plan de la gestion optimale des réserves internationales : La présente étude propose une méthode d'optimisation des réserves internationales à la CEMAC, donnant ainsi la possibilité à cette dernière de pouvoir orienter ses excédents en réserves. En effet, la détermination du niveau optimal de réserves que devrait conserver la CEMAC offre la possibilité à la zone de pouvoir réinjecter l'excédent de réserve dans le système productif soit en effectuant des placements, ou encore en les vendant à un prix qui les rendrait rentables, assurant ainsi l'efficacité de la politique monétaire par le biais du marché financier. v Sur le plan méthodologique : La présente étude propose une méthode d'estimation de l'optimum des réserves à long et à court terme en partant de la situation économique des pays de la zone CEMAC. Elle offre aussi l'opportunité d'un point de vue économique de vérifier les théories économiques dans le cas de la CEMAC. Le travail est présenté en deux grandes parties: La première partie intitulée « MESURE ET TECHNIQUES D'EVALUATION DES RESERVES INTERNATIONALES DANS LE CAS DE LA CEMAC », comporte deux chapitres à savoir : « CONCEPTS ET MESURE DES RESERVES INTERNATIONALES» comme chapitre 1 ; et « APPROCHES DE DETERMINATION DU NIVEAU OPTIMAL DES RESERVES » comme chapitre 2. Nous examinerons dans le premier chapitre, le concept de réserves internationales, les motifs de détention de ces réserves et leur utilité. Nous spécifierons également une évidence dans l'évaluation des réserves dans le cas de la CEMAC. Par ailleurs, dans le second chapitre, nous exposerons les différentes approches rencontrées dans la littérature sur la question qui nous préoccupe. La deuxième partie intitulée « EVALUATION EMPIRIQUE DU NIVEAU D'ÉQUILIBRE DES RESERVES INTERNATIONALES : APPLICATION DE L'APPROCHE PAR LA FONCTION DE DEMANDE DES RESERVES DANS LE CAS DE LA CEMAC », se penche sur l'évaluation empirique du niveau d'équilibre des réserves internationales. Tout comme la première partie, elle comporte deux chapitres à savoir : « ORIGINE DES DONNÉES ET CONDICTIONS D'ADÉQUATION » comme premier chapitre ; et « ÉVALUATION DU NIVEAU D'ÉQUILIBRE DES RESERVES INTERNATIONALES » qui constitue le second chapitre. Nous nous limiterons uniquement à la mise sur pied d'un modèle axé sur l'approche par la fonction de demande des réserves. Le modèle ainsi développé nous permettra d'obtenir le niveau d'équilibre des réserves, après avoir au préalable pris le soin de s'assurer que les conditions d'adéquation soient vérifiées. NB : Dans la suite, lorsqu'on parlera de réserves adéquates, il s'agira du niveau optimal des réserves selon l'approche par les indicateurs.
* 7 Cette étude a été menée par Corinne DELECHAT, que nous verrons plus bas. * 8 Parmi ces indicateurs, on peut citer le ratio dette sur réserves, le ratio réserves sur importation, réserve sur exportation etc. * 9 La notion de mois d'importation repose sur une prévision des importations de la zone. Ainsi dire que l'on majore les réserves de deux mois d'importations, signifie que l'on ajoute au plafond des réserves la quantité de réserves pouvant couvrir la prévision sur deux mois des importations de la CEMAC. * 10 Ce taux est de 20% |
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