Capital public et productivité en zone CEMAC( Télécharger le fichier original )par Jean Patrick Mfoulou Olugu Université de Yaoundé II soa - DEA 2008 |
2. Les estimations de l'élasticité de la production et le problème de causalitéLa question de la productivité de l'infrastructure publique voit le jour avec l'étude de Ashauer (1989) sur l'investissement public aux Etats-Unis. En se servant d'une fonction de production Cobb-Douglas pour analyser les données produites par les Etats-Unis en 1970, il a constaté que l'élasticité de la production des investissements publics dans l'infrastructure de base18(*) était de 0,24. Cette grande élasticité l'amène à soutenir que le ralentissement de la croissance de la productivité dans les années 1970 était largement attribuable à une baisse des investissements publics dans l'infrastructure. L'auteur constante également que les investissements dans le capital non militaire avaient un effet beaucoup plus profond sur la productivité que les investissements dans le capital militaire. Dans l'année qui a suivi la publication du rapport de Ashauer, d'autres chercheurs ont entrepris des études pour confirmer ou réfuter son estimation des répercussions de l'infrastructure publique sur la productivité. Munnel (1990) comptait parmi les auteurs à avoir appuyé les résultats de Ashauer. Dans son étude, Munnell (1990) a analysé les répercussions économiques du Stock de capital non militaire, non résidentiel net19(*) entre 1970 et 1986 aux Etats-Unis, et constante que les Etats qui investissaient d'avantage dans l'infrastructure affichaient de meilleurs résultats économiques, des investissements privés plus élevés et une croissance de l'emploi plus forte, ce qui semblait être conforme aux résultats de Ashauer (1989). Plus la recherche dans le domaine a progressé, plus se sont multipliés les différends sur l'orientation de la causalité entre les changements dans la productivité et les investissements dans l'infrastructure. a. Critique méthodologique des premières études : le problème de causalitéEvans et Karras (1994) ont analysé les données sur l'infrastructure et la productivité de sept pays membres de l'OCDE entre 1963 et 1988. Ils ont décelé d'étroites corrélations entre les deux variables, mais concluent que l'orientation de la causalité20(*) était à l'opposé de ce qu'avaient signalé Ashauer (1989) et Munnell (1990). C'est-à-dire que la hausse des stocks de capital public était le résultat de la hausse de la production et de la croissance économique, pas la cause. En analysant la corrélation entre le Produit Intérieur Brut (PIB) annuel moyen et le stock de capital net du gouvernement, Evans et Karras (1994) ont conclu que rien ne prouve que les immobilisations gouvernementales soient hautement productives. Zegeye (2000) appuie l'étude de Evans et Karras (1994) lorsqu'il conclut que l'infrastructure est un bien normal21(*), et que les pays riches auront tendance à en avoir plus et les pays pauvres, à en avoir moins. Dans son rapport, Zegeye (2000) constate que l'élasticité de la production entre l'infrastructure publique et les investissements privés n'est que de 0,02. Plusieurs auteurs ont tenté de régler la question de la causalité, perfectionnant leurs méthodes afin d'être sur qu'ils saisissaient les résultats des investissements dans les infrastructures et pas les résultats de la croissance économique. * 18 Rues et routes, aéroports, installations électriques et gazières transport en commun, réseaux d'eau et égouts. * 19 C'est-à-dire routes et rues, réseaux d'adduction d'eau d'égouts immeubles et autres structures, et équipements. * 20Quand on estime une fonction de production, on part implicitement du principe que le capital public « engendre » de la production et de la croissance. Pourtant, le sens de la causalité peut être inversé. Plus une société s'enrichit, plus elle peut dépenser dans l'infrastructure publique, de manière telle qu'une augmentation de la production, qui entraîne une plus grande prospérité, peut entraîner de plus grandes dépenses publiques d'investissement. * 21 Un bien normal est un produit dont la demande augmente à mesure que le revenu de la personne augmente. |
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