La liberte contactuelle dans les sûretés personnelles en droit OHADA( Télécharger le fichier original )par Huguette Eliane Ndounkeu Université de Dschang - DEA en droit communautaire 2006 |
B- L'absence de délimitation des différents délaisEntre la présentation de la demande par le bénéficiaire et le paiement par le garant, certaines opérations doivent être accomplies par ce dernier. Le législateur est imprécis sur les délais d'accomplissement de ces opérations, qu'il s'agisse de l'examen de la demande (1) ou de l'information du donneur d'ordre (2). 1- La clarté insuffisante du délai d'examen de la demandeLe garant dispose, même s'il s'est obligé à payer à première demande, d'un temps raisonnable de réflexion et d'investigations. C'est cette nécessité que traduit l'article 35 al. 1 de l'AUS lorsqu'il énonce: « le garant ou le contre garant doit disposer d'un délai raisonnable pour examiner la conformité des documents produits avec les stipulations de la garantie ou de la contre garantie ». L'obligation de vérification de la conformité des documents aux stipulations contractuelles doit être exécutée dans « un délai raisonnable ». Cette notion assez vague ne donne pas une durée maximale de la période d'examen de la demande. En l'absence d'une détermination conventionnelle par les parties, il y a lieu de laisser la question à l'appréciation souveraine des juges du fond, sous le contrôle de la Cour Commune de justice et d'arbitrage352(*). Les parties pourront, pour déterminer cette durée, s'inspirer des usages, ou de la réglementation internationale en la matière353(*). La possibilité laissée aux parties de fixer la durée maximale de la période d'examen de la demande pourrait déboucher sur « les refus des garants et les malentendus entre ces derniers et les bénéficiaires. En effet, faute de motif valable de refus de paiement, (les garants) pourront exploiter cette faille législative pour différer le paiement du montant de la garantie »354(*). Cette absence de précision du délai d'examen de la demande consacre alors l'insécurité de la lettre de garantie. La clarté insuffisante du délai d'information du donneur d'ordre a le même effet. 2- Le caractère vague du délai d'information du donneur d'ordreL'autonomie de l'engagement du garant devrait en principe exempter ce dernier d'avoir à avertir le donneur d'ordre ou le contre garant avant de payer. De même, le contre garant appelé par le garant de premier rang n'est pas tenu d'en référer au donneur d'ordre. Cependant, suivant un usage largement répandu, les banques garantes ou contre garantes avertissent leur donneur d'ordre avant de payer355(*). Mais de cette pratique, « de nature plus commerciale que juridique »356(*), il ne paraît pas possible de déduire une obligation. Sauf stipulation contractuelle expresse, le garant doit être libre de tenir le donneur d'ordre informé. La réglementation communautaire est conforme à cette pratique commerciale. En effet, l'article 35 al. 2 de l'AUS prévoit qu'« avant tout paiement, le garant doit transmettre sans retard la demande du bénéficiaire et tous documents accompagnant celle-ci au donneur d'ordre pour information ou, le cas échéant, au contre garant pour transmission au donneur d'ordre aux mêmes fins ». Cette démarche laisse au donneur d'ordre la possibilité de s'opposer à l'exécution de la garantie s'il a, pour ce faire des raisons suffisantes. La loi uniforme utilise l'expression « sans retard ».Le contenu de cette notion n'étant pas déterminé, il reviendra aux parties de le fixer. Leur liberté à cet égard sera d'autant plus grande qu'elles n'auront, en dehors des usages, pratiquement aucune référence internationale en la matière357(*). Quoiqu'il en soit, à défaut d'une détermination conventionnelle, il faudra s'en référer à l'appréciation souveraine des juges du fond. Une fois informé de l'appel de la garantie, le donneur d'ordre ne pourra s'opposer au paiement que si celui-ci est manifestement frauduleux ou abusif. * 352ANOUKAHA (F.) ; ISSA-SAYEGH (J.) ; CISSE-NIANG (A)...précité, n°147, P.57. * 353A cet égard, certains usages accordent au garant un délai de trois jours pour répondre à l'appel de la garantie. Le projet de la CNUDCI quant à lui propose de limiter ce délai raisonnable sauf clause contraire à sept jours ouvrables au maximum après réception de la demande (article 16 al. 2). La technique du référé-provision a même été jugée applicable en la matière. CA Paris, 29 juin 1990 : Juris-Data n° 022933 ; JCP E 1990, I, 20401 ; D. 1993. somm. P.98. obs. VASSEUR. * 354 SOUPGUI (E.), mémoire précité, P. 14. * 355 Cette démarche s'inscrit dans le cadre de saines relations commerciales entre les banques et leurs clients. * 356 SIMLER (Ph.), op. cit, n° 965, P. 873. * 357 En effet, sur le plan international, les rédacteurs du projet de la CNUDCI ont, après discussion, renoncé à se prononcer sur ce point. Quant aux RUGD de la CCI, elles semblent bien imposer au garant l'obligation d'informer le donneur d'ordre en cas d'appel de la garantie en des termes qui ne sont cependant pas parfaitement limpides. |
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