Le Jeu Vidéo (et moi...)( Télécharger le fichier original )par ESRA - Institut Supérieur des Techniques du Son 2006 |
L'image immature des jeux vidéo ne doit pas empêcher les développeurs de leur donner plus de contenuLes jeux vidéo se sont, jusqu'à présent, essentiellement fondés sur des principes impliquant des actions violentes et basiques -sauter sur un ennemi, tirer, diriger un vaisseau, frapper... Pourquoi ? Tout simplement parce que c'est ce qu'il y a de plus facile à programmer, et à gérer par une machine. Ce n'est pas un hasard si le premier jeu vidéo de l'histoire, Space War (1962), est un shoot'em up (de l'anglais « shoot them up », qui désigne les jeux de tir, généralement à bord d'un avion ou d'un vaisseau spatial, en deux dimensions avec un défilement horizontal ou vertical) Mais désormais, la technologie est suffisamment avancée pour élargir la marge de manoeuvre dont dispose le joueur, et épaissir le propos. Malheureusement, des facteurs économiques, sur lesquels nous reviendrons plus tard, font que les développeurs ne peuvent souvent pas donner à leurs jeux un vrai contenu. Mais le problème est quelquefois plus grave : certains développeurs ne veulent pas donner une signification à leurs jeux. Mike Diskett, game designer de Urban Chaos (PC, 99), met en avant le manque de crédibilité des jeux vidéo : "Mettre un message dans mes jeux ne fait généralement pas partie de mes préoccupations, car un soft n'est pas vraiment un bon support pour des commentaires politiques ou des proclamations générales. Par leur nature même, les jeux vidéo ne sont pas pris très au sérieux, donc quel que soit le message que tu voudrais faire passer, il n'aurait pas beaucoup d'impact". Ce n'est pas faux, mais c'est une réponse un peu timide qui enclenche un cercle vicieux que seuls les développeurs peuvent briser. Si ces derniers donnaient plus de contenu à leurs titres, les jeux vidéo seraient davantage perçus par le public comme un moyen d'expression légitime. Conséquence : les développeurs, se sentant davantage écoutés et reconnus, donneraient in fine plus de contenu à leurs titres, et ainsi de suite... Entre les lignes, Glen Dahlgren, game designer de Wheel of Time (PC, 99) est, lui, plus sévère avec ses pairs : "Personnellement, je ne crois pas que beaucoup de game designers s'inquiètent de faire passer un message, mais j'en ai connu qui le font, et je pense qu'aucune histoire ne vaut la peine d'être racontée si elle n'a rien à dire". Interactivité et contenu : mettre le joueur face à des choix moraux, l'inciter à la réflexion plutôt que de lui asséner un message Malgré tout, quelques jeux ont clairement une morale tacite. Elle est généralement banale, mais elle a au moins le grand mérite d'exister. Metal Gear Solid (PS, 98) comporte un sous-texte pacifiste, le scénario d' Oddworld (PS et PC, 97) fait penser à des génocides historiques, Final Fantasy 7 (PS et PC, 97) est porteur d'une philosophie manifestement écologique, The Nomad Soul (PC et DC, 1999 et 2000) est une dénonciation feutrée des régimes totalitaires... Le problème de ces quatre jeux vient de ce que leur morale est exprimée sans tenir compte des spécificités des jeux vidéo. Impuissant, le joueur doit accepter le message qu'on lui assène. Cette manière de faire passer un message dans un jeu n'est pas très intéressante, car elle n'est en rien interactive. La meilleure approche, c'est d'essayer de trouver, dans les propriétés des jeux vidéo, le moyen de faire passer un message. Black & White Certains créateurs l'ont compris. Republic, Black & White ou Mafia sont de bons exemples de jeux d'auteur : à aucun moment le joueur n'est contraint d'adopter une ligne de conduite définie. Ces trois jeux ont été conçus pour nous inciter à la réflexion, pour nous mettre face à des choix moraux. Au joueur de construire sa réponse. |
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