4.5/ Le besoin de reconnaissance sociale
Une majorité des personnes interrogées
considèrent qu'elles ont consommé plusieurs biens et
contracté différents crédits afin d'être reconnues
socialement. Avec la mise en place du plan conventionnel de redressement, ce
besoin est toujours présent mais la contraction des crédits ne
leur permet plus de le satisfaire. Nous pouvons nous demander de quelle
manière elles réagissent face au regard des autres, et quelle est
leur place dans la société selon elles.
Certaines personnes sont sensibles aux jugements d'autrui.
Elles veulent acquérir des biens pour faire croire qu'elles
appartiennent à une autre classe sociale plus valorisante. La
finalité recherchée est d'imiter et de se conformer aux
autres.
v Mme A. : « de ne pas avoir de carnet de
chèque, ça me gênerait, je me sentirais inférieure
aux autres. »
v Mr et Mme D. : « voir les autres vivre
comme ils vivent, ça nous met le moral à zéro parce que
c'est dur de faire comme si on était pareil qu'eux mais sauf qu'en
réalité, on a un dossier de surendettement. On trouve toujours de
bonnes excuses pour ne pas montrer mais c'est pas toujours
évident. »
v Mme E. : « avoir un carnet de
chèque, ça me donne un statut, j'ai l'impression d'être
comme tout le monde. »
v Mme B. : « j'ai ma fierté. Je
leur dirais peut être un jour, quand tout sera fini, je ne sais pas, une
fois qu'on aura fini le plan, pour montrer qu'on a galéré mais on
réussi à s'en sortir. Sauf qu'en attendant, il ne faut rien
laisser paraître de notre situation, c'est pas évident à
expliquer mais c'est important pour moi. »
v Mme C. : « Le fait de ne pas avoir de carnet
de chèque, c'était frustrant. A chaque fois, je disais
« ah, j'ai oublié mon chéquier ». Je passais
pour quelqu'un de tête en l'air, alors qu'en fait, j'avais honte de
dire : « ben non, j'ai plus de carnet de
chèque. » »
Toutefois, Mme C. explique clairement les raisons de son
« silence » concernant son dossier de surendettement :
« je fais beaucoup attention au regard des autres, c'est pour
ça que je dis rien, parce que y'a des gens qui disent que j'ai la folie
des grandeurs et que je sais pas gérer. Alors que c'est pas ça du
tout. En fait, j'ai surtout peur que les gens me jugent (...) Moi, c'est parce
que j'ai voulu profité de ma liberté retrouvée, j'ai voulu
me remeubler (...) J'ai surtout voulu combler la solitude, le vide. (...) On
s'est retrouvé en concurrence, mon ex et moi, vis-à-vis de ma
fille car elle était enceinte à ce moment-là, et il lui
faisait de beaux cadeaux, et moi, je voulais aussi montrer à ma fille
que je l'aimais autant que son père sauf que moi j'avais pas les moyens.
Je pense que j'ai voulu combler un manque affectif, la solitude et aussi
prouver que j'aime par les cadeaux. »
Nous voyons ici que le regard des autres est très
important. Les personnes peuvent avoir ce besoin de reconnaissance sociale et
peuvent vouloir prouver leur amour par l'achat.
D'après ces propos, nous comprenons que certaines
personnes surendettées activement veulent se distinguer de leur groupe
d'origine et adopter le style de vie de celles issues d'une classe sociale
supérieure pour être reconnues socialement. Par le manque de
moyens financiers, elles n'ont pu acquérir des biens de consommation,
leur permettant de se différencier de leur groupe de
référence.
De même, ces témoignages soulignent le besoin de
ces personnes d'être « comme tout le monde ».
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