4 - Ce que les laboratoires annoncent en terme de
programmes d'accès aux traitements
Au regard du début de l'épidémie et des
dates de commercialisations des premières molécules actives, ce
qui retient l'attention, c'est que l'engagement de l'industrie pharmaceutique
dans les pays en voie de développement ou à faible revenus est
décalé dans le temps. Le premier à s'être
engagé dans un (( access program >> institutionnalisé est
Wellcome (GSK) en 1992 avec ((Positive action>> soit 15 ans après
le début de l'épidémie et 5 ans après la
commercialisation de L'AZT. BMS emboîtera le pas dès 1999. A ce
jour, tous les laboratoires proposent un (( access program >>. En plein
ATU (autorisation temporaire d'utilisation) TIBOTEC annonce déjà
que sa deuxième molécule TMC125 sera disponible à travers
son programme d'accès aux traitements.
Il paraît évident qu'en 2007 aucun laboratoire
pharmaceutique ne semble pouvoir se dispenser de son (( access program
>>. Sans remettre en cause ce qui a été fait, est-ce
à la hauteur des attentes des pays du Sud ou au moins à la
hauteur de leurs possibilités financières. Act Up à ce
propos n'hésitait pas à communiquer les ventes des
différents groupes pharmaceutiques.
Laboratoire
|
Chiffre d'affaire 2000
|
Bénéfices 2000
|
Bénéfices 2002
|
Médicament
|
Ventes 2000
|
Ventes 2003
|
Glaxo-SmithKline
|
26 000
|
4 750 6 600 Retrovir 86,4 60,5
|
|
|
|
|
Epivir
|
430,5
|
311
|
|
|
|
|
Combivir
|
818
|
1168
|
|
|
Ziagen 210 427,4
|
|
|
|
|
Trizivir
|
28,8
|
294
|
|
|
|
|
Agénérase
|
89
|
209
|
|
|
|
|
Total
|
1 656
|
2 515
|
ROCHE
|
29 600
|
6 500 10 200 Viracept 423 325
|
Merck & C°
|
40 000
|
6 900
|
8 000
|
Crixivan
|
560
|
520
|
BMS
|
21 700
|
4 700
|
5 200
|
Zérit
|
618
|
838
|
|
|
Videx 183 309
|
Abbott
|
13 700
|
2 800
|
3 400
|
Norvir
|
123
|
105
|
|
|
|
|
Kaletra
|
31
|
300
|
Roche
|
16 600
|
Invirase 198 169
|
Boehringer
|
|
Ingelheim
|
|
Viramune
|
199
|
260
|
|
|
Act Up allait même plus loin en mettant en
parallèles les bénéfices des laboratoires et le PIB
(Produit Intérieur Brut) de certains pays particulièrement
touchés par le VIH/SIDA.
Publication mars 2001 dans Action 72
« L'industrie pharmaceutique est la plus rentable au
monde, et l'une des plus riches. Pour mieux comprendre le rapport de force qui
existe entre cette industrie et les gouvernements africains, il suffit de
comparer le poids économique de ces entreprises avec celui des Etats qui
tentent de lutter contre leur pouvoir absolu. Les bénéfices 2000
de Merck, toutes pathologies confondues, sont équivalents au produit
intérieur brut (PIB) du Congo (7 milliards de $).Les
bénéfices 2000 de ROCHE sont équivalents au PIB de
l'Ethiopie (6,5 milliards de $). Ceux de BMS équivalent au PIB du Gabon.
Ceux d'Abbott au PIB du Mali. L'Ouganda, un des premiers pays à avoir
mis en place un accès aux traitements contre le sida, a un PIB
équivalent aux bénéfices prévus en 2002 pour
Glaxo-Smithkline (6,3 milliards de $). Le Sénégal, qui vient de
négocier une réduction de prix avec les grandes compagnies
pharmaceutiques, a un PIB équivalent aux bénéfices 2000 de
Glaxo-Smithkline (4,8 milliards de $).Le fossé est encore plus criant
quand on voit que les ventes 2000 du médicament
Zérit® (d4T), produit par BMS, sont équivalentes
au PIB du Cap Vert, celles du Videx® (ddI, produit par BMS) au
PIB des Comores, celles de Combivir® (combinaison d'AZT et de
3TC en un seul médicament produit par GlaxoSmithkline) au PIB du
Lesotho. Pour finir, les ventes totales de médicaments anti-VIH de
Glaxo-Smithkline sont équivalentes au PIB du Tchad (1,6 milliard de $)
>>.
N'est-ce pas aussi un moyen comme un autre de communication
permettant de redorer le blason. Un prétexte pour se donner « bonne
conscience >>. La mode actuellement est au commerce équitable. Des
sociétés comme McDonald, Accor, Nestlé embrassent ce
nouveau courant pour « re-lifter >> leur image très
malmenée et parfois même faire oublier leur politique salariale
fortement décriée. Est-on dans la même stratégie en
ce qui concerne « l'access program >> ?
L'ONUSIDA, l'Organisation Mondiale de la Santé,
l'UNICEF, l'UNFPA, la Banque Mondiale et des laboratoires de recherche
pharmaceutique (Boehringer-Ingelheim, Bristol-Myers Squibb, F. Hoffmann-La
Roche et GlaxoSmithKline, et plus tard Abbott Laboratories et Gilead Sciences)
créent en mai 2000 Accelerating Access Initiative (AAI) L'objectif
commun consistait à trouver des moyens d'élargir l'accès
tout en garantissant une utilisation rationnelle, abordable, sûre et
efficace des médicaments destinés aux maladies liées au
VIH/SIDA. Alors justement, que font les laboratoires.
L'américain Abbott a opté pour un « fond
» sous couvert de la création en 1951 d'une société
Illinoise à but non lucratif et philanthropique. Son budget, programmes
humanitaires et d'assistance aux patients, actions sociales et dons de
médicaments aux malades du SIDA, totalise plus de 300 millions de
dollars (contre 225 millions de dollars en 2003). Son programme d'assistance
aux patients (PAP) délivre un accès gratuit à la
médecine à des individus à faibles revenus sans assurance
médicale ou aide gouvernementale. Ainsi, en août 2005 des milliers
de patients Illinois ont bénéficié du partenariat de
sociétés, fondations et institutions. Depuis son lancement en
avril, ce programme a été délivré à 600 000
personnes.
Depuis 2001, Abbott procure ses antirétroviraux
à prix coûtant (500 dollars par patient et par an) en Afrique et
dans les pays en développement. Kaletra est disponible à hauteur
de 1000 dollars par an dans plus de 40 pays aux revenus faibles ou
intermédiaires.
Toujours dès 2001, Abbott a contribué à
l'ouverture d'une clinique pédiatrique en Roumanie permettant une baisse
spectaculaire de la mortalité dans ce centre de 90 % en 3 ans. Depuis,
d'autres expériences de ce type se sont mises en place en Afrique comme
au Malawi. Depuis 2001, plus de 600 000 enfants et leurs familles ont
bénéficiés des services d'Abbott.
En 2002, Abbott et le gouvernement de Tanzanie ont
formé un partenariat public-privé unique. Il est soutenu par
l'organisation Axos - spécialisée dans l'encadrement des
systèmes de santé à l'attention des pays en
développement. Cette initiative à pour objectif de moderniser le
système de santé, des équipes soignantes aux patients.
En plus d`un hôpital de référence dans la
capitale, 80 hôpitaux ou centres de soins en milieu rural ont
été incorporé dans ce projet ce qui représente un
investissement de 44 millions de dollars.
Abbott a investi 100 millions de dollars sur les cinq
dernières années à des programmes d'accès aux
antirétroviraux en Afrique et autres soutiens aux malades et à
leurs familles.
|