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Entreprises et zones d'activités du Haut Forez à l'Ouest lyonnais : état des lieux et perspectives avant la mise en service du barreau A89 Balbigny / La-Tour-de-Salvagny

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par Vincent VANDAELE
Université Jean Monnet - Saint-Etienne - Master 1 2007
  

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Liste des acronymes :

§ ASSEDIC : l'Association pour l'Emploi Dans l'Industrie et le Commerce

§ ASF : Autoroutes du Sud de la France

§ BGCA : Bâtiment et Génie Civil Agricole

§ CDE : Comité de Développement Economique

§ CDT : Contrat Territorial de Développement

§ COL : Contournement Ouest de Lyon

§ DRE : Direction Régionale de L'Equipement

§ DUP : Déclaration d'Utilité Publique

§ EPCI : Etablissement Public de Coopération Intercommunale

§ INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques

§ LOADDT : Loi d'Orientation de l'Aménagement et du Développement Durable du Territoire

§ LOTI : Loi d'Orientation des Transports Intérieurs

§ NES : Nomenclature Economique de Synthèse

§ SAPRR : Société des Autoroutes Paris-Rhin-Rhône

§ SCOT : Schéma de Cohérence Territorial

§ SDRN : Schéma Directeur Routier National

§ SIG : Système d'Information Géographique

§ TIC : Technologies de l'Information et de la Communication

§ TPU : Taxe Professionnelle Unique

§ ZA : Zone d'Activités

§ ZAUER : Zonage en Aires Urbaines et en aires d'Emploi de l'espace Rural

INTRODUCTION

En 1971, au moment de l'arrivée sur le territoire bourguignon de l'autoroute A6, le Comité d'Expansion de la Côte-d'Or se demandait : « L'autoroute se comportera-t-elle comme un torrent qui érode le sol et lui arrache ses sédiments fertiles sans étancher sa soif ou, au contraire, aura-t-elle l'effet bienfaisant de ces rivières et de ces fleuves dont le cours régulier et les eaux limoneuses apportent la fertilité et la richesse ?...Saône ou Durance ? 1(*)». Cette question, posée il y a plus de 35 ans, reflète bien les attentes et les craintes que suscite l'arrivée d'une nouvelle autoroute. Cette interrogation relative aux « effets » qu'induit la mise en service d'une autoroute sur les territoires qu'elle dessert est toujours d'actualité, car même si depuis, de nombreux chercheurs et organes de recherches se sont attelés spécifiquement à cette question, beaucoup d'interrogations demeurent.

Il est vrai que l'autoroute est une infrastructure particulière comparativement aux autres types de routes. La loi du 18 avril 1955 portant statut des autoroutes les définit comme des « voies routières à la destination spéciale, sans croisement, accessibles seulement en des points aménagés à cet effet et essentiellement réservées aux véhicules à propulsions mécaniques2(*) », c'est-à-dire automobiles, motos et poids lourds. Ses chaussées son généralement en 2x2 voies ou plus, séparées par un terre plein central, et destinées à chaque sens de circulation. Le but premier d'une autoroute est d'assurer des conditions de circulation et de sécurité optimales. Ce sont ces caractéristiques qui différencient l'usage et la vocation des autoroutes par rapport à d'autres types d'infrastructures routières. Dans ce mémoire, l'intérêt sera porté sur le futur axe A89 Balbigny - La-Tour-de-Salvagny et sa potentielle influence sur la structuration économique des territoires bientôt desservis. Il paraît nécessaire, avant d'étayer la problématique de cette étude, de présenter l'autoroute A89 à petite échelle, puis ensuite à plus grande échelle et ainsi d'aborder les caractéristiques des territoires que le futur tronçon desservira.

L'autoroute A89 a été inscrite au Schéma Directeur Routier Nationale (SDRN) en 1987. Dénommée « la transversale », elle doit relier Bordeaux à Lyon via Clermont-Ferrand. Aujourd'hui, cette autoroute est en service sur pratiquement toute sa longueur, hormis entre Thenon et Terrasson-Lavilledieu, en construction, et entre Balbigny et La-Tour-de-Salvagny, tronçon qui devrait normalement être ouvert à la circulation en 2012 (carte Int.1). Communément, on nomme « barreau » un tronçon autoroutier de taille restreinte et destiné à joindre plusieurs autres axes. Le futur tronçon Balbigny - La-Tour-de-Salvagny sera le « barreau » terminal de l'autoroute A89. Il fera la connexion entre cette autoroute et le réseau autoroutier du Sud-est de la France, ce qui à terme permettra de réaliser le trajet Bordeaux - Genève sans quitter l'autoroute.

Carte Int.1 : l'autoroute A89 dans l'espace national

Réalisation : Vandaele V. - 2007

A plus grande échelle, le futur tronçon de 53 kilomètres traversera, d'Ouest en Est, le département de la Loire puis le département du Rhône, permettant ainsi d'assurer la liaison entre la plaine du Forez et la vallée du Rhône (carte Int.2). Le tronçon terminal de l'A89 a eu une histoire « mouvementée ». Inscrit au SDRN en 1987, au même titre que l'ensemble de l'autoroute, il aurait du être construit dans les mêmes délais. Mais alors qu'en 1995 une première définition du tracé est validée (bande des 300 mètres), la commission européenne impose à la France de reprendre la procédure d'attribution du concessionnaire (ASF), ce qui provoque en 1997 la suspension du projet. Puis, en 2000, une décision favorable de la cour européenne de justice permet de relancer le dossier, qui aboutit le 17 avril 2003 à la Déclaration d'Utilité Publique (DUP), et avec elle, la certitude de sa mise en service. En 2007, le tracé précis a été dévoilé par ASF et les travaux devraient commencer en 2008 pour une mise en service programmée en 2012.

Carte Int.2 : le futur « barreau » A89 à échelle interdépartementale

Réalisation : Vandaele V. - 2007

Le tronçon terminal de l'autoroute A89 traversera un espace aux caractéristiques physiques diversifiées, tout comme les territoires, qui présentent une grande hétérogénéité socio-économique. Venant de Clermont-Ferrand, l'axe A89 (anciennement A72) passe au nord des monts du Forez, à proximité de Noirétable, pour aboutir dans la Plaine du Forez à Balbigny. Descendant vers le Sud en direction de Saint-Etienne, l'autoroute A72 dessert notamment la ville de Feurs. De Balbigny, le futur « barreau A89 » traversera par un tunnel, à Violay, les monts du Tararois, qui avoisinent les 1 000 mètres d'altitude, pour aboutir à Tarare. De là, en suivant l'étroite vallée de la Turdine, l'autoroute ira desservir La-Tour-de-Salvagny, ou elle se terminera. Une antenne de quelques kilomètres est également prévue pour desservir l'Arbresle (carte Int.3). Les monts du Tararois constituent une véritable coupure géographique autant physique qu'humaine entre les départements du Rhône et de la Loire. En effet, dans le département de la Loire, Saint-Etienne et Roanne sont les plus grosses agglomérations. Mais un antagonisme marqué différencie le Sud du département porté par Saint-Etienne, et qui se révèle relativement dynamique, et le Nord où la crise industrielle des années 1980 est latente. De plus, les territoires situés au nord du département de la Loire ressentent fortement un enclavement à mettre au compte d'une mauvaise accessibilité, ce qui explique une forte attente vis-à-vis du futur barreau A89. La situation est à peu près similaire pour Tarare qui a connu également ces dernières décennies un net déclin de son industrie textile, soumise à la concurrence internationale. L'enclavement est aussi très marqué pour cette région, ce qui s'explique à la fois géographiquement car elle se situe en plein coeur des Monts du Tararois, mais aussi par rapport aux infrastructures routières. En effet, la route nationale qui traverse en plein coeur la ville de Tarare est souvent saturée, car actuellement, il s'agit du seul axe d'importance pour réaliser le trajet Lyon - Roanne. Cette situation explique sans doute que l'aire d'influence de la métropole lyonnaise ne parvienne par jusqu'à cette région. Toutefois, dans le Rhône, la capitale régionale est véritablement le pôle fort de l'espace. Elle est un des facteurs qui conditionne sur son ouest les dynamiques territoriales, notamment en raison du phénomène de périurbanisation, qui semble s'étendre inexorablement.

Carte Int.3 : caractéristiques topographiques de l'espace bientôt traversé par le « barreau » A89

Réalisation : Vandaele V. - 2007

C'est donc dans ce contexte, partiellement décrit ici, que sera mis en service le futur tronçon terminal de l'A89. Comme nous l'avons vu, sa vocation principale sera celle de désenclaver des territoires mal desservis. Toutefois, on peut se demander si d'autres prérogatives accompagnent la mise en service d'un tel axe autoroutier. Les autoroutes ne sont elles pas aussi construites dans un but de revitalisation économique? Dans quelles mesures cet objectif est-il justifié? Afin de répondre à ce questionnement, il convient de se pencher sur le rôle et l'influence attribués aux autoroutes sur l'économie, notamment dans les discours politiques, puis sur les études déjà menées sur ce sujet.

La construction du premier réseau autoroutier d'envergure national en Allemagne dans les années 1930 a été initiée dans un but de stratégie militaire, afin d'acheminer rapidement troupes et matériels vers le front. Au lendemain du second conflit mondial, lorsqu'en France, les premières trames d'un réseau autoroutier sont construites, c'est aussi dans un but stratégique, mais cette fois de « ce qu'il est convenu d'appeler le calcul économique3(*) ». En effet, la spectaculaire croissance économique des trente glorieuses révèle rapidement l'incapacité du réseau routier traditionnel à supporter les échanges de plus en plus soutenus. C'est dans ce contexte d'urgence que des axes autoroutiers de dimension nationale sont construits, sans que de réelles interrogations quant aux « effets » de l'infrastructure soient posées. A partir des années 1970, des discours basés sur le développement économique et la décentralisation générée par l'autoroute commencent à émerger. C'est ce que R. IZQUIERDO qualifie de « paradigme politique basé sur les potentiels de développement régional et d'effets structurants des infrastructures4(*) ». Transposé de la sphère politique à la sphère scientifique, ce paradigme ne résiste pas longtemps. Les effets d'entraînements mécaniques, attribuant systématiquement à l'autoroute des fonctions bénéfiques sont rapidement décriés et laissent la place à une approche plus nuancée, notamment dès 1977 par F. PLASSARD dans un ouvrage référence : les autoroutes et le développement régional. En contestant le modèle mécaniste simple promu par le discours politique, son objectif est de ne plus considérer l'autoroute comme seul objet d'étude. Les recherches doivent porter sur d'autres domaines comme l'économie ou la gestion des territoires traversés. L'infrastructure n'est plus seule en scène, elle est une partie d'un tout qui doit aussi faire l'objet de recherches. F. PLASSARD a véritablement initié une approche aujourd'hui encore paradigmatique. C'est dans cette continuité que s'inscrit ce mémoire.

Cette étude a pour objectif d'évaluer l'influence du futur axe terminal de l'A89 entre Balbigny et La-Tour-de-Salvagny sur la géographie économique des territoires bientôt desservis. Pour cela, et faute de ne pouvoir appréhender tous les aspects relatifs à l'économie en général, il est apparu pertinent de s'intéresser à la localisation des entreprises et des zones d'activités, considérée comme susceptible de révéler sur le moyen et long terme l'influence spatiale d'une infrastructure autoroutière.

L'entreprise, définie comme « une unité économique, juridiquement autonome, organisée pour produire des biens ou des services pour le marché5(*) », est une entité fondamentale du fonctionnement économique. Celle-ci présente de grandes diversités selon son secteur d'activité, son effectif salarié, son organisation productive et logistique, etc. L'entreprise peut être appréhendée comme une entité vivante, dans le sens où elle née et peut aussi disparaître, elle évolue, elle est susceptible de migrer. Le fonctionnement d'une entreprise est assuré par un ou plusieurs acteurs, que nous désignerons acteurs économiques. Cet acteur, ou ces acteurs, qui dirigent et commandent l'entreprise peuvent être le patron, le chef d'entreprise, une équipe dirigeante ou encore un collège de cofinanceurs comme des actionnaires par exemple. Ce sont eux qui prennent les décisions déterminantes quant à l'évolution de l'entreprise. Dès lors, l'intérêt porté à celles-ci ne peut se faire indépendamment des acteurs qui les dirigent. Cette logique d'acteur est aussi fondamentale concernant les zones d'activités. Classiquement, on définit les zones d'activités (ZA) comme « un espace aménagé selon une démarche volontariste par un agent (ou acteur) en vue d'être commercialisé, c'est-à-dire vendu ou loué, à des entreprises ou à des organismes, afin que ceux-ci puissent exercer leur activité économique 6(*)». Il existe différents types de zones d'activités, déterminées par leurs caractéristiques et/ou le secteur d'activité des entreprises susceptibles de s'y implanter. Les parcs d'activités sont destinés aux entreprises non nuisantes de toutes catégories (production, bureaux, entrepôts, commerces). Les zones industrielles (ZI) accueillent quant à elles des établissements dits «  classés pour la protection de l'environnement7(*) », elles sont souvent de taille importante pour l'implantation d'industries lourdes ou plus modestes. On trouve encore des parcs technologiques, qui sont des sites réservés à des activités à forte valeur ajoutée dans les domaines de la haute technologie ou encore des zones artisanales, généralement de petite taille et qui accueillent des activités artisanales de proximité. Dans le cadre de ce mémoire, le terme de zone d'activités sera la plupart du temps employé pour désigner ces différents types de sites destinés à l'accueil des entreprises. La zone d'activités est un outil majeur de la politique de développement économique des collectivités, dont la finalité doit être de répondre au mieux aux besoins des entreprises autant pour les fixer durablement sur le territoire que pour les attirer lors de leur recherche d'un site d'implantation. La création et la gestion d'une zone d'activités relèvent donc d'une logique d'acteurs, mais cette fois institutionnels, et la plupart du temps d'envergure locale. Et comme pour les entreprises, il paraît impossible d'aborder les zones d'activités sans se pencher sur « l'implicite » qui l'accompagne, c'est-à-dire l'action de ces acteurs, les motivations qui les ont conduit à implanter tel type de zone à tel endroit de leur territoire. Se pose alors la question du processus de localisation des entreprises et des zones d'activités.

Le terme localisation désigne en premier lieu la position d'un objet dans l'espace « à l'aide d'un système de référence explicite, qui est souvent celui des coordonnées géographiques ». Il s'agit de la localisation absolue, qui demeure statique comme le rappelle D. PUMAIN8(*). Dans cette étude, nous nous intéresserons à la localisation relative, ou situation géographique, des entreprises et des zones d'activités. Il s'agit d'une notion dynamique qui « doit être redéfinie en permanence en tenant compte des évolutions à la fois des autres lieux considérés comme référence, et des accessibilités qui sont toujours mesurées dans un rapport espace temps particulier ». Ainsi, la localisation décrit à la fois une situation absolue dans l'espace, mais aussi le résultat de l'action qui consiste à choisir « de localiser un objet en un lieu, compte tenu des avantages relatifs que ce lieu représente ». La réflexion qui précède ce choix suppose la mobilisation d'une grande variété de facteurs parmi lesquels certains ont une dimension explicite. Pour les entreprises, la localisation dépend en partie des coûts de transport des ressources, matérielles et immatérielles nécessaire à la production, aussi appelées intrants, et de l'acheminement de ces biens ou de ces services, les extrants. La localisation des concurrents, mais aussi des marchés sont aussi des éléments déterminants. Concernant les zones d'activités, le choix de leur localisation est fait selon les facteurs déterminants pour les entreprises, étant donné qu'elles leurs sont destinés. Toutefois, les collectivités locales désireuses d'implanter une zone d'activités doivent acquérir des terrains constructibles, ce qui nécessite d'élaborer et de mettre en oeuvre des politiques foncières. Les facteurs de localisation précédemment cités peuvent être qualifiés d'objectifs, mais à ceux-ci s'ajoutent des facteurs moins objectifs liés aux représentations spatiales que se font les acteurs de ces localisations relatives. En effet, en considérant « qu'aucun acteur [...] ne bénéficie d'une totale transparence des processus économiques et des données spatiales », « toute décision aux conséquences spatiales est donc influencée par la façon dont l'acteur économique se représente le contexte spatial9(*) ». Ainsi, l'appréhension des dynamiques et des logiques de localisation nécessite l'analyse de facteurs concrets, liés aux caractéristiques des territoires, aux réseaux routiers ou encore aux coûts des terrains et des locaux et à leurs disponibilités, mais aussi à des facteurs moins objectifs relatifs à la perception spatiale des acteurs.

Les définitions de ces notions nous permettent de considérer que les entreprises formalisent des demandes de localisations. L'action des acteurs institutionnels locaux et les projets de zones d'activités qu'ils mettent en oeuvre, en fonction des caractéristiques des territoires, formalisent des offres de localisations. L'annonce, puis la mise en service d'un axe autoroutier dans ce contexte est donc susceptible d'influencer les logiques de localisation, mais aussi dans les moyen et long termes, de générer de franches évolutions de la géographie économique des territoires auparavant dépourvus d'une telle infrastructure. Car comme le rappelle R. BRUNET10(*), les territoires changent ou se créent tous les jours et cela à toutes les échelles d'observation. Tous les jours, il y a des activités qui disparaissent, d'autres qui apparaissent, d'autres qui se déplacent, etc. L'amélioration de l'accessibilité qu'engendre la mise en service d'une autoroute est un facteur qui peut s'avérer fondamental dans ces processus d'évolutions territoriales, on peut dès lors se demander dans quelles mesures?

La mise en service d'une autoroute représente une nouvelle caractéristique de l'offre territoriale de localisation. Pour une entreprise, l'intérêt de se localiser à proximité d'une telle infrastructure peut être motivé par les gains de temps qu'elle permet, évalués généralement de 40% à 50%11(*), mais aussi par la baisse des coûts de transport qui serait de l'ordre de 15%12(*). L'effet vitrine est également à prendre en compte, car située en bordure d'une autoroute, une enseigne peut être bien mise en valeur et bénéficier ainsi d'une publicité visible depuis l'infrastructure. Toutefois, il convient de souligner que la localisation à proximité d'une autoroute dépend aussi du secteur d'activité de l'établissement économique considéré. Par exemple, il paraît évident qu'une entreprise de transport a plus intérêt à se localiser à proximité d'une autoroute qu'un petit commerce. Les acteurs institutionnels locaux se doivent également de se positionner face à la mise en service d'une autoroute, en mettant en place des politiques spécifiques. « Pour eux, un enjeu majeur de développement local apparaît : comment transformer des gains d'accessibilité par l'autoroute en facteur d'attractivité socio-économique ?13(*) »  Pour répondre à cette problématique, la mesure la plus couramment employée est la création de zones d'activités, situées non loin des diffuseurs autoroutiers ou en bordure de l'axe. Il s'agit donc pour ces collectivités de valoriser l'autoroute à l'échelle territoriale considérée, afin de répondre aux demandes de localisation des entreprises en intégrant cette nouvelle caractéristique de leur territoire. Ainsi, l'autoroute peut être perçue comme un atout pour le développement. Les collectivités locales sont donc susceptibles de profiter de l'accessibilité de la nouvelle infrastructure, et ainsi d'accroître l'attractivité de leurs territoires en créant de nouvelles zones d'activités. Toutefois, la réussite de ces politiques de valorisation n'est pas assurée par la seule présence de l'axe, car la situation géographique du territoire par rapport à l'axe, la cohérence territoriale et des différents projets, le profil des actions menées pour valoriser l'autoroute, l'aspect organisationnel des collectivités locales,... sont autant de facteurs fondamentaux à prendre en compte quant aux probables retombées positives induites par une telle infrastructure.

La question de l'influence sur la géographie économique d'une infrastructure telle qu'une autoroute est délicate et complexe de part la multitude des facteurs qui intervient dans ces processus. Il est donc nécessaire pour déterminer la problématique, puis pour élaborer l'approche méthodologique, d'aborder tous ces facteurs et de les appréhender globalement, c'est-à-dire en prenant en compte les interactions qui les unissent.

Le questionnement initial de cette étude est le suivant : dans quelles mesures le futur axe A89 de Balbigny à La-Tour-de-Salvagny est-il susceptible d'engendrer une évolution de la géographie économique des territoires qu'il desservira ?

Afin de répondre à ce questionnement, plusieurs hypothèses sont émises, à partir desquelles la problématique centrale de cette étude sera établie :

- Tout d'abord, nous ferons l'hypothèse que cet axe autoroutier aura une influence sur la structuration socio-économique des territoires qu'elle desservira.

- Ensuite, nous partirons du principe que la localisation des entreprises et des zones d'activités est un élément susceptible de révéler l'attractivité induite par le futur axe autoroutier.

- Enfin, est émise l'hypothèse selon laquelle le rôle, le jeu et les stratégies d'acteurs des territoires sont déterminants dans les processus de localisation des entreprises et des zones d'activités.

Il convient ici de rappeler que cette étude est inscrite dans la durée, car menée cinq années avant la mise en service du futur « barreau » terminal de l'A89. La problématisation, puis l'approche et les méthodes élaborées pour y répondre seront donc construite autour de cette situation dans la temporalité de l'autoroute.

La problématique centrale de ce mémoire est la suivante :

Quelle sera l'influence de la mise en service du futur axe A89 de Balbigny à La Tour-de-Salvagny sur la structuration territoriale des entreprises et des zones d'activités ?

Elle se décline en plusieurs sous problématiques :

Comment se caractérise actuellement la structuration territoriale des entreprises et des zones d'activités ? Il paraît en effet essentiel de dresser un état des lieux concernant les zones d'activités et les entreprises pour asseoir les analyses qui seront menées dans ce mémoire, mais aussi dans le cadre de futures études. La structuration territoriale est appréhendée ici comme la disposition globale des localisations des zones d'activités et des entreprises.

Quel est le rôle des acteurs institutionnels locaux et des acteurs économiques dans ces dynamiques de localisation ? Ce sont les acteurs qui sont à l' origine des choix d'implantation des zones d'activités ou d'entreprises. Dès lors, il semble essentiel d'évaluer leur rôle et leur cadre d'action pour répondre à la problématique.

Quels sont les facteurs de localisation les plus importants pour les entreprises ? Cette question est importante, car elle nous permettra d'appréhender l'importance de multiples facteurs, dont la proximité de l'autoroute.

Quels sont les profils des actions envisagées ou d'ores est déjà menées par les acteurs institutionnels locaux pour valoriser le futur axe autoroutier ? Des mesures de valorisation sont d'ores et déjà élaborées et mises en oeuvre. Il s'agira donc de déterminer leur nature, et plus particulièrement la création ou l'extension de zones d'activités

Comparativement aux autres études menées sur la même thématique, quelles seront les « effets » économiques susceptibles de se produire ? La comparaison avec d'autres études menées sur la même thématique va nous permettre d'évaluer l'influence du futur axe sur la structuration territoriale des zones d'activités et des entreprises.

Quel sont le rôle et l'utilité de cette étude ? Comment peut-elle servir de support à de futures investigations ? Le cadre de réalisation de ce mémoire ainsi que sa vocation à servir de référence à de futures études impliquent ce questionnement. Il semble aussi que les informations et données recueillies puissent avoir une utilité et un intérêt pour les acteurs institutionnels et économiques.

Ce mémoire a donc pour objectif principal d'évaluer l'influence de la mise en service du futur axe A89 de Balbigny à La-Tour-de-Salvagny sur la structuration territoriale des entreprises et des zones d'activités. Il répond à la demande de l'observatoire de l'environnement et des territoires de l'autoroute A89 faite auprès de l'université Jean Monnet afin que plusieurs étudiants s'attellent à l'analyse, antérieurement à la mise en service de la future infrastructure, de plusieurs thématiques en rapport avec la future infrastructure. Cette étude se situe cinq années avant la mise en service prévue de ce tronçon, et s'inscrit ainsi dans une méthodologie d'analyse « avant - après », ou ex ante - ex post, qui permet de présenter des comparaisons d'évolutions entre variables examinées à chacune de ces périodes. Même si cette approche est critiquable, elle apporte certains avantages, comme la quantification des évolutions par exemple. L'approche développée sera donc empirique et locale, contingente à un espace délimité. Sa fonction sera donc de fournir « un état de lieux » ou encore « un état référence » relatif aux zones d'activités et aux entreprises localisées sur les territoires de la zone d'étude qui sera déterminée. Cet état des lieux pourrait apparaître statique, prenant davantage la forme d'un rapport que d'une véritable étude. Pourtant, il va permettre d'appuyer un certain nombre d'analyses, qui sans cet état des lieux auraient été impossibles, notamment celle de prospective par comparaison. Aussi, le cadre de réalisation de cette étude implique une réutilisation de cet état référence pour le comparer à une situation ultérieure, certainement au moment de la mise en service de cet axe. Afin d'assurer une exploitation optimale de cette étude pour de futures investigations, trois « outils » ont été construits. Tout d'abord, il s'agit d'une base de données concernant les zones d'activités et renseignant sur une multitude de leurs caractéristiques (cf. annexe 4). Aussi, des indicateurs pertinents ont été déterminés dans différents domaines afin, en les comparant lors d'une prochaine campagne d'étude, d'évaluer les évolutions à mettre au compte, ou non, de l'infrastructure nouvellement mise en service. Puis, en s'inspirant des travaux de S. LE CORRE14(*), il est apparu pertinent de construire un Système d'Information Géographique spécifique au thème d'étude de ce mémoire.

Cette étude est donc inscrite dans la durée pour examiner de manière concrète non pas tant les « effets autoroutiers », vision trop mécaniste et déterministe, mais plutôt les interactions multiples et diverses entre la mise en service d'une autoroute et une économie territorialisée, comprenant ses propres acteurs économiques et institutionnels. Ainsi, le rôle structurant de ce type d'infrastructures, porté par les hommes politiques notamment, s'estompe et donne toute sa place aux rôles et à la stratégie des acteurs locaux, publics et privés. Dés lors, pour mener à bien cette étude, il est apparu important d'appréhender globalement les processus de localisation des activités économiques grâce à une approche systémique inspirée des travaux d'E. FAIVRE15(*). Cette approche permet de se détacher du rôle de la seule infrastructure autoroutière pour prendre en compte les entreprises, les zones d'activités, les caractéristiques des territoires et l'action des acteurs institutionnels locaux. Concernant ces derniers, et plus particulièrement dans le cadre des intercommunalités, une série d'entretiens a été réalisée pour évaluer les mesures de valorisation d'ores et déjà élaborées.

Cette étude s'organise en trois parties. Dans la première, nous rappellerons les motivations qui ont conduit à la construction de grands réseaux autoroutiers, puis nous aborderons les études qui ont été menées à leur sujet pour évaluer leurs effets sur les territoires. Etant donné la complexité des processus étudiés, il est apparu nécessaire de consacrer une sous partie à la description de la méthodologie qui sera employée. Cette méthodologie concernera un espace d'étude délimité, dont les caractéristiques seront décrites à la fin de cette première partie.

La seconde partie sera quant à elle consacrée à l'état des lieux. Ce sont tout d'abord la structuration territoriale et les caractéristiques des entreprises qui seront abordées, puis celles des zones d'activités. Enfin, les mesures et politiques de valorisation déjà élaborées seront exposées.

Pour terminer, la troisième partie sera consacrée à un essai de formalisation pratique et prospective. Dans un premier temps, nous tenterons d'évaluer l'influence potentielle du futur axe autoroutier sur le système de localisation des activités, puis sur les économies locales, comparativement à d'autres cas. Puis, dans un second temps, nous décrirons quelle pourra être l'utilité de ce mémoire pour de futures études, mais aussi pour les acteurs institutionnels locaux et économiques.

* 1 BAVOUX J.J., Essai d'évaluation de quelques « effets structurants » autour des échangeurs de l'autoroute A6 en Bourgogne, p. 229 à 244, in VARLET J.(dir.), 1997, Autoroutes, économie et territoires, Actes du colloque de Clermont Ferrand - Mai 1995, SATCAR/CERAMAC, 420p.

* 2 Définition à consulter sur le site : http://www.vie-publique.fr/politiques-publiques/politique-route-securite-routiere/glossaire/

* 3 BUREAU D., TOUJANSKY L., Economie publique : l'évaluation des infrastructures de transports, in FERRANDON B. (éd.), 2005, La microéconomie en pratique, La documentation française, Cahiers français - n° 327.

* 4 IZQUIERDO R., VASSALLO J.M., 2004, Nuevos sistemas de gestion y de financiacion de infraestruturas de transporte, Collegio de Ingenieros de Caminos, Canales y Puertos, Associacion Espanola de la Carretera, 690p.

* 5 Définition issus du site SIRENE. A consulter sur le site : http://www.sirene.tm.fr/fenetre/fenetre.asp?contenu=entreprise

* 6 Définitions disponibles sur le site : http://www.zonesdactivites.org/article/-Zone-d-activit-s----Parc-d-activit-s----Zone-Industrielle--ou--Parc-Industriel-----i8.htm?PHPSESSID=c2ca75ede2c17273148a2d4a814469b9

* 7 Ibid.

* 8 PUMAIN D., 2004, Définition du terme localisation.

A consulter sur le site : http://www.hypergeo.eu/article.php3?id_article=12

* 9 DEBARBIEUX B., représentations spatiales et localisations industrielles : le cas de l'axe Grenoble - Genève, p.93 à 115, in DEBARBIEUX B., GUMUCHIAN H.(dir.), 1993, Géographie économique et représentations , Recueil de textes des communications de la 4e université d'été organisée par le groupe Cham's à Sérignan en avril 1991, Anthropos/Reclus/Economica , 254 p.

* 10 BRUNET R., 2005, Le développement des territoires, Editions de l'Aube, 96 p.

* 11 ORUS J.P., les conséquences économiques de grandes infrastructures routières : bilan et perspectives, p. 155 à 177 in VARLET J. (dir.), 1997, Autoroutes, économie et territoires, Actes du colloque de Clermont Ferrand - Mai 1995, SATCAR/CERAMAC, 420p.

* 12 Ibid.

* 13 LANGUMIER J.F., Pourquoi des observatoires autoroutiers et pour qui ?, p. 95 à 98 in VARLET J. (Dir.), 2003, Autoroutes, Acteurs et Dynamiques Territoriales, revue Géocarrefour, volume 77- n°1, 112p.

* 14 LE CORRE S., 2000, Intégration et évaluation de l'Information Géographique Numérique dans le cadre des procédures des observatoires autoroutiers. Démarche appliquée à l'A20 et à la RN88, Thèse de doctorat en géographie, Université Toulouse-Le Mirail, 205 p.

* 15 FAIVRE E., 2003, Infrastructure autoroutière, mobilité et dynamiques territoriales, Thèse de Doctorat en géographie, Université de Franche-Comté, 620p.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand