L'Etat, engagé sur la scène internationale ou
non dispose de nombreux moyens pour se soustraire de ses obligations notamment
quand il est question de respecter le droit international.
Toute fois, si cet argument persiste, il n'est pas prit en
compte de façon générale. C'est ainsi que les obstacles
envisagés sous le double plan politique et économique
s'inscrivent aussi dans la matérialisation des grands
déséquilibres actuels.
A - LES OBSTACLES POLITIQUES
Les deux obstacles majeures ici sont notamment la
souveraineté et l'irresponsabilité. En réalité,
l'un est tributaire de l'autre. La souveraineté est un principe admis en
droit international et consacré par la charte des Nations Unies. A
l'heure où les conflits internes sont de plus en plus prolifiques, les
dictateurs de tout bord et même les citoyens fondent
généralement leurs augmentations sur l'égalité des
Etats et par conséquent sur l'impossibilité pour un Etat de
s'insurger dans les affaires internes d'un autre. A coté de ce principe
de droit international,
existe celui de l'irresponsabilité. On se pose la
question fondamentale de savoir à partir de quel moment devient-on
responsable de ses actes et surtout jusqu'où. Tels sont les deux points
qui guideront notre réflexion.
1 - La souveraineté de l'Etat.
Dans l'ordre international, l'équilibre est maintenu
grâce au principe de la souveraineté qui consacre une
égalité formelle entre les Etats. Ce principe régule les
relations entre Etats en terme de droits et de devoir.
Chaque Etat a le droit d'exercer sa souveraineté sur
son territoire et le droit de protéger celui - ci contre toute agression
étrangère ou ce qui en tient lieu. La méfiance
engendrée par les Etats suite aux méthodes nouvelles d'espionnage
encourage cet état de refuge derrière la souveraineté.
Celle - ci s'appréhende comme le monopole de la force sur le territoire,
l'autorité suprême. Ceci a pour incidence première
l'inadmissibilité d'une intervention armée ou non dans les
affaires d'un Etat.
Dans la pratique, les conflits armés s'accompagnent
touj ours de violations massives du DIH. « La
souveraineté étant censée protéger l'Etat non
seulement contre une intervention mais aussi contre toute immixtion d'un ou de
plusieurs autres Etats65 », elle est à l'origine de la
mauvaise réception que font les Etats de l'application du droit
humanitaire.
De même, pendant un conflit, l'Etat peut décider
au nom de la souveraineté, de refuser toute idée de secours
humanitaire: c'est l'exercice de la souveraineté au sens absolu. Dans
cette hypothèse toute intervention forcée est perçue non
pas comme la lutte contre les crimes contre l'humanité mais comme un
crime contre la souveraineté.
Ainsi entendu, la souveraineté s'exerce de plusieurs
façon.
- D'abord, les Etats ont le droit d'émettre des
réserves aux traités. Un Etat, à travers un acte
unilatéral peut obtenir l'exclusion ou la modification des effets
juridiques de certaines dispositions d'un traité dans leur application
envers lui. La procédure des réserves consacrée vise
à donner aux Etats un droit de regard profond et au besoin, de limiter
les effets des traités auxquels ils adhèrent à leur
égard surtout lorsque le texte serait vague et pourrait susciter une
interprétation différente.
65 - Jean Charpentier. Le phénomène
étatique à travers les grandes mutations politiques
contemporaines, colloque de Nancy sur l'Etat Souverain à l'aube du XXXI
siècle, SFDI 1994, E ?A Pedone P.27
- Ensuite, on note la question de réciprocité
plus précisément des représailles. Il semble illusoire de
demander à un Etat de clamer sur tous les toits les violations du droit
humanitaire par un autre, de rester passif au lieu d'agir. Dans ces conditions,
la réaction la plus courante consiste à violer également
le droit humanitaire. La réaction instantanée étant l'un
des moyens de gagner à la fois le temps et l'espace, aucun Etat
n'accepterait de rester les bras croisés au non de l'interdiction des
représailles. Celles - ci se trouvent davantage appliquées dans
les conflits internes ou le gouvernement légal répond toujours
aux attaques des forces illégales par une offensive musclée,
visant à anéantir celles - ci qui sont supposées n'abriter
que de vulgaires criminels. Dès lors peut - on traiter ce gouvernement
ou cet Etat de responsable d'une dérive humanitaire?
2- L ' irresponsabilité
La question d'irresponsabilité se pose en des termes
aussi fluctuants et insaisissables que l'entité étatique elle -
même. Il s'agit à travers ce mécanisme, de refuser de se
soumettre à une décision en arguant pour sa défense qu'on
n'est pour rien dans la situation pour laquelle on est accusé. Il s'agit
de balayer d'un revers de la main la responsabilité pour une infraction
donnée. Il faut pouvoir mesurer l'étendu de la
responsabilité sur laquelle pèse un arbitraire certain et
l'établissement de la responsabilité qui reste tributaire
d'imprécisions flagrantes.
- Les imprécisions sur l'établissement de la
responsabilité.
La préoccupation est simple mais assez pertinente: Qui
a la charge de déclarer un Etat souverain coupable d'une violation aux
droits des civils à l'occasion d'un conflit armé? Les
dénonciations qui sont tantôt l'oeuvre des Etats tantôt le
fait des organisations humanitaires ne sont en aucun cas des sentences au sens
juridique du terme. Il s'agit tout simplement des déclarations qui ne
lient pas l'Etat en question et qui n'ont aucune valeur juridique. Cet aspect
purement déclaratoire des observations des Etats et organisations
humanitaires a pour unique but d'attirer l'attention de la communauté
internationale et celle éventuellement de l'Etat qui ferait semblant de
ne pas constater ce qui se passe sur son territoire.
Poussant l'analyse plus loin, au sein d'un Etat, la
rébellion qui viole le droit humanitaire ne peut être poursuivie
sur le plan international parce que dépourvue de statut juridique. Seuls
ses membres peuvent être poursuivis individuellement.
De même, l'Etat ne saurait perdre son droit de maintien
ou de rétablir l'ordre sur son territoire. Cette responsabilité
de haute facture incombe à l'Etat sans partage66.
En définitive, seule la commission internationale
d'établissement des faits peut enquêter valablement sur une
infraction grave aux conventions et protocoles67.
- L'arbitraire dans l'Etendue de la responsabilité.
Il n'existe aucun critère objectif de
détermination de la consistance de la sanction. D'abord, l'Etat n'est
pas une personne physique, par conséquent, ne peut être
pénalement responsable, ce serait d'ailleurs une absurdité.
Ensuite, dès lors qu'il n'est tenu qu'à
indemnité68, s'il refuse de se soumettre au règlement
de la note, il sera difficile de l'y contraindre sans courir le risque de
provoquer une catastrophe humanitaire. Cette situation est
généralement observée lorsque la partie au conflit qui
serait reconnue coupable de violations aux dispositions des conventions et
protocoles fait face à d'énormes difficultés
économiques.
B - LES OBSTACLES ECONOMIQUES
Le sort des populations pendant et après la guerre
n'est pas qu'une affaire politique, c'est d'avantage une question
économique qui trouve son fondement tantôt dans l'incivisme dans
les rapports entre Etats et Nations Unies ou organisations humanitaires. Les
problèmes économiques qui encouragent négativement le sort
des civils sont parfois d'essence insurmontable pour les Etats,
véritables pauvres, dépourvus de moyens pour faire face aux
désastres.
1 - L'incivisme économique.
Le terme incivisme est emprunté ici au droit fiscal
qui l'utilise couramment pour désigner le refus
délibéré de payer ses impôts.
Si l'argent est le nerf de la guerre, il est encore plus le
nerf de la paix. C'est la contribution des Etats membres des NU
qui constitue la source de financement de ses actions. Beaucoup
d'Etats ne s'acquittent pas toujours de leurs contributions. Ceci est à
l'origine des difficultés de financement qui mettent à mal
66 - Art3AL1 PII
67 - Art 90P1 68 - Art 91 P1
les actions et les activités humanitaires de
l'ONU sur le terrain. Lors de la conférence de presse
qui s'est tenue à OSTLO en décembre 1988, PEREZ de QUELLAR
déclarait à un membre de l'armée américaine qui le
félicitait pour le prix Nobel décerné aux forces des
NU: «... malheureusement c'est près qu'un prix
à titre posthume. Vous vous dites nation pacifique alors, de
grâce, payez vos dettes, aidez-nous.» Cette phrase illustre bien le
malaise auquel fait face le Conseil de Sécurité chaque fois qu'il
faut déployer une force de maintien de la paix pour intervenir dans un
pays ou lorsqu'il faut apporter un appui financier ou matériel à
une organisation humanitaire.
Cette situation fort regrettable reste une entorse au
DIH quand on sait que les principaux débiteurs des
NU sont encore ceux là qui clament le respect des
droits de l'homme ou du DIH partout. Il s'agit plus d'un
mépris du système et d'un manque de volonté manifeste que
d'un manque de moyens. Il est à leur sens plus facile et plus judicieux
de refuser de payer ses contributions que de se déployer sur le terrain
pour intervenir directement au nom d'intérêts
égoïstes.
Ces cas regrettables ne doivent se confondre avec les
obstacles économiques liés à la pauvreté des
Etats.
2- La pauvreté manifeste.
La pauvreté peut se définir au sens stricte ici
comme un état d'insuffisance ou de manque de façon
générale et quasi - permanente des choses nécessaires
à la vie. Elle se caractérise par la faiblesse des revenus, du
niveau de vie général des populations, la faiblesse du taux de
scolarisation, le taux de mortalité élevé, le manque
d'infrastructures routières, ferroviaires et sanitaires, la mauvaise
couverture en moyen de télécommunication ... La pauvreté,
quelle soit liée aux facteurs naturels ou non constitue une
sérieuse entrave à l'action humanitaire.
Dans certains conflits armés, le premier
réflexe des soldats en déroute ou non est de piller la population
non pas dans le but de nuire, mais dans celui de se ravitailler et de faire des
provisions faute de moyens de suivie. Dans ce contexte, la population est
molestée, torturée au besoin pour laisser ce qu'elle a. Il arrive
aussi que ces actes de pillage soient l'oeuvre d'autres civils qui y sont
contraints pour les mêmes raisons.
Dans ces pays, les structures sanitaires sont insuffisantes.
L'accès aux soins ne suit pas l'avancée de la catastrophe; seul
un recours à l'extérieur peut permettre de trouver un
début de solution. La réponse et l'arrivée des secours
étrangers ne sont pas souvent spontanées en raison des
problèmes financiers et de logistique. Ceux - ci n'arrivent très
souvent que lorsque le bilan est suffisamment élevé. Et
même, lorsque ces secours sont là, l'accès aux
sinistrées n'est pas
touj ours évident du fait de la qualité des
routes et chemins de fer. Très souvent dans ces conditions, les moyens
aériens sont utilisés avec ce que cela suppose comme coût.
En outre, la qualité des communications entre les lieux sinistrés
et les autres n'est pas toujours meilleure. Ce cas est très souvent
celui des pays du tiers monde et précisément d'Afrique.
Au Rwanda et en Somalie les organisations humanitaires ont
trouvé de véritables catastrophes. Les Etats concernés
n'avaient pas eu suffisamment de moyens pour organiser les premiers secours en
attendant la réaction étrangère.
Ici, les organisations humanitaires ont eu trop de peine
à établir des camps, à déplacer les personnes
sinistrées et à les regrouper. Elles ont fait face aux
problèmes d'électricité et d'eau potable. Les
regroupements familiaux en vu de la matérialisation de l'unité et
de l'intégrité n'ont pas été aisés dans des
pays où le système d'identification est encore précaire et
où les médias sont du reste embryonnaire.
Enfin, les membres d'organisations humanitaires et les
volontaires sont guidés par le bénévolat; mais lorsque la
situation se prolonge dans le temps, un soutien financier s'impose.
Ainsi, les moyens doivent suivre la volonté pour un
rendement efficient des actions humanitaires afin de pouvoir atténuer
les obstacles liés a la conduite des hostilités.