La répression des infractions procède d'une
vielle idée selon laquelle la sanction peut s'avérer être
une solution satisfaisante dans la recherche des voies et moyens visant
à limiter les attaques contre les civils. Chaque fois qu'un individu,
fusse-t-il chef d'Etat sait que certains actes ont été
réprimés sévèrement, il réfléchit par
deux fois avant de les poser s'il ne s'en abstient pas tout simplement.
La question de la répression de ces infractions est
largement reprise dans les textes fondamentaux52.
La Responsabilité ici consacrée est au sens de
l'article 146 de la IV eme Convention de Genève, individuelle et non
collective. En principe, les
50 - Lieutenant Général LARK-ERIL Wahlgen ancien
commandant de la Finul et de la FORPRONU. Symposium sur l'action humanitaire et
les opérations de maintien de la paix. Genève 22-24 juin 1994.
<<en avril 1993, lorsque la situation militaire et humanitaire s'est
dégradée dans certains villages de l'ex- Yougoslavie, le conseil
de sécurité a institué des zones de
sécurité»
51 -Lieutenant Général LARK-ERIK OP cit. <<
lorsque plus de 400 palestiniens furent déportés au Sud Liban en
décembre 1992, ils demandèrent l'assistance de la FINUL.
conventions et leurs protocoles visent globalement deux
catégories d'infractions les unes qualifiées de
graves53 assorties de l'obligation pour les Etats de les
réprimer pénalement; et les violations à l'égard
desquelles l'obligation des Etats visent seulement à les faire cesser.
La répression de ces infractions incombe essentiellement aux parties
contractantes qui choisissent de déférer les auteurs de ces
infractions devant la juridiction qu'elles jugent compétente. De cette
construction découle l'idée de la Juridictionalisation et
éventuellement celle de la pénalisation.
L'obligation de réprimer les infractions graves aux
textes internationaux relatifs à la protection des civils en temps de
guerre incombe aux Etats qui en devenant parties aux conventions de
Genève, se sont engagés à prendre les mesures
nécessaires pour sanctionner les coupables de ces infractions. Toutes
fois, pour vaincre l'inertie d'un Etat qui ne voudrait pas poursuivre les
auteurs d'infractions graves, la communauté internationale a
pensé et mis sur pied une justice pénale internationale.
La juridiction nationale qui s'oppose à la juridiction
pénale internationale est celle chargée de réprimer les
personnes coupables ou suspectées d'avoir commis des infractions graves
à ces traités, ou encore de les remettre pour jugement à
un autre Etat. Elle est compétente pour les infractions commises sur le
territoire national quel que soit la nationalité et la qualité de
l'auteur. La compétence nationale est tantôt territoriale
tantôt personnelle. L'Etat partie aux Conventions et Protocoles doit
prendre des mesures nécessaires pour établir sa compétence
quand:
- L'infraction a été commise sur tout territoire
sous juridiction dudit Etat ou à bord d'aéronefs ou de navires
immatriculés dans cet Etat;
- quand la victime est un ressortissant dudit Etat et que ce
dernier le juge approprié54
53 - Art 146 IVeme CVG
54 Art 147 IV eme CVG: les infractions graves
visées a l'art précédent sont celles qui comportent l'un
ou l'autre des actes suivants, s'ils sont commis contre des personnes ou des
biens protégées par la convention: l'homicide intentionnel, la
torture ou les traitements inhumains, y compris les expériences
biologiques, le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de
porter des atteintes graves a l'intégrité physique ou à la
santé, la déportation ou le transfert illégal, la
détention illégale, le fait de contraindre une personne
protégée à servir dans les forces armées de la
puissance ennemie, ou de la priver de son droit d'être jugée
régulièrement et impartialement selon les prescriptions de la
présente convention, la prise d'otage, la destruction et l'appropriation
de biens non justifiés par des nécessités militaires et
exécutées sur une grande échelle de façon illicite
et arbitraire.
Cette disposition résume les hypothèses oil la
juridiction nationale est fondée à se mettre en branle pour
réprimer les infractions graves dont la liste est clairement
donnée dans la IV eme Convention de Genève.
De même, il ressort du même texte et en
référence aux articles 105 et suivants de la III eme
Convention de Genève, que l'accusé aura droit au respect
des droits de la défense tels que l'assistance judiciaire du fait d'un
avocat ou toute personne compétente et éventuellement d'un
interprète; il aura droit aux visites de son conseil, et à la
communication du dossier afin de savoir à temps tous les faits qui lui
sont reprochés pour préparer sa défense.
Les voies de recours lui sont ouvertes notamment l'appel et le
pourvoi en cassation. Ainsi, la décision rendue ne pourra être
exécutée qu'après épuisement des voies de
recours.
La notification des jugements se fera devant les instances
compétentes et devant toute personne intéressée au cas oil
celle - ci aurait été absente lors du prononcé de la
décision.
Enfin, la peine retenue contre l'auteur de l'infraction sera
exécutée dans les conditions prévues par les textes
notamment celles relatives à l'hygiène et à la
salubrité des lieux carcéraux. Les parties contractantes se
chargeront de veiller à ce que les femmes soient séparées
des hommes.
En somme, la juridiction nationale qui peut être saisie
par toute personne intéressée, par toute association ou
organisation ou par l'Etat lui - même en cas de violations aux
dispositions de la IV eme Convention de Genève a un large
spectre d'action. Son intervention dans ce domaine ne s'achève que
lorsque le jugement a été rendu de façon
régulière55. Cette intervention est reconnue et
confortée sur la scène internationale; ses mérites sont
mitigés, diversement appréciés d'oil l'idée de la
pluralité de compétence répressive qui fait la part belle
à la justice pénale internationale.
B - LA JUSTICE PENALE INTERNATIONALE
La justice pénale internationale vient conforter le
principe dit de la juridiction universelle dans la recherche et la poursuite
des personnes suspectées d'avoir commis des infractions graves aux
traités. Il établit la responsabilité pénale
internationale des individus.
55 - la régularité est conférée au
jugement par le respect des droits de la défense l'admission des
recours, la notification des jugements. Cf. art 146 IV eme CVG avec
Renvoi aux art 105 et III eme CVG
La question de la responsabilité individuelle s'est
posée en termes dramatiques devant les horreurs et les souffrances de la
deuxième guerre mondiale. C'est à l'occasion de l'accord de
Londres du 8 août 1945 portant statut du Tribunal de Nuremberg qu'ont
été définies de nouvelles incriminations internationales
avec le crime de guerre et le crime contre l'humanité.
En fait, si le crime de guerre faisait déjà
partie du jargon des Conventions de La Haye de 1899 et 1907, le crime contre
l'humanité échappait au droit par son caractère
monstrueux67.
La juridiction pénale internationale, véritable
nébuleuse des temps contemporains s'appréhende en
définitive ici tantôt comme le tribunal pénal international
(TPI), tantôt comme le cour pénale internationale (CPI.)
A la différence des tribunaux, ad hoc
déjà existants, la Cour Pénale Internationale toute
récente sera indépendante des Nations Unies et financée
par les Etats parties.
1 - Le Tribunal Pénal International
Notre propos sera essentiellement basé ici sur deux
exemples qui sont et resteront pendant longtemps, les plus marquants de la
dernière décennie. Il s'agit du Tribunal Pénal
International pour le Rwanda (TPIR) et du Tribunal Pénal International
pour l'ex- Yougoslavie (TPI-Y.) Il faut noter d'entrée que l'examen de
ces deux cas vise à montrer comment la répression est
sévère chaque fois que les populations civiles ont
été atteintes par les agissements criminels des
belligérants, des politiciens ou de toute autre personne.
a) Le Tribunal Pénal International pour
l'ex-Yougoslavie
Le TPI-Y a été créé en 1993 par
la résolution 827 du Conseil de Sécurité aux fins de
poursuivre les personnes présumées responsables de violations
graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de
l'ex-Yougoslavie depuis 1991 et en réponse aux graves menaces
portées à l'encontre de la paix et de la sécurité
internationales.
Ce tribunal a reconnu que la notion de crime de guerre
couvrait également les violations graves commises lors des conflits
internes alors qu'en principe, le droit conventionnel ne les admet que dans le
cadre de conflits armés
67 L'idée du crime contre l'humanité ne sera que
très faiblement évoqué dans le préambule de la
IVéme convention de La Haye en ces termes «les
populations et les belligérants restent sous la sauvegarde et sous
l'empire des principes du droit des gens, tels qu'il résulte des usages
établis entre nations civilisées , des lois de l'humanité
et des exigences de la conscience publique ».
internationaux. Cet apport sera consacré l'année
suivante par le TPIR, ce qui fera combler ce qui paraissait
jusque-là, être un vide juridique.
L'une des affaires les plus marquantes de ce tribunal reste
le procès MILOSEVIC56 qui, à l'i nstar de l' affaire
PINOCHET présentera la protection des civils par la répression du
crime de guerre, du crime contre l'humanité et de toutes infractions
graves aux traités. L'aspect évocateur de ce réveil de la
conscience universelle face au massacre des milliers de civils se trouve dans
la qualité même des personnes poursuivies: MILOSEVIC, ancien Chef
de l'Etat voudrait bien fonder son irresponsabilité sur
l'immunité du fait des fonctions qu'il occupait au moment de la
commission des infractions qui lui sont reprochées. C'est dire par le
seul fait des poursuites, que l'immunité tombe de plein droit là
oil naît la monstruosité, le mal, les souffrances inutiles.
Cette affaire, véritable révolution de
l'impunité au nom de l'humanité rappelle l'idée selon
laquelle il faut extrader ou punir, telle que reprise par le
TPIR.
b) Le tribunal pénal international pour le
Rwanda.
Le 8 novembre 1994, le conseil de sécurité des
NU décide de la création d'un TPI
chargé de «juger les personnes présumées
responsables d'actes de génocide ou d'autres violations du Droit
humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens Rwandais
présumés responsables de tels actes ou violations sur le
territoire d'Etats voisins entre le 1er janvier et le 31
décembre 1994. » Ce tribunal est établit à Arusha en
Tanzanie.
A l'examen du procès intenté à Elizaphan
et Gérard NTAKIRUTIMANA57, il ressort que ces deux individus
sont poursuivis pour génocide, crime contre l'humanité et
violation grave de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et au
Protocole II.
De même, le préfet de Kigali, Tharcisse RENZAHO
est poursuivi pour des faits similaires notamment pour avoir incité la
population au meurtre des Tutsis à travers ses interventions
répétées à la Radio Télévision des
mille collines ...
56 - Affaire Milosevic : l'acte d'accusation est
déposé contre l'ancien chef d'Etat le 22 mai 1999 ; le 22 janvier
2001 est délivré le mandat d'arrêt; il se rend à la
justice serbe le 1er avril 2001 et est transféré
à La Haye le 28 juin 2001. le procès sera enfin ouvert le 12
février 2002. il est accusé notamment:
- de crimes contre l'humanité et violation des lois ou
coutumes de la guerre au Kosovo;
- de violation des lois ou coutumes de la guerre, infractions
graves aux conventions de Genève et crime contre l'humanité en
Croatie
- de génocide et complicité de génocide,
crime contre l'humanité, violation graves des Conventions de
Genève et violation graves des lois ou coutumes de la guerre en
Bosnie.
57 - TPIRAffairesN°ICIR- 96- 10-I etICIR-96 -17-5
Le conseil de sécurité à travers ces
deux cas n'est pas resté aveugle devant les atrocités qui ont
marqué la décennie 90 dans les conflits de Bosnie, en
exYougoslavie et au Rwanda. Cette intervention de l'ONU ne
s'inscrit pas seulement dans le cadre de la prévention mais surtout de
la répression qui, avec son effet dissuasif convaincra les personnes
animées d'esprits maléfiques, criminels. En cas de continuation,
ceux-ci connaîtront les affres de la cour pénale
internationale.
2- La Cour Pénale Internationale (CPI)
Pour comprendre cette juridiction toute nouvelle, il suffit
de se retourner vers les déclarations de Richard Dicker, directeur du
programme justice internationale à Human Rights
Watch:<<la Cour Pénale Internationale représente
l'institution en charge des droits humains la plus importante des cinquante
dernières années. C'est cette cour qui tiendra pour responsables
de leurs actes les prochains SADDAM, POLPOT et PINOCHET >>.
La CPI est une juridiction internationale
permanente qui, poursuivra et réprimera des individus
indépendamment de leurs rangs sociaux, responsables des crimes contre
l'humanité, crimes de guerre, crimes de génocide et crimes
d'agression.
Elle se distingue:
- De la cour internationale de justice (CIJ) qui ne
connaît que des litiges entre Etats relatifs aux violations des
règles de droit international. La CIJ ne juge pas les individus.
- Des tribunaux pénaux internationaux ad hoc; ceux-ci
ont des compétences limitées notamment dans le temps et l'espace.
C'est ainsi que le mandat du TPIR ne couvre que la
période qui va du 1 er janvier au 31 décembre 1994.
Cette logique veut donc qu'à chaque conflit, il y ait un TPI.
Or la CPI peut exercer partout et contre n'importe quel citoyen
dès lors qu'il s'agit des <<crimes de guerre >>,
<<crimes contre l'humanité >>, <<crimes de
génocides>> ou <<crimes d'agression. >> Il peut
être saisi d'office par les soins de son procureur pour toute infraction
qui rentre dans la compétence de la cour58. Elle
reconnaît toutefois une priorité de compétence des
juridictions nationales sur elle-même59. Elle aura
autorité pour poursuivre en justice les crimes internationaux les plus
graves commis après le premier juillet 2002.
58 Art. 13 et 14 du statut de la CPI
59 - Art 17 statut précité