P2- LES LIMITES LIEES A LA REPRESSION
La répression internationale des crimes de guerre est
consacrée et se développe assez rapidement avec les tribunaux
internationaux et la Cour pénale internationale. Ces juridictions
elles-mêmes sont fortement limitées.
- les tribunaux pénaux internationaux ont
laissé un goût d'inachevé. En principe, ils ont
consacré une inégalité dans les poursuites, la
délivrance des mandats d'arrêts. En pratique, il est difficile,
après une crise humanitaire de retrouver tous les coupables et
même de les poursuivre. Certains sont parfois de hauts dignitaires qu'il
est préférable de laisser partir pour éviter d'être
compromis. Ainsi, un commentateur dont nous n'avons jamais pu retrouver
l'identité déclarait un jour sur les ondes d'une radio son
indignation en ces termes: «Quand vous tuez un homme, on vous condamne
à la peine de mort. Quand vous en tuez dix, on vous envoie dans un asile
psychiatrique. Quand vous tuez des milliers, on vous invite à une
conférence de paix.» cette idée reprise ici traduit le iou
de la justice internationale qui a tendance à discriminer les
criminels.
- La lenteur de la justice pénale internationale est
aussi un facteur limitant le DIH. Les criminels sont très souvent
poursuivis après de longues années et les procès ne sont
bouclés que des dizaines d'années plus tard. Or, le but de la
justice est de sanctionner pour attirer l'attention. le fait qu'un
procès ne soit pas bouclé dix ans après la commission des
violations favorise la loi de l'oubli. La sanction une fois prononcée ne
concerne plus qu'une poignée de personnes usées par le
procès.
- Enfin, l'impuissance de la justice internationale est de
taille. Lorsque le
Président Charles Taylor déclare que les
hostilités ne pourraient être
interrompues tant que les poursuites ne sont pas
abandonnées contre lui, on ne
peut que croiser les doigts.
A- LA COMMISSION INTERNATIONALE D'ETABLISSEMENT DES FAITS
Le droit coutumier consacrait déjà la
possibilité d'une enquête visant à établir la
réalité des infractions au DIH. De même
que pour la notion de puissance protectrice, elle est restée
jusqu'aujourd'hui inutilisée dans la mesure oil sa mise en oeuvre
nécessite l'accord de deux Etats. On voit mal des Etats ennemis en train
de s'entendre pour faire enquêter et constater leurs atteintes mutuelles.
Cette possibilité est toutefois offerte et prévue dans la
IVème Convention.
Prolongeant la réflexion, le Protocole I prévoit
pour le futur la création d'une commission permanente dont la
compétence ne sera cependant obligatoire envers un Etat qu'à
partir du moment où celui-ci l'aura expressément
reconnu75. Qu'il s'agisse de l'une ou de l'autre, le problème
reste entier. L'Etat est le seul maître du jeu. Il peut décider
d'y prendre part, de reconnaître la structure ou non. En cas de
reconnaissance, il reste libre d'accepter ses services et en dernière
analyse, s'il le souhaite, les résultats d'enquête ne peuvent
être publiés. Cette approche visant à améliorer ce
contrôle reste elle aussi vaine à cause de la suspicion qui
pèse autour d'elle. Rares sont les Etats qui, conscients des abus qu'ils
posent ou sont susceptibles de poser, admettraient bien que leurs violations
soient établis.
B - LES AUTRES LIMITES
Le panel ici est presque connu. Les textes internationaux ont
presque tout prévu sauf le régime de la sanction. Les sanctions
sont prévues mais non quantifiées. Que court un criminel de
guerre? Dix ans d'emprisonnement, vingt ans ou tout simplement un an? Si le
renvoi est fait à l'ordre juridique interne, les instances nationales
peuvent bien décider de protéger ceux qu'on qualifierait de
criminels ou alors, refuser même de lever l'immunité. Ce recours
au juge international reste donc frappé d'une limite curieusement
négligée. C'est l'ouverture d'une brèche à
l'arbitraire. Le juge pourra ici aussi, pour deux infractions de même
nature, appliquer deux sanctions différentes. C'est l'éternel
problème de l'intime conviction dujuge.
Les Conventions comme les Protocoles stipulent clairement que
les infractions graves doivent être réprimées. Ces textes
toutefois ne fixent pas euxmêmes de peine précise, pas plus qu'ils
n'instituent de juridiction pour juger les contrevenants. Ils se contentent
d'exiger expressément des Etats que ceux-ci prennent des mesures
législatives nécessaires pour sanctionner les personnes
responsables de violences graves.
75- Torelli m. Opcit, pp.102-103
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