La Cour Pénale Internationale et le terrorisme international: Le problème de compétence ratione materiae( Télécharger le fichier original )par Jean Marie Vianney NYIRURUGO Université Libre de Kigali - Rwanda - Licence en droit (Ao) 2006 |
CHAPITRE III. DE LA NECESSITE D'UNE REPONSE PENALE UNIVERSELLE AU CRIME DE TERRORISME INTERNATIONALAu cours de ce chapitre nous tentons de proposer des réponses tant sur le plan juridique que judiciaire du terrorisme international. III. 1. La réponse juridique du terrorisme internationalDes progrès considérables ont été effectués par les Etats pour enrayer le terrorisme sur le plan international que régional, et particulièrement au sein de l'Union Européenne. Avec une force plus ou moins contraignante, les Etats membres de l'Union Européenne sont désormais obligés d'intégrer la lutte contre le terrorisme dans leurs législations pénales internes, de prévoir l'infraction et la sanction des auteurs.
Cependant, sur le plan international, même si le terrorisme est devenu prioritaire et par là, la condamnation unanime de cet acte lâche et abominable, la pleine coopération judiciaire se heurte encore à bien des obstacles et des zones d'ombre subsistent pour un traitement impartial des auteurs. Concernant la qualification de l'acte de terrorisme, il ressort de la réflexion des experts deux lignes directrices essentielles : premièrement, commis en temps de guerre le terrorisme est une infraction grave au Droit International Humanitaire (DIH). Les auteurs peuvent être jugés par n'importe quel Etat partie aux conventions de Genève en vertu du principe aut dedere, aut judicare et en cas de carence par la CPI, son statut prévoyant sa compétence pour de tels actes. Deuxièmement, commis en temps de paix, les experts s'entendent pour soutenir que lorsque l'acte de terrorisme réunit les critères exigés pour être qualifié de crime contre l'humanité, rien ne devrait faire obstacle à la compétence de la CPI.1(*)06 Cependant, cette juridiction n'intervient qu'à titre complémentaire des juridictions pénales internes et pour autant que les autres conditions, principalement le fait que l'Etat concerné soit partie au Statut de la CPI, soient réunies.1(*)07 Nous pensons que cette restriction ajoutée au fait que le terrorisme n'est pas formellement inclus dans la compétence de la CPI et qu'il en a même été délibérément exclu, a pour résultat que la sanction des actes de terrorisme est laissée à l'appréciation unilatérale des Etats. Or, le plus souvent, et quelle que soit l'infraction internationale considérée, les Etats se refusent, sur le plan judiciaire interne, à arrêter, juger, condamner les dirigeants d'Etats encore en exercice, présumés commanditaires des actes terroristes au mépris de l'obligation aut dedere, aut judicare issue des quatre conventions de Genève. Cela est d'autant vrai dans le domaine du terrorisme international que cette infraction souffre d'un manque de reconnaissance, comme si l'acte de terrorisme pouvait être, parfois, en raison de son caractère politique, plus excusable qu'une autre infraction internationale, comme si l'on ne voulait pas y toucher par crainte, peut être, que les ennemis d'aujourd'hui deviennent les alliés de demain.1(*)08 A notre avis, cette difficulté d'appréhender avec justesse le terrorisme peut conduire à des solutions tout aussi unilatérales qu'illégales, à la négation des droits attachés à la personne humaine. Ainsi, la guerre menée contre l'Afghanistan, puis celle engagée contre l'Irak montre à l'évidence que la réponse au terrorisme international n'est pas encore maîtrisée avec la sérénité et le discernement indispensables. En effet, la non reconnaissance d'un Statut pour les personnes détenues sur la base américaine de Guantanamo comme les ripostes militaires organisées contre la population sont autant d'exemples de violation des dispositions essentielles du droit international.1(*)
A l'opposée, les intolérables immunités, encore invoquées au prétexte d'une coutume internationale désuète, pour protéger les dirigeants en exercice de toute poursuite sont tout autant illégales et elles doivent définitivement être abolies par les Etats, quelque soit le crime commis, y compris celui de terrorisme international. En outre, la différence de traitement judiciaire instaurée par les Etats dans le Statut de la CPI, entre un dirigeant d'Etat commendataire de crime contre l'humanité, voire de génocide, et celui qui ordonne la commission d'acte de terrorisme n'est ni réellement fondée ni socialement admissible. De la même façon, le refus d'arrêter et juger tous les auteurs et complices du crime de terrorisme en application du principe de la compétence universelle fussent-ils des dirigeants en exercice, n'est plus acceptable2(*) Nous pensons également que, le terrorisme, commis en temps de guerre ou en temps de paix est contraire au droit international conventionnel ou coutumier, puisque les attaques délibérées contre les populations civiles sont absolument prohibées et qu'aucune cause aussi juste soit-elle ne les justifie et la transgression de cette interdiction générale et absolue doit être sanctionnée. Toutefois, pour être cohérente, comme précise Madame DOUCET, la sanction doit être harmonisée car le risque est grand aujourd'hui d'aboutir à des sanctions disparates ou à une absence de punition.3(*) D'après Garzn BARTAZARD, magistrat à l'audience nationale espagnole « la réponse au terrorisme internationale n'est évidemment pas militaire. La réponse part nécessairement du droit, à travers l'élaboration et l'approbation urgente d'une convention internationale sur le terrorisme qui unifie les concepts et inclut les normes devant réguler les modes d'investigation et de coopération policière et judiciaire, et permettant l'élimination de toutes les entraves aux enquêtes dans les pays qui abritent les différents groupes terroristes. La création d'un espace unique universel, ce qui suppose nécessairement la ratification urgente du Statut de la Cour Pénale Internationale et l'aide aux pays concernés pour qu'il puissent accroître leurs moyens non militaires mais plutôt humanitaires, culturelles et économiques, sont autant de mécanismes juridiques qui puissent servir pour combattre le terrorisme international. »1(*)12 Dans le même ordre d'idées, Frank KAMPA, précise que, même si le droit ne peut apporter qu'une réponse partielle à la menace terroriste, cela ne signifie pas que la réponse au terrorisme doit s'affranchir du droit.1(*)13 Nous pensons avec ces auteurs que, les Etats devraient accélérer les travaux d'élaboration d'une convention générale sur le terrorisme international, inciter les Etats non parties au Statut le Rome de la CPI de le ratifier et inclure le terrorisme international dans les compétences de la CPI en affirmant leur solidarités juridiques en vue de poursuivre et juger tous les auteurs du crime de terrorisme international. * 106 DOUCET, G., Op.Cit., p.534. * 107 Art 1 et 4. (2) du Statut de Rome de la CPI. * 108 DOUCET, G., Op.Cit., p.532. * 1DOUCET, G., Op.Cit., p.532. * 2 Ibidem. * 3 DOUCET, G., Op.Cit., p.533. * 112 BARTAZAR, G., « La seule réponse au terrorisme », disponible sur http:// www.s.lycos.fr/terrorisme/ doc.html, consulté, le 26/05/06. * 113 KAMPA, F., « Guerre au terrorisme retour juridique sur l'après le 11 septembre 2001 », disponible sur http://www.ehss.fr/ terrorisme.html, consulté le12/07/06. |
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