2 ORIGINE DU BESOIN D'AJUSTEMENT EN HAÏTI
Les besoins d'ajustement varient d'un pays à un
autre et semblent surtout résulter de la mauvaise utilisation des
recettes en devises et des ressources de l'Etat suite à
l'élévation rapide de la valeur de leurs exportations.43
Ces pays ont souvent accru leurs investissements dans
des projets
42 Guillaumont définit l'ajustement
structurel, comme étant l'ajustement durable de la balance des
paiements obtenu au moyen d'une adaptation des structures
économiques (principalement des structures de production),
c'est-à-dire autrement que par une réduction de la
croissance économique ou par un recours accru ou excessif
aux capitaux extérieurs. Cf. GUILLAUMONT Patrick, Croissance et
Ajustement, les problèmes de l'Afrique de l'Ouest, Economica,
Paris, 1985
43 Guillaumont a essayé de catégoriser
les pays ACP en fonction de la nécessité de leur besoin
d'ajustement structurel. Quatre indicateurs de
besoin d'ajustement sont retenus pour définir un
indicateur synthétique : deux indicateurs fondamentaux : solde
courant et croissance ; et deux indicateurs complémentaires :
niveau d'endettement extérieur, et de taux de change réel.
Selon les critères retenus, sont considérés comme ayant
un fort besoin d'ajustement ceux dont simultanément le solde de la
balance des paiements courants et le taux de croissance du PIB sont
inférieurs à leur valeur médiane, ou encore ceux qui
combinent l'une des deux propriétés précédentes
avec un encours de la dette extérieure ou un taux de change effectif
réel supérieur à sa valeur médiane.
Cas 1 : Un pays dont la balance courante est
déficitaire et la croissance du produit faible, voire
négative.
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Crises, réformes économiques et pauvreté
en Haïti
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surdimensionnées et mal préparés, ainsi
que leur dépense courante, en augmentant les effectifs de la fonction
publique, secondairement le niveau des rémunérations, et
parfois en étatisant une partie de l'appareil productif.
Le besoin d'ajustement de l'économie haïtienne
résulte en grande partie des mêmes conditions qui ont
favorisé la croissance des années soixante-dix accentué
par le contexte d'endettement, de déséquilibres financiers et de
stagnation, voire de régression économique du début la
décennie 80, ayant atteint la majorité des pays en
développement. Le retournement de tendance survenu au niveau
mondial à l'époque n'a servi que de détonateur et
d'amplificateur à la crise de l'économie et des finances
haïtienne en germination. Contrairement à la discipline
fiscale satisfaisante de la décennie 70, « à partir de
1979-80, la situation [a évolué] cependant de façon
différente car elle est marquée par une crise des finances
publiques sans précédent depuis les années 20.
[...] Des dépenses incontrôlées, conséquences de
décisions politiques erronées, sont à l'origine de cette
crise »44. Elle a contribué à empirer les
déséquilibres de la balance commerciale et des paiements. En
1981, le déficit budgétaire et celui de la balance commerciale
atteint respectivement 13% et 20,1% du PIB. Un recul important est
constaté dans les principaux secteurs productifs
définis par l'agriculture (-2%), l'industrie
manufacturière (-12,4%), l'industrie extractive (-14,6%) et cette
tendance à la baisse s'est maintenue.
Ce qui témoigne les manifestations d'un problème
structurel très profond. Le PIB global a chuté de
2.9%. Parallèlement, l'aggravation du secteur
agricole suite à la baisse de la production agricole au taux de 1,3%
l'an dont les causes sont à rechercher dans ses structures mêmes
posera avec acuité le problème de la sécurité
alimentaire. Le concours du FMI sera réclamé et deux accords de
prêts seront signés respectivement en 1982/83 et 1983/85.
Les mesures qui seront mises en place font fi des contraintes
structurelles pour privilégier le rééquilibrage
économique et financier.
A la différence des autres pays, Haïti ne faisait pas
face au problème d'endettement excessif, le service
de la dette représente moins de 7% des exportations
totales de bien et service en 1981.45 La mise en place des
politiques d'ajustement n'etait donc pas déterminée par
les problèmes d'endettement extérieur. Elle était
plutôt motivé par d'autres éléments tels
l'inflation, les pénuries, les déficits budgétaires.
Comparé aux autres pays ACP, Haïti fait donc figure d'un
pays à besoin relativement élevé d'ajustement.
Cas 2 : Un pays qui ne parvient à équilibrer
sa balance courante qu'au prix d'une politique déflationniste
(c'est-à-dire dont la croissance est
faible ou négative). Son besoin d'ajustement
correspond à une perte de compétitivité et dans le
fait qu'il a atteint son niveau maximum
d'endettement, ce qui le condamne à équilibrer sa
balance courante
Cas 3 : Un pays dont la croissance économique
rapide s'accompagne d'un fort déséquilibre de la balance des
paiements courants et qui ne peut espérer poursuivre sa croissance si
l'encours de sa dette extérieure limite à brève
échéance le recours aux capitaux extérieurs et si son
niveau de compétitivité compromet le
rééquilibre de sa balance.
cf . GUILLAUMONT PATRICK, Ajustement et
développement..., p. 19)
44 CAPRIO Giovanni, « Economie et
Société (1970-1988) », La République
Haïtienne. Etat des lieux et perspectives, BARTHELEMY Gerard,
Christian GIRAULT, (dir.) Karthala, Paris, 1991, p. 279.
45 La faiblesse de la dette s'explique par le fait
que le modèle de développement en place utilisait peu de
capitaux externes. Cf. CADET
Charles, pp. Op. cit., pp.12, 20.
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