Les pronoms personnels : nous, vous et on
Le « nous » sert parfois à désigner
non une somme d'individus mais un sujet collectif. En effet, pour E.Benveniste,
« d'une manière générale, la personne
verbale au pluriel exprime une personne amplifiée et
diffuse »193(*). Le « nous » n'est
alors qu'une collection de « je »,
« c'est un je dilaté au delà de la personne
stricte, à la fois accru et de contours vagues ». Dans le
« nous », la prédominance du
« je » est très forte, au point que, dans
certaines conditions, ce pluriel peut tenir lieu de singulier. On observe les
mêmes remarques pour le « vous », qui peut
désigner aussi bien une collectivité qu'un seul individu (dans ce
cas, c'est la marque de la politesse).
Le « on » réfère toujours à
un être humain, il occupe toujours la fonction de sujet, il ne varie ni
en genre ni en nombre et constitue, du point de vue morphologique, une
troisième personne, il a une grande polyvalence. Sa
préférence varie selon la manière dont il est
mobilisé à l'intérieur d'un processus énonciatif
particulier. Selon le contexte, il peut s'interpréter comme
référant à l'énonciateur, au co-énonciateur,
au couple énonciateur plus co-énonciateur, à la
non-personne, que ce soit un individu, un groupe ou un ensemble flou.
Les guillemets et l'italique (faits intonatifs ou
typographiques)
Les guillemets sont utilisés lorsque l'on rapporte un discours
ou bien lorsque l'on veut isoler un mot. Dans ce dernier cas, il s'agit d'un
emploi autonymique. L'énonciateur peut également dédoubler
en quelque sorte son discours pour commenter la parole en train de se faire. Il
peut utiliser aussi des tirets, des parenthèses ou l'italique. Il peut
s'agir d'un commentaire sur ce qui est train d'être dit. Quelquefois, on
emploie un mot un peu inadéquat ou une expression empruntée
à quelqu'un, alors on utilise l'italique ou des guillemets.
En mettant des mots entre guillemets, l'énonciateur se contente en effet
d'attirer l'attention du co-énonciateur sur le fait qu'il emploie
précisément ces mots qu'il met entre guillemets ; il les
souligne en laissant au co-énonciateur le soin de comprendre pourquoi il
attire ainsi son attention, pourquoi il ouvre une faille dans son propre
discours.
Souvent, mettre une unité entre guillemets, c'est en renvoyer la
responsabilité à un autre. Pour interpréter les
guillemets, le lecteur doit tenir compte du contexte et en particulier du genre
de discours.
Nous voyons donc que la subjectivité peut s'instaurer dans
différents moments du processus d'énonciation. Parler c'est
signifier, mais c'est en même temps référer : c'est
fournir des informations spécifiques à propos d'objets
spécifiques du monde extralinguistique, lesquels ne peuvent être
identifiés que par rapport à certains « points de
référence » à l'intérieur d'un
certain « système de
repérage »194(*). De plus, certains termes ou expressions sont
très marqués subjectivement et évoquent clairement
l'opinion du locuteur. Nous avons procédé à un
repérage des unités énonciatives que nous avons
jugé utiles pour l'analyse. Ces différents points que nous venons
de mettre au jour nous a permis de faire émerger ce sentiment
d'appartenance, ce sentiment de collectif qui semble peser sur le forum de
discussions.
* 193 BENVENISTE
Problèmes de linguistique générale, Gallimard,
Paris, 1966 in MAINGUENEAU D. op.ct.
* 194 CULIOLI A.
« Sur quelques contradictions en linguistique » in
Communication n°20, Mai 1973
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