Le Cameroun sous les fourches caudines du fmi d'après les journaux: 1988-2006par Symphorien Loïc EMBOLO Université de Yaoundé 1 - Master 2 en Histoire des relations internationales 2023 |
AbstractThe economic difficulties of the 1970s led many Africanheads of state to resort to the IMF's structural adjustment plans (SAP), but. for Cameroon in particular, itwas only in 1988 that such ambition is manifested. Indeed, over the decades after its independence, the Cameroonian miracle is the expression that characterizes the economic evolution of the country, thus reflecting the impressive economic expansion imposed by the abundance of national resources and the pragmatism of its leaders. But after the strengthening of protectionist policies in the USA at the 1980s, a context of uncertainly was created in the Cameroonian economy. Cornered by the failure of autonomous adjustment and the weight of external constraints subsequently, the government resolves to sign confirmations with the IMF in order to benefit from the financial support in exchange for application of SAP. Therefore, the problem that arises here is to know, what was the influence and opinion of the newspapers on the evolution of Cameroon-IMF cooperation between 1988 and 2006? To deal with this subject, the inductive-deductive method is adopted. It was necessary to examine archive funds and newspapers articles. After a comparison of sources and a work of reflection, small summaries on a whole series of facts are proposed where it emerges, according to the newspapers, that this cooperation was a fiasco despite the relative stabilization of the Cameroonian economy in the early 2000s. Keys words:Financial institution, cooperation,structural adjustment, globalization, conditionality INTRODUCTION GENERALE1. Contexte général de l'étude Ledébut de la décennie 1970 marque la fin des 30 glorieuses européennes et le début d'une crise économique mondiale engendrée par la crise du billet vert et la succession des crises pétrolières1(*).Pendant que lesÉtats se dépêchaient à trouver des moyens de régulation face à cette déchéance conjoncturelle, l'abondance des ressources nationales et le pragmatisme des autorités empêche àl'économie camerounaisede s'effondrer jusqu'en 1984, d'où le miracle camerounais. Avec untaux de croissance moyen de 8%durant cette période, le Cameroun se présente comme un modèle de développement raisonnable en Afrique2(*). Mais, au cours de l'exercice budgétaire 1985/86, le Cameroun qui était pourtant bien parti voit son économie dégringolée et connaitre une involution après la dévaluation du dollar et la chute des prix des principaux produits d'exportation3(*). De 1985 à 1987, soit en deux ans, la valeur des exportations chute de 65% pour le pétrole, 25% pour le cacao, 11% pour le café, 20% pour le caoutchouc et le revenu par habitant d'un tiers. Les termes de l'échange se détériorent pratiquement de 45%, entraînant une dégradation rapide des équilibres interne et externe du pays, tandis que les recettes d'exportations baissentde 8% par rapport au PIB4(*).Le 20 juin 1987, le gouvernement élabore, avec l'aide de la France, un plan de rigueur consistant à réduire les irrégularités afin de rétablir les équilibres macroéconomiques5(*). Maisface à l'échec dudit plan à cause de la mauvaise gestion des finances et à la pression de l'opinion publique nationale et internationale, les autorités camerounaisesse résolvent à prendre le chemin de New York en1988 pour recourir au soutien financier et aux conseils économiques du FMI, selon le quotidien national Cameroon tribune6(*). 2. Les raisons de choix du sujet Le choix d'un sujet ne se fait pas au hasard, il émane d'un certain nombre de déterminants qui peuvent être personnels, académiques et scientifiques. Du point de vue personnel, c'est une fierté de relever le défi de l'écriture scientifique. Ce sujet suscite en nous une curiosité à plus d'un titre. Il reflètenotre passion pour l'économie monétaire, l'économie politique, la finance et la diplomatie économique. En effet, l'ambition de rédiger sur la coopération entre le Cameroun et le FMI selon les journaux a été marqué par des entretiens pluriels, d'où l'originalité de ce sujet qui permet de créer une banque de données dont d'autres chercheurs pourront en bénéficier. Les raisons académiques s'inscrivent dans la motivation d'obtenir un Doctorat PhD sous un système LMD (Licence-Master-Doctorat) qui exige la rédaction d'un mémoire en fin de cycle de Master, ceci dans le but de justifier des bases solides de l'étudiant dans sa spécialisation et sur le respect de la déontologie de la recherche scientifique. Concernant les raisons scientifiques, elles concernent le devoir qu'a un chercheur de renouveler les problématiques afin de faire avancer la science à travers la recherche. C'est la raison pour laquelle ce sujet apporte des alternatives et des nouveautésdans la connaissance antérieure afin de les ajouter à la littérature scientifique existante.Depuis le sacre du capitalisme sur le collectivisme en 1989, les relations diplomatiques du Cameroun n'ont cessé de se développer sous l'angle économique.Ainsi, mener une étude sur ce sujet selon les journaux, d'où son originalité, permetd'explorer les contours de la question de manière objective, de desceller les manquements et d'apporter une contribution significative dans ce vaste champ d'étude. «Tout entreprise intellectuelle ou artistique de quelque importance sociale procède à la fois d'un malaise et d'un élan d'enthousiasme''7(*). C'est dans cette optique que s'inscrit ce travail de recherche qui revêt un triple intérêt. Il se propose d'explorer les dix-huit premières années de coopération entre le Cameroun et le FMI du point de vue des journaux. Sur le plan scientifique, l'intérêt de la présente étude s'apprécie à deux niveaux. D'une part, elle permet devérifier l'applicabilité des accords du FMI dansles États africains de façon générale, et au Cameroun particulièrement. D'autre part, cette recherche est scientifiquement intéressante car elle se préoccupe de l'étude des décisions politiques, diplomatique et stratégiques prises en situation de crise économique. En effet, l'analyse des processus de décision gouvernementale, centrée sur l'étude des crises, constitue un domaine privilégié de l'étude des Relations internationales. Sur le plan politique, cette étude permet au futur décideurs et diplomates de s'imprégner des marques de la politique du pays qu'il s'engage à servir, à travers la maitrise de ses rouages essentiels et ses objectifs, mais aussi de ses déterminants et contraintes.Elle permet également de comprendre l'économie politique internationale (EPI) en Afrique et les logiques qui guident le Cameroun dans ses relations avec les institutions financières internationales.Cette étude permet également d'évaluer le niveau de rapport entre les États africains et les institutions internationales. Sur le plan historique, ce sujet traite de l'historicité du Cameroun. Pour cernerles soubresauts de la coopération entre le Cameroun et le FMI de nos jours,comme dans tout autres domaines d'ailleurs, une étude rétrospective s'est toujours avérée primordiale. Car selon M. Bloch, «l'explication du plus proche par le plus lointain a toujours meublé nos recherches jusqu'à l'hypnose''8(*). Ainsi, dans l'optique d'avoir une vue globalesur les relations entre Cameroun et les institutions de Bretton Woods (IBW), il est préjudiciable d'aménager le contexte et les circonstances qui ont permis leur aboutissement. Ne dit-on pas quel'Histoire est le juge du monde ?
Du point de vue spatial, le Cameroun est un pays d'Afrique Centrale situé au fond du Golfe de Guinée entre les 2e et 13e degrés de latitude Nord et les 9e et 16e degrés de longitude Est. Il a une forme triangulaire,et occupe une superficie de 475000 km2dont la moitié est couverte par la forêt. Il s'étend du Sud,depuis la forêt sempervirente du climat équatorial, jusqu'aux steppes sahéliennes du Nord sur près de 1200 km ; une base d'Ouest en Est de 800 km2et dispose d'un microcosme de climats et d'écosystèmes variées9(*). Cette diversité confère une biodiversité riche et une forte vocation agricole au Cameroun. Il est bordé à l'Ouest par le Nigéria, au Nord-Est par le Tchad, à l'Est par la République Centrafricaine, au Sud par le Congo, le Gabon et la Guinée Équatoriale etau Sud-Ouest, le pays s'ouvre sur l'Océan Atlantique10(*).À cause de son énorme richesse en sous-sol, le territoire est considéré comme une Afrique en miniature.Cet État est une mosaïque humaine, riche de plus de 200 ethnies et presqu'autant de langues nationales. Le tableau ci-dessous présente l'évolution de la population de cet État entre 1988et 2006. Tableau n°1 : Évolution de la population camerounaise entre 1988et 2006
Source : Banque mondial D'après le tableau ci-dessus, de1988 à 2006, soit en 18 ans, la population du Cameroun a presque doublée passant de 10.759.573 habitants en 1988 à 17.751.333 habitants en 2006avec une densité moyenne de 39 habitants au kilomètre et une structuration relativement jeune comme le présente letableau statistique de l'annuaire 2004ci-dessus. Tableau n°2 : Structuration de la population camerounaise en 2004
Source : Annuaire statistique 2004 Source : Graphique réalisé à partir des données statistiques de l'annuaire 2004. D'après l'Annuaire Statistique 2004 du Cameroun, la structure de la population de plus en plus jeune se présente ainsiqu'il suit : -5 ans (16%), 5-14 ans (28,3%), 15-24 ans (20,2%), 25-34 ans (15,4%), 35-44 ans (7%), 45-54 ans (5,1%), 55-64 ans (4,2) et plus de 65 ans (3,8%)11(*). Concernant le cadre temporel, plusieurs raisons motivent le choix des bornes chronologiques, soit 1988 et 2006. Le 24 septembre 1988,est choisie parce qu'elle représente la date à laquelle le Cameroun conclut avec le FMI lepremier accord de confirmation. Celle du 28avril 2006,par contre renvoie à l'atteinte du point d'achèvement de l'initiative Pays Pauvre et Très Endetté (IPPTE) par le Cameroun. Carte n°1 : Localisation du Cameroun en Afrique Source : www.openEditions-Books.com, vendredi le 16 juin 2023 à 19h06. Carte n°2 :Carte géographique du Cameroun Source : www.Wikimémoires.com, vendredi, 16 juin 2023, à 19h 15. Dans le but de déterminer le sens des concepts«fourches caudines'' et Fonds monétaire international'' employer dans cette étudeafin d'éviter toute confusion, une clarification azimutale s'avère primordiale. En effet, l'expression«fourches caudines'' vient du latin FurculaeCaudinae qui, à l'origine, est un défilé pratiqué à l'Est du Caudium, une région située en Capoue et Beneventum dans l'Italie centrale12(*). Mais cette expression se comprend de nos jours à plusieurs niveaux. Selon Fernand De Vischer et Violaine Epitalon,elle fait d'abord référence à la bataille qui opposait l'armée romaine et les Samnites à l'issue de laquelle les Samnites humilièrent les Romains en 321 avant J. C, rapportée par l'historien romain Tite-Live13(*). Ensuite, l'expression de «fourches caudines'' a été comprise au sens figuré par transposition du lieu géographique et de la fameuse bataille par le biais d'une métonymie. Aujourd'hui, elle se comprend donc au sens assez large de «vivre une situation désagréable''selon le journalExpressio qui considère que passer sous les fourches caudines c'est être vaincu, être contraint d'accepter des conditions humiliantes ou ruineuses imposées par une personne ou une situation, ou encore subir une cuisante humiliation14(*). Dans ce travail, l'expression«fourches caudines'' ou «passer sous les fourches caudines''traduiraitdonc l'allégeance et la soumission de l'État camerounaisau Fonds Monétaire International. Pour ce qui est duFonds monétaires international (FMI),il est primordial de noter que cette expressionoppose les opinions depuis sa création en 1944.Pour les néo-libéralistes tels que M.Vaisse, C. Morelleou encore M.Lelart, le FMI est une institution financière internationale qui détient une provision de devises fournies par chacun des États adhérents en fonction de leur place dans les échanges internationaux et dont le but consiste à permettre les opérations de compensation entre les États membres, à remédier aux problèmes créés par les crises financières, et à rappeler à ses membres les règles d'orthodoxie monétaire15(*). Ce point vu est contesté par des auteurs tels que Mongo Beti, Yves Tavernier et Joseph Stiglitzqui soutiennent plutôt l'idée selon laquelle cette institutionne serait rien d'autre qu'un instrument de l'impérialisme,soit une arme au service des intérêts des occidentaux,un véritable prédateur économique16(*). En effet, selon l'analyse de ses performances de façon générale, il ressort que sesinterventions plurielles dans les pays en développement se sont toujours soldées par la hausse des inégalités, du chômage,de la dette et de la suppression ou la diminution de la capacité d'intervention des États17(*).Mais dans cette étude, le sens retenue du FMI est celui d'une institution financière à vocation internationale, apportantun soutien financier et des conseils économique aux États qui en font la demande. Tout travail de recherche scientifique s'inscrit dans un cadre théorique bien précis. Pour le chercheur, l'élaboration d'un cadre théorique permet de donner une orientation à son travail, pour l'inscrire dans un domaine scientifique donné. Dans ce travail,deux théories à l'instar du capitalisme et le libéralisme sont confirmées. En effet, le dictionnaire de poche Le grand Larousse définie le capitalisme comme étant un régime à la fois économique et politique fondé sur la primauté des capitaux privés dont le pouvoir est dépendant18(*). C'est cette même optique que se range Max Weber qui présente le capitalisme comme étant la condition dans laquelle apparait l'invention de la modernité économique. Car en son sein, la permanence est la réinvention de certaines formes de réciprocité sociale au coeur des processus de transition économique dont la Chine, l'Asie centrale et l'Afrique sont de parfaites illustrations19(*). Dans ce travail de recherche, cette doctrines'apparente un levier d'appui pour appréhender l'élargissement du marché et l'extension de l'économie de marché au Cameroun. En effet, la planétarisation du marché capitaliste résulte essentiellement de la convergence de trois mouvements, dont la libéralisation des échanges mondiaux, la déréglementation des économies nationales et la globalisation des grandes firmes industrielles et de services''20(*). Pour ce qui est du libéralisme,il part des revendications pour les libertés de l'individu contre l'absolutisme politique, le dirigisme économique, et l'intolérance philosophique politiques. Ses trois fort principes sont : la liberté, la propriété et la responsabilité21(*). Sur le domaine économique, il est considéré comme une doctrine économique hostile à l'intervention de l'État dans la vie économique et à son contrôle sur les moyens de production comme le soutient les classiques comme Adam Smith et David Ricardo. Dans les années 1970, il s'oppose à l'orthodoxie marxienne, mettant en avant l'idée d'une nouvelle économie qui prétend au dépassement de la forme néoclassique traditionnelle. Il préconise une économie généralisée dans un monde où tout est, par définition, rare22(*). Dans cette étude, le libéralisme permet d'expliquer lespolitiques de dérèglementation des marchéset de libéralisation économique au Cameroun entre 1989 et 2006. Conscient que la coopération entre Cameroun et le FMI ne constitue pas une terra incognita, il serait doncprétentieux de vouloir recenser de manière exhaustive la littérature sur le Cameroun et le FMI. Par ailleurs,on peut retracer quelques grands courants parmi ceux qui sont plus ou moins liés à notre recherche. J.-J. Aerts et Als23(*), mènent une étude macroéconomique sur l'économie camerounaise. Sa question centrale est celle de savoirpourquoi la régression économique mondiale a affecté le Cameroun au milieu de la décennie 1980 ? Dans cet ouvrage, une analyse historique, permettant de cerner avec aisance les fondements de l'économie camerounaise post indépendance, les mécanismes à l'origine de l'impasse, ainsi que des perspectives pouvant relever cette économie, est faite. Jean Ngandjeu24(*),traite des stratégies de développement post indépendances camerounaises et du contexte de crise des années 1980 lorsqu'il examine les facteurs de la crise et ses effets sur le Cameroun. Touna Mama25(*), dresse des diagnostiques des politiques de dérèglementation des institutions de Bretton Woods, puis conclurepar la suite que ces politiques n'ont pas permis d'atteindre les résultats escomptés, dans la mesure où elles aboutissent à l'aggravation de la crise et à la paupérisation croissante de la population, alors que des politiques alternatives auraient été plus adéquates. Fanny Pigeaud26(*), pour sa part traite de façon superficielle les causes de la crise, le contexte et les circonstances dans lequel le Cameroun intègre les institutions de Bretton Wood. Edy-Claude Okala27(*), analyse les changements économique et sociale que les PAS ont causé dans la société camerounaise pendant les 12 premières années de leur application, notammententre 1988 à 2000. Il met en exergue les problèmes qui minent la société camerounaise à cette époque, notamment une crise économique sévère, une crise politique, et une crise morale. Sous la direction de Georges Courade28(*), un ouvrage très documenté et très sérieux donne une vision réaliste et poignante de l'impact des politiques d'ajustement structurel dans les campagnes camerounaises. Il faut regretter malheureusement que leur étude se soit limitée au milieu rural. Il a fallu la réalisation des travaux de KengneFodouop29(*) sur les petits métiers derue pour combler avec parcimonie le vide laissé par les travaux de Courade et de son équipe. Ces travauxrapportentqu'une bonne partie de la population a trouvé dans le secteur informel un mode de survie face à la crise et autres mesures d'austérité en ville. Ils donnent en ce sens une meilleure lisibilité de l'incidence des politiques d'ajustement structurel sur les couchent urbaines. Par ailleurs, lerapport du Senat comptant pour la session 2001-200230(*),traite des origines dela criseéconomique au Cameroun en 1985. Dans ce rapport, il est également noté que depuis les élections de 1997, l'immobilisme des autorités en matière de réformes s'est traduit par la pauvreté liée à l'action du FMI, la recrudescence de l'insécurité et le développement de la corruption au Cameroun. Juliènne Carine Elembe31(*),dans son mémoire traite du problème de l'intégration de l'économie camerounaise dans la mondialisation. Après le début de la fluctuation économique en 1985, le Cameroun a dû adopter les programmes d'ajustement du FMI en 1988,ce qui a permis aux autorités d'arborer une vision prospective de développement et l'élaboration du DSCE'' devant stimuler la croissance économique et l'insertion régionale et internationale du pays. Samuel Fambon32(*), dans son article, «Endettement du Cameroun : problèmes et solutions'' fait une analyse sur la situation d'endettement interne et externe du Cameroun, sans oublier les perspectives de solution. Yolande NjikeNyatchou33(*) pour sa part traite de l'évolution de la dette extérieure du Cameroun entre 1960 et 2006.Selon elle n'a cessé d'augmenter, passant d'environ 302,7 milliards de franc CFA en 1981 à 4934 milliards en 2000 après la mise en application des programmes du FMI. Mais grâce l'initiative PPTE et l'Initiative d'Allègement de la Dette Multilatérale, elle est réduite à hauteur de 1095 milliards en 2006. Au vu de ce qui précède, force est de constater qu'une littérature exhaustiveest déjà produite sur la question, mais les avis des auteurs semblent limites à une analyse idéologique précis à leur domaine. On peut alors se demander si nous arriverons aux mêmes conclusions lorsque nous problématisons la coopération entre le Cameroun et le FMI du point de vue des journaux ? 8. ProblématiqueAprès de fortes réticences des instances politiques camerounaises à recourir aux crédits conditionnels du FMI en 1987, dont la contrepartie signifie un désengagement de l'État des secteurs clés de l'économie, c'est finalement en septembre 1988 que le Cameroun signele premier accord «stand-by'' avec le Fonds, soit 3 ans après le début de la dégradation de la balance des paiements et des finances publiques. Confirmés par le décaissement du 15 novembre 1988, les programmes approuvés par le gouvernement camerounais à Washington avaient pour mission de stabiliser l'économie camerounaise. Maisface à l'exubérance des déséquilibres macroéconomiques, le Cameroun prolonge l'utilisation des ressources du FMI jusqu'à l'adoption et l'achèvement de l'Initiative Pays Pauvre Très Endetté (IPPTE) en avril 2006.Acculé par le processus de libéralisation et de démocratisation sur la décennie 1990,la question qui se pose ici est celle de savoir quelle a été l'influence et l'opinion des journaux sur l'évolution de la coopération Cameroun-FMI entre 1988 et 2006 ?De cette problématique naissent les hypothèses de recherche ci-dessous. Selon G. Mace et F. Petry, l'hypothèse se présente comme une réponse anticipée à la question spécifique de la recherche, un résultat à la formulation du problème et le point de départ de toute vérification34(*). Dès lors, trois hypothèses sont formulées pour donner une orientation à ce travail de recherche : - Le Cameroun recourtà l'assistancedu FMI en 1988 sous la pression des journaux, afin de stabiliser son déséquilibre micro et macroéconomique ; - La recrudescence de la crise entraine l'utilisation prolongée des ressources du FMI jusqu'en 2006 ; - Les politiques de dérèglementations du Fonds permettent à l'État camerounais de stabiliser son économie et de renouer avec la croissance.
Ce travail de recherche a un objectif principal et quatre objectifs subsidiaires. L'objectif principal consiste à évaluer les rapports de la coopération Cameroun-FMI entre 1988 et 2006, du point de vue des journaux.Concernant les objectifs subsidiaires, il s'agit dedonner les raisons qui amènentle Cameroun à recourir au FMI en 1988,de présenter la coopération effective entre les deux parties, de faire un bilan des étapes franchies par le Cameroun,18 ans après, et enfin de s'interroger sur l'avenir de cette collaboration après l'atteinte du point d'achèvement de l'initiative PPTE. Dans tout travail de recherche, la méthodologie renvoie à deux considérations majeures : d'une part les techniques par lesquels les données sont collectées, et d'autre part les méthodes par lesquelles lesdites données sont analysées. Concernant les sources, la collecte des données s'est faite dans plusieurs centres de documentation où nous avons exploité des Encyclopédies, des articles de journaux relatifs au domaine d'étude, des ouvrages méthodologiques, des mémoires, des thèses et des ouvrages en phase avec notre thème. Il s'agit : des bibliothèques universitaires de Yaoundé (Université de Yaoundé 1, Université de Yaoundé 2 (SOA), et l'Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC)),des archives nationales de Yaoundé (ANY), des maisons d'édition de journaux (Cameroontribune, Mutations), et les bibliothèques privées tels que l'Institut français du Cameroun (IFC) et bien d'autres. À côté de cela, nous avons procédéaux interrogations dans le but de recueillir des informations auprès despersonnes sources. Il s'agit notamment des professeurs, des personnels administratifs, de la société civile et des journalistes. La procédure s'est faite par interrogations ou procuration des questionnaires à récupérer plus tard. Également, les données et informations obtenues grâce à internet dans certains sites sérieux comme la fondation Friedrich Ebert-Cameroun ou d'autres instituts de recherche à l'instar du centre d'études et de recherches internationales (CERI) dont nous avons pu consulter les travaux en ligne ont également contribué à étayer notre argumentaire, à côté de la revue Politique africaine portant sur le Cameroun. Étant donné que cette étude s'intéresse particulièrementà l'opinion des journaux, l'apport de la presse aussi bien officielle que privée a été une source d'information appréciable dans le cadre de la réalisation de ce travail. Cameroon Tribune, le Messager, Jeune Afrique, Mutations,etLe Monde ont permis d'aborder la question de la coopération Cameroun-FMI au-delà des données statistiques ne reflétant toujours pas la réalité sociale des populations. Grâce à ces journaux, l'analyse va au contact des faits sociaux afin de faire ressortir le déphasage qui existe entre données économique chiffrées et réalité sociale. Pour mener à bien ce travail et surtout répondre aux questions relatives à la problématique, la méthodologie qui sied le mieux à notre étude est le raisonnement inductivo-déductive, qui s'illustre comme une technique adéquate préconisant plusieurs étapes. Notamment les enquêtes, la soumission des hypothèses, l'interprétation et l'analyse correspondent à ce que Jean de Bonville appelle «l'analyse et l'interprétation des données''35(*). L'analyse inductive se définit comme un ensemble de procédures systémiques permettant de traiter des données qualitatives. Elle permet de réduire les données brutes pour en arriver à extraire le sens derrière ces données36(*). Pour François Guillemette, elle est fondamentalement une ouverture à l'inédit, une attention à ce qui peut être découvert à partir du vécu37(*). Raison pour laquelle elle s'intéresse aux expériences subjectives, recueille des données auprès des témoins privilégiés sélectionnés minutieusement pour la recherche en tenant compte des contextes variés dans lesquels se déploient ces expériences, comme le souligne Jennifer Denis38(*). Dans ce travail, elle permet de s'immerger dans le phénomène pour en faire émerger les données et les compréhensions pertinentes. Cette manière d'aborder un phénomène permet de se poser des questions tant d'un point de vue épistémologique que d'un point de vue méthodologique. Et à partir de l'observation des situations empiriques où se trouvent les phénomènes, elle rend compte de manière approfondie des phénomènes processuels ou subjectifs tout aussi complexes les uns que les autres. La méthode déductive ou hypothético-déductive est une méthode d'enracinement de l'analyse dans les données de terrain39(*). Aussi appelée «déduction logique'' ou «approche hypothético-déductive'', elle consiste à formuler une hypothèse afin d'en déduire des conséquences observables futures, mais également passées afin de déterminer la validité40(*). C'est un processus qui permet de conclure une affirmation à partir d'hypothèses, de prémisses ou d'un cadre théorique. Elle est utilisée dans ce travail pour son utilité à tester plusieurs hypothèses, développer le sens critique, et de faire émerger de nouveaux éléments susceptibles d'approfondir le sujet. Ainsi, la confirmation ou la non confirmation des hypothèses de travail permettraitdonc de trouver une explication au sujet étudié41(*). 12. Les difficultés La finalisation de ce travail n'a pas été sinécure.Les difficultés rencontrées sont inhérentes à la collecte de l'information, compte tenu de la confidentialité de certaines sources. À plusieurs reprises, nous avons failli céder au découragement, car il s'est posé le problème d'accès dans certains centres de recherche pourtant essentiels pour la collecte de sources primaires. L'absence de moyens financiers considérables a contribué non seulement à ralentir notre travail, mais aussi à le rendre plus difficile à élaborer. Par ailleurs, malgré les entraves propres à la recherche scientifique, c'est avec un soulagement certain que le plan ci-dessous a été adopté. Le travail s'articulé autour de quatre grands chapitres.Le premier chapitre, intitulé «face aux défis de l'heure, le Cameroun recourt au FMI'', traite des étapes de la lente récession de l'économie jusqu'à l'intervention du FMI. Le second chapitre intitulé,«vers une coopération effective entre le Cameroun et le FMI'', traite des crédits conditionnelsdu FMI et de leur mise en application concrète au Cameroun. Le troisième chapitre traite des performances socio-politiques et économiques des PAS, 18 ans après.Enfin, le chapitre quatre intitulé «quel avenir pour les relations entre le Cameroun et le FMI'', s'interroge sur la légitimité de ces relations tout en insistant sur des recommandations de développement pour le Cameroun. * 1M. Vaisse et C. Morelle, Dictionnaire des relations internationales, de 1900 à nos jours, 3e édition, Paris, Armand Colin, 2009, p.136. * 2MINEPAT, PNUD et Bureau des Services d'Appui des Projets, «Études socio-économiques régionales de la pauvreté au Cameroun. Cadrage national'', 2000, p.9. * 3 F. Pigeau, Au Cameroun de Paul Biya, Paris, Karthala, 1994, p.8. * 4M. J. Abena Etoundi, «La longue crise économique des années 80 : efforts de redressement et répercussions socio-économiques au Cameroun'', in EditorialBoardMembers, n°76, consulté en ligne sur www.afjolih.com, le 13 janvier 2022 à 16h 47. * 5D. C. 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