CHAPITRE I : PROBLÉMATIQUE DE L'ÉTUDE
Selon Danet et Elengabeka (2013) : « la
problématique est l'art de bien poser un problème,
c'est-à-dire d'interroger un sujet pour en dégager des questions
pertinentes » (p. 34). D'après Beaud (2006, p. 55), «
la problématique c'est l'ensemble construit autour d'une question
principale, des hypothèses de recherche et des lignes d'analyse qui
permettront de traiter le sujet choisi ». De plus, selon Kouam &
Mbonda (2008, p . 89) : « c'est l'ensemble construit autour d'une
interrogation fondamentale, des hypothèses de recherche et des lignes
d'analyse qui permettront d'analyser le sujet choisi ».Dans un
travail universitaire comme le mémoire de recherche, la
problématique va donc consister pour Schneider (2006), à la
« Présentation du contexte de l'étude. Description
succincte du choix de l'étude, formulation et définition du champ
d'investigation. Précisions sur la signification de l'étude : les
enjeux théoriques et pratiques » (p. 8).
En conséquence, le présent chapitre qui
porte sur la problématique de l'étude en cours, s'articule autour
de six points. En premier, le contexte et la justification du sujet sont
exposés. En second, le problème de recherche est formulé.
Au troisième moment sont posées les questions de recherche. En
quatrième lieu, les hypothèses de recherche. Les objectifs de
l'étude seront formulés au cinquième moment.
L'intérêt ainsi que la délimitation de l'étude
constituent les moments, respectivement de la sixième et de la
septième articulation. Nous débutons la problématique de
cette étude, par le contexte et la justification de la
recherche.
1.1. CONTEXTE ET JUSTIFICATION DE LA RECHERCHE Cette
section présente tour à tour, le contexte dans lequel
émerge la recherche en cours, ainsi que les raisons du choix du
sujet.
1.1.1. Contexte de la recherche Pour Kouokam Magne (2020)
:
Le contexte sert à situer sa pensée
ou l'idée principale que l'on veut analyser [...] Faire un contexte veut
dire trouver des éléments autour du sujet, notamment des faits
d'actualités, qui justifient le choix de ce sujet. Il s'agit de montrer
l'environnement dans lequel le sujet se situe
En fait, dans le contexte, il d'agit de
décrire, mieux, faire une présentation exhaustive des faits qui
entourent le sujet à l'étude. Une telle démarche n'est pas
fortuite. En réalité, elle obéit à un ordre
logique. Voilà pourquoi il est prescrit que : « La
présentation
6
du contexte gagne à s'inscrire dans une
approche qui permet d'aller du général au particulier. En
employant la métaphore de l'entonnoir, on peut voir à quoi
ressemble un contexte » (Kouokam Magne, 2020). Telle est l'approche
adoptée dans cette section. Les faits retenus pour présenter le
contexte vont du global au local.
La deuxième guerre mondiale, si elle a eu de
nombreuses conséquences négatives, il faut néanmoins
reconnaitre qu'elle a permis d'assoir un nouveau type de relations entre les
États, et de reconfigurer la nature du système international. Ce
système-là se caractérise par la recherche
effrénée de la puissance. Cette volonté de puissance
conduit alors de temps à autre, à la violence. En effet, aux
lendemains de cette grande guerre, certains États se réuniront
à Francisco à l'effet de définir les nouvelles bases du
fonctionnement du monde. De ce fait, ils créeront l'Organisation des
Nations Unies (ONU).
Dès lors, le parcours du texte fondateur qui
régit cette organisation internationale (Charte des Nations Unies), nous
permet ainsi de lire aux alinéas 3 et 4 de l'article 2 qu'il est
interdit de recourir à la violence sous quelque forme que ce soit (ONU,
1945). Si ces interdits y sont mentionnés, ils n'excluent toutefois pas
qu'un État puisse user des moyens pacifiques à l'effet d'assoir
son hégémonie. Depuis lors, les États usent de moyens
ainsi que des mécanismes divers, mais pacifiques ou doux, qui leur
permettent ainsi d'asseoir leur hégémonie sur les autres
États. Parmi ces mécanismes, figure en bonne place la culture.
C'est ce que l'internationaliste Nye va théoriser sous le concept
« soft power » pour signifier le fait que : les facteurs
tangibles de la puissance tendraient de plus en plus à être
supplantés par les facteurs non tangibles, telle la cohésion
nationale ou la culture (Roche 2001, p. 96).
Et dans cet élan, de nombreux États
usent donc des facteurs non tangibles pour assoir leur hégémonie
sur la scène internationale. On pourrait ainsi citer : le domaine
cinématographique avec pour les USA, le cinéma hollywoodien ;
l'Inde, le cinéma bollywoodien ; le Nigeria, le cinéma
nollywoodien. Citons aussi le domaine linguistique, l'hégémonie
des langues anglaises et françaises, respectivement par le Royaume Uni
de Grande Bretagne et la France. En outre, la Chine avec sa médecine ou
le Brésil avec son festival culturel la « Samba », manifestent
aussi leur hégémonie dans les domaines
évoqués.
Mais, il faut noter qu'un facteur non tangible, n'est
pas en soi un moteur géostratégique.
Pour le dire autrement, la culture prise en
elle-même ne constitue pas une force. Pour jouer son rôle de
facteur de puissance, la culture doit être considérée et
fait usage comme tel par l'acteur. L'acteur est entendu ici au sens de Rojot
(2003) comme toute entité qui peut, grâce aux ressources et
stratégies dont elle dispose, influencer une sphère
donnée. D'après Ndam Njoya, le Cameroun devenu un acteur du
système international de par son accession à
7
l'indépendance (1979, p. 5-6), se voudrait
alors être considéré comme un acteur stratégique et
influent de la scène internationale. Et pour y parvenir, le Cameroun use
de ses ressources au rang desquelles, la culture. C'est cela que l'on peut lire
dans la loi fondamentale du Cameroun. En effet, dans le préambule de la
Constitution du 18 janvier 1996 modifiée et complétée par
la loi n°2008/001 du 14 avril 2008, il est écrit parlant de l'usage
de la culture que : « Fier de sa diversité linguistique et
culturelle, élément de sa personnalité nationale qu'elle
contribue à enrichir » (p. 2). C'est dire que la culture
camerounaise constitue un élément de son rayonnement et de son
influence.
Ainsi, l'on dénombre au Cameroun une
pluralité de cultures. Cette pluralité se manifeste par la
mosaïque ethnolinguistique, de même qu'une variété
géographique et naturelle. En effet, selon Hombert (2009)
derrière le Nigeria et devant le Congo qui comptent respectivement 553
et 215 langues et ethnies chacun, le Cameroun avec 279 langues, est
classé parmi les six (06) États du monde où l'on parle
plus de 200 langues. Cette diversité culturelle selon Mveng
(1985,68-69), constitue le socle de l'identité du Cameroun.
Par ailleurs, depuis la fin de la guerre froide
symbolisée par la chute du mur de Berlin, le monde a basculé dans
un système nouveau. Il s'agit, du libéralisme. Ce système
nouveau a eu pour corollaire l'ouverture. Bien plus, la finalité ultime
de cette ouverture-là est la mondialisation ou globalisation courante.
En réalité, le système libéral a conduit à
l'émergence de ce que Mcluhan a appelé « village global
ou planétaire ». Selon ce philosophe Canadien (1989, p. 67),
« The new electronic interdependence recreates the world at the image
of a global village ». En abondant dans le même sens, De Carlo
affirme :
« Le rapport avec l'altérité
est donc devenu un sujet incontournable pour la compréhension d'un
monde, où les échanges et la circulation non seulement de biens
et de capitaux, mais aussi d'individus, de groupes, d'idées,
d'informations, de projet, de vie...s'intensifient de jour en jour »
(1998, p. 35).
Autrement dit, à travers les contacts culturels
induits par l'essor des réseaux d'échange et de transport, les
mobilités internationales des personnes et même la colonisation,
il résulte une accentuation des contacts entre les différentes
cultures du monde.
Cependant, ces brassages culturels entrainent le
phénomène de l'homogénéisation culturelle. En
claire, certaines cultures risquent se dissoudre dans les cultures des autres.
On assisterait alors à la disparition de certaines cultures au profit
d'autres. Véritablement donc, les États africains en
général, le Cameroun en particulier a perdu de son patrimoine
ainsi que de ses valeurs culturelles. Cela résulte à la fois de
la mondialisation, et davantage de la
8
colonisation. Ainsi au Cameroun, la colonisation en
interdisant l'enseignement les langues locales, a substitué ces
dernières par des langues étrangères, en l'occurrence le
Français et l'Anglais, contribuant ainsi à une assimilation
culturelle.
De même, la globalisation entraine l'abandon des
us et coutumes locaux, pour
l'adoption sans filtres des manières de vivre
venues d'ailleurs. L'on assiste alors une sorte
d'extraversion et une aliénation culturelle.
Et, comme nous le révèle Piou (2012, p. 2), la perte
du patrimoine culturel a contribué à la
perte des valeurs identitaires et séculaires des
sociétés
qui composent le Cameroun. Ainsi, pour pallier
à cette perte, des actions concrètes sont
menées en faveur de la sauvegarde du patrimoine
culturel du Cameroun. C'est dans ce sens-là
que s'inscrivent les politiques publiques en faveur de
l'enseignement des cultures nationales.
Autant dire que, la volonté du Cameroun en
entrant dans la mondialisation, est de préserver et sauvegarder sa
culture. D'abord, cette volonté est inscrite dans la loi fondamentale de
l'État du Cameroun. Dans l'alinéa trois (3) de l'article premier
de la Constitution camerounaise il est dit que : « La
République du Cameroun adopte l'anglais et le français comme
langues officielles d'égale valeur. Elle garantit la promotion du
bilinguisme sur toute l'étendue du territoire. Elle oeuvre pour la
protection et la promotion des langues nationales » (p. 1). En
d'autres mots, en s'ouvrant à l'autre par le truchement des langues
française et anglaise, le Cameroun envisage des stratégies pour
conserver et protéger sa culture.
Par suite de quoi donc, depuis les états
généraux de l'éducation tenus en 1995, les pouvoirs
publics camerounais se sont résolus d'intégrer dans les
systèmes scolaires, des programmes d'enseignement des Cultures
nationales. C'est dans cette même logique que s'inscrit l'article cinq
(5) alinéa un (1) de la loi d'orientation de l'éducation, qui
stipule que l'éducation a entre autres objectifs, « la
formation de citoyens enracinés dans leur culture, mais ouverts au monde
». En fait, par l'enseignement des cultures nationales, l'apprenant
s'ouvre au monde tout en restant enraciné dans la diversité
culturelle constitutive du pays.
Ayant ainsi présenté les faits qui
entourent le sujet à l'étude, aussi bien dans une perspective
internationale que nationale, il faut dire ce qui nous a motivé à
choisir un tel sujet. Ce qui revient à dire qu'il faut donner la
justification de la recherche.
1.1.2. Justification de la recherche
Lorsque l'on parle de la justification de la
recherche, il s'agit d'expliquer le choix du sujet. En d'autres mots, le
chercheur est appelé à donner les raisons ayant motivé le
choix
9
de la recherche qu'il entend mener. À ce
propos-là justement, N'da (2015,) soutient que par la justification du
choix du sujet, « Le chercheur évoque les motivations qui ont
suscité son intérêt pour ce sujet »,
c'est-à-dire « d'où il sort » ou
« comment on en est venu à le choisir parmi tant d'autres du
domaine de recherche ». Pour le présent sujet, le choix est
accompagné des motivations de deux sortes. Les unes sont des raisons
personnelles, les autres sont des raisons scientifiques. Au premier chef, les
raisons personnelles. Notre progéniture vient
régulièrement auprès de nous pour s'enquérir de tel
ou tel autre des éléments culturels. Très souvent, il
s'agit de l'appellation des éléments du quotidien en lien avec
l'être humain, les animaux, les plantes, les végétaux, etc.
En fait, ce sont des questions données pour la préparation des
séances de cours suivants des cultures nationales. Cette pratique est
connue sous l'appellation de pédagogie inversée. C'est dire
qu'autant notre progéniture vient s'enquérir des faits culturels
de sa société, ses camarades d'autres cultures en font autant.
Nous avons donc toujours voulu savoir si dans le cadre de cet
enseignement-là, notre progéniture acquiert les
éléments culturels de ses camarades en classe de cultures
nationales. Concrètement, nous avons toujours voulu savoir si à
travers l'enseignement des cultures nationales, les apprenants apprenaient des
autres cultures.
Qui plus sont, les raisons scientifiques. En
consultant la littérature disponible, il apparaissait de plus en plus
que la compétence interculturelle n'était abordée que dans
la perspective des études des langues étrangères. En
réalité, il est question dans ces études de traiter des
rapports envisageables en situation de contact entre personnes de cultures
différentes, mais dans une perspective internationale. Il nous a donc
semblé utile de savoir si dans l'enseignement des cultures nationales,
la dimension interculturelle s'y trouve et donc, de la documenter, cette
fois-ci dans une perspective interne au Cameroun riche de sa diversité
culturelle en contact permanent.
Telles sont les deux motivations qui fondent
l'étude que nous menons dans ce travail en cours. Mais, pour continuer
à mener cette recherche, il faut d'abord dire ce qu'elle se propose de
résoudre. C'est cela qui consiste à la formulation du
problème de recherche.
1.2. FORMULATION ET POSITION DU PROBLÈME
DE
RECHERCHE
Partant de la pensée selon laquelle « la
science naît dans les problèmes et finit dans les problèmes
» (Popper, 1986, p. 185), il en ressort que le problème est ce
qui fonde tout processus de recherche. Dès lors, l'on ne saurait
débuter une étude sans en
10
formuler le problème. C'est la raison pour
laquelle Popper (1985) dit que « la science ne commence que s'il y a
problème » (p. 329).
En outre, plusieurs acceptions du problème de
recherche existent. D'après l'étymologie, le mot problème
est issu du latin et du grec « problema ». Il signifie :
« problème, question à résoudre »
(Gaffiot , 1934) ; « obstacle, question proposée, sujet de
controverse » (Bailly, 1895). En effet, le problème
se conçoit comme une difficulté. Kouam & Mbonda (2008)
enrichissent cette approche étymologique en affirmant que :
Le problème est étymologiquement ce
que l'on trouve pro-jeté devant soi. Sur un plan pratique, c'est un
obstacle qu'on trouve devant soi et qu'on a quelque mal à franchir. Et
sur un plan théorique, le problème est une difficulté
pro-posée en vue d'une résolution (p. 21).
En réalité, l'existence du
problème scientifique est non moins de fait, qu'une construction du
chercheur. Car, « Il n'y a pas de problème de recherche en soi
: un problème n'émerge que si quelqu'un, quelque part, accepte de
voir une situation comme un problème » (Gosselin, 1994,
pp.138-139). En fait, le problème de recherche est une formulation du
chercheur. Dès lors :
Formuler le problème, c'est exprimer en
termes sans équivoque, dans un énoncé non interrogatif, la
situation qui exige qu'une recherche soit menée pour que la
lumière soit apportée aux brouillards des interrogations. C'est
montrer à l'aide d'une argumentation que l'exploration empirique du
problème est nécessaire, pertinente, et qu'elle peut contribuer
à l'avancement des connaissances. (Nd'a, 2015, p. 54).
En fait, dans la formulation du problème de
recherche selon N'da :« Il s'agit donc de présenter la
situation, avec les faits qui s'y attachent, et de dire ce qui fait
problème » (2015 :54). En conséquence, le
problème de l'étude en cours se formule comme suit :
|