PARAGRAPHE II : L'OBLIGATION DE SECRET PROFESSIONNEL.
L'obligation de secret vise à garantir les secrets des
administrés, tandis que l'obligation de discrétion s'oppose
à la divulgation de secrets de l'administration. Ainsi, comme nous
l'avons précédemment dit, bien que ces deux obligations se
ressemblent et sont souvent liées, elles sont différentes,
d'où la nécessité de commencer par une définition
de l'expression « secret professionnel ».
Le secret professionnel est l'obligation, pour les
personnes qui ont eu connaissance de faits confidentiels dans l'exercice ou
à l'occasion de leurs fonctions, de ne pas divulguer hors
272 Décret n°2011/020 du 4 février 2011
portant statut spécial des fonctionnaires de greffes.
273 Article 26 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et
obligations des fonctionnaires.
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publique camerounais
les cas où la loi l'impose ou autorise la
révélation du secret ; obligation sanctionnée par la loi
pénale, qui pèse sur les médecins, chirurgiens,
sages-femmes, mais également sur toutes les autres personnes,
dépositaires par état, profession ou fonctions (temporaires ou
permanentes), des informations à caractère secret qu'on leur
confie (avocats, notaires, ministres de culte, etc.) et qui dispense de celle
de déposer sur les faits appris dans ces conditions274. On
comprend mieux à partir de cette définition, ces propos d'Emile
Garçon : «Ni le médecin, ni l'avocat, ni le prêtre
ne peuvent accomplir leur mission si les confidences qui leur sont faites
n'étaient assurées d'un secret inviolable ». Il
convient, dans le cadre de notre étude de remarquer que l'obligation de
secret professionnel ne figure pas dans le statut général de la
fonction publique camerounais (A) avant d'étudier la portéLe de
cette obligation (B)
A-L'obligation de secret professionnel, une obligation
absente dans le statut général.
L'obligation de secret professionnel ne figure pas dans le
statut général de la fonction publique275. En effet,
lorsque le statut général énumère les obligations
du fonctionnaire, il ne mentionne pas l'obligation de secret professionnel. En
fait, l'article 35 dudit statut dispose que : « le
fonctionnaire est astreint aux obligations : de servir et de se consacrer au
service ; de désintéressement ; d'obéissance ; de
réserve ; de discrétion professionnelle ».
L'absence de cette obligation dans le statut général, ne signifie
pas pour autant qu'elle ne s'impose pas aux fonctionnaires camerounais. En
réalité, d'autres textes font mention de cette obligation.
L'obligation de secret professionnel est consacrée dans les statuts
particuliers (1) et comme partout ailleurs, elle est consacrée par le
code pénal (2).
1-La consécration de l'obligation de secret
professionnel dans les statuts particuliers.
En France, l'obligation de secret professionnel figure,
contrairement au Cameroun, dans le statut général de la fonction
publique. En effet, la loi Le Pors276 consacre cette obligation en
son article 26 alinéa1 en ces termes : « les
fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des
règles instituées dans le code pénal ».
C'est sans doute pour combler cette absence de l'obligation de secret
professionnel du statut général que des statuts particuliers.
Le
274 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.
275 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant
statut général de la fonction publique de l'Etat modifié
et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre
2000.
276 Loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et
obligations des fonctionnaires.
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statut spécial des fonctionnaires de
greffes277, citant les obligations du fonctionnaire, dispose en son
article 83, alinéa 3 qu' « il est soumis au strict
respect du devoir de réserve et astreint au secret professionnel. Le
secret professionnel concerne tous les faits, actes et informations parvenus
à sa connaissance dans m'exercice de ses fonctions. Il ne peut en
être délié que sur autorisation spéciale du Ministre
chargé de la Justice ».
De même, le statut spécial des fonctionnaires de
l'administration pénitentiaire278 dispose en son article 26
alinéa 2 qu' « il est soumis au devoir de reserve et
astreint au secret professionnel. Le secret professionnel concerne tous les
faits et informations parvenus à la connaissance du fonctionnaire dans
l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions
». Le code de déontologie des fonctionnaires de la
sûreté nationale est encore plus précis sur l'obligation de
secret professionnel qui s'impose aux policiers en ces termes :
« le fonctionnaire de la sûreté nationale est
soumis à l'obligation de réserve et au strict respect du secret
professionnel »279. Malgré sa
présence dans les statuts particuliers, l'obligation de secret
professionnel est explicitement dans le code pénal.
2-La consécration pénale de l'obligation de
secret professionnel.
Avant de nous intéresser à la
consécration pénale proprement dite, il convient de dire que les
statuts de la fonction publique qui consacrent l'obligation de secret
professionnel renvoient toujours au code pénal qui apparait comme
l'instrument juridique par excellence en matière de secret
professionnel. La plupart de ces statuts utilisent la formule :
«Indépendamment des règles instituées dans le
code pénal en matière de secret professionnel ». Ceci
montre la primauté du code pénal en matière de secret
professionnel.
En effet, le code pénal280 dispose en son
article 310 que : « (1) Est puni d'un emprisonnement de trois
mois à trois ans et d'une amende de 20.000 à 100.000 francs celui
qui révèle sans l'autorisation de celui à qui il
appartient un fait confidentiel qu'il n'a connu ou qui ne lui a
été confié qu'en raison de sa profession ou de sa
fonction. (2) L'alinéa précédent ne s'applique ni aux
déclarations faites aux autorités judiciaires ou de police
judiciaire portant sur des faits susceptibles de constituer un crime ou un
délit, ni aux réponses
277 Décret n°2011/020 du 4 février 2011
portant statut spécial des fonctionnaires de greffes.
278 Décret n°2010/365 du 29 novembre 2010 portant
statut spécial des fonctionnaires de l'administration
pénitentiaire.
279 Article 7 du décret n°2012/546 du 19 novembre
2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la
sûreté nationale.
280 Loi n° 77/23 du 06 décembre 1977 portant code
pénal du Cameroun.
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en justice à quelque demande que ce soit.
(3) L'alinéa 2 ne s'applique pas : a) Au médecin et au chirurgien
qui sont toujours tenus au secret professionnel, sauf dans la limite d'une
réquisition légale ou d'une commission d'expertise ; b) Au
fonctionnaire sur l'ordre écrit du Gouvernement ; c) Au ministre du
culte et à l'avocat. (4) La juridiction peut prononcer les
déchéances de l'article 30 du présent code
». Le petit « b » de l'alinéa 3 est une
illustration que le fonctionnaire est soumis au secret professionnel par le
droit pénal.
Dans le même sillage, L'article 226-13 du code
pénal français prévoit que « la
révélation d'une information à caractère secret par
une personne qui en est dépositaire, soit par état, soit par
profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est
punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende
». La sanction ne se limite pas à celui qui
transgresse le secret lié à sa profession : elle peut
également s'appliquer à ceux qui incitent à cette
transgression, car le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir la communication de
ces informations est également puni d'un an d'emprisonnement et de 15
000 euros d'amende. Ces exemples montrent par l'évidence que la
protection du secret professionnel est d'abord une affaire pénale. Dans
le même schéma que celui adopté dans le cas de l'obligation
de discrétion professionnelle, il convient de mesurer la portée
de l'obligation de secret professionnel.
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