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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais.


par Philippe Roméo AMBI
Université de Yaoundé 2 - Master 2 2015
  

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B-La portée de l'obligation de secret professionnel.

La notion de secret professionnel est plus complexe. En ce qui concerne les fonctionnaires, les avis divergent sur le fait qu'ils soient concernés ou non. Toutefois, la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 mentionne en son article 26 que « les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le code pénal». Ainsi, il y a bien secret professionnel, mais c'est sa portée qui varie de celui concernant les médecins ou les avocats. C'est cette variation de la portée qui fait en sorte qu'il y ait des domaines où l'obligation de secret professionnel ait un caractère absolu (1). Toutefois, cette obligation comporte aussi des limites (2).

1-Les domaines du secret absolu.

Des domaines exigent le secret absolu de la part des fonctionnaires : la défense, les informations financières et le domaine médical. Dans le domaine de la défense, on parle souvent de secret-défense. L'article 18 du statut général des militaires281 dispose en effet

281 Loi n°80/10 du 14 juillet 1980 portant statut général des militaires.

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 114

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qu' : « indépendamment des dispositions du code pénal relatives au secret de la défense nationale ou du secret professionnel, les militaires sont liés par l'obligation de discrétion pour tout ce qui concerne les faits et informations dont ils ont connaissance dans l'exercice de leurs fonctions ou à l'occasion du service ».

En outre, dans le domaine médical, le code pénal282 est clair lorsqu'il dispose que les exceptions au secret professionnel contenues dans l'alinéa 2 de l'article 310, ne s'applique pas aux médecins et chirurgiens. Les termes exacts sont les suivants : « ...(3) L'alinéa 2 ne s'applique pas : a) Au médecin et au chirurgien qui sont toujours tenus au secret professionnel, sauf dans la limite d'une réquisition légale ou d'une commission d'expertise ...».Toujours dans le domaine médical, en France cette fois, Dès 1885, dans l'arrêt WATTELET, la Cour de Cassation a affirmé le caractère général et absolu de l'obligation de secret professionnel s'imposant aux médecins comme un devoir de leur état et dont il n'appartient à personne de les affranchir. On peut mieux comprendre ce caractère général et absolu dans le serment d'Hippocrate : "Quoi que je voie ou entende dans la société pendant l'exercice ou même hors de l'exercice de ma profession, je tairai ce qui n'a jamais besoin d'être divulgué, regardant la discrétion comme un devoir en pareil cas". Le délit existe dès que la révélation est faite avec connaissance même sans intention de nuire. Ce sont les mesures d'action sanitaire et sociale qui amèneront au début du XXe siècle à remettre en cause le caractère absolu pour créer un état de secret controversé. On s'orientera vers l'adjonction au texte du Code pénal de dérogations définies par des lois, et vers une interprétation assouplie des textes.

2-Les dérogations à l'obligation de secret professionnel.

Le code pénal camerounais prévoit trois dérogations à l'obligation de secret professionnel : l'autorisation du titulaire du secret, les faits susceptibles de constituer des crimes ou délits et la réquisition légale faite aux médecins et chirurgiens. Les termes du code sont les suivants : « (1) Est puni ...celui qui révèle sans l'autorisation de celui à qui il appartient un fait confidentiel qu'il n'a connu ou qui ne lui a été confié qu'en raison de sa profession ou de sa fonction. (2) L'alinéa précédent ne s'applique ni aux déclarations faites aux autorités judiciaires ou de police judiciaire portant sur des faits susceptibles de constituer un crime ou un délit, ni aux réponses en justice à quelque demande que ce soit. (3) L'alinéa 2 ne s'applique pas : a) Au médecin et au chirurgien qui sont toujours tenus au secret

282 Loi n° 77/23 du 06 décembre 1977 portant code pénal du Cameroun.

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 115

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professionnel, sauf dans la limite d'une réquisition légale ou d'une commission d'expertise ...».

La législation française est plus étendue en la matière. La révélation des secrets acquis y est parfois permise, voire même obligatoire. Elle est permise notamment : pour prouver son innocence ; lorsque la personne intéressée a donné son autorisation. Elle est obligatoire notamment dans les cas où le législateur, pour des motifs de sécurité ou de cohésion de la vie sociale, a placé les fonctionnaires dans une situation de secret professionnel mais aussi de signalement de faits délictueux ou criminels auxquels ils seraient confrontés. Exemple : les articles 226-14 et 434 du code pénal imposent la révélation du secret en cas de sévices à l'encontre d'un mineur de moins de quinze ans ou d'un incapable majeur ou pour prévenir ou limiter les effets d'un crime. C'est en fait une obligation de dénonciation. Exemple : l'article 40-2 du code de procédure pénale impose aux fonctionnaires d'avertir sans délai le procureur de la république lorsqu'ils ont acquis la connaissance d'un délit ou d'un crime. Ces textes ne prévoient pas de sanction pénale pour les fonctionnaires en cas de méconnaissance mais d'autres textes peuvent être invoqués pour les sanctionner. De plus, la méconnaissance de ces dispositions peut servir de fondement à des poursuites disciplinaires. Exemple : deux policiers participent à un congrès au cours duquel les personnes apprennent à fabriquer des bombes. Le ministre de l'intérieur révoque ces deux fonctionnaires car ils n'ont pas révélé les faits. Pour le Conseil d'Etat, la révocation est justifiée car il y a bien une faute disciplinaire.

En somme, il était question pour nous de traiter des obligations de confidentialité. En effet, nous avons recensé trois obligations de confidentialité que sont l'obligation de réserve qui consiste en une retenue dans l'expression des opinions en public du fonctionnaire, vis-à-vis de l'administration ; l'obligation de discrétion professionnelle qui consiste à ne pas divulguer les secrets de l'administration (faits et documents dont il a connaissance dans l'exercice de ses fonctions ou à l'occasion du service) ; enfin, l'obligation de secret professionnel qui consiste à ne pas divulguer les secrets des administrés. Nous avons par exemple constaté que l'obligation de réserve qui est d'origine jurisprudentielle au Cameroun, est restée complètement jurisprudentielle en France, depuis sa consécration par le conseil d'Etat en 1935283. Le fonctionnaire doit donc adopter une attitude responsable dans le service et en dehors du service.

283 CE. 11 janvier 1935, Bouzanquet (le juge renforce, dans cet arrêt, l'obligation de réserve pour les fonctionnaires en poste à l'étranger dans la mesure où ils représentent la France.

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CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

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En somme, il était question pour nous d'énumérer et d'analyser les obligations de responsabilité du service qui sont contrairement aux obligations de solidarité aux corps, toutes présentes dans le statut général de la fonction publique284 à l'exception de celle du secret médical qui est premièrement pénale, et ne font pas l'objet de statuts particuliers. Nous les avons regroupées en deux catégories : l'obligation de servir d'une part et les obligations de confidentialité d'autre part. Concernant la première catégorie, c'est-à-dire l'obligation de servir, elle regroupe l'obligation de se consacrer à ses fonctions et l'obligation d'obéissance hiérarchique qui rendent le fonctionnaire responsable des tâches qui sont les siennes. Concernant la dernière catégorie, contituée des obligations de confidentialité que sont l'obligation de réserve, de discrétion professionnelle et de secret professionnel.

Il est à noter que l'obligation d'obéissance hiérarchique et l'obligation de secret professionnel sonrt particulières parmi les obligations de responsabilité du service car elles exposent à des poursuites et le cas échéant à des sanctions pénales en dépit des sanctions disciplinaires. Pour ce qui est de l'obligation d'obéissance hiérarchique pour ne parler que de celle-ci, elle est limitée par le devoir de désobéissance en cas d'ordre manifestement illégal. Le code pénal précise pour ce qui est de l'infraction de la torture285 par exemple qu'il ne retient pas l'ordre du supérieur hiérarchique comme excuse. Ce qui rend cette obligation complexe, d'autant plus qu'en France, dans l'affaire Papon, des historiens ont parlé de vassalisation des fonctionnaires par le régime de Vichy et la transformation des citoyens en objets. En outre, la corrélation entre l'esprit carriériste de M. Papon et la soumission à l'autorité a été sérieusement évoquée. On comprend mieux ainsi l'intention du législateur car, on encadrant le devoir d'obéissance du fonctionnaire, il remet on avant sa responsabilité au sein de l'organisation. De plus, en admettant que l'on puisse obéir à un ordre illégal si celui ci ne perturbe pas le service public, on comprend parfaitement la priorité qui est donnée au fonctionnement des institutions

284 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

285 Article 132 (bis) de la loi n° 77/23 du 06 décembre 1977 portant code pénal du Cameroun.

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dans le souci de l'intérêt général. En bref, les obligations de responsabilité du service réglementent les relations intra-adminstratives et les relations administration/usagers du service publique. Elles concernent tout ce qui a trait au service.

CONCLUSION

GENERALE

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En définitive, il était question pour nous d'étudier les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais. Cette étude avait pour but, tout au long de notre analyse de répondre à la question : quelles sont les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais ? La réponse à cette question nous a permis de constater un certains nombre de faits qui mérite un rapport.

Tout d'abord, il convient de dire que notre question donnait lieu à une énumération à laquelle nous avons ajouté l'analyse afin d'aboutir à un resultat relativement satisfaisant. La première réponse que nous avons apportée à cette question a été de dire que l'on peut regrouper les obligations du fonctionnaire en deux catégories : les obligations de solidarité au corps et les obligations de responsabilité du service. Cette division peut être justifiée par le fait que le statut général de la fonction publique définit le corps comme l' « ensemble des fonctionnaires exerçant une fonction spécifique dans un secteur d'activité déterminé et régi par les mêmes dispositions réglementaires »286. Cela subodore de par l'existence de dispositions réglementaires propres à certains corps qu'il y a également une différence de degré dans la déontologie. Le corps a donc une influence sur les obligations du fonctionnaire. Les obligations de responsabilité du service sont celles qu'on retrouve aussi bien dans le statut général que dans les statuts particuliers. Un rapport au cas par cas s'impose.

Pour ce qui est des obligations de solidarité au corps, ce sont des obligations qui sont exigibles au fonctionnaire en fonction du corps auquel il appartient. En d'autres termes, les obligations varient d'un corps à l'autre ; le fonctionnaire est soumis à ces obligations du fait de son appartenance au corps. C'est pourquoi certains fonctionnaires sont astreint dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions à revêtir un uniforme287, à porter un costume288 ou même à porter une arme tandis que d'autre ne sont pas soumis à ces obligations. Tout comme certains fonctionnaires jouissent du droit syndical, du droit d'adhésion à un groupement ou formation politique et même du droit de grève qui est constitutionnellement consacré tandis que d'autre en sont privés et ont une obligation de ne pas exercer ce droit. Si on s'en tient au droit en vigueur, l'incident de septembre 2015 où les militaires de retour de la MINUSCA, bien qu'ayant le droit de reclamer leur droit à la rémuneration, devaient privilégier la voie hiérarchique au lieu de se mettre en grève. Nous avons pu regrouper les obligations de solidarité au corps en

286 Article 5 du décret n°94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

287 Article 11 du décret n°2012/546 du 19 novembre 2012 portant code de déontologie des fonctionnaires de la sûreté nationale

288 Décret n°2011/020 du 4 février 2011 portant statut spécial des fonctionnaires de greffes.

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deux catégories : les obligations de solidarité dans l'éthique du corps et les obligations de solidarité dans la discipline du corps.

Pour ce qui est des obligations de responsabilité du service, ce sont des obligations que l'on peut qualifier de générales car elles sont exigibles par l'administration à tous les fonctionnaires, quel que soit le corps auquel ils appartiennent. Tout fonctionnaire a par exemple l'obligation de servir ; c'est juste l'intensité de l'obligation qui peut varier d'un corps à l'autre, comme nous l'avons vu par exemple en France où certains fonctionnaires avait un droit de retrait d'une situation dangereuse289 comme motif de désobéir aux ordres du supérieur, tandis que d'autres ne pouvaient pas s'en prévaloir. C'est derniers ne pouvaient s'en prévaloir car faire face à ce genre de situation fait partie de leur obligation de servir et sont par conséquent tenus à obéir aux ordres du supérieur.

Deux obligations parmi tant d'autres ont attiré particulièrement notre attention à cause de leurs violations qui apparaissent déjà comme le quotidien de l'administration camerounaise : il s'agit de l'obligation de désintéressement et de l'obligation de service continu, elle-même, issue du principe de continuité du service public. L'obligation de désintéressement a, en dehors du fait de ne pas avoir des intérêts dans une entreprise sous son contrôle ou en relation avec le fonctionnaire, deux implications : l'interdiction d'obtenir des gains privés et l'interdiction d'utiliser l'argent public à des fins personnelles, des pratiques que l'on peut qualifier de corruption et de détournement de deniers publics. Or, comme le signale le Pr Bernard Raymond Guimdo, le fonctionnaire est tenu à une obligation de moralité et de bonnes moeurs290. Pour ce qui concerne le principe de, continuité du service public, il est sujet de violations de par les actes de bon nombre de fonctionnaire à travers les retards et les absences injustifiées qui causent des périodes de vacuité dans le service public, exception illégime et même illégal au principe de continuité du service public. Compte tenu de l'existence de la CONAC (commission nationale anti-corruption) pour lutter contre la corruption291, nous avons, comme solution à la violation du principe de continuité du service public, suggéré la mise sur pied d'une commission de contrôle dont la mission serait de la présence du fonctionnaire à son poste conformément à la réglementation en vigueur, et ceci en faisant des contrôles inopinés comme le fait l'administration fiscale dans ces contrôles des marchés. Si cette mésure est mise sur pied,

289 Voir article 5 du décret n°95-680 du 9 mai 1995, op. cit.

290 Voir Guimdo Dongmo (B.R), « la corruption dans le droit de la fonction publique : le cas du Cameroun, juridis périodique n°75, P61.

291 Voir décret n°2006/088 du 11 mars 2006 portant création, organisation et fonctionnement de la CONAC.

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l'administration camerounaise travaillera avec une célérité exemplaire et une efficacité admirable. Un dernier aspect du droit de la spécificité du droit de la fonction publique camerounais a été le fait que tout au long de notre étude comparative, les statuts de la fonction publique des autres pays de notre champ géographique étaient des lois, le Cameroun a été le seul pays où le statut des fonctionnaires est du domaine réglementaire.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams