SECTION II : LES OBLIGATIONS DE DISCRETION
PROFESSIONNELLE ET DE SECRET PROFESSIONNEL.
Les obligations de discrétion professionnelle et de
secret professionnel tout comme l'obligation de réserve sont des
obligations de confidentialité. Ces deux obligation se ressemblent mais
ne sont pas identiques. Sans y être vraiment défini, le secret
professionnel est imposé par l'article 310 du code pénal.
L'obligation de discrétion professionnelle ne repose pas sur un article
du code pénal mais constitue plutôt une notion
générique (c'est-à-dire dont la formulation est dans le
domaine public). L'obligation de discrétion professionnelle n'est pas
aussi absolue que l'obligation de secret professionnelle car elle n'expose
qu'aux sanctions disciplinaires tandis que l'autre, de par sa
consécration pénale, expose également à des
sanctions pénales.
En revanche, l'obligation de discrétion professionnelle
est plus étendue que celle du secret professionnel car elle concerne
l'ensemble des informations que le fonctionnaire reçoit du fait de
l'exerce de la fonction. Le secret professionnel ne couvre que les faits
appris, qui sont liés à la fonction exercée. C'est
pourquoi, pour mieux appréhender ces deux obligations, il convient de
traiter séparément l'obligation de discrétion
professionnelle (paragraphe I) et l'obligation de secret professionnel
(paragraphe II).
PARAGRAPHE I : L'OBLIGATION DE DISCRETION
PROFESSIONNELLE.
Pour saisir l'obligation de discrétion professionnelle,
il faut d'abord définir le terme « discrétion ». Sur le
plan littéraire, la discrétion est la qualité d'une
personne qui sait garder
260 CE. 25 novembre 1987, District de Comtat Venessin.
261 CE. Section 1er décembre 1972, Duue
Obrégo.
262 CE. 14 mars 1958, Etienne.
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un secret263. Le dictionnaire le Robert de
poche va dans le même sens. Sur le plan juridique, le vocabulaire
juridique la définit comme le fait de taire ou qualité de
celui qui tait des informations confidentielles, réserve qui
fait parfois l'objet d'une obligation professionnelle. Ex. l'obligation qui
pèse sur les fonctionnaires pour tout ce qui concerne les faits et
informations dont ils ont connaissance dans l'exercice de leurs fonctions ou
sur les membres du comité d'entreprise dans le domaine de l'information
économique264. De cette définition, seule la
partie concernant le fonctionnaire, nous intéresse. Cette
définition va dans le même sens que le statut
général de la fonction publique qui dispose en son article 41 que
: «(1) Tout fonctionnaire doit faire preuve de
discrétion professionnelle pour tout ce qui concerne les faits,
informations ou documents dont il a eu connaissance dans l'exercice ou à
l'occasion de l'exercice de ses fonctions. En dehors des cas
expressément prévus par les textes en vigueur, le fonctionnaire
ne peut être délié de cette obligation que par une
décision expresse de l'autorité dont il relève. (2) Tout
détournement, toute soustraction de pièces ou de documents de
service sont formellement interdits. Il en est de même de leur
communication ou de leur production, à moins qu'elles ne soient
exécutées pour raison de service et dans les formes prescrites
par les textes en vigueur »265. Pour
étudier de cette obligation, nous parlerons de sa consistance (A), avant
de nous intéresser à sa portée (B).
A-La consistance de l'obligation de discrétion
professionnelle.
L'obligation de discrétion signifie que le
fonctionnaire doit garder secrets les faits ou renseignements dont il prend
connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses
fonctions et qui revêtent un caractère confidentiel. Cette
obligation signifie également que le fonctionnaire adopte une attitude
de retenue à l'égard de tous les faits ou renseignements qui,
s'il les dévoilait, pourraient nuire à l'intérêt
public, à l'autorité constituée, au bon fonctionnement de
l'administration publique ou porter atteinte à la vie privée de
citoyens. Au Cameroun, cette obligation consiste à faire preuve de
discrétion (1) et à ne pas détourner des documents (2).
263 Dictionnaire universel, 4e éd.
Hachette-EDICEF, Août 2007.
264 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.
265Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994
portant statut général de la fonction publique de l'Etat
modifié et complété par le décret n° 2000/287
du 12octobre 2000.
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1-La recommandation de faire preuve de
discrétion.
Les fonctionnaires sont tenus à une obligation de
discrétion professionnelle pour tous les faits (informations, documents)
dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice
de leurs fonctions. L'obligation de discrétion professionnelle
protège les secrets de l'administration/du service. C'est cette
obligation qui interdit la communication de certains documents à des
personnes privées mais aussi à des fonctionnaires qui n'ont pas
la qualité à recevoir de tels documents. L'obligation de
discrétion professionnelle exclut donc toute divulgation de faits,
informations, documents confidentiels ou non, réservés à
l'usage de l'administration.
En ce qui concerne les enseignants, Ils ne peuvent pas faire
état publiquement de documents internes concernant l'école dans
laquelle il exerce. Un enseignant peut se prêter à une interview
sur une question d'ordre général, mais pas sur le fonctionnement
administratif de l'école où il enseigne. Cette obligation impose
aux personnels de l'enseignement d'éviter des prises de position
publiques mettant en cause le fonctionnement de l'administration. Elle vise
à éviter que le comportement public de ces personnels ne porte
atteinte à l'intérêt du service et ne crée des
difficultés relationnelles préjudiciables à
l'accomplissement de leurs missions. Il s'agit également de ne pas
divulguer des faits dont ils ont connaissance dans l'exercice de notre
métier. En voici quelques exemples : parler de résultats
scolaires à des tiers non concernés hors du cadre institutionnel
; établir des attestations et témoignages concernant un divorce
(sauf à la demande d'un juge) ; divulguer une situation familiale
douloureuse, ou délicate, à un tiers hors du cadre institutionnel
; citer un rapport médical confidentiel (enfant porteur du virus HIV,
tares familiales, etc.). Cette liste n'est pas exhaustive, loin de là,
aussi, il est conseillé la plus grande prudence lorsque vous devez faire
une déclaration sur l'école à un tiers non enseignant
(Parent, journaliste, professionnel de santé, avocat...). A
côté de cette recommandation de faire preuve de discrétion,
il y a l'interdiction de détournement.
2-L'interdiction de détourner les
documents.
Avant de parler de l'interdiction proprement dite, il convient
de définir d'abord le terme «détournement ». Le
détournement est l'action de détourner, la soustraction
à son profit ; en terme plus clair, c'est du « vol » qui
est une infraction pénale. En fait, concernant l'interdiction
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de détournement, l'article 41 alinéa 2 du statut
général de la fonction publique dispose que : «
tout détournement, toute soustraction de pièces ou de
documents de service sont formellement interdits. Il en est de même de
leur communication ou de leur production, à moins qu'elles ne soient
exécutées pour raison de service et dans les formes prescrites
par les textes en vigueur ».
Ce versant de l'obligation de discrétion
professionnelle, s'impose avec acuité, d'une part aux fonctionnaires
chargés de photocopier par exemple des documents qu'ils ne doivent
divulguer compte tenu du contenu de la note photocopiée266 et
d'autre part, aux syndicats de fonctionnaires267. Le comptable d'un
lycée manque, par exemple à son obligation de discrétion
en photocopiant, pour permettre à son épouse d'en faire usage, un
courrier adressé au proviseur de l'établissement dont il a eu
connaissance dans l'exercice de ses fonctions268. Ces faits ont
été qualifiés, par l'administration de « reprographie
frauduleuse » et ont motivé la sanction du blâme. Une fois la
consistance de l'obligation de discrétion professionnelle
étudiée, il convient de s'intéresser à sa
portée.
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