D-LES RESULTATS DES REFORMES FORESTIERES DE 1994,
ENVIRONNEMENTALES DE 1996 ET LEURS TEXTES D'AMENAGEMENT
0 Ibid.
0 Ibid.
0 Ibid.
0 Arrêté n° C 69/ MINEP du 08 mars 2005 fixant
les différentes catégories d'opérations dont la
réalisation est
soumise à une étude d'impact d'impact
environnemental.
0 Ibid.
114
L'aménagement des forêts, la réduction des
titres d'exploitation à deux, l'attribution des concessions par appel
d'offres après étude d'une commission sont autant d'innovations
qui ont rendues l'activité forestière rentable et
bénéfique pour l'économie du pays et certaines
collectivités locales. L'interdiction d'exploiter certaines essences
d'arbres allait développer la transformation locale en créant
plusieurs emplois dans l'avenir dans le secteur des forêts.
En effet, les résultats de la loi de 1994 ne se sont
pas fait attendre. En dehors de l'augmentation de la contribution du secteur
forestier au PIB, la lutte contre la pauvreté à travers la
rétrocession d'une partie des recettes fiscales aux
collectivités, la création d'emplois et la mise en place des
forêts communautaires et communales.
Après les réformes forestières de 1994,
on a remarqué une profonde augmentation de la contribution des revenus
au PIB. Ainsi, cette contribution est passée de 1, 53 milliards en 1992
à 258 milliards en 20040. Dans son objectif de lutter contre
la pauvreté, le gouvernement camerounais a réservé 40% de
recettes fiscales au communes et 10% aux populations riveraines0.
Pour ce qui est des emplois régénérés par le
secteur forestier, on a aussi constaté une augmentation des chiffres.
Les chiffres que le rapport 2006 du MINEFI estime à 13270
emplois0. L'autre aspect positif des résultats de ces
réformes est la création des forêts communautaires et
communales. En 2009, le nombre des forêts communautaires est
estimé à 35 alors que les forêts communales sont
estimées à 180. D'autres aspects positifs de ces
résultats sont à noter. Il s'agit de l'élaboration d'un
plan de zonage, le seul dans la sous région, le passage progressif
à la certification forestière, l'adoption d'un mécanisme
d'adjudication des titres et l'introduction des trois niveaux d'observateurs
indépendants pour la gestion transparente du secteur0.
Beaucoup d'observateurs saluent la politique d'appel d'offres.
Pour eux, cette politique emmène la compétitivité dans les
offres des soumissionnaires, en plus à travers les critères de
sélection, la commission élimine des sociétés
irresponsables. L'un de ces observateurs est Giuseppe Topa0, il
affirmait à Jeune Afrique Intelligence en juin 2000 que : `'
Avec le système d'appel d'offres, le Cameroun a mis en place un
système d'attribution des concessions, de contrôle de
l'exploitation et de protection de la nature qui pourra devenir à
0 Verbelen, `'Exploitation abusive des forêts», 1999,
p. 25.
0 Bigombé Logo, `'Foresterie communautaire et
réduction».
0 `'Audi économique et financier», MINEFI, 2006, p.
50.
0 Bigombé Logo, `'Foresterie communautaire et
réduction», 2008.
0 `'Ministère des forêts et de la faune», http.
//Cameroun50, 2010.
0Giuseppe Topa, expert forestier principal de la Banque mondial
pour la région Afrique.
115
long terme l'un des plus performants dans le
monde''0. D'une manière générale, les travaux
des commissions ont permis de donner un signal fort dans la lutte contre
l'exploitation illégale par l'élimination des soumissionnaires
fortement impliqués dans l'exploitation frauduleuse. C'est ce qui est
arrivé à la SIM en 2000. Elle s'est vue exclue des appels
d'offres de concessions de l'année 2000 pour faute lourde0.
Le relèvement des critères a permis d'écarter bon nombre
d'aventuriers et à rendre le secteur plus difficile d'accès,
l'attribution des titres à des opérateurs qui ont investis
durablement0.
Mais, beaucoup reste encore à faire, car certaines de
ces dispositions n'ont pas été appliquées ou sont mal
adaptées au contexte camerounais. Par exemple celles qui
prévoyaient la transformation à 70% de l'essence localement et
l'interdiction d'exportation des grumes cinq ans après l'application de
la dite loi. On peut dire que la loi de 1994 n'a pas encore atteint les
objectifs escomptés. Car nous avons constaté qu'elle a plusieurs
failles. Ses manquements sont son manque de respect et son application
subjective par les autorités compétentes. Cette loi semble
complexe et floue dans certaines de ses dispositions. On note une
diversité des sources favorables à des interprétations
fluctuantes. Par exemple la liste des pièces demandées pour la
confection du dossier d'appel d'offre. Ces pièces varient selon que l'on
se réfère aux pièces demandées par l'article 65 du
décret 095-531, aux pièces demandées par l'administration
des forêts pour ces offres d'appel, aux pièces à fournir
par les soumissionnaires prévues par l'article 23 du code des
marchés0. Cette diversité des sources permet
d'écarter ou de conserver en lice tel ou tel dossier. Le nombre de
pièces demandées par l'administration des forêts est le
plus complet, mais sans doute également superflu. Est-il
nécessaire de demander le bilan de cinq années comparées,
le plan d'investissement et les réalisations sociales pour que soit
déclaré recevable le soumissionnaire ? Tout se passe comme si
l'objectif de l'administration était d'écarter le plus possible
de soumissionnaires sur des critères non financiers, dans les conditions
parfois douteuse vu les conflits d'intérêt qui concerne certains
membres de la commission0. Prenons le cas de Bonaventure Takam.
L'attribution en 2001 d'une concession de presque 100 000 hectares à sa
SCTB était paradoxale. Car l'offre de Takam était la plus basse
de l'adjudication, plus basse même que les offres perdantes0.
A ces lacunes s'ajoutent encore l'attribution à des non professionnels,
la
0 Ibid. p. 58.
0 Ibid. p. 27.
0`'Audit économique et financier '', MINEF, 2006, p.50
0 Ibid. p. 50.
0 Ibid. p. 52.
0 Labrousse, Verschaves, Les pillards de la forêt,
2002, p. 72.
116
pratique de la fermage, la concurrence entre les filiales
soeurs d'une même entreprise. S'agissant de ce genre de cas de
concurrence truquée, dans les adjudications de 2000, deux filiales de
Rougier, à savoir la CAMBOIS et la SFID étaient concurrentes pour
une concession remportée par la première. Ainsi, quelle
sorcellerie deux filiales du même groupe en concurrence ne sauraient au
courant ni du nom ni de l'existence de leur compétiteurs
éventuels ? Pourtant en se référant à la
jurisprudence française qui est la plus exigeante en la matière,
on peut constater que sont interdites :
Toute pratique tendant à permettre ou faciliter la
coordination des offres des entreprises soumissionnaires, ainsi que les
échanges d'informations entre elles antérieurement à la
date ou le résultat de l'appel d'offres est connu ou peut être que
ces échanges portent sur l'existence des compétiteurs, leurs
noms, leur importance, leur disponibilité en personnel et en
matériel, leur intérêt ou leur absence
d'intérêt pour le marché considéré ou le prix
auquel ils se proposent de soumissionner0.
Pourtant dans la liste des soumissionnaires de juin 2000, un
bon nombre de soumissionnaires qui se battaient pour une même concession
étaient des sociétés associées. Conséquence,
le rapport de l'observateur indépendant révèle
paradoxalement que les soumissionnaires qui étaient seuls en
compétition pour une UFA ont soumissionné quasiment au prix
plancher. Ce qui peut laisser croire qu'ils ont eu connaissance qu'ils
étaient seuls en compétition0.
Le non respect de certaines dispositions forestières
par les autorités compétentes est une véritable entorse
dans l'atteinte des objectifs fixés. En octobre 2000, Guisepe Topa
disait que : `'Dans le cadre de sa stratégie de planification, le MINEF
a accompli un travail de mise en ordre et de transparence dans la gestion des
titres qui vient enfin limiter les opportunités autrefois rependues de
masquer des exploitations illicites. Le MINEF a confirmé
récemment que toutes les autorisations de récupération
sont expirées. Toute activité menée sur un tel titre est
donc désormais illégale''0. Pourtant, entre le 30
juillet 1999 date officielle de leur suppression en octobre 2000, quand la
Banque mondiale félicite le MINEF, pas moins de 49
récupérations ont été
octroyées0.
En dehors de ce manque de respect s'ajoutent une
vérification non pertinente de certains critères tels que la
possession des engins, les garanties de financement, les investissements
programmés. A titre illustratif, cet extrait du rapport de l'OI en
témoigne que
0 Ibid. p. 58. 0 Ibid. p. 94. 0 Ibid.
0 Ibid.
la commission a encore manqué de rigueur en acceptant
un dossier qui n'a pas justifié dix jours après la caution
bancaire qu'on lui exigeait. Ce qui a été pris comme une
injustice par certains membres de la commission, car les cas ne sont pas
jugés de la même façon0.
Les versements des redevances forestières par les
sociétés forestières aux communes et aux populations
riveraines qui étaient considérées comme une solution
viable pour la lutte contre la pauvreté montrent plutôt un autre
visage aujourd'hui. Leur multiplication ne traduit pas toujours une meilleure
implication des populations locales, ou des retombées effectives sur le
développement local0. De nombreuses études ont
montré qu'il s'agit dans beaucoup des cas d'une instrumentalisation du
dispositif légal et l'ignorance des masses paysannes, par des gens mieux
organisés et nantis (élites intérieures et
extérieures). Ainsi les réalisations sociales provenant des
revenus de l'exploitation des ces forêts sont souvent imperceptibles. Les
photos ci-dessous illustrent suffisamment quelques abus notoires et autres
investissements dont la pertinence peut être questionnée.
117
0 Ibid. p. 53.
0 `'Audi économique et financier», MINEFI, 2006, pp.
92-93.
Les photos n°17 - 24 : les
réalisations issues des redevances forestières des communes de la
région de l'Est.

Figure 49 : Ce hangar a coûté plusieurs millions
!

Figure 50 : Idem

Figure 50: Ce comptoir commercial a été
facturé 10 millions par une commune rurale


Figure 53 : Foyer communautaire construit avec les fonds RFA (les
10%) : Quelle importance pour les populations

Figure 52: Comme ces deux là (10 millions chacun)
Figure 54 : Exemple de surfacturation , édifice à 8
millions de FCFA ?

118
Figure 55 : Ce puit a été facturé
à 5 millions de FCFA
Figure 56 : Matériel coûteux ayant très
peut servi et
abandonné faute de maintenance
Source : `'Audit économique et
Financier», MINEFI, 2006, p. 95.
119
Au terme de l'analyse de l'évolution de la
législation forestière et environnementale au Cameroun, ce qui
saute à l'oeil c'est que, ce changement s'est fait de manière
crescendo, parfois affecté par les facteurs internes du pays et souvent
suite aux réalités internationales. Les différentes
métamorphoses subis par la législation forestière
aboutissent aux grandes réformes forestières et environnementales
des années 90. Ce sont ces réformes qui viennent parfaire et
adapter le régime forestier et environnemental camerounais aux normes
internationales. Pourtant les résultats de ce changement ont
été parfois entachés d'insuffisances. Alors que pour
l'application de ces différents régimes et la réalisation
des projets dans le secteur des forêts et environnemental, il fallait des
institutions et des structures d'accompagnement, qui comme ces lois ont connu
aussi une franche évolution.
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