Section II : La sanction attachée à la
délimitation des compétences
La distinction entre matières législatives et
matières réglementaires établie par la Constitution peut
s'avérer insuffisamment précise. Il est également presque
inévitable que chacun des organes soit amené à
étendre ses compétences au-delà de son domaine propre. En
prévision de telles situations, se trouvent être assurées
la protection du domaine réglementaire (paragraphe 1) aussi bien que
celle du domaine législatif (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La protection du domaine
réglementaire
La protection du domaine réglementaire est
organisée par la Constitution elle-même. Cette protection est
rigoureuse car elle est à la fois a priori (A) et a
posteriori (B).
A/ Une protection a priori : l'opposition
d'irrecevabilité de l'article 76
114 L'article 75 impose, à peine de caducité, le
dépôt d'un projet de loi de ratification « avant la date
fixée par la loi d'habilitation ». Il n'interdit pas pour autant
que la ratification puisse intervenir par l'adoption d'un texte de loi
différent du projet déposé et ayant un objet plus
étendu, de sorte que le projet de loi de ratification ne pourrait plus
avoir qu'une fonction conservatoire, en évitant la caducité des
ordonnances.
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La protection a priori prévue à
l'article 76 de la Constitution résulte de l'accord nécessaire
entre les présidents de la République et de l'Assemblée
nationale (1). Mais les députés ne sont pas
désarmés devant cet accord intervenu entre les organes de la
même majorité : ils peuvent le contester devant le Conseil
constitutionnel (2).
1. Un accord nécessaire entre les présidents de la
République et de l'Assemblée nationale
Une irrecevabilité peut être
décidée contre les propositions et amendements de lois qui ne
sont pas du domaine législatif. Il faut pour cela que le
président de la République soulève une opposition
d'irrecevabilité (a) et que le président de l'Assemblée
nationale la retienne (b).
a. Un moyen de défense invoqué par le
président de la République
Les propositions de lois et les amendements parlementaires qui
ne sont pas du domaine de la loi sont irrecevables. Cette règle est une
conséquence logique de la délimitation des domaines de
compétences législatives et réglementaires puisque
l'Assemblée nationale ne peut intervenir en dehors de son domaine de
compétences propre.
La Constitution ne précise pas l'autorité qui a
qualité pour soulever l'irrecevabilité. Mais étant
donné qu'il s'agit de protéger le domaine réglementaire
des empiètements éventuels du législateur, il est logique
d'admettre que cette prérogative revienne au président de la
République. C'est d'ailleurs cette solution que fournit le
règlement de l'Assemblée nationale en son article
54.3115 qui précise que l'irrecevabilité est
prononcée par le président de l'Assemblée nationale
après avis de la conférence des présidents ou à la
demande du président de la République.
Il est à noter que l'irrecevabilité n'est
dirigée ici que contre les propositions et les amendements d'origine
parlementaire. Mais le règlement de l'Assemblée nationale en son
article 54.3 inclut également dans le champ des irrecevabilités
les projets de lois qui ne sont pas du domaine de la loi116.
115 C'est l'ancien article 52.3 du règlement de
l'Assemblée nationale avant sa modification par la résolution
n° 2006 A du 1er juin 2006.
116 Outre le fait que cette disposition est
inconstitutionnelle, elle est de surcroît illogique :
l'irrecevabilité de l'article 76 doit être analysée comme
un moyen de protection du domaine réglementaire et dès lors que
le président de la République lui-même dépose un
projet de loi dont certaines dispositions empiètent sur le domaine
réglementaire, il va sans dire qu'il consent à ces
empiètements.
38
Aussi longtemps que la proposition ou l'amendement n'est pas
voté, le président de la République peut soulever
l'irrecevabilité en demandant au président de l'Assemblée
nationale de la prononcer. Dans certains régimes politiques
étrangers, ce droit appartient à l'exécutif même
pour défendre la compétence législative que le Parlement
lui a déléguée si bien que la délégation a
pour effet de déposséder complètement le Parlement des
questions qu'il a prêtées à la réglementation
gouvernementale ; c'est la solution notamment en droit constitutionnel
béninois117.
Mais le président de la République ne dispose
pas de la faculté de décider unilatéralement de
l'irrecevabilité. Il doit nécessairement s'adresser au
président de l'Assemblée nationale qui doit accepter de donner
une suite favorable à sa demande.
b. Un moyen de défense accepté par le
président de l'Assemblée nationale
Si le président de la République soulève
l'irrecevabilité, il faut encore que le président de
l'Assemblée nationale admette que la proposition ou l'amendement contre
lesquels l'irrecevabilité est invoquée empiètent bien sur
le domaine réglementaire. La décision d'irrecevabilité
est, aux termes de l'article 76.1 de la Constitution, une prérogative
constitutionnelle du président de l'Assemblée nationale.
Si le président de l'Assemblée nationale
conteste l'irrecevabilité invoquée par le président de la
République, celui-ci pourra saisir le Conseil constitutionnel. Mais en
raison de la nature de notre régime politique et plus encore du contexte
politique ivoirien, il semble hypothétique que le président de
l'Assemblée fasse de la résistance à une demande
exprimée par le Chef de l'État : il est donc plus certain que les
volontés concordantes de l'un et de l'autre empêchent la poursuite
de la discussion de la proposition ou de l'amendement jugé
irrecevable.
Mais bien heureusement, il existe une procédure
constitutionnelle permettant aux députés de l'opposition de
contester devant le Conseil constitutionnel cet accord intervenu entre les
organes de la même majorité.
117 L'article 104.2 de la Constitution béninoise
dispose que : « S'il apparaît que la proposition ou l'amendement
sont contraires à une délégation accordée en vertu
de l'article 102 de la présente Constitution, le Gouvernement peut
opposer l'irrecevabilité ». L'article 102 de la Constitution
béninoise est celui qui prévoit le pouvoir de législation
déléguée.
39
2. La contestation de l'accord entre les présidents de
la République et de l'Assemblée nationale
La contestation par les députés de l'opposition
de l'accord intervenu entre les présidents de la République et de
l'Assemblée nationale en matière d'irrecevabilité des
propositions et amendements entraîne la saisine du Conseil
constitutionnel (a). Celui-ci apparaît en définitive comme le juge
suprême des décisions d'irrecevabilité de l'article 76
(b).
a. La saisine du Conseil constitutionnel par les
députés
Les députés qui contesteraient la
décision d'irrecevabilité ne sont pas désarmés car
ils pourraient toujours saisir le Conseil constitutionnel afin que celui-ci
tranche la difficulté. Cette faculté ouverte aux
députés -le seuil requis est le quart des députés
au moins- par l'article 76 in fine de la Constitution est importante
car elle donne en pratique une arme aux députés de l'opposition
entendant contester l'irrecevabilité prononcée par le
président de l'Assemblée nationale à la demande d'un
président de la République du même bord politique.
Évidemment, le président de la République dispose lui
aussi de la faculté de saisir le Conseil constitutionnel pour contester
la décision du président de l'Assemblée nationale refusant
de prononcer l'irrecevabilité qu'il demande118. Mais le
contexte politique ivoirien rend improbable, nous l'avons déjà
dit, un tel conflit entre ces deux organes.
Dans le cadre de la Constitution béninoise, l'accord du
Gouvernement et du président de l'Assemblée nationale
désarme au contraire les députés auteurs de la proposition
déclarée irrecevable. Ils ne disposent pas de la faculté
de saisir la Cour constitutionnelle : le Gouvernement et le président de
l'Assemblée nationale -appartenant à une même
majorité politique- pourraient de la sorte s'entendre -l'un soulevant
l'irrecevabilité et l'autre la prononçant- pour enterrer
systématiquement toutes les propositions et amendements des
118 Article 76 de la Constitution : « (...) En cas de
contestation, le Conseil constitutionnel, saisi par le président de
la République ou par un quart des députés au moins,
statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine
(...)». Il apparaît donc que le président de
l'Assemblée nationale ne dispose pas, en cette matière, de la
faculté de saisir le Conseil constitutionnel. Il faut donc
s'étonner de ce que le règlement de l'Assemblée nationale,
en son article 54.3, dispose qu' « en cas de désaccord entre eux
(entre le président de la République et le président de
l'Assemblée nationale), le Président (de l'Assemblée
nationale) peut consulter le Conseil constitutionnel... ». Ensuite,
l'arbitrage exercé en ce cas par le Conseil constitutionnel étant
bien décisionnel en ce qu'il statue au contentieux, il convient de ne
pas prendre au pied de la lettre cet article 54.3 qui dispose qu' « en cas
de désaccord entre eux, le président peut consulter le
Conseil constitutionnel... ». Enfin le délai imparti au Conseil
constitutionnel pour statuer est de quinze jours aux termes de la Constitution
et non de huit jours comme l'énonce le règlement de
l'Assemblée nationale (art. 54.3).
40
députés de l'opposition sans que ceux-ci ne
puissent contester cette décision devant le juge constitutionnel.
Celui-ci ne peut être saisi que dans le cas où le président
de l'Assemblée nationale refuserait de prononcer l'irrecevabilité
demandée par le Gouvernement : saisie par l'un ou par l'autre, la Cour
constitutionnelle statuerait dans un délai de huit jours (art.
104.3).
La faculté ouverte aux députés de
contester l'accord intervenu entre le président de l'Assemblée
nationale et le président de la République -deux organes de la
même majorité-limite par conséquent l'arbitraire du pouvoir
d'État en matière de décisions d'irrecevabilité
à l'encontre des propositions et amendements en faisant en
définitive du Conseil constitutionnel le seul juge de
l'appréciation des décisions d'irrecevabilité.
b. Le Conseil constitutionnel, seul juge des décisions
d'irrecevabilité
La saisine du Conseil constitutionnel suspend la discussion de
la proposition de loi ou de l'amendement au sujet desquels se sont
élevées les contestations quant à leur
irrecevabilité. Si le Conseil constitutionnel ne statue pas dans le
délai qui lui est imparti119, le texte est
réputé recevable et l'Assemblée nationale est
autorisée à l'examiner.
Si le président de la République n'agit pas au
stade de la procédure législative pour opposer
l'irrecevabilité à la proposition de loi empiétant sur le
domaine réglementaire, il peut encore -après que cette
proposition de loi est définitivement adoptée- la
déférer à la censure du Conseil constitutionnel : c'est
une des modalités de la protection a
posteriori120.
B/ Une protection a posteriori : le contrôle de
constitutionnalité et le déclassement des lois
La protection a posteriori du domaine
réglementaire consiste essentiellement en un contrôle de
constitutionnalité des lois votées (1) et en la
possibilité de déclasser certaines lois intervenues avant
l'entrée en vigueur de la Constitution de 2000 (2).
1. Le contrôle de constitutionnalité de la loi
119 Ce délai est de quinze jours aux termes de
l'article 76.2 et non de huit jours comme l'affirme le règlement de
l'Assemblée nationale en son article 54.3 ; il conviendrait de corriger
les nombreuses contradictions qui existent entre la Constitution et le
règlement de l'Assemblée nationale, notamment celles relatives
à la question des irrecevabilités de l'article 76 de la
Constitution (voir à cet effet la note précédente).
120 La protection est a posteriori en ce sens que la
proposition a franchi le stade de l'adoption et est devenue loi ; le Conseil
constitutionnel, s'il juge qu'il y a inconstitutionnalité, n'intervient
qu'à titre « curatif » et non préventif.
41
Le contrôle de constitutionnalité des lois se
présente comme un moyen « curatif » de l'empiètement de
la loi sur le domaine réglementaire (a). Mais le sort de la loi
déclarée inconstitutionnelle dépend de la forme de la
déclaration d'inconstitutionnalité (b).
a. Un moyen curatif de l'empiètement de la loi sur le
domaine réglementaire
Lorsque la proposition (ou l'amendement) a été
adoptée et qu'elle est par conséquent devenue loi, elle peut
encore, avant sa promulgation, être déférée au
Conseil constitutionnel saisi par le président de la République,
le président de l'Assemblée nationale ou un dixième au
moins des députés ou par les groupes
parlementaires121.
L'article 95.2 de la Constitution permet au président
de la République de demander aux juges constitutionnels de censurer cet
empiètement de la loi sur le domaine réglementaire : si ceux-ci
reconnaissent qu'il y a bien transgression du critère matériel de
la loi par le texte voté, les dispositions réglementaires
pourront en être extirpées.
La saisine du Conseil constitutionnel est, entre les mains du
président de la République ou des autres organes de la
majorité, un moyen efficace de protection du domaine
réglementaire. Le Président peut en effet s'abstenir de
promulguer la loi jusqu'à l'expiration du délai de promulgation
qui est de quinze jours et la déférer ensuite, avant l'expiration
de ce délai, aux juges constitutionnels. Au contraire, rien ne
l'empêche, s'il n'entend pas contester une loi, de la promulguer
dès les premières heures suivant la transmission qui lui en est
faite privant ainsi les députés (de l'opposition) d'exercer leur
droit de saisine du Conseil constitutionnel.
Dès que le Conseil constitutionnel est saisi, le
délai de promulgation cesse de courir, il est suspendu jusqu'à sa
décision qui doit être rendue dans le délai maximum de
quinze jours (article 77 in fine). Au cas où le Conseil
constitutionnel déclare que la loi contestée est conforme
à la Constitution, le Président devra en principe se
résoudre à la promulguer. Mais
121 Les articles 77.1 et 95.2 posent un problème de
qualité de rédaction de la Constitution : l'article 77.1 portant
exactement sur le même objet que l'article 95.2 ne mentionne pas le
président de la République comme l'une des autorités
pouvant saisir le Conseil constitutionnel et n'indique pas que la saisine de
celui-ci suspend le délai de promulgation tandis que l'article 95.2
n'indique pas le délai dans lequel doit statuer le Conseil
constitutionnel saisi, de sorte que l'on doit lire les deux articles
séparément pour avoir une vue d'ensemble sur la question de la
saisine du Conseil constitutionnel en matière de lois. Il aurait
été plus cohérent de rédiger sous le même
article ces divers éléments en évitant ainsi cet
impression de redondance et d'insuffisance des deux articles.
42
si le Conseil décide que la loi comporte
réellement des dispositions non législatives, son sort
dépendra de la forme de la déclaration
d'inconstitutionnalité.
b. Le sort de la loi empiétant sur le domaine
réglementaire et déclarée inconstitutionnelle
Le sort de la loi déclarée inconstitutionnelle
en raison de son empiètement sur le domaine réglementaire
dépend de la forme de la déclaration
d'inconstitutionnalité. Celle-ci peut en effet revêtir deux formes
: soit le Conseil constitutionnel estime que la disposition inconstitutionnelle
est inséparable du reste du texte, auquel cas la loi tout entière
ne peut être promulguée ou appliquée122 soit il
estime que les dispositions inconstitutionnelles peuvent être
séparées du texte, auquel cas le président de la
République peut, ou bien promulguer le texte amputé desdites
dispositions -en occurrence les dispositions non législatives- ou bien
demander une seconde délibération de la loi à
l'Assemblée nationale afin de substituer de nouvelles dispositions
conformes à la Constitution à celles qui ont été
déclarées inconstitutionnelles123 (art. 42.3 de la
Constitution).
Une autre modalité de la protection a posteriori
aux mains du pouvoir exécutif est la délégalisation
des textes de forme législative.
2. La délégalisation des textes de forme
législative
La délégalisation des textes de forme
législative permet au président de la République d'obtenir
le déclassement par voie de décret de certaines lois
adoptées avant la délimitation des domaines législatif et
réglementaire opérée par la Constitution de 2000 (a). Mais
cette procédure de délégalisation est beaucoup moins
radicale en régime politique ivoirien qu'en d'autres régimes
politiques africains (b).
122 L'article 28 de la loi du 5 août 1978 à
laquelle la Constitution du 3 novembre 1960 (muette sur la question du
contrôle de constitutionnalité) renvoyait, dispose -reprenant en
cela l'article 62 de la Constitution française du 4 octobre 1958- que :
« Aucune disposition déclarée inconstitutionnelle ne peut
être promulguée ou entrer en vigueur ». Il s'ensuit que la
déclaration d'inconstitutionnalité d'une loi s'oppose seulement
à sa promulgation et à son application, la loi
déclarée inconstitutionnelle n'est par conséquent ni nulle
ni annulée.
123 La solution dégagée par le juge
constitutionnel français dans sa décision du 23 août 1985
(n° 85-197 D.C) relative à la loi sur l'évolution de la
Nouvelle-Calédonie a été reprise par le législateur
ivoirien dans la loi du 16 août 1994 relative au Conseil constitutionnel
en ses articles 27 et 28 qui disposent respectivement « qu'au cas
où le Conseil constitutionnel décide que la loi contient une
disposition contraire à la Constitution et inséparable de
l'ensemble de cette loi, celle-ci ne peut être promulguée »
et qu'en revanche « dans le cas où la Conseil constitutionnel
décide que la loi contient une disposition contraire à la
Constitution sans constater en même temps qu'elle est inséparable
de l'ensemble de cette loi, le Président de la République peut
soit promulguer la loi à l'exception de cette disposition soit
demander à l'Assemblée nationale une nouvelle lecture
».
a.
43
Un moyen de reclassement des lois adoptées avant la
délimitation des domaines législatif et réglementaire
opérée par la Constitution de 2000
De nombreuses lois ont été adoptées
depuis la naissance de la République de Côte d'Ivoire et -par
l'effet de la délimitation des domaines législatif et
réglementaire opérée par la Constitution de 2000- elles
portent après coup sur des matières non législatives. Ces
lois sont dénommées des « textes de forme législative
» en ce qu'elles se caractérisent par la dissociation des
critères matériel et organique qui définissent
désormais la loi : organiquement, ce sont des lois parce qu'ayant
été adoptées par des organes législatifs mais
matériellement elles portent sur des matières devenues
réglementaires124.
Le président de la République peut obtenir le
déclassement de ces lois en les modifiant par décret : il doit
simplement le faire après un avis du Conseil constitutionnel. Cette
procédure connue sous le nom de délégalisation ou de
décrétalisation permet de rétablir une unité rompue
-par l'effet de la Constitution de 2000- de la forme et du fond des lois
intervenues pendant quarante ans.
La procédure de délégalisation est
traditionnelle dans la plupart des régimes politiques africains
connaissant une délimitation des compétences législatives
et réglementaires ; ainsi la Constitution du Niger, en son article 103.2
énonce que : « les textes de forme législative intervenus en
ces matières antérieurement à l'entrée en vigueur
de la présente Constitution, peuvent être modifiés par
décret pris après avis de la Cour constitutionnelle ».
Mais elle est moins radicale en droit constitutionnel
ivoirien en ce qu'elle est inexistante à l'égard des lois
intervenues après l'entrée en vigueur de la Constitution de
2000.
b. Un moyen de reclassement inexistant à
l'égard des lois intervenues après l'entrée en vigueur de
la Constitution de 2000
Le moyen offert au président de la République
d'obtenir le déclassement -en les modifiant par décrets- des lois
intervenues dans des matières devenues législatives par l'effet
de la Constitution de 2000 se limite aux lois votées avant la
délimitation des domaines législatif et réglementaire : il
ne peut pas modifier par décret des lois votées après
l'entrée en
124 Francis V. WODIÉ, op.cit., p. 194-195.
44
vigueur de la Constitution et qui n'ont pas été
déférées au Conseil constitutionnel avant leur
promulgation125.
Dans le régime politique malien, l'exercice du pouvoir
réglementaire aboutissant à modifier des lois peut se produire
dans deux hypothèses : ou bien les lois en question ont
été votées avant la délimitation des domaines
législatif et réglementaire opérée par la
Constitution ; ou bien des lois votées après cette
délimitation n'ont pas été déférées
à la Cour constitutionnelle avant leur promulgation. Dans la
première hypothèse, le Gouvernement peut modifier librement les
lois existantes par décret : il est simplement obligé de le faire
par décret après avis de la Cour suprême (art. 73.2 de la
Constitution malienne). Au contraire, dans le second cas, il ne peut le faire
que si la Cour constitutionnelle a déclaré le caractère
réglementaire de ces lois : si un Gouvernement, par négligence ou
par volonté politique délibérée, ne
défère pas à la Cour constitutionnelle, avant
promulgation, une loi intervenant hors du domaine réservé au
pouvoir législatif, ses successeurs ne seront pas enchaînés
par sa décision, puisqu'ils pourront ainsi la remettre en cause devant
la Cour constitutionnelle et la modifier ensuite par décret (art. 73.3).
Des solutions similaires à ou proches de celle fournie dans la
Constitution malienne existent également dans plusieurs autres
Constitutions africaines126.
De même que le domaine réglementaire, le domaine
législatif est également protégé d'éventuels
empiètements du pouvoir exécutif.
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