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Les rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif en Côte d'Ivoire


par Boubacar GUISSE
Université Alassane Ouattara de Bouaké - Master 2 Recherche 2014
  

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Paragraphe 2 : Au plan financier

317 On pourrait rapprocher une telle pratique du filibustering ayant cours aux États-Unis, même s'il s'agit de deux pratiques assez différentes.

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Les initiatives parlementaires sont non seulement restreintes en matière financière (A) mais également, et plus grave encore, il existe un déficit évident du contrôle parlementaire en cette matière (B).

A/ Les restrictions aux initiatives parlementaires en matière financière

Ces restrictions résultent de la suppression de principe de l'initiative parlementaire en matière de dépenses (1) et de l'interdiction des cavaliers budgétaires (2).

1. La suppression de principe de l'initiative parlementaire en matière de dépenses

Cette suppression est générale et absolue (a) et sans possibilité de contestation pour les députés (b).

a. Une suppression générale et absolue (...)

La première restriction à l'initiative parlementaire en matière financière résulte de l'article 78.2 de la Constitution aux termes duquel une irrecevabilité peut être opposée aux propositions et amendements déposés par les députés lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques soit la création ou l'aggravation d'une charge publique. Elle serait justifiée par l'exigence constitutionnelle de voter le budget en équilibre (art. 80.2 de la Constitution)318; on observera, toutefois, que le même type d'irrecevabilité est consacré en certains régimes politiques où il n'est pourtant pas obligatoire de voter le budget en équilibre (art. 40 de la Constitution française). D'autre part, il est à noter que l'irrecevabilité dont il s'agit ne peut pas s'appliquer aux projets et aux amendements du président de la République ou du Gouvernement.

La Constitution ivoirienne -comparativement à l'article 17 de la Constitution française de 1946- a poussé dans un sens plus général et plus absolu l'interdiction du droit d'initiative parlementaire en matière financière et elle y a procédé de trois manière : d'abord, en étendant l'interdiction des propositions aux amendements ; ensuite, en visant à la fois les propositions et amendements tendant à augmenter les dépenses et ceux tendant à diminuer les recettes et enfin, en décidant qu'elle vaut aussi bien pendant la discussion budgétaire qu'en dehors de celle-ci.

318 Francis V. WODIÉ, op.cit., p. 209.

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Seules les propositions et amendements tendant à supprimer ou à réduire effectivement une dépense ou à créer ou à accroître une recette seront alors recevables319. Mais dès lors que la proposition ou l'amendement est accompagné d'une proposition d'augmentation de recettes ou d'économies équivalentes compensant ainsi la diminution des recettes ou l'augmentation des dépenses, l'irrecevabilité ne joue plus320.

Ce qui est toutefois grave en matière d'irrecevabilité financière, c'est que les députés ne disposent pas de la possibilité de contester la décision d'irrecevabilité prononcée contre leurs propositions.

b. (...) sans possibilité de contestation à la disposition des députés

La compétence pour soulever l'irrecevabilité revient au président de la République -en pratique à ses ministres- puisque l'irrecevabilité a pour objet de protéger le projet de loi de finances contre une diminution de ressources publiques ou une augmentation de charges publiques. Mais c'est du président de l'Assemblée nationale que dépend la décision sur la recevabilité ou l'irrecevabilité. Par conséquent, c'est lui qui détermine la portée de l'article 78.2.

Mais si le président de l'Assemblée nationale prend une décision et que celle-ci est contestée soit par les députés ou la Commission des finances soit par le Gouvernement, force est de reconnaître -puisque la Constitution garde le silence sur la question- qu'il est inenvisageable que le Conseil constitutionnel puisse être saisi. Dans ces conditions, il faut conclure que la décision du président de l'Assemblée est sans recours : si celui-ci décide de l'irrecevabilité, le texte ne peut recevoir aucune suite et les députés ne peuvent que s'incliner et s'il la déclare recevable, la procédure législative se poursuit et le Gouvernement ne peut s'opposer au vote321.

Toutefois, le président de la République conserve une dernière possibilité, très efficace. Il peut, en effet, soumettre au Conseil constitutionnel la loi votée mais non encore promulguée

319 C'est l'interprétation restrictive que donne d'ailleurs l'article 42 de l'ancienne ordonnance organique française du 2 janvier 1959 de l'article 40 de la Constitution française du 4 octobre 1958.

320 Article 78 in fine de la Constitution du 1er juillet 2000. Cette atténuation de l'interdiction est également consacrée par la plupart des Constitutions africaines mais elle n'existe pas à l'article 40 de la Constitution française. Cependant, en dehors même de l'hypothèse où la proposition ou l'amendement serait accompagné d'une compensation financière, il reste que les députés peuvent toujours employer des moyens détournés pour faire échec aux dispositions constitutionnelles : réductions indicatives de crédits ou refus de discuter les crédits, etc.

321 Francis V. WODIÉ, op.cit., p. 209.

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en vertu de l'article 95.2 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel statuera dès lors sur la constitutionnalité de ladite loi au regard de l'article 78.2322 et sera ainsi amené, de manière indirecte, à apprécier le bien-fondé de la décision du président de l'Assemblée nationale. En revanche, les députés contestant la décision d'irrecevabilité du président de l'Assemblée nationale ne disposent pas de la même faculté puisque, naturellement, la décision d'irrecevabilité enterre définitivement la proposition.

L'interdiction des cavaliers budgétaires prive par ailleurs l'Assemblé nationale d'un moyen de pression sur le président de la République.

2. L'interdiction des cavaliers budgétaires

Si l'interdiction des cavaliers budgétaires se justifie au plan purement technique (a), il n'en reste pas moins qu'elle prive les députés d'un moyen de pression sur le président de la République et son Gouvernement (b).

a. Une mesure se justifiant sur le plan technique (...)

Toute mesure étrangère à l'objet d'une loi de finances est un cavalier budgétaire323. L'objet d'une loi de finances est fixé par la Constitution elle-même en son article 71.1 disposant que : « les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l'État » et par la loi organique du 05 juin 2014324 en son article 2 disposant que les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'État et qu'elles tiennent comptent d'un équilibre économique et financier qu'elles déterminent sur la base des objectifs et des résultats des programmes définis dans le cadre des missions de l'État325. L'article 47 de la loi organique française du 1er août 2001 maintient également la prohibition des cavaliers budgétaires326. En cas de méconnaissance de l'article 47 de ladite loi, la disjonction de la disposition non financière du projet de loi de finances

322 Le Conseil constitutionnel français a d'ailleurs déjà été appelé à rendre son arbitrage en la matière dans sa décision du 20 janvier 1961, D. 1962, p. 177, note L. Hamon.

323 http://fr.jurispedia.org/index.php/, consulté le dimanche 9 novembre 2014, à 13h 43.

324 Loi organique n° 2014-339 du 05 juin 2014 relative aux lois de finances.

325 Voir également l'article 1er, al. 1er de la loi organique française du 1er août 2001 relative aux lois de finances et l'article 40 de la directive de l'UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine).

326 Cette loi (L.O.L.F.) abroge l'ordonnance organique du 2 janvier 1959.

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soumis à l'examen du Conseil d'État est de droit et le Conseil constitutionnel censure l'adjonction ou l'amendement étranger à l'objet de la loi de finances votée327.

Sur un plan purement technique, l'interdiction des cavaliers budgétaires, tout comme celle plus générale des amendements sans lien avec le texte en discussion, se justifie pleinement car elle permet une certaine rationalité dans la procédure législative (budgétaire). Tous les amendements ou adjonctions dont on aura ainsi à connaître dans le débat budgétaire devront nécessairement présenter un rapport certain avec l'objet de la loi de finances ou ne pas être étrangers, par leur nature, à celui-ci. De la sorte, on évite un gonflement des projets de lois de finances, un allongement inconsidéré des débats budgétaires et la loi de finances adoptée reste conforme à son objet328.

Toutefois, l'interdiction des cavaliers budgétaires -et, en passant, celle plus générale des amendements qui sont sans rapport avec l'objet du texte auquel ils se rapportent- prive les députés d'un véritable moyen de pression sur le pouvoir exécutif.

b. (...) mais privant l'Assemblée nationale d'un moyen de pression sur le pouvoir exécutif329

Sous les Républiques françaises précédentes, les parlementaires inséraient dans la loi de finances, sous forme d'amendements, des dispositions étrangères à son objet afin de s'assurer de leur adoption. Le Gouvernement n'avait d'autres choix que celui d'accepter ces dispositions puisqu'il lui importait avant tout que le projet de loi de finances soit adopté. De la sorte, les parlementaires pouvaient voir adoptées des mesures dont le Gouvernement ne voulait pas et qu'il aurait, à d'autres occasions, rejetées. Avec l'avènement de la Ve République française et l'interdiction des cavaliers budgétaires par la Constitution qui l'instaure -interdiction reprise dans la Constitution ivoirienne- les parlementaires ne disposent

327 Le Conseil constitutionnel pourrait se fonder sur l'article 47 de la loi organique du 1er août 2001 (art. 42 de l'ancienne ordonnance organique du 2 janvier 1959).

328 Petit lexique parlementaire, http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/lexique.asp, consulté le dimanche 9 novembre 2014, à 12h 09.

329 « Toutes ces limitations juridiques du pouvoir financier du parlement ont un seul et unique but, celui d'assurer la prééminence du gouvernement dans le processus d'adoption de la loi de finances. Elles sont d'ailleurs considérées comme incontournables même dans les régimes les plus démocratiques du monde occidental du fait de la technicité de plus en plus grande des questions financières nationales et internationales et du peu d'intérêt que suscite le débat budgétaires chez les parlementaires » (Kossi SOMALI, Le parlement dans le nouveau constitutionalisme en Afrique. Essai d'analyse comparée à partir des exemples du Bénin du Burkina Faso et du Togo, thèse droit public, Lille, Université du droit et de la santé - Lille 2 (Ecole doctorale n° 74), 2008, p. 317-318).

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plus d'une arme aussi efficace que les cavaliers budgétaires en face du pouvoir exécutif qui leur permettaient de faire passer en force des mesures importantes.

En plus des restrictions apportées aux initiatives parlementaires en matière financière, il y existe également un déficit criant de contrôle parlementaire.

B/ Le déficit de contrôle parlementaire en matière financière

Les règles restrictives dont a fait l'objet le pouvoir financier entraîne un déficit du contrôle parlementaire en matière financière. Ce déficit résulte d'une part, de l'insuffisance du délai de délibération sur le projet de loi de finances (1) et d'autre part, de la restriction des principes classiques du droit budgétaire gouvernant la présentation du budget (2).

1. L'insuffisance du délai de délibération sur le projet de loi de finances

Le délai court laissé à l'Assemblée nationale se justifie par la nécessité d'adopter le projet de loi de finances avant le début de l'exercice budgétaire (a). Mais ce délai est illusoire pour examiner un dossier aussi complexe que le projet de loi de finances (b).

a. Un délai destiné à assurer l'adoption de la loi de finances avant le début de l'exercice budgétaire

En vertu de la règle de l'antériorité exigeant que la loi de finances soit votée avant le début de l'année budgétaire, la Constitution fait obligation à l'Assemblée nationale, dès le dépôt du projet de loi de finances le premier mardi du mois d'octobre, de se prononcer dans les soixante-dix jours. Autrement dit, l'Assemblée nationale devra émettre un vote au plus tard le 15 décembre330. Si elle ne parvient pas à se prononcer aux termes de ce délai et seulement au cas où elle ne se prononce pas331, elle est dessaisie du pouvoir que lui confère la Constitution d'autoriser le budget car le président de la République se trouve en mesure de mettre en vigueur par ordonnance le projet de loi de finances (art. 80.3 de la Constitution).

330 Cette date du 15 décembre est la limite extrême du délai imparti à l'Assemblée nationale mais elle peut varier en fonction de la date où tombe le premier mardi d'octobre.

331 L'hypothèse dans laquelle l'Assemblée nationale se prononcerait, mais rejetterait le projet de loi de finances ne joue pas : le président de la République ne pourrait pas, dans ce cas, mettre en vigueur le projet de loi de finances par ordonnance.

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Dès lors, le pouvoir d'autorisation de l'Assemblée nationale en matière financière devient au cours d'une session extraordinaire convoquée à cet effet un pouvoir de ratification de l'ordonnance budgétaire de mise en vigueur du projet de loi de finances (art. 80.4).

Ce délai de soixante-dix jours est pourtant illusoire pour l'examen d'un dossier aussi complexe que le projet de loi de finances.

b. Un délai illusoire pour l'examen d'un dossier aussi complexe332

Il est illusoire de penser que l'Assemblée nationale puisse se prononcer amplement sur le projet de loi de finances dans une période aussi courte de soixante-dix jours.

Il faudrait alors changer de manière radicale le mode des sessions parlementaires pour les adapter à l'examen des lois des finances.

L'autre raison du déficit de contrôle parlementaire en matière financière résulte de la restriction des principes classiques du droit budgétaire dans la présentation du budget.

2. La restriction des principes budgétaires dans la présentation du budget de l'État

Les principes budgétaires ont un aspect politique important au regard du contrôle parlementaire (a). Les aménagements apportés à ces principes s'analysent pour certains d'entre eux en une véritable restriction du pouvoir financier du Parlement, c'est-à-dire une limitation de son contrôle sur le budget de l'État333 (b).

a. Les incidences vertueuses du respect des principes budgétaires sur le contrôle parlementaire

332 Les questions financières sont très techniques et assez complexes pour les députés qui s'y intéressent peu (Kossi SOMALI, op.cit., p. 319).

333 Georges Burdeau écrivait justement que : « Historiquement, la compétence financière, spécialement le consentement à l'impôt, a été la première prérogative du Parlement. C'est pour obtenir des subsides que les rois convoquèrent des assemblées représentatives et c'est pour contrôler la politique du monarque qu'elles s'affirmèrent seules habilitées à en fournir les moyens, c'est-à-dire les deniers prélevés sur le patrimoine des contribuables » (op.cit., p. 614). Le pouvoir financier est une arme essentielle du Parlement en face de l'exécutif : par ce pouvoir financier, il peut parvenir à contrôler toute la politique gouvernementale. A contrario, la restriction de ce pouvoir financier ne peut être que désavantageuse pour le Parlement dans ses rapports avec le pouvoir exécutif, or c'est à cette situation que l'on aboutit dans l'état actuel de notre droit et de celui de plusieurs autres pays.

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Le respect des principes budgétaires assure l'efficacité du contrôle parlementaire sur l'exécution du budget de l'État par les autorités gouvernementale et administrative. Le principe d'annualité permet d'assurer l'efficacité du contrôle parlementaire en imposant une périodicité assez brève afin que soit respectée l'obligation du consentement à l'impôt.

Le principe d'unité -exigeant que toutes les opérations de dépenses et de recettes soient retracées dans un document unique et que la loi de finances prévoie et autorise l'ensemble des recettes et des charges de l'État- permet un contrôle accru des députés sur les finances publiques par la clarté de la présentation du budget (vérifier si le budget est réellement en équilibre, éviter l'existence de comptes hors-budget, mettre en évidence le volume total des dépenses de l'État).

Le principe d'universalité -impliquant le rassemblement en une seule masse de l'ensemble des recettes brutes sur laquelle doit s'imputer l'ensemble des dépenses brutes-interdit la compensation des dépenses et des recettes qui permettrait de dissimuler certaines charges ou certaines dépenses aux députés334 et l'affectation d'une recette déterminée à une dépense déterminée.

Le principe de spécialité -imposant d'indiquer précisément le montant et la nature des opérations prévues par la loi de finances- permet au Parlement de limiter de façon étroite la liberté d'action du pouvoir exécutif et de contrôler en même temps toute la vie administrative335.

Certains aménagements que subissent les principes budgétaires constituent cependant de véritables atteintes au contrôle parlementaire.

b. Les incidences négatives de certaines dérogations aux principes budgétaires sur le contrôle parlementaire

Certaines dérogations aux principes budgétaires sont source d'insuffisance, d'inefficacité ou même d'absence pure et simple de contrôle parlementaire. Une telle situation est grave car le pouvoir financier de l'Assemblée nationale constitue une arme majeure entre

334 Une caisse noire est une réserve d'argent, le plus souvent illicite, servant à financer des actions souvent illicites (l'enrichissement des personnalités publiques notamment). Pour l'histoire de la caisse noire, voir Henri VINCENOT, La vie quotidienne dans les chemins de fer au XIXe siècle, pp. 53-54.

335 Maurice DUVERGER, op.cit., p. 622.

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ses mains dans ses rapports avec le Président et l'administration336. Le principe d'unité n'est pas ainsi toujours respecté. Ce sont surtout les comptes spéciaux qui permettent d'égarer le contrôle parlementaire puisque, précisément, ils retracent des opérations de recettes et de dépenses effectuées hors du budget général337. Concernant la débudgétisation, elle peut se faire soit en reportant certaines des dépenses que l'État supportait jusque-là vers les budgets annexes et les comptes spéciaux du Trésor -dans ce cas, le contrôle parlementaire est toujours possible car les dépenses restent dans les comptes publics- soit en reportant certaines dépenses vers des personnes morales privées ou publiques, auquel cas le contrôle parlementaire devient impossible338.

Les dérogations au principe d'universalité ont pour conséquence directe de permettre que certaines dépenses et certaines recettes de l'État ne soient pas soumises aux députés et échappent ainsi à tout contrôle parlementaire.

Quant au principe de spécialité, il n'est qu'imparfaitement respecté notamment en ce qui concerne les services votés. Les crédits relatifs à ces services sont en effet reconduits par un vote global et unique339. L'Assemblée nationale n'exerce par conséquent un contrôle détaillé que sur les mesures nouvelles qui ne représentent qu'une part relativement réduite de la masse budgétaire, les services votés représentant la plus grande partie de celle-ci.

336 L'ineffectivité ou l'inefficacité du contrôle parlementaire qu'elles résultent du fait institutionnel (ineffectivité ou inefficacité résultant des textes) ou du fait politique (ineffectivité ou inefficacité résultant, au contraire, du fait que l'Assemblée nationale, depuis l'indépendance, a été rarement autre chose qu'une « caisse de résonnance ») est très grave : il faut en effet y voir la cause, avec le manque d'indépendance véritable de la justice, des nombreuses malversations et gabegies financières constatées au plus haut sommet de l'État. S'il n'est possible ni pour l'Assemblée nationale de « regarder dans la bouche du grilleur d'arachides » ni pour la justice de sanctionner ce dernier, le développement économique et social tant souhaité dans les discours politiques tardera à devenir une réalité.

337 Georges BURDEAU, op.cit., p. 635.

338 La débudgétisation va parfois encore plus loin ; il arrive en effet que l'État fasse peser sur d'autres personnes morales que lui le financement de certaines dépenses qu'il avait coutume d'assurer. Le Conseil constitutionnel contrôle toutefois cette pratique.

339 Déjà à l'étape de la préparation du document budgétaire par le ministre de l'économie et des finances sur délégation du président de la République, étape antérieure au vote à l'Assemblée nationale, l'évaluation prévisionnelle des dépenses et des recettes publiques se fait par la méthode du calcul des « services votés » qui consiste à prendre pour base le budget antérieurement exécuté auquel il est ajouté les « mesures acquises » représentées par une diminution des crédits en cas de suppression par l'État de charges exceptionnelles.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius