Statut du juge constitutionnel en droit positif congolaispar Roger Tshitenge Kamanga Université de Kinshasa - Licence 2019 |
Section II : Des perspectives pour l'amélioration du statut du juge constitutionnel83(*)Léon ODIMULA LOFUNGUSO KOSENGENYI pense qu'une perspective est une idée que l'on présente pour l'avenir. Elle suppose l'existence d'un passé et d'un présent. En effet, le passé de la justice constitutionnelle congolaise présente un paysage contrasté tant bien il est vrai que le Juge constitutionnel oeuvrait dans un contexte peu favorable à son épanouissement aussi bien sur le plan politique, juridique, psychologique, technique que matériel. Les perspectives du Statut du juge constitutionnel passe passent par la régulation juridictionnelle effective du pouvoir politique dans le cadre de la protection des droits et des libertés constitutionnellement garantis à la personne humaine. Il s'agit d'examiner la possibilité d'instaurer et de consolider une justice constitutionnelle congolaise à même d'impulser la culture du respect de la norme fondamentale qu'est la Constitution. L'entreprise ne saurait être achevée car ses déclinant dans un domaine à construire et no du construit impliquant en même temps du courage et de la détermination dans le chef du juge, dans l'exercice de ses prérogatives constitutionnelles. Plus qu'un exercice d'élaboration des règles juridiques, il est question de les critiquer à la lumière de la pratique afin de rendre les règles plus effectives, effectives et, partant plus efficaces. Pour y parvenir, la présente section a pour objectif de formuler des dispositions en termes de perspectives pouvant améliorer le Statut du juge constitutionnel en République Démocratique du Congo en droit positif congolais. Cela permettra de consolider l'Etat de droit et de la Démocratie en République Démocratique du Congo. C'est pourquoi, dans les lignes qui suivent, nous analysons successivement dans le premier point sur les perspectives psychologiques et techniques et en deuxième des perspectives politiques et juridiques. §1 : Sur le plan psychologique, matériel et technique La proposition des pistes des solutions sur le plan psychologique, matériel et technique sera faite d'abord sur le plan psychologique, ensuite sur le plan matériel et technique. 1. Sur le plan psychologiqueLes causes de la dépendance du juge à l'égard du politique sont également psychologiques. Raymond MutuzaKabe, voit dans la psychologie une étude du comportement de l'homme84(*). Dès lors et en cernant les perspectives psychologiques dans l'appréciation de l'oeuvre du juge constitutionnel, la réflexion converge vers le comportement ou l'attitude que ce dernier doit avoir face à ses justiciables et à ses missions constitutionnelles. Le juge Paul Martens observe que, lorsqu'on est magistrat, l'on doit être perpétuellement amené à se demander « si on juge exclusivement en fonction d'éléments rationnels, si on n'est pas perpétuellement altéré par des sentiments ou des sensations, si la raison du droit n'est pas infectée par la passion, si les motivations savantes ne sont pas le costume juridique de l'arbitraire »85(*). L'auteur note qu'il y a une culpabilité du juge, et il est bon qu'il la conserve car, sans elle, il serait perpétuellement menacé d'autosatisfaction. Trois idées permettent de survivre avec cette culpabilité. - La dimension instinctive de la fonction de juger. Pour Emmanuel Kant, la faculté de juger constitue « un terme intermédiaire entre l'entendement et la raison ; et surtout qu'elle est un moyen terme entre la faculté de connaître et la faculté de désirer86(*). » - L'imaginaire de la rationalité. Il ne s'agit pas de renier la raison, mais de prendre conscience des limites d'une conception exagérément désincarnée de la rationalité juridique. - La justification lyrique du constitutionnalisme. Il existe une culpabilité du juge constitutionnel dont le statut présente cet inconfort de censurer les détenteurs légitimes du pouvoir alors qu'il ne possède aucune légitimité élective87(*). Il en découle qu'à travers les perspectives psychologiques, le juge doit se dépassionner, mieux se départir des considérations pouvant affecter sa fonction de juger. En tant que gardien de la Constitution, le juge constitutionnel doit faire un dépassement de soi, sortir de soi pour entrer dans le pour soi. Dans le même temps, on observe que la juridiction constitutionnelle doit se considérer comme un organe qui trône au sommet de la hiérarchie des institutions parce que protégeant la norme fondamentale qu'est la Constitution88(*). C'est avec cette conviction que le juge pourra se sentir psychologiquement indépendant vis-à-vis du pouvoir exécutif ou législatif. La révolution culturelle qui résulte du changement des paradigmes, matérialisé par la mutation du rôle du droit constitutionnel moderne qui est devenu à la fois régulateur des pouvoirs publics et protecteur des droits et libertés de la personne, implique de la part de celle-ci la foi dans la justice constitutionnelle, ce qui permettrait l'épanouissement du prétoire constitutionnel. Pour soutenir cet élan rénovateur, il est souhaitable que le juge constitutionnel puisse bénéficier des immunités et des privilèges.89(*) Sur le plan psychologique, les remèdes suggérés, à cet effet, sont de deux ordres ; l'amélioration des conditions sociales et traitement du personnel judiciaire d'une part, l'application sans complaisance des règles juridiques voire déontologiques destinées à valoriser la réputation de ce personnel d'autre part.90(*) Mais aussi il faut dire que seul le pouvoir public a l'obligation de mettre à la disposition du juge constitutionnel des outils et bâtiment nécessaire pour réaliser bien son travail. * 83 ODIMULA LOFUNGUSO Léon, La justice constitutionnelle à l'épreuve de la juridicisation de la vie politique, thèse de doctorat en droit public Unikin 2013 op.cit. p.169 * 84R.E. MUTUZA KABE, Apport de la psychologie dans la formation du juriste, Kinshasa, Editions Noraf, 2009, p.7. * 85 Lire P. MARTENS, Théories du droit et pensée juridique contemporaine, Bruxelles, Larcier, 2003, p.16. * 86 Cité par P. MARTENS, Idem, p.17. * 87 Lire P. MARTENS, Théories du droit et pensée juridique op.cit., p.17. * 88 Dans la conception kelsenienne, la Constitution est la norme qui chapeaute toutes les autres normes, c'est la grundnorm du droit positif. * 89ODIMULA LOFUNGUSO Léon, La justice constitutionnelle à l'épreuve de la juridicisation de la vie politique, thèse de doctorat en droit public Unikin 2013 op.cit.p.134 * 90 IDEM, p.134 |
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